Responsabilité du bailleur et obligations locatives en matière de jouissance et d’entretien des lieux.

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Responsabilité du bailleur et obligations locatives en matière de jouissance et d’entretien des lieux.

L’Essentiel : Le litige oppose les locataires [R] [F] et [V] [K] aux bailleurs [X] et [U] [N] suite à la location d’un appartement. Les locataires réclament des indemnités pour perte de jouissance de la cave, des retenues sur le dépôt de garantie, ainsi qu’une compensation pour résistance abusive. Ils soutiennent que la cave était en mauvais état et contestent les frais liés à l’état des lieux de sortie. Les bailleurs, de leur côté, demandent le rejet des demandes et réclament des indemnités pour résistance abusive, arguant que les infiltrations étaient dues à des travaux de force majeure. Le tribunal a rendu son jugement le 25 novembre 2024.

Contexte du litige

Par un acte de bail daté du 10 septembre 2016, [X] et [U] [N] ont loué un appartement à [R] [F] et [V] [K], avec un loyer mensuel de 1.200 euros et un dépôt de garantie de 1.200 euros. Un état des lieux d’entrée a été réalisé le 1er octobre 2016. Le 30 septembre 2022, un état des lieux de sortie a été effectué par huissier, les locataires ayant quitté les lieux le même jour.

Actions en justice

Le 29 septembre 2023, [R] [F] et [V] [K] ont cité [X] et [U] [N] devant le tribunal pour obtenir des indemnités, incluant 3.600 euros pour perte de jouissance de la cave, 193,15 euros pour retenues injustifiées sur le dépôt de garantie, 1.500 euros pour résistance abusive, et 1.500 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. L’affaire a été plaidée le 16 septembre 2024.

Arguments des locataires

Les locataires soutiennent que la cave était en mauvais état en raison d’infiltrations, ce qui a réduit leur espace de vie. Ils demandent une compensation de 150 euros par mois pour la perte de jouissance. Concernant le dépôt de garantie, ils affirment que les travaux effectués ne relèvent pas de leur responsabilité. Ils contestent également le coût de l’état des lieux de sortie, arguant qu’ils n’ont pas refusé un état des lieux amiable.

Arguments des bailleurs

Les bailleurs, représentés par leur avocat, demandent le rejet des demandes des locataires et réclament 5.000 euros pour résistance abusive. Ils affirment que la cave n’est pas habitable et que les infiltrations résultent de travaux de force majeure. Ils soutiennent également que les locataires n’ont pas justifié l’entretien du cumulus, ce qui a nécessité un devis pour des travaux.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué sur plusieurs points, notamment la restitution du dépôt de garantie, les retenues pour l’entretien du cumulus, et la demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance. Les bailleurs ont été condamnés à restituer 118,15 euros et 1.200 euros pour le préjudice de jouissance, tandis que les demandes réciproques de dommages et intérêts pour résistance abusive ont été rejetées.

Conclusion

Le jugement a été rendu le 25 novembre 2024, avec des décisions précises sur les sommes à restituer et le rejet des demandes non satisfaites. Chaque partie a conservé la charge de ses propres dépens, et le jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la demande de restitution du dépôt de garantie

Le dépôt de garantie est régi par l’article 22 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, qui stipule que :

« Lorsqu’un dépôt de garantie est prévu par le contrat de location pour garantir l’exécution de ses obligations locatives par le locataire, il ne peut être supérieur à un mois de loyer en principal. Au moment de la signature du bail, le dépôt de garantie est versé au bailleur directement par le locataire ou par l’intermédiaire d’un tiers. (…) Il est restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la remise en main propre, ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, des clés au bailleur ou à son mandataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées. »

Il est également précisé que le locataire est tenu de « répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement. »

Dans cette affaire, les bailleurs ont retenu des sommes sur le dépôt de garantie pour des dégradations et des réparations locatives. Les locataires, quant à eux, ont contesté ces retenues, arguant qu’ils n’étaient pas responsables des dégradations.

