Responsabilité médicale et indemnisation des préjudices corporels : enjeux et perspectives.

·

·

Responsabilité médicale et indemnisation des préjudices corporels : enjeux et perspectives.

L’Essentiel : M. [I] a subi une opération en 2018 pour décompression cervicale, suite à des douleurs cervico-brachiales. Au réveil, il a présenté une hémiparésie gauche et des dysesthésies dans les quatre membres, nécessitant une laminectomie complémentaire. Malgré cette intervention, il a conservé des séquelles neurologiques et psychiatriques. En 2023, il a assigné l’ONIAM et d’autres organismes pour obtenir réparation de son préjudice, chiffré à 1 013 268,44 €. Le tribunal a finalement condamné l’ONIAM à verser 933 268,44 € à M. [I], en plus de frais supplémentaires, après déduction d’une provision.

Contexte médical et intervention chirurgicale

M. [D] [I] a subi une opération en 1994 pour un spondylolisthésis L5-S1 de grade 3. À partir de mars 2013, il a commencé à ressentir des douleurs cervico-brachiales bilatérales importantes, accompagnées de dysesthésies. En 2018, il a consulté le Dr. [P], neurochirurgien, qui a recommandé une intervention chirurgicale pour décompression par arthrodèse de C5/C6 et C6/C7. L’opération a eu lieu le 27 novembre 2018 à la Clinique [3].

Conséquences post-opératoires

Au réveil, M. [I] a présenté une hémiparésie gauche et des dysesthésies dans les quatre membres. Un examen IRM a conduit à une nouvelle intervention chirurgicale, une laminectomie complémentaire. Après cette seconde opération, il a conservé des séquelles neurologiques et psychiatriques, notamment une parésie distale des membres supérieurs et une impotence fonctionnelle des membres inférieurs.

Expertise judiciaire et conclusions

En décembre 2020, M. [I] a obtenu la désignation d’un expert judiciaire, le Dr [U] [V], qui a conclu en octobre 2021 que les soins prodigués par le Dr [P] étaient conformes aux normes médicales. L’expert a qualifié l’accident de thérapeutique d’aléa, précisant que les complications neurologiques étaient rares, à hauteur de 0,2 % des cas.

Demandes d’indemnisation

En mars 2023, M. [I] a assigné l’ONIAM, la CPAM des Bouches du Rhône et la société GAN EUROCOURTAGE pour obtenir réparation de son préjudice. Il a réclamé des sommes pour divers postes de préjudice, incluant des frais d’assistance, des pertes de gains, et des préjudices esthétiques et fonctionnels.

Réponse de l’ONIAM

L’ONIAM a reconnu son obligation d’indemnisation mais a contesté le montant des demandes de M. [I], proposant des montants inférieurs pour plusieurs postes de préjudice. Il a également souligné que les indemnités perçues par M. [I] de la CPAM et d’autres organismes seraient déduites de l’indemnisation.

Évaluation des préjudices

Le tribunal a évalué les préjudices de M. [I] en se basant sur le rapport d’expertise. Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux ont été chiffrés, incluant des frais divers, des pertes de gains professionnels, et des souffrances endurées. Le total des préjudices a été estimé à 1 013 268,44 €.

Décision du tribunal

Le tribunal a condamné l’ONIAM à verser à M. [I] la somme de 933 268,44 € en réparation de son préjudice, après déduction d’une provision de 80 000 €. De plus, l’ONIAM a été condamné à payer 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre juridique de l’indemnisation des accidents médicaux en France ?

L’indemnisation des accidents médicaux en France est régie principalement par le Code de la santé publique, notamment par l’article L.1142-1. Cet article stipule que :

« I. – Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.

Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère.

II. – Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d’un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25%, est déterminé par ledit décret. »

Ainsi, l’indemnisation peut être accordée même en l’absence de faute, sous certaines conditions, notamment lorsque l’accident médical présente un caractère de gravité.

Quelles sont les conditions pour bénéficier d’une indemnisation par l’ONIAM ?

Pour bénéficier d’une indemnisation par l’ONIAM, plusieurs conditions doivent être remplies, comme le précise l’article L.1142-1 du Code de la santé publique.

En effet, cet article stipule que :

« II. – Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. »

Ainsi, il est nécessaire que l’accident médical soit directement imputable à des actes médicaux et qu’il ait des conséquences anormales sur l’état de santé du patient, avec un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à 25%.

Comment est évalué le préjudice corporel dans le cadre d’une indemnisation ?

