Notion de plus-value sur un brevet
Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values de cession de brevet d’invention créé depuis plus de deux ans. Le régime fiscal des plus ou moins-values à long terme s’applique aux plus-values de cession de brevets, d’inventions brevetables ou de procédés de fabrication industriels. La plus-value nette à long terme est imposable au taux réduit de 15 %. Ce taux réduit d’imposition s’applique aux résultats nets de la concession ou de « sous-concession » des droits sur un brevet et aux plus-values réalisées lors de la cession de tels droits à la condition qu’il n’existe pas de lien de dépendance entre le cédant et le cessionnaire. Ce régime d’imposition s’applique aussi au résultat net de la concession de licences d’exploitation du brevet.
Le montant de la plus-value réalisée lors de la cession des éléments du brevet est égal à la différence entre le prix de cession et la valeur d’origine. Le montant de la plus-value réalisée est égal à la différence entre le prix de cession et la valeur d’origine. En règle générale, le prix de cession s’entend de la valeur de la contrepartie reçue par le cédant. Il correspond à la somme acquise au vendeur en cas de vente, à la valeur réelle des biens reçus en cas d’échange, et à la valeur réelle des titres émis en rémunération en cas d’apport. Ce prix s’entend net des frais de cession. La valeur d’origine des éléments concernés correspond à la valeur nette comptable pour laquelle ces éléments figuraient à l’actif du bilan du cédant.
Compensation avec les moins-values
La plus-value réalisée est susceptible de se compenser avec les moins-values à long terme de l’exercice, de s’imputer « euro pour euro » sur le déficit de l’exercice et les déficits reportables des exercices antérieurs, ou de s’imputer sur les moins-values à long terme constatées au cours des dix exercices antérieurs et qui n’ont pas encore été imputées. Si la cession d’un brevet qui est un élément amortissable par nature fait apparaître une moins-value, cette dernière constitue dans tous les cas une moins-value à court terme quel que soit le délai écoulé depuis l’entrée de cet élément cédé dans l’actif.
Cessions concernées par les plus-values
Le régime des plus-values à long terme s’applique aux opérations de cession sur les brevets, c’est-à-dire à toute opération entraînant la sortie de l’actif de l’entreprise des éléments en cause. La cession revêt le plus souvent la forme d’une vente, mais peut également consister en d’autres opérations (apport en société, échange, renonciation contre indemnité à un droit d’exclusivité, partage, donation, retrait pur et simple de l’actif, cessation d’activité, etc.) ou résulter d’événements tels que l’expropriation, l’expulsion, l’éviction ou la réquisition. Le régime des plus-values à long terme s’applique également lorsque la cession est assortie d’une condition résolutoire destinée à garantir les droits du cédant.
La cession s’entend de toute opération entraînant la sortie de l’actif de l’entreprise des éléments en cause. La concession d’une licence d’exploitation est le contrat par lequel le titulaire d’un brevet concède à une personne, en tout ou partie, la jouissance de son droit d’exploitation moyennant le paiement d’une redevance. La concession peut : i) être exclusive ou non ; ii) être conclue pour l’ensemble du ou des territoires pour lesquels l’invention bénéficie d’une protection juridique, ou pour une partie de ceux-ci seulement ; iii) porter sur la totalité des droits ou sur certains éléments seulement (par exemple, la concession pourrait ne concerner que certaines applications d’un brevet seulement).
Attention à l’interdépendance
Le régime des plus-values à long terme ne s’applique pas lorsqu’il existe des liens de dépendance entre l’entreprise cédante et l’entreprise cessionnaire au sens du 12 de l’article 39 du CGI. Des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises : i) lorsque l’une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l’autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ; ii) lorsqu’elles sont placées l’une et l’autre, dans les conditions définies à l’alinéa précédent, sous le contrôle d’une même tierce personne. Les cessions de brevets, inventions brevetables et procédés de fabrication réalisées par des entreprises liées, sont imposées dans les conditions de droit commun (régime du court terme).
Assujettis concernés
L’imposition des plus-values sur brevet concerne les entreprises industrielles ou commerciales, ou agricoles, ainsi que les contribuables imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, relevant de l’impôt sur le revenu et les entreprises relevant de l’impôt sur les sociétés.
Quid de l’abattement des 30% ?
En principe, en ce qui concerne les produits des brevets (cessions, concessions), la base imposable est déterminée selon les règles de droit commun. Toutefois l’article 93-2 du CGI prévoit que les produits de la propriété industrielle provenant de la concession de licence d’exploitation d’un brevet ou de cession ou de concession d’un procédé ou formule de fabrication perçus par l’inventeur lui-même sont, lorsqu’ils sont exclus du régime des plus-values à long terme déterminés selon des modalités particulières.