Il a été établi que les bailleurs étaient fondés à déduire certaines sommes du dépôt de garantie, notamment pour l’entretien du cumulus, qui incombe aux locataires selon le décret n°87-112 du 26 août 1987. En revanche, la retenue pour l’état des lieux de sortie effectué par huissier a été jugée injustifiée, car les bailleurs n’ont pas prouvé l’impossibilité d’un état des lieux amiable.

Ainsi, les bailleurs ont été condamnés à restituer 118,15 euros aux locataires, correspondant à la somme indûment retenue.

Sur les sommes retenues au titre de l’entretien du cumulus

L’entretien courant des équipements, tel que le cumulus, est précisé dans le décret n°87-112 du 26 août 1987, qui énonce que :

« Sont des réparations locatives les travaux d’entretien courant, et de menues réparations, y compris les remplacements d’éléments assimilables auxdites réparations, consécutifs à l’usage normal des locaux et équipements à usage privatif. »

Les locataires, ayant occupé le logement pendant six ans, n’ont pas justifié d’avoir effectué l’entretien du cumulus. Les bailleurs ont produit un devis pour l’entretien du cumulus, ce qui a été jugé suffisant pour prouver que cette dépense était à la charge des locataires.

En conséquence, les bailleurs ont été considérés comme justifiés dans leur décision de déduire cette somme du dépôt de garantie, et la demande des locataires à ce sujet a été rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance

L’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 impose au bailleur de remettre un logement en bon état d’usage et de réparation. Il stipule que :

« Le bailleur est tenu de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement. »

Dans cette affaire, les locataires ont subi des infiltrations dans la cave, rendant son usage impossible. Les bailleurs ont tenté de se décharger de leur responsabilité en invoquant la force majeure, mais il a été établi que l’obligation de délivrer un logement en bon état est une obligation de résultat.

Les locataires ont prouvé qu’ils n’ont pas pu jouir de leur cave pendant une période significative, et le préjudice a été évalué à 50 euros par mois pour une période de 24 mois, soit un total de 1.200 euros.

Les bailleurs ont donc été condamnés à verser cette somme aux locataires en réparation de leur préjudice de jouissance.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive et procédure abusive

L’article 2274 du code civil établit une présomption de bonne foi dans l’exercice d’une action en justice. En l’espèce, les deux parties ont présenté des demandes réciproques de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Le tribunal a constaté que chaque partie avait des raisons légitimes de défendre ses intérêts, et aucune des parties n’a réussi à prouver la malice ou la mauvaise foi de l’autre. Par conséquent, les demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive ont été rejetées.

Sur les mesures de fin de jugement

Le tribunal a décidé que chaque partie supporterait la charge des dépens, et les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ont également été rejetées.

Ainsi, le jugement a été rendu, condamnant les bailleurs à restituer une partie du dépôt de garantie et à indemniser les locataires pour le préjudice de jouissance, tout en rejetant les demandes réciproques de dommages et intérêts.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 3]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 23/09848 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XVGI

JUGEMENT

DU : 25 Novembre 2024

[R] [F]
[V] [K]

C/

[U] [N]
[X] [N]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 25 Novembre 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

Mme [R] [F], demeurant [Adresse 5]

M. [V] [K], demeurant [Adresse 5]

représentée par Représentant : Me Patrick DELBAR, avocat au barreau de LILLE

ET :

DÉFENDEUR(S)

Mme [U] [N], demeurant [Adresse 2]

M. [X] [N], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Thomas MINNE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 16 Septembre 2024

Noémie LOMBARD, Juge, assisté(e) de Deniz AGANOGLU, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 25 Novembre 2024, date indiquée à l’issue des débats par Noémie LOMBARD, Juge, assisté(e) de Deniz AGANOGLU, Greffier