L’évaluation du préjudice corporel dans le cadre d’une indemnisation est un processus complexe qui prend en compte plusieurs éléments, comme le stipule l’article D.1142-1 du Code de la santé publique.

Cet article précise que :

« Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l’article L.1142-1 est fixé à 24 %. Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l’article L.1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d’un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %. »

L’évaluation se fait donc en tenant compte de divers critères, tels que la durée de l’incapacité, le taux de déficit fonctionnel, et les conséquences sur la vie personnelle et professionnelle de la victime.

Les préjudices sont classés en préjudices patrimoniaux (pertes de gains, frais médicaux) et préjudices extrapatrimoniaux (souffrances endurées, préjudice esthétique, etc.), chacun étant évalué selon des barèmes spécifiques.

Quelles sont les conséquences de l’indemnisation sur les autres prestations perçues par la victime ?

L’indemnisation accordée à la victime peut être affectée par d’autres prestations qu’elle a pu percevoir, comme le précise l’article L.1142-1 du Code de la santé publique.

Cet article indique que :

« Les indemnités qui ont pu être versées tant par la CPAM que par tout organisme de protection complémentaire ou garantie accident de la vie seront déduites de l’indemnisation qui lui sera allouée par le tribunal et ne pourront donner lieu à aucune prise en charge par l’ONIAM. »

Cela signifie que toute somme perçue par la victime au titre d’autres assurances ou de la sécurité sociale sera déduite du montant total de l’indemnisation accordée par l’ONIAM.

Cette disposition vise à éviter le cumul des indemnités et à garantir que la réparation soit intégrale sans excéder le préjudice subi.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/439 du 21 Novembre 2024

Enrôlement : N° RG 23/03460 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3EMC

AFFAIRE : M. [D] [I]( Maître Jacques-antoine PREZIOSI de l’ASSOCIATION PREZIOSI CECCALDI ALBENOIS)
C/ ONIAM (la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS)

DÉBATS : A l’audience Publique du 26 Septembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente, juge rapporteur
BERTHELOT Stéphanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 21 Novembre 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BESANÇON Bénédicte, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [D] [I]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Jacques-Antoine PREZIOSI de l’ASSOCIATION PREZIOSI CECCALDI ALBENOIS, avocats au barreau de MARSEILLE, vestiaire : 15032023

CONTRE

DEFENDEURS

LA CPAM DES BOUCHES DU RHONE, dont le siège social est sis « [Adresse 4]

défaillant

Compagnie d’assurance GAN EUROCOURTAGE, dont le siège social est sis [Adresse 7]

défaillant

ONIAM, dont le siège social est sis [Adresse 9]

représenté par Maître Patrick DE LA GRANGE de la SELARL DE LA GRANGE ET FITOUSSI AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

EXPOSE DU LITIGE :

M. [D] [I] a été opéré en 1994 d’un spondylolisthésis L5-S1 de grade 3.

Il a présenté, à compter de mars 2013, des douleurs cervico-brachiales bilatérales importantes associées à des dysesthésies.

Il a consulté le Dr.[P], neurochirurgien les 27 août et 24 octobre 2018 qui a posé l’indication opératoire proposant un geste de décompression par arthrodèse de C5/C6 et C6/C7.

Le 27 novembre 2018, le Dr.[P] procédait à cette intervention au sein de la Clinique [3] à [Localité 5].

Au réveil, M.[I] présentait une hémiparésie gauche nette avec des dysesthésies des quatre membres.

Un examen IRM était réalisé en urgence et conduisait l’équipe soignante à pratiquer un nouveau geste chirurgical consistant en une laminectomie complémentaire.

L’évolution à l’issue cette seconde intervention chirurgicale était marquée par une parésie distale des deux membres supérieurs prédominant à gauche avec des dysesthésies prédominant du même côté, ainsi qu’une impotence fonctionnelle motrice des membres inférieurs relative prédominant du côté gauche.

Le 4 décembre 2018, M.[D] [I] quittait la Clinique [3] pour la Clinique [8]. Il restait hospitalisé au sein de cet établissement jusqu’au 11 décembre 2018, date à laquelle il commençait sa rééducation en hospitalisation de jour jusqu’au 28 décembre 2018.

Le 16 janvier 2019, M.[I] consultait à nouveau le Dr. [P] qui constatait des dysesthésies hyperpathiques du membre supérieur gauche.