Il est, en effet, appliqué sur les produits d’exploitation ou sur le prix de vente un abattement forfaitaire de 30 % pour tenir compte des frais exposés en vue de la réalisation de l’invention, dans la mesure où les frais réels n’ont pas déjà été admis en déduction pour la détermination du bénéfice imposable. Cet abattement forfaitaire est susceptible d’être pratiqué même dans l’hypothèse où le contribuable se trouve placé sous le régime de la déclaration contrôlée :
« Dans le cas de concession de licence d’exploitation d’un brevet, ou de cession ou de concession d’un procédé ou formule de fabrication par l’inventeur lui-même, il est appliqué sur les produits d’exploitation ou sur le prix de vente un abattement de 30 % pour tenir compte des frais exposés en vue de la réalisation de l’invention, lorsque les frais réels n’ont pas déjà été admis en déduction pour la détermination du bénéfice imposable, sauf application des dispositions du deuxième alinéa du I de l’article 93 quater. » (article 93 du CGI)
En bref, l’abattement de 30 % est censé tenir compte, en raison de son caractère forfaitaire, de l’ensemble des frais exposés en vue de la réalisation de l’invention.
Dès lors toutefois qu’il représente les frais exposés pour la réalisation ou la mise en œuvre d’une invention, l’abattement forfaitaire n’est applicable qu’aux redevances qui résultent de la cession ou de la concession d’une marque de fabrique trouvant son origine dans une invention ayant contribué à la fabrication de produits.
Il est admis que cet abattement s’applique également aux produits de la cession ou de la concession de marques de fabrique. A noter que la marque de fabrique doit être distinguée de la marque de commerce ou de distribution. Les redevances provenant de la cession ou de la concession de marques commerciales, quelle que soit la dénomination portée au contrat, relèvent de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Elles n’entrent donc jamais dans le champ d’application de l’abattement forfaitaire propre à la catégorie des bénéfices non commerciaux.
Question de la TVA
Lorsque le contribuable tient sa comptabilité toutes taxes comprises, le forfait inclut la TVA versée au Trésor, augmentée s’il y a lieu de la taxe ayant grevé le coût des immobilisations lorsqu’elle a donné lieu à une imputation effective au cours de l’année d’imposition ; lorsqu’au contraire, le contribuable tient sa comptabilité hors taxes, le forfait n’inclut pas la TVA et est calculé d’après les recettes hors taxes.
Déductibilité des frais réels
L’inventeur peut demander la déduction de ses frais réels, s’il estime que les dépenses qu’il a exposées pour la conception ou la réalisation de l’invention se révèlent supérieures au montant du forfait. Il perd alors le bénéfice de celui-ci non seulement pour l’année au titre de laquelle il a demandé la déduction des frais réels, mais également pour les années suivantes. Les inventions doivent être considérées isolément. Un inventeur peut, de la sorte, appliquer l’abattement forfaitaire pour une invention et la déduction des frais réels pour une autre. Mais, pour chacune, le régime choisi revêt un caractère définitif.
Position de la jurisprudence sur l’abattement forfaitaire
Le Conseil d’État a eu l’opportunité de se prononcer, dans plusieurs décisions, sur l’application de l’abattement forfaitaire. Il a ainsi été jugé que :
– le bénéfice de l’abattement est réservé à l’inventeur lui-même. En conséquence, la veuve d’un inventeur ne saurait bénéficier de cet abattement sur les redevances qu’elle continue de percevoir, après le décès de son mari, à raison de la cession par ce dernier de la formule de fabrication d’un produit, dès lors qu’il n’est pas établi que l’intéressée ait eu conjointement avec le de cujus la qualité d’inventeur de ce produit (CE, arrêt du 12 janvier 1953) ;
– les « frais exposés en vue de la réalisation de l’invention », que couvre l’abattement forfaitaire de 30 % sur les produits perçus par les inventeurs, comprennent non seulement les dépenses qui ont été exposées avant le dépôt du brevet mais également celles qui ont été supportées ultérieurement pour mettre au point l’invention, la faire connaître aux utilisateurs éventuels et l’adapter, le cas échéant, à leurs besoins. Par suite, un inventeur qui a, sur le montant des revenus tirés de l’exploitation de ses brevets, pratiqué l’abattement n’est pas fondé à déduire en outre les frais relatifs à la mise en exploitation des dits brevets (CE, arrêt du 29 mai 1970). En revanche, l’abattement forfaitaire ne peut être considéré comme couvrant les frais liés à des actions judiciaires engagées pour la protection de l’invention. Dès lors, un inventeur qui a pratiqué cet abattement peut, en outre, déduire les frais de procès qu’il justifie avoir exposés pour assurer la protection de ses inventions (CE, arrêt du 31 mars 1978).
– un contribuable qui a participé avec un tiers à une invention ultérieurement brevetée au nom de ce dernier et dont l’exploitation a été cédée à une société, a droit au bénéfice de l’abattement forfaitaire prévu à l’article 93-2 du CGI (CE, arrêt du 25 juin 1969).
Les produits nets de charges sont soumis à l’impôt sur le revenu selon les taux du barème progressif.
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