RG : 23/9848 PAGE

EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous-seing privé du 10 septembre 2016 à effet au 1er octobre 2016, [X] et [U] [N] ont donné à bail à [R] [F] et [V] [K] un appartement situé [Adresse 4] à [Localité 6] ainsi qu’une cave, moyennant un loyer mensuel initial de 1.200 euros, une provision mensuelle sur charges de 200 euros et un dépôt de garantie de 1.200 euros.
 Le 1er octobre 2016, un état des lieux d’entrée a été établi amiablement par les parties. 
Le 30 septembre 2022, un état des lieux de sortie a été établi à la demande des bailleurs par huissier de justice en présence des locataires. Ces derniers ont quitté les lieux le même jour.
Par actes d’huissier de justice délivrés le 29 septembre 2023, [R] [F] et [V] [K] ont fait citer [X] et [U] [N] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille aux fins d’obtenir la condamnation de ces derniers à leur payer les sommes suivantes :
3.600 euros au titre de la perte de jouissance de leur cave ;193,15 euros au titre des retenues injustifiées du dépôt de garantie ;1.500 euros au titre de leur résistance abusive ;1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.L’affaire a été retenue et plaidée à l’audience du 16 septembre 2024.
Reprenant oralement les termes de leurs dernières écritures visées à l’audience, [R] [F] et [V] [K] ont maintenu l’ensemble des demandes contenues dans leur acte introductif d’instance et sollicité le rejet des prétentions adverses.
Invoquant les dispositions de l’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, ils font valoir que la cave mise à leur disposition présentait un taux d’humidité important en raison d’infiltrations consécutives à des travaux, ce qui les a contraint à stocker l’ensemble des affaires qu’ils y avaient initialement déposées dans leur appartement et a réduit, de ce fait, leur espace de vie. Ils déclarent que cette situation, qui a perduré pendant 48 mois, doit être réparée par la somme mensuelle de 150 euros au regard du montant de leur loyer. En réponse à l’argumentation présentée par la partie adverse, ils exposent que la cave était expressément mentionnée dans le bail d’habitation, de sorte qu’elle constitue un équipement que le bailleur était tenu de remettre en bon état au sens des dispositions susvisées.
A l’appui de leur demande de restitution du dépôt de garantie, ils font valoir que le devis de la SARL MON P’TIT DEPANNEUR démontre que l’opération effectuée dépasse le simple entretien du ballon électrique ; que le bail ne met pas à la charge des locataires l’entretien du cumulus ; que celui-ci n’a subi aucune dégradation qui leur soit imputable.
Invoquant les dispositions de l’article 3-2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, ils font ensuite valoir que leurs bailleurs ont unilatéralement choisi d’avoir recours à un huissier de justice pour effectuer l’état des lieux de sortie, de sorte qu’ils ne sauraient en partager le coût. Ils contestent s’être opposés à la réalisation d’un état des lieux amiable ainsi qu’à la réalisation des visites préalables à la vente de l’immeuble, au cours desquelles ils soutiennent être restés courtois.
Ils exposent ensuite que les bailleurs se sont retranchés derrière divers moyens durant toute la durée du bail et postérieurement à celui-ci pour rejeter leurs demandes, ce qui les a contraint à entamer des démarches pour faire valoir leurs droits et justifie l’allocation de dommages et intérêts pour résistance abusive.