Conservant de nombreuses séquelles, tant sur le plan neurologique, que psychiatrique, M.[I] obtenait la désignation du Dr [U] [V] en qualité d’expert judiciaire par ordonnance en date du 09 décembre 2020.

L’expert déposait son rapport définitif le 26 octobre 2021.

Il concluait que les actes et soins prodigués par le Dr [P] avaient été consciencieux, attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science actuelle et précisait :
« il s’agit d’un aléa thérapeutique, risque inhérent à l’acte médical qui ne pouvait être maîtrisé.
Une atteinte neurologique de la moelle épinière, per et post-opératoire pour la chirurgie rachidienne cervicale ou dorsale est une complication possible, rare pour ne pas dire exceptionnelle référencée dans la littérature, à hauteur de 0.2% des cas. »

Par ordonnance en date du 23/09/2022 le juge des référés condamnait l’ONIAM à verser à Monsieur [I] une provision de 80 000 €.

***

Par actes en date des 03 et 15 mars 2023, M.[D] [I] a assigné devant le tribunal de céans la CPAM des Bouches du Rhône, la société GAN EUROCOURTAGE et l’ONIAM aux fins de :
– Condamner l’ONIAM à lui verser les sommes suivantes en réparation du préjudice subi du fait de l’accident médical survenu le 27 novembre 2018 :
> Au titre des frais d’assistance à expertise : 2 760 €
> Au titre des pertes de gains actuels : 91 276.53 €
> Au titre des pertes de gains futurs : 537 730.24 € dont à déduire la pension d’invalidité
> Au titre de l’incidence professionnelle : 281 545.34 €
> Au titre de l’aide humaine :
-› Échue : 114 300 € à parfaire par une somme de 75 € par jour à compter du 02/03/2023 et jusqu’à la date de la décision à intervenir
-› à échoir : 946 158 €
> Au titre du déficit fonctionnel temporaire : 11 325 €
> Au titre des souffrances endurées : 20 000 €
> Au titre du préjudice esthétique temporaire : 5 000 €
> Au titre du déficit fonctionnel permanent : 104 000 €
> Au titre du préjudice d’agrément : 30 000 €
> Au titre du préjudice esthétique permanent : 4 000 €
> Au titre du préjudice sexuel : 20 000 €
> Au titre des dispositions de l’article 700 du CPC : 3 000 €
– Assortir les sommes allouées en principal des intérêts au taux légal à compter de la demande en Justice le 13 décembre 2016, et ordonner la capitalisation des intérêts par année entière à compter de cette même date, en application des dispositions de l’article 1343-2 du Code Civil ;
– Condamner l’ONIAM aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 21 février 2024, M.[D] [I] maintient ses demandes.

Il fait valoir que l’ensemble des critères énoncés par le législateur nécessaire à une demande indemnitaire au titre de la solidarité nationale à charge de l’ONIAM sont remplis ; que l’intervention chirurgicale litigieuse est postérieure au 5 septembre 2001 ; que le taux de déficit fonctionnel permanent retenu par l’expert est de 40% ; que cet accident médical est en lien avec ses préjudices.

Par conclusions signifiées le 05 janvier 2024, l’ONIAM demande au tribunal de :
– Constater qu’il ne conteste pas son obligation indemnitaire au profit de M.[I] au titre de l’aléa thérapeutique survenu lors de l’intervention du 27 novembre 2018 ;
– Réduire le montant de l’indemnisation provisionnelle de M.[I] à de plus justes proportions, dans la limite des montants suivants :
> Frais d’assistance à expertise : 700 €
> Assistance tierce personne temporaire : rejet et subsidiairement 18 174 €
> Perte de gains professionnels actuels : rejet
> Perte de gains professionnels futurs : rejet
> Incidence professionnelle 20 000€
> Perte de droits à la retraite : rejet
> Assistance tierce personne permanente : rejet et subsidiairement pour la période échue 38 818€ et pour la suite rente trimestrielle de 2 678€
> Déficit fonctionnel temporaire : 5 144 €
> Souffrances endurées : 10 000 €
> Préjudice esthétique temporaire : 2 000 €
> Déficit fonctionnel permanent : 60 913 €
> Préjudice esthétique permanent : 2 126 €
> Préjudice d’agrément : 6 000 €
> Préjudice sexuel : 8 000 €
– Déduire du montant qui sera alloué à M.[I], les sommes éventuellement perçues en application d’un contrat de garantie des accidents de la vie ;
– Déduire du montant qui sera alloué à M.[I], la provision de 80.000 € versée en exécution de l’ordonnance de référé en date du 23 septembre 2022 ;
– Débouter M.[I] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépens ;
– Rejeter toute autre demande.

L’ONIAM soutient qu’il a son propre référentiel d’indemnisation ; que cet outil propose une grille d’évaluation pour chacun des postes de préjudices prévus par la nomenclature Dintilhac ; que son application, dans le cadre d’une indemnisation par la solidarité nationale, qui impose un traitement égalitaire des victimes du service public hospitalier et du service privé de santé sur l’ensemble du territoire, est particulièrement légitime; que la version revalorisée au 1er avril 2022 de ce référentiel a été approuvée par le conseil d’administration de l’ONIAM avec le vote favorable des associations représentatives des patients et victimes ; qu’il s’oppose à l’application du barème de capitalisation paru en 2022 à la Gazette du Palais sollicité par M.[I] qui n’a rien d’officiel, la Gazette du Palais étant une revue d’analyse, de veille juridique et judiciaire, organisée par domaines de spécialisation. Il rappelle que les indemnités qui ont pu être versées tant par la CPAM que par tout organisme de protection complémentaire ou garantie accident de la vie seront déduites de l’indemnisation qui lui sera allouée par le tribunal et ne pourront donner lieu à aucune prise en charge par l’ONIAM.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures susvisées.

Citées à personnes morales, ni la CPAM des Bouches du Rhône, ni la compagnie d’assurances GAN COURTAGE n’ont constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 09 septembre 2024, et l’affaire renvoyée à l’audience de plaidoirie du 26 septembre 2024. Elle a été mise en délibéré au 21 novembre 2024.

MOTIFS :

Sur le droit à indemnisation :

L’article L.1142-1 du Code de la santé publique dispose :
« I. – Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.
Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère.
II. – Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.
Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d’un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25%, est déterminé par ledit décret. ».

L’article D.1142-1 du code de la santé publique dispose que :
« Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l’article L.1142-1 est fixé à 24 %.
Présente également le caractère de gravité mentionné au II de l’article L.1142-1 un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ayant entraîné, pendant une durée au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois, un arrêt temporaire des activités professionnelles ou des gênes temporaires constitutives d’un déficit fonctionnel temporaire supérieur ou égal à un taux de 50 %.
A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu :
1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l’activité professionnelle qu’elle exerçait avant la survenue de l’accident médical, de l’affection iatrogène ou de l’infection nosocomiale ;
2° Ou lorsque l’accident médical, l’affection iatrogène ou l’infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d’ordre économique, dans ses conditions d’existence. »

En l’espèce, l’ONIAM ne conteste pas devoir indemniser M.[D] [I] des conséquences dommageables de l’intervention du 27 novembre 2018.

Sur le montant de l’indemnisation :

Aux termes non contestés du rapport d’expertise du Dr [U] [V], l’accident a entraîné pour la victime, les conséquences médico-légales suivantes :

Au titre des préjudices patrimoniaux temporaires avant consolidation :

– DSA : sur justificatifs
– Frais divers : sur justificatifs, canne, médecin conseil, avocat-conseil ;
– Aide personnelle non professionnelle : épouse et fils : 2h/jour sans la conduite ;
– Aide spécialisée : non
– PGPA : du 27/11/2018 au 26/11/2020 ; durée d’arrêt de travail de 6 semaines s’il n’y avait pas eu d’accident médical à déduire (temps habituel de convalescence après ce type de chirurgie cervicale)

Au titre des préjudices extra-patrimoniaux temporaires avant consolidation :

– DFTT :01/12/2018 au 28/12/2018 (4 jours ont été déduits à compter du 27/11/2021, temps habituel d’hospitalisation sans accident médical, pour ce type de chirurgie).
– DFTP : 50 % du 29/12/2018 au 26/11/2020 ;
– Souffrances endurées : 4,5/7 ;
– Préjudice esthétique temporaire : 3/7 ;
– Date de consolidation : 27/11/2020.