En réponse à la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par la partie adverse, ils contestent avoir fait preuve d’obstination. Ils déclarent qu’ils souhaitaient résoudre le litige de manière amiable, que les commentaires qu’ils ont fait sur le logement lors des visites des potentiels acquéreurs étaient honnêtes et dépourvus d’intentions malveillantes.
Reprenant oralement les termes de leurs dernières conclusions visées à l’audience, [X] et [U] [N], représentés par leur avocat, ont demandé au juge des contentieux de la protection de débouter les requérants de l’ensemble de leurs demandes et de condamner solidairement ces derniers à leur payer la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et procédure abusive, outre la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Invoquant les dispositions de l’article R.1331-17 du code de la santé publique, ils font valoir qu’une cave est par nature impropre à l’habitation, de sorte que les dispositions de l’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ne lui sont pas applicables. Ils ajoutent que l’amiante présente dans la cave est en bon état de sorte qu’elle ne présente aucun danger. Ils font ensuite valoir que les infiltrations survenues dans la cave résultent de travaux de raccordement d’eau du réseau d’égout de la ville préconisés par la MEL et réalisés à la demande de la copropriété de l’immeuble, ce qui constitue un cas de force majeure excluant leur responsabilité. Ils ajoutent que les locataires ne justifient pas de l’impossibilité de jouir de leur cave dès lors qu’ils ont été en mesure d’y stocker leurs affaires personnelles.
Invoquant les dispositions de l’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et le décret n°87-112 du 26 août 1987, ils ajoutent que les locataires n’avaient pas justifié de l’entretien du cumulus, ce qui les a contraint de solliciter la réalisation d’un devis portant sur l’entretien du ballon électrique.
Sur le fondement des dispositions de l’article 3-2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, ils exposent que la réalisation d’un état des lieux de sortie amiable était impossible en raison du harcèlement dont ils ont été victimes de la part des locataires depuis la délivrance du congé pour vendre, de sorte que le recours à un huissier de justice était nécessaire et doit de ce fait être pris en charge par moitié par les parties adverses.
Invoquant les dispositions de l’article 1240 du code civil, ils font enfin valoir que l’introduction de la présente instance par les requérants est constitutive d’un abus de droit et procède d’une intention malveillante et malicieuse en ce que leurs allégations sont mensongères, leur attitude contraire à toute forme de courtoisie et leurs demandes dépourvues du sérieux que requiert l’exercice d’une action en justice.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 25 novembre 2024.
Pour l’exposé plus ample des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION 
Sur la demande de restitution du dépôt de garantie
 Aux termes de l’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est notamment obligé de « répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement. »
 
Le locataire est également obligé de « prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’État, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure ».
 
L’indemnisation du bailleur au titre des dégradations et réparations locatives n’est pas subordonnée à la preuve par celui-ci de l’exécution des travaux dont il demande réparation.

Aux termes de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 : « Lorsqu’un dépôt de garantie est prévu par le contrat de location pour garantir l’exécution de ses obligations locatives par le locataire, il ne peut être supérieur à un mois de loyer en principal. Au moment de la signature du bail, le dépôt de garantie est versé au bailleur directement par le locataire ou par l’intermédiaire d’un tiers. (…)
 
Il est restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la remise en main propre, ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, des clés au bailleur ou à son mandataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes, restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées. A cette fin, le locataire indique au bailleur ou à son mandataire, lors de la remise des clés, l’adresse de son nouveau domicile.
 
Il est restitué dans un délai maximal d’un mois à compter de la remise des clés par le locataire lorsque l’état des lieux de sortie est conforme à l’état des lieux d’entrée, déduction faite, le cas échéant, des sommes, restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, en lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées. (…)
 
A défaut de restitution dans les délais prévus, le dépôt de garantie restant dû au locataire est majoré d’une somme égale à 10 % du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard. Cette majoration n’est pas due lorsque l’origine du défaut de restitution dans les délais résulte de l’absence de transmission par le locataire de l’adresse de son nouveau domicile. »
 
La finalité du dépôt de garantie étant, selon l’alinéa 1er de l’article précité de garantir l’exécution de ses obligations locatives par le locataire, le bailleur peut retenir toutes les sommes dues en raison de l’inexécution par le locataire de ses obligations énumérées à l’article 7 de la loi de 1989.
 