Au titre des préjudices patrimoniaux permanents après consolidation :

– Pertes de gains futurs :27/11/2020 au 31/12/2020 (invalidité 1er janvier 2021)
– IP : oui ; à chiffrer par régleur sur justificatifs
– Tierce personne : 2h/jour sans les accompagnements voiture (car ne conduit plus)

Au titre des préjudices extra-patrimoniaux permanents après consolidation :
– DFP global : 40% (30% syndrome de Brown-Sequard + 10% syndrome anxiodépressif)
– Préjudice d’agrément : oui pour la marche (déclaratif)
– Préjudice esthétique permanent: 2/7
– Préjudice sexuel :
– oui sur la libido, déclaratif ; réalisation acte sexuel : non ; procréation : non
– en rapport avec syndrome anxio-dépressif et lourd traitement psychotrope

Sur la base de ce rapport, contre lequel aucune critique médicalement fondée n’est formée, et compte tenu des conclusions et des pièces produites, le préjudice corporel de M.[D] [I], âgé de 53 ans au moment de sa consolidation, doit être évalué ainsi qu’il suit :

I) Les Préjudices Patrimoniaux :

I-A) Les Préjudices Patrimoniaux Temporaires :

Les dépenses de santé :

La victime n’a pas justifié de dépenses restées à charge.

Les frais divers :

Les frais divers sont représentés par les honoraires d’assistance à l’expertise du médecin conseil au vu des éléments produits.

Ces honoraires correspondent à des démarches nécessaires à l’assistance de M.[D] [I] à l’expertise et leur coût n’est pas excessif eu égard aux tarifs habituellement pratiqués. Ces dépenses supportées par la victime, nées directement et exclusivement de l’accident, sont par la même indemnisables.
Ces frais exposés par la victime pour se faire assister d’un médecin lors des opérations d’expertise sont nécessaires à la préservation de ses droits. En effet, le débat présentant un caractère scientifique il paraît légitime qu’elle s’entoure d’un conseil technique et ce dans le respect du principe du contradictoire.
La réparation du préjudice subi par la victime doit être intégrale et la dépense correspondant aux honoraires du médecin conseil de la victime, non prise en charge par l’organisme social, et qu’elle a dû supporter, est née directement et exclusivement de l’accident.

Il lui sera dû à ce titre la somme de 2 760€.

La tierce personne temporaire :

Ces dépenses sont liées à l’assistance temporaire d’une tierce personne pour aider la victime handicapée à effectuer les démarches et plus généralement les actes de la vie quotidienne.

L’expert a retenu la nécessité d’une aide humaine temporaire à raison de 2h/jour sans la conduite automobile.

Le versement de l’indemnité octroyée au titre de la tierce personne ne saurait être subordonné à la production de justifications de dépenses effectives. Son montant ne peut être réduit en cas d’assistance bénévole par un membre de la famille.

Compte tenu du coût moyen de l’emploi d’une personne non qualifiée à domicile, en dehors du recours à une association prestataire, le coût horaire de 20 € sera retenu.
La conduite automobile ne peut pas être prise en compte à défaut d’information donnée au tribunal sur les déplacements journaliers de M.[I].

Le préjudice de M.[I] sera évalué, sur la période du 29/12/2018 au 27/11/2020, date de la consolidation, à la somme de :
2 heures/jour x 700 jours x 20 € = 28 000 €

La pertes de gains professionnels actuels :

Au moment de l’accident, M.[I] exerçait la profession d’ingénieur conseil auprès de la société AMARIS, et ce, depuis le 1er juillet 2017 jusqu’au 23 juillet 2018, date à laquelle il a fait l’objet d’un arrêt de travail.
Il a fait l’objet d’un licenciement le 09 septembre 2018 et n’a pas repris d’activité professionnelle.
Les indemnités de licenciement et allocations chômage perçues à la suite de son licenciement sont sans lien avec l’accident survenu le 27 novembre 2018 et n’ont dès lors pas à être déduites du montant de l’indemnisation perçue au titre de la perte de gains professionnels actuels.

Le cumul net imposable révélé par les bulletins de salaire de M.[I] et l’avis d’imposition 2018 attestent d’un revenu annuel de 48 798€, montant par ailleurs retenu par la compagnie d’assurances GAN pour le calcul des prestations versées au titre de la garantie invalidité.

L’expert a retenu une période de perte de gains professionnels actuels du 27/11/2018 au 26/11/2020 dont il y a lieu de déduire 6 semaines correspondant à la durée normale d’arrêt de travail à défaut d’accident médical.

Sa perte de revenus s’élève ainsi sur une période de 22,5 mois à :
(Revenu annuel 48 798€ :12 mois) x 22,5 mois = 91 496,25€.

Sur la période du 1er décembre 2018 au 17 décembre 2018, la CPAM a versé des indemnités journalières pour un montant total de 18 312,42€ qu’il convient de déduire.

En conséquence, il reste dû à la victime la somme de 73 183,83€.

I-B) Les Préjudices Patrimoniaux Permanents :

Les pertes de gains professionnels futurs :

Les pertes de gains professionnels futurs indemnisent la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du dommage.

L’expert a retenu qu’il convenait de les prendre en considération sur la période du 27 novembre 2020, date de la consolidation, au 31 décembre 2020, M.[I] étant en invalidité à compter du 1er janvier 2021.

Toutefois, M.[I] n’a pu être en mesure de reprendre son activité antérieure compte tenu des difficultés à se concentrer du fait de son lourd traitement psychotrope, d’une irritabilité très importante, de l’impossibilité de conduire. Dès lors, ce poste de préjudice ne peut être seulement évalué sur une période d’un mois, puisqu’il n’est pas exclu qu’il aurait pu retravailler et retrouver un niveau de salaire équivalent à celui qu’il percevait avant son licenciement compte-tenu de ses aptitudes et compétences professionnelles.
C’est une perte de revenu d’un montant de 48 798€ qu’il convient de capitaliser de la date de consolidation à l’âge auquel M.[I] aurait pu prétendre à la retraite à taux plein, soit à 62 ans, à la date du 1er avril 2019 : 48 798€ x 8.856 = 432 155,08€.

Toutefois, ce poste de préjudice est partiellement compensé par la rente accident du travail versée par la CPAM des Bouches du Rhône à hauteur de 121 723,22€ (soit 19 597,95€ € au titre des arrérages échus au 25/04/2022 et 102 125,27€ au titre du capital rente), somme à laquelle il y a lieu d’ajouter les arrérages échus en invalidité à la date du jugement, soit sur la période du 26/04/2022 au 21/11/2024.

Sur la base du calcul des arrérages échus au 25 /04/2022 mentionnée dans la notification définitive des débours de la CPAM du 26/04/2022, il y a lieu de déduire les arrérages échus au 21/11/2024 qui peuvent être évalués à la somme de 31 646, 25€, soit au total la somme de : (121 723,22€ + 31 646, 25€) = 153 369,47€

Il convient en outre de prendre en considération le versement de la pension d’invalidité versée par l’organisme de prévoyance LE GAN dont le montant annuel est de 23 794,94€ au 1er janvier 2021, (pièce N°8 du demandeur). M. [I] n’ayant pas communiqué le décompte des sommes versées par LE GAN à la date la plus proche de l’audience, cette pension sera évaluée à la date du jugement à la somme de 67 082€, sur la base des seuls éléments fournis.

En conséquence, le montant total des pertes de gains professionnels futurs sera évalué à la somme de : 432 155,08€ – 153 369,47€ – 67 082€ = 211 703,61€

L’incidence professionnelle :

Ce poste a pour objet d’indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle, telles que la dévalorisation sur le marché du travail, la perte de chance professionnelle, l’augmentation de la pénibilité de l’emploi occupé ou le préjudice consécutif à l’abandon de la profession exercée avant l’accident au profit d’une autre choisie en fonction du handicap.

M.[I] sollicite l’indemnisation de l’incidence professionnelle à hauteur de la somme de 80 000€ en soutenant qu’il avait un poste de consultant dans le nucléaire avec de nombreux déplacements professionnels et d’importantes responsabilités, de sorte qu’il a subi une dévalorisation sociale très importante.

L’expert a relevé ce poste de préjudice en précisant que M.[I] était dans l’impossibilité de reprendre son travail antérieur, qu’il rencontrait des « difficultés à se concentrer du fait de son lourd traitement psychotrope, irritabilité +++, ne conduit plus, difficultés à se déplacer ».

Le Dr [H] [R], psychiatre, a attesté le 1er août 2019 qu’avant l’accident, « ce patient présentait une personnalité particulière : « extrêmement actif et dynamique, il assurait de hautes responsabilités et se comportait en leader au travail comme au foyer. Il se trouve à l’heure actuelle immobilisé, en proie à des douleurs chroniques et violentes et amoindri dans ses capacités cognitives du fait des anti-douleurs. Il vit sa dépression sur un mode de combat, comme il a mené sa vie jusqu’ici. Insomniaque, irritable, agressif, révolté, le risque de passage à l’acte élevé a motivé la mise sous Dékapote (…) »

Le préjudice consécutif à l’abandon de ses activités professionnelles est caractérisé, l’incidence professionnelle, préjudice distinct de la perte de gains professionnels futurs découlant de la situation d’anomalie sociale dans laquelle M.[I] s’est trouvé du fait de son inaptitude à reprendre un quelconque emploi.
Il considère de plus qu’il subit en outre une perte au titre de sa retraite de base et de sa retraite complémentaire, qu’il y a lieu d’indemniser.