sur les sommes retenues au titre de l’entretien du cumulus
En application du décret n°87-112 du 26 août 1987 Sont des réparations locatives les travaux d’entretien courant, et de menues réparations, y compris les remplacements d’éléments assimilables auxdites réparations, consécutifs à l’usage normal des locaux et équipements à usage privatif.
Ont notamment le caractère de réparations locatives les réparations énumérées en annexe au présent décret, parmi lesquelles le rinçage et le nettoyage des corps de chauffe et tuyauteries ainsi que l’entretien courant et menues réparations des appareils tels que réfrigérateurs, machines à laver le linge et la vaisselle, sèche-linge, hottes aspirantes, adoucisseurs, capteurs solaires, pompes à chaleur, appareils de conditionnement d’air, antennes individuelles de radiodiffusion et de télévision, meubles scellés, cheminées, glaces et miroirs.
Il résulte de ces dispositions que l’entretien courant d’un cumulus incombe aux locataires.
En l’espèce, les locataires, qui ont vécu six ans dans le logement, ne justifient d’aucune diligence pour assurer l’entretien courant du cumulus.
Les bailleurs produisent un devis établi par la SARL MON P’TIT DEPANNEUR le 17 octobre 2022, soit très peu de temps après le départ des locataires, ayant pour objet l’entretien et le contrôle du cumulus pour un montant de 75 euros TTC.
Cette prestation relève de l’entretien courant et doit par conséquent être mise à la charge des locataires, faute pour ces derniers de démontrer y avoir fait procéder par eux mêmes pendant les six années du bail.
Il en résulte que les bailleurs étaient bienfondés à déduire cette somme de la restitution du dépôt de garantie.
La demande présentée par les locataires sur ce fondement sera de ce fait rejetée.

Sur les sommes retenues au titre du coût de l’état des lieux de sortie effectué par commissaire de justice
Aux termes de l’article 3-2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, un état des lieux est établi selon des modalités définies par décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la Commission nationale de concertation, dans les mêmes formes et en autant d’exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés. Il est établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles et joint au contrat de location.
Si l’état des lieux ne peut être établi dans les conditions prévues au premier alinéa, il est établi par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire et à un coût fixé par décret en Conseil d’Etat. Dans ce cas, les parties en sont avisées par l’huissier au moins sept jours à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
En l’espèce, aucune des pièces produites aux débats ne permet de conclure à l’impossibilité d’effectuer un état des lieux de sortie à l’amiable. En effet, les multiples échanges de mails antérieurs au départ des locataires produits par les parties permettent d’établir que les relations sont demeurées jusqu’à cette date sinon amicales, du moins cordiales, sans qu’aucune impolitesse crasse ne soit à déplorer de part ou d’autre.
Les bailleurs ne justifient par aucun élément avoir tenté d’effectuer un état des lieux de sortie à l’amiable. Le procès verbal de constat d’huissier ne fait part d’aucun incident en ce sens. Les locataires étaient présents ; l’intention de nuire qui leur est reprochée ne transparaît d’aucune pièce produite.
Il en résulte que c’est à tort que les bailleurs ont mis à la charge des locataires la moitié du coût du procès verbal de constat d’huissier et retenu cette somme sur leur dépôt de garantie.
Par conséquent, [X] et [U] [N] seront condamnés à restituer à leurs locataires la somme 118,15 euros à ce titre.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance

Aux termes de l’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précitée, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation. Le bailleur est obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de INK »https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000006442792&dateTexte=&categorieLien=cid »l’article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l’état des lieux, auraient fait l’objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus et d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués.
En l’espèce, la cave est mentionnée dans le contrat de location, de sorte qu’elle constitue un accessoire du logement et fait partie des équipements que le bailleur est tenu de remettre en bon état d’usage et de fonctionnement en application des dispositions susvisées.
Il est constant que la cave louée aux requérants a subi des infiltrations imputables à des travaux diligentés au mois de janvier 2019 à la demande de la copropriété de l’immeuble.
Il résulte des échanges de mail produits par les parties ainsi que de l’argumentation présentée par les bailleurs – lesquels invoquent la force majeure pour s’exonérer de leur responsabilité – que cette situation a perduré jusqu’à la fin du bail.
S’il apparaît démontré que les bailleurs ont, à de multiples reprises, pendant plusieurs années, alerté le syndic quant à la rémanence de ces infiltrations dans la cave litigieuse, l’obligation de délivrer un logement, en ce compris ses accessoires, en bon état d’usage, de réparation et de fonctionnement, n’est pas une obligation de moyen mais une obligation de résultat.
A cet égard, il appartenait aux bailleurs d’appeler en garantie les tiers qu’ils estiment responsables du dommage subi ; l’éventuelle inertie du syndic ne saurait en effet exonérer les bailleurs des obligations dont ils sont tenus envers leurs locataires en vertu de la loi et du contrat.
Les photographies de la cave annexées aux échanges de mails produits par les locataires (pièce 8) démontrent que les infiltrations étaient conséquentes ; les sol apparaît presque entièrement recouvert d’eau.
Au regard de ces éléments, l’impossibilité d’entreposer des affaires dans la cave sans risque de détérioration de ces dernières en raison de l’eau et de l’humidité apparaît suffisamment établie.
Les locataires justifient en outre avoir reçu un courrier électronique du syndic le 9 août 2022 les invitant à déplacer les affaires qui encombraient leurs parties communes ; photographie de celles-ci est jointe au courrier. Ils soutiennent que ces sacs et cartons faisaient partie des affaires initialement stockées dans leur cave, déplacées sur leur palier puis dans leur appartement à la suite du courrier du syndic, ce qui n’est pas sérieusement contestable. Photographies des cartons entreposés dans l’appartement sont également produites aux débats ; celles-ci ne font l’objet d’aucune contestation de la part de la partie adverse.
Au regard de ces éléments, il apparaît suffisamment démontré que les locataires n’ont pu jouir normalement de la cave à compter du mois de janvier 2019 et jusqu’à la fin du bail.
Les locataires reconnaissent néanmoins être prescrits en leur demande indemnitaire portant sur la période antérieure au 29 septembre 2020. Le bail a pris fin le 30 septembre 2022. Il en résulte que le préjudice subi doit être indemnisé pour la période de 24 mois ayant précédé cette date.

Comme le relèvent à juste titre les locataires, celui-ci résulte à la fois de l’impossibilité de jouir normalement de la cave mais également de la diminution de leur espace vital en raison du déplacement de leurs affaires dans l’appartement à la suite des infiltrations.
Aucun document ne permet de connaître la surface de cette cave. Il est constant que celle-ci se trouve dans un immeuble collectif. Il convient par conséquent de considérer qu’elle présente une surface de 5m². L’appartement présente une surface de 80 m². Le loyer était de 1.200 euros hors charges. Au regard de ces éléments, le préjudice subi sera évalué à la somme de 50 euros par mois, soit à la somme totale de 1.200 euros.
Par conséquent, [X] et [U] [N] seront condamnés à payer à [R] [F] et [V] [K] la somme de 1.200 euros à ce titre.

sur les demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive et procédure abusive présentées de part et d’autre

L’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol.
En l’espèce, la présomption de bonne foi édictée par les dispositions de l’article 2274 du code civil n’est renversée par aucune des parties, étant observé que chacune succombe partiellement à l’instance, de sorte que tant l’exercice de l’action en justice que la résistance à celle-ci se trouvaient légitimes.
Par conséquent, les demandes réciproquement présentées sur ce fondement seront rejetées.

Sur mes mesures de fin de jugement

Chaque partie succombant partiellement à l’instance supportera la charge des dépens exposés ; pour les mêmes motifs, les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

 Le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, statuant après débats tenus en audience publique, par décision contradictoire, rendue en premier ressort et mise à disposition au greffe, 

CONDAMNE [X] et [U] [N] à payer à [R] [F] et [V] [K] la somme de 118,15 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie ;

CONDAMNE [X] et [U] [N] à payer à [R] [F] et [V] [K] la somme de 1.200 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;  

REJETTE le surplus des demandes présentées par les parties et non satisfaites ; 

REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
DIT que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens ;
RAPPELLE que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit

Ainsi jugé et prononcé à Lille, le 25 novembre 2024.

LE GREFFIER                                                                 LA JUGE
D.AGANOGLU N.LOMBARD


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