Toutefois, le tribunal n’est pas en mesure de calculer précisément la perte de retraite subi par M. [I] sur la base des seules pièces versées aux débats.

En conséquence, par une appréciation souveraine des éléments de la cause, il lui sera alloué de ce chef la somme de 100 000€.

L’assistance tierce personne permanente :

L’expert a retenu la nécessité d’une aide humaine temporaire à raison de 2h/jour sans la conduite automobile.

Sur une base horaire de 20€, il lui sera alloué la somme de 473 496€ se décomposant comme suit :
-Sommes échues : du 28/11/2020 au 21/11/2024 (date du jugement): 20€ x2 x 1455 j = 58 200€
-A échoir : 2h/jour x 412j x 20€ = 16 480€ x 25.200 (euro de rente viager pour 1 homme de 57 ans) : 415 296€

II) Les Préjudices Extra Patrimoniaux :

II-A) Les Préjudices Extra-Patrimoniaux Temporaires :

Le déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste de préjudice cherche à indemniser l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu’à sa consolidation et correspond à une perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante incluant le préjudice d’agrément temporaire pendant cette période.

Compte tenu de la nature des lésions subies par M.[I] et de la gêne qu’elles ont entraînée sur sa vie quotidienne, il y a lieu d’indemniser ce poste de préjudice sur la base de 30€ par jour.

– déficit fonctionnel temporaire total : 28 jours 840 €
– déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % : 699 jours 10 485 €

Total : 11 325 €

Les souffrances endurées :

Les souffrances endurées fixées par l’expert à 4,5/7 seront indemnisées par le versement de la somme de 20 000 €.

Le préjudice esthétique temporaire :

Ce poste vise à réparer le préjudice né de l’obligation pour la victime de se présenter temporairement au regard des tiers dans une apparence physique altérée en raison de ses blessures.

Fixé par l’expert à 3 /7 jusqu’à la date de consolidation, ce préjudice sera indemnisé à hauteur de 5000 €.

II-B) Les Préjudices Extra-Patrimoniaux Permanents :

Le déficit fonctionnel permanent :

Ce poste de préjudice cherche à indemniser le préjudice extra-patrimonial découlant de l’incapacité médicalement constatée et à réparer ses incidences touchant exclusivement la sphère personnelle de la victime, soit non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de celle-ci mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans ses conditions d’existence après consolidation.

Compte tenu des séquelles conservées par la victime, il a été estimé par l’expert à 40 %.

Il y a donc lieu de l’indemniser par l’allocation de la somme de 102 000 € selon le calcul suivant : 2 550€ x 40 = 102 000€

Eu égard à sa finalité de réparation d’une incapacité permanente de travail, qui lui est assignée à l’article L.431-1 du code de la sécurité sociale, et à son mode de calcul, appliquant au salaire de référence de la victime le taux d’incapacité permanente défini à l’article L.434-2 du même code, la rente d’accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l’accident, c’est-à-dire ses pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité, et que dès lors le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d’une telle rente ne saurait s’exercer que sur ces deux postes de préjudice et non sur un poste de préjudice personnel.

En conséquence, il n’y a pas lieu d’imputer la rente accident du travail sur l’indemnité allouée en réparation du déficit fonctionnel permanent.

Le préjudice esthétique permanent :

Estimé à 2/7 par l’expert, ce poste de préjudice sera fixé à la somme de 4 000 €.

Le préjudice d’agrément :

Ce poste de préjudice vise exclusivement à réparer le préjudice d’agrément spécifique lié à l’impossibilité ou à la difficulté pour la victime de pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs et doit être évalué in concreto.

Au vu des documents produits, le préjudice d’agrément est justifié par la nature et la localisation des séquelles entravant notamment la pratique de la randonnée, du bodybuilding, du fitness, power-training . Il sera évalué compte-tenu de l’âge de M. [I] et des activités exercées avant l’accident nécessairement arrêtées, à la somme de 20 000€.

Le préjudice sexuel :

Il convient de rappeler que l’expert a retenu ce préjudice sexuel dans les termes suivants :
– oui sur la libido, déclaratif ; réalisation acte sexuel : non ; procréation : non
– en rapport avec syndrome anxio-dépressif et lourd traitement psychotrope

Le Dr [R], psychiatre, avait relevé aussi que son état avait contribué à détériorer ses relations conjugales, ce qui aggravait les difficultés.

Compte-tenu de la gravité des séquelles, et des souffrances tant physiques que psychologiques endurées, ce préjudice sexuel sera indemnisé à hauteur de la somme de 20 000€.

RÉCAPITULATIF

– frais divers………………………………………………………………………………………..2 760,00€
– tierce personne temporaire………………………………………………………………..28 000,00€
– pertes de gains professionnels actuels………………………………………………….73 183,83€
– tierce personne permanente………………………………………………………………415 296,00€
– pertes de gains professionnels futurs…………………………………………………211 703,61€
– incidence professionnelle………………………………………………………………..100 000,00€
– déficit fonctionnel temporaire…………………………………………………………….11 325,00€
– souffrances endurées………………………………………………………………………..20 000,00€
– préjudice esthétique temporaire…………………………………………………………….5 000,00€
– déficit fonctionnel permanent…………………………………………………………..102 000,00€
– préjudice esthétique permanent……………………………………………………………4 000,00€
– préjudice d’agrément……………………………………………………………………….20 000,00€
– préjudice sexuel………………………………………………………………………………20 000,00€

TOTAL………………………………………………………………………………………..1 013 268,44€

PROVISION A DÉDUIRE………………………………………………………………….80 000,00€

RESTE DU……………………………………………………………………………………..933 268,44€

En application de l’article 1231-6 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

En application de l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts dus pour une année entière sera ordonnée.

Sur les demandes accessoires :

L’article 514 du Code de procédure civile, dans sa rédaction issue de l’article 3 du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020 prévoit que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision n’en dispose autrement. Il n’y a pas lieu en l’espèce d’écarter l’exécution provisoire de droit.

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, l’ONIAM, partie succombante, sera condamnée aux entiers dépens de la présente procédure.

M.[D] [I] ayant exposé des frais pour obtenir la reconnaissance de ses droits, il est équitable de condamner l’ONIAM à lui payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les frais et dépens de procédure ne peuvent inclure les frais des éventuelles mesures d’exécution forcée que le créancier est susceptible d’engager pour obtenir l’exécution d’une décision de justice. En effet aucune disposition législative ou réglementaire n’a prévu la faculté pour une juridiction de faire supporter même partiellement la charge de ces droits proportionnels ou d’encaissement par le débiteur, en sus de l’indemnité allouée sur le fondement de l’article au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire, en matière civile ordinaire, en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

EVALUE le préjudice corporel de M.[D] [I], ainsi qu’il suit :

– frais divers………………………………………………………………………………………..2 760,00€
– tierce personne temporaire………………………………………………………………..28 000,00€
– pertes de gains professionnels actuels…………………………………………………73 183,83€
– tierce personne permanente………………………………………………………………415 296,00€
– pertes de gains professionnels futurs………………………………………………….211 703,61€
– incidence professionnelle…………………………………………………………………100 000,00€
– déficit fonctionnel temporaire……………………………………………………………..11 325,00€
– souffrances endurées………………………………………………………………………..20 000,00€
– préjudice esthétique temporaire……………………………………………………………5 000,00€
– déficit fonctionnel permanent……………………………………………………………102 000,00€
– préjudice esthétique permanent…………………………………………………………….4 000,00€
– préjudice d’agrément………………………………………………………………………..20 000,00€
– préjudice sexuel……………………………………………………………………………….20 000,00€

TOTAL…………………………………………………………………………………………1 013 268,44€

PROVISION A DÉDUIRE………………………………………………………………….80 000,00€

RESTE DU………………………………………………………………………………………933 268,44€

EN CONSÉQUENCE :

CONDAMNE l’ONIAM à payer avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement à M.[D] [I] :

– la somme de 933 268,44€ en réparation de son préjudice corporel, et ce déduction faite de la provision précédemment allouée,

– la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;

DÉCLARE le présent jugement commun et opposable à la CPAM des Bouches du Rhône ;

JUGE qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision ;

CONDAMNE l’ONIAM aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Jacques-Antoine PREZIOSI, avocat, sur son affirmation de droit.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 21 Novembre 2024

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon