L’Essentiel : La SARL CPI a signé un bail commercial en 1986, renouvelé plusieurs fois, avec un loyer fixé à 62.653,38 euros en 2009. En septembre 2018, la société a demandé le renouvellement, mais les propriétaires ont refusé, proposant une indemnité d’éviction. En octobre 2020, CPI a assigné les propriétaires pour obtenir cette indemnité, tandis que ceux-ci ont réclamé une indemnité d’occupation. Les procédures ont été jointes en février 2021. En janvier 2024, CPI a demandé une expertise pour évaluer les indemnités dues, et le juge a ordonné une mesure d’expertise, tout en proposant une médiation pour résoudre le litige.
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Constitution du bail commercialLa SARL CPI a signé un bail commercial avec les consorts « [V]-[U] » le 4 novembre 1986 pour des locaux situés à [Localité 37]. Ce bail, d’une durée de neuf ans, a été renouvelé plusieurs fois, avec un loyer fixé par le tribunal en mai 2009 à 62.653,38 euros. Demande de renouvellement et refusEn septembre 2018, la société CPI a demandé le renouvellement de son bail à compter du 1er octobre 2018. Cependant, le 19 décembre 2018, les propriétaires ont signifié leur refus de renouvellement, tout en proposant une indemnité d’éviction. Assignation en justiceEn octobre 2020, la SARL CPI a assigné les propriétaires pour obtenir le paiement d’une indemnité d’éviction et la désignation d’un expert judiciaire. Parallèlement, les propriétaires ont assigné la SARL CPI pour obtenir le paiement d’une indemnité d’occupation. Jointure des procéduresLes deux procédures ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état en février 2021. En juillet 2022, le juge a rejeté une fin de non-recevoir soulevée par la société CPI concernant la prescription de la demande d’indemnité d’occupation. Demandes d’expertise et d’indemnitéEn janvier 2024, la société CPI a demandé une expertise pour évaluer les indemnités dues. En réponse, les propriétaires ont demandé la mise hors de cause de leur administrateur de biens et ont fixé le montant de l’indemnité d’occupation à 117.000 euros par an. Décision du juge de la mise en étatLe juge a déclaré incompétent pour statuer sur les demandes relatives aux indemnités et travaux, qui relèvent du juge du fond. Il a ordonné une mesure d’expertise pour déterminer les montants des indemnités d’éviction et d’occupation. Mesures d’expertise et médiationUne expertise judiciaire a été ordonnée pour évaluer les indemnités dues, avec une provision de 6.000 euros à consigner par les propriétaires. Le juge a également proposé une médiation pour faciliter une résolution rapide du litige. Prochaines étapesL’affaire a été renvoyée à une audience de mise en état pour contrôler le versement de la consignation et pour suivre l’évolution de la médiation. Les dépens et frais irrépétibles ont été réservés. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’indemnité d’éviction prévue par l’article L. 145-14 du Code de commerce ?L’article L. 145-14 du Code de commerce stipule que : « Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail commercial, mais il doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité d’éviction. » Cette disposition est essentielle car elle protège le locataire en cas de non-renouvellement de son bail. En effet, le locataire a droit à une indemnité d’éviction, qui vise à compenser la perte de son fonds de commerce et les désagréments liés à son éviction. Il est important de noter que le locataire a également le droit de se maintenir dans les lieux jusqu’au paiement de cette indemnité. Cela signifie que tant que l’indemnité d’éviction n’est pas versée, le locataire peut continuer à occuper les locaux, ce qui est un élément crucial dans les litiges relatifs aux baux commerciaux. En l’espèce, la SARL CPI a demandé le renouvellement de son bail, mais les propriétaires ont signifié leur refus, ce qui ouvre droit à l’indemnité d’éviction. Le juge a donc reconnu ce droit, affirmant que la société CPI pouvait prétendre à cette indemnité, conformément à l’article L. 145-14. Quelles sont les conséquences du refus de renouvellement du bail commercial ?Le refus de renouvellement d’un bail commercial a plusieurs conséquences juridiques, notamment en vertu des articles L. 145-14 et L. 145-28 du Code de commerce. L’article L. 145-28 précise que : « Le locataire a droit de se maintenir dans les lieux jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction. » Cela signifie que, même après le refus de renouvellement, le locataire peut continuer à occuper les locaux tant que l’indemnité d’éviction n’est pas versée. Cette protection est cruciale pour le locataire, car elle lui permet de ne pas se retrouver sans local commercial immédiatement après le refus de renouvellement. De plus, le locataire est redevable d’une indemnité d’occupation pendant cette période. Cette indemnité est calculée sur la base du loyer contractuel et doit être versée au bailleur jusqu’à la libération des lieux. Dans le cas présent, la SARL CPI a été informée de la décision de refus de renouvellement le 19 décembre 2018, ce qui a ouvert droit à une indemnité d’occupation à compter de cette date. Les propriétaires ont donc le droit de réclamer cette indemnité jusqu’à ce que la société CPI quitte effectivement les lieux. Comment se déroule la procédure d’expertise judiciaire dans le cadre d’un litige sur l’indemnité d’éviction ?La procédure d’expertise judiciaire est régie par les articles 263 et suivants du Code de procédure civile. Ces articles prévoient que le juge peut ordonner une mesure d’instruction, notamment une expertise, lorsque cela est nécessaire pour éclairer le tribunal sur des points techniques ou complexes. Dans le cas présent, la société CPI a demandé une expertise judiciaire pour évaluer le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation. Le juge a accepté cette demande, considérant qu’il était nécessaire de déterminer ces montants en raison du désaccord entre les parties. L’expert désigné a pour mission de : 1. Visiter les lieux et les décrire. L’expert devra également rendre compte de la situation des locaux et des travaux nécessaires, le cas échéant. Le rapport d’expertise sera déposé au greffe et servira de base pour la décision du tribunal. Il est à noter que les frais d’expertise sont généralement avancés par la partie qui en fait la demande, mais peuvent être répartis entre les parties selon les résultats de l’expertise. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du Code de procédure civile dispose que : « La partie qui succombe peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. » Cet article permet au juge de condamner la partie perdante à verser une indemnité à l’autre partie pour couvrir les frais engagés dans le cadre de la procédure, tels que les honoraires d’avocat. Dans le litige en question, la société CPI et les propriétaires indivis ont formulé des demandes au titre de l’article 700. Les propriétaires demandent une somme de 1.500 euros pour couvrir leurs frais, tandis que la société CPI conteste cette demande. Le juge, dans sa décision, a indiqué qu’il se réservait le droit de statuer sur les demandes formées en application de l’article 700 à l’issue de la procédure. Cela signifie que la décision finale sur cette question sera prise après que le tribunal aura examiné l’ensemble des éléments du dossier et rendu son jugement sur le fond. Ainsi, l’article 700 joue un rôle important dans la gestion des frais de justice et peut avoir un impact significatif sur le montant que chaque partie devra supporter à l’issue du litige. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies
délivrées le :
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18° chambre
1ère section
N° RG 20/11393 N° Portalis 352J-W-B7E-CTGZ5
N° MINUTE : 1
Assignation du :
13 Octobre 2020
contradictoire
Expertise
Mme [P] [W]
[Adresse 9]
[Localité 39]
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 19 Novembre 2024
DEMANDERESSE
S.A.R.L. CPI
[Adresse 22]
[Localité 37]
représentée par Maître Antoine GENTY de la SCP BODIN GENTY, demeurant [Adresse 12], avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P182
DEFENDEURS
Monsieur [A] [D]
[Adresse 33]
[Localité 38]
Madame [B] [D] épouse [X]
[Adresse 10]
[Localité 21]
Madame [I] [V] épouse [C]
[Adresse 26]
[Localité 32]
Madame [J] [V] épouse [TZ]
[Adresse 17]
[Localité 41]
Madame [Z], [MV] [V] épouse [PO]
[Adresse 25]
[Localité 14]/FRANCE
Monsieur [GF] [V]
[Adresse 20]
[Localité 24]
S.A.S. CABINET MAURY-SCHWOB
[Adresse 11]
[Localité 36]
S.C.I. HAUTEVILLE BONNE NOUVELLE
[Adresse 8]
[Localité 37]
Monsieur [ZX] [JN]
[Adresse 30]
[Localité 21]
Madame [H] [JN]
[Adresse 15]
[Localité 21]
Monsieur [L] [JN]
[Adresse 34]
[Localité 39]
Madame [CN] [JN]
[Adresse 13]
[Localité 27]
Madame [O] [T] épouse [E]
[Adresse 46]
[Localité 29]
Madame [F] [E]
[Adresse 19]
[Localité 18]
Monsieur [G] [EX]
[Adresse 28]
[Localité 31]
Tous représentés par Me Laurence SEMEVIER, demeurant [Adresse 42], avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0313
MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT
Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge,
assistée de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,
DEBATS
A l’audience du 12 septembre 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
Puis, le délibéré a été prorogé au 19 Novembre 2024.
ORDONNANCE
Rendue par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort
Par acte sous seing privé à [Localité 47] en date du 4 novembre 1986, la SARL CPI s’est vue consentir un bail commercial par les consorts « [V]-[U] » sur des locaux dépendant d’un immeuble situé [Adresse 23] à [Localité 37], au fond de la cour et donnant sur le [Adresse 8], ci-après désignés :
« Situés en fond de la Cour de l’immeuble du [Adresse 22] et donnant sur le [Adresse 8], divers locaux au :
Un rez-de-chaussée,
Premier étage,
Deuxième étage.
Et par lesquels on accède par l’escalier de l’immeuble du [Adresse 22] et par un escalier intérieur. »
Le bail a été consenti pour une durée de neuf années entières et consécutives, commençant à courir à compter du 1er octobre 1986 pour se terminer le 30 septembre 1995.
La destination du bail est la « création et fabrication de tous modèles de coutures – styliste ».
Par acte sous seing privé en date du 11 octobre 1995, le bail a été renouvelé pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 1995, puis à nouveau à compter du 1er octobre 2007, moyennant un loyer fixé par le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Paris par jugement en date du 14 mai 2009 à la somme de 62.653,38 euros en principal.
Par acte extrajudiciaire du 20 septembre 2018, la société CPI a sollicité le renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2018.
Suivant exploit d’huissier en date du 19 décembre 2018, les propriétaires indivis du local ont fait signifier à la société CPI leur refus de renouvellement du bail avec offre d’indemnité d’éviction prévue par l’article L. 145-14 du code de commerce.
Par actes d’huissier en date des 13, 14, 15 octobre 2020, la SARL CPI a assigné les indivisaires propriétaires ainsi que leur mandataire, le Cabinet Maury Schwob administrateur de l’immeuble, aux fins principales de les voir condamner au paiement d’une indemnité d’éviction et, avant dire droit, désigner un expert judiciaire aux fins d’évaluation de l’indemnité d’éviction. L’affaire a été enregistrée sous le numéro RG n° 20/11393.
Suivant exploit d’huissier en date du 25 novembre 2020, la SCI Hauteville Bonne Nouvelle, Monsieur [ZX] [MV] [S] [JN], Madame [H] [JN], Monsieur [L] [MV] [S] [JN], Madame [CN] [JN], Madame [O] [E] née [N], Madame [F] [MV] [E], Monsieur [G] [GF] [EX], Monsieur [A] [G] [D], Madame [B] [ZG] [MV] [X] née [D], Madame [I] [Y] [C] née [V], Madame [J] [M] [TZ] née [V], Madame [Z] [MV] [PO] née [V], et Monsieur [GF] [R] [V] ont assigné la SARL CPI aux fins, à titre principal, de fixation de l’indemnité d’occupation due par la société preneuse à compter du 19 décembre 2018 à la somme de 110.600 euros par an en principal, et de condamner la société CPI au paiement de ladite indemnité jusqu’à libération complète des locaux, et à titre subsidiaire, de désignation d’un expert judiciaire pour évaluer le montant de cette indemnité d’occupation. L’affaire a été enregistrée sous le numéro RG n° 20/11878.
Par ordonnance du juge de la mise en état du 4 février 2021, les deux procédures ont été jointes sous le numéro RG 20/11393.
Par ordonnance du 7 juillet 2022, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société CPI et tirée de la prescription de la demande en paiement d’une indemnité d’occupation des propriétaires indivis des locaux.
Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 15 janvier 2024, la société CPI demande au juge de la mise en état de :
– ordonner une mesure d’expertise aux fins de fournir au tribunal les éléments nécessaires et utiles à la fixation des indemnités principales et accessoires qui lui sont dues et de statuer sur le montant de l’indemnité d’occupation,
– dire que la consignation à valoir sur les frais et honoraires d’expertise sera mise à la charge des deux parties par moitié,
– réserver les dépens.
Aux termes de leurs conclusions en réponse sur incident notifiées par voie électronique le 19 avril 2024, la SCI Hauteville Bonne Nouvelle, Monsieur [ZX] [MV] [S] [JN], Madame [H] [JN], Monsieur [L] [MV] [S] [JN], Madame [CN] [JN], Madame [O] [E] née [N], Madame [F] [MV] [E], Monsieur [G] [GF] [EX], Monsieur [A] [G] [D], Madame [B] [ZG] [MV] [X] née [D], Madame [I] [Y] [C] née [V], Madame [J] [M] [TZ] née [V], Madame [Z] [MV] [PO] née [V], et Monsieur [GF] [R] [V], ainsi que la SAS Cabinet Maury Schwob demandent au juge de la mise en état de :
– prononcer la mise hors de cause du Cabinet Maury Schwob,
– condamner la SARL CPI au paiement d’une somme de 1.500 euros au bénéfice du Cabinet Maury Schwob au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– dire et juger que la société CPI est redevable d’une indemnité d’occupation à compter du 19 décembre 2018 et jusqu’à restitution des lieux,
– fixer le montant de ladite indemnité d’occupation à la somme de 117.000 euros par an en principal, hors taxes et hors charges,
– dire et juger que la SARL CPI lui est redevable d’une somme de 600.000 euros au titre des travaux indispensables dans les lieux compte tenu de l’absence totale et manifeste d’entretien,
– subsidiairement, désigner un expert aux fins d’estimation de l’indemnité d’occupation due par la société CPI depuis le 19 décembre 2018 et aux fins de décrire et chiffrer le montant des réparations locatives à la charge de la société CPI, lesquelles doivent venir en déduction de l’indemnité d’éviction,
– déclarer la société CPI mal fondée au titre des sommes évoquées au titre de l’indemnité d’éviction,
– dire et juger que l’indemnité d’éviction à laquelle la société CPI pourrait prétendre ne saurait excéder la somme totale de 468.000 euros, avant déduction des travaux indispensables compte tenu du défaut d’entretien,
– subsidiairement, désigner un expert aux fins d’estimation de l’indemnité d’éviction en excluant expressément les postes de perte d’exploitation et de frais de réinstallation qui sont étrangers au cas d’espèce,
– dire et juger que le paiement de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation s’opèrera de plein droit par compensation en application des articles 1348 et suivants du code civil,
– débouter la société CPI de toutes ses demandes y compris celle tendant à mettre à la charge des indivisaires les frais d’expertise,
– la débouter de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société CPI aux frais d’expertise,
– condamner la société CPI au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Semevier.
L’affaire a été appelée par le juge de la mise en état à l’audience d’incidents du 12 septembre 2024, mise en délibéré au 7 novembre 2024, prorogée au 19 novembre 2024, date à laquelle il a été rendu par mise à disposition du greffe.
Sur la compétence du juge de la mise en état
Les défendeurs à l’instance et à l’incident exposent :
– que le Cabinet Maury Schwob, compte tenu du fait qu’il n’a qu’une fonction de mandataire des propriétaires indivis en tant qu’administrateur de biens, doit être mis hors de cause,
– que l’indemnité d’éviction à laquelle la société CPI peut prétendre ne peut être supérieure à la somme de 468.000 euros avant déduction des travaux indispensables compte tenu du défaut d’entretien,
– que la société CPI est redevable d’une indemnité d’occupation à compter du 19 décembre 2018 d’un montant de 117.000 euros par an, hors taxes et hors charges,
– que ces évaluations sont fondées sur un rapport d’expertise amiable réalisé par M. [OX] [K], expert, à la demande des propriétaires indivis,
– que des travaux devront être réalisés dans les locaux du fait d’un défaut d’entretien par la société preneuse, évalués à 600.000 euros,
– que le paiement de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation devront s’opérer par compensation en application des articles 1348 et suivants du code civil.
La société CPI fait valoir :
– qu’elle s’en rapporte sur la mise hors de cause du Cabinet Maury Schwob mais que la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile n’est pas justifiée,
– que l’estimation de l’indemnité d’éviction proposée par les bailleurs se fonde sur un rapport d’expertise ancien, datant de 2018, établi sans visite des locaux, dont elle conteste les conclusions,
– que les parties s’opposent également sur l’indemnité d’occupation, tant sur la superficie à retenir que sur la valeur locative, de sorte qu’une expertise est nécessaire,
– que la demande de réparations locatives n’est pas justifiée, les bailleurs ne rapportant pas la preuve des travaux nécessaires ni du manquement de la société preneuse à ses obligations.
Aux termes des articles 787, 788, 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état dispose de pouvoirs juridictionnels pour :
– constater l’extinction de l’instance,
– statuer sur une demande de communication de pièces,
– statuer sur une exception de procédure, une demande de renvoi fondée sur l’art 47 ou un incident mettant fin à l’instance, une demande provisionnelle, une mesure provisoire, une mesure d’instruction.
Il résulte de ces dispositions que le juge de la mise en état dispose de compétences juridictionnelles exclusivement dans le cadre du contentieux procédural d’une instance mais qu’il ne dispose pas de compétence pour statuer sur des demandes au fond.
En l’espèce, les demandes des propriétaires indivis du local commercial et de leur administrateur de biens visant à mettre hors de cause le Cabinet Maury Schwob et visant à se prononcer sur le montant d’une indemnité d’éviction, d’une indemnité d’occupation et sur des travaux d’entretien, relèvent de la compétence du juge du fond et non de la compétence limitativement énumérée du juge de la mise en état.
En conséquence, le juge de la mise en état se déclarera incompétent pour connaître de ces demandes.
Sur la mesure d’expertise
La société CPI fait valoir qu’en l’absence d’accord des parties sur le montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation, une expertise judiciaire est nécessaire, l’expertise amiable présentée par les bailleurs étant ancienne et non contradictoire.
Les propriétaires indivis des locaux font état d’une expertise amiable réalisée à leur demande par M. [OX] [K] en décembre 2018 pour solliciter la fixation du montant de l’indemnité d’éviction et de l’indemnité d’occupation, mais compte tenu du désaccord des parties, ils ne s’opposent pas à la désignation d’un expert judiciaire, les frais d’expertise devant être mis à la charge de la société CPI. Ils soutiennent qu’au regard de l’absence d’entretien des locaux par la société preneuse depuis son entrée dans les lieux, l’expertise devra évaluer le montant des travaux de remise en état qui devront venir en déduction de l’indemnité d’éviction.
Selon les articles L. 145-14 et L. 145-28 du code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail mais doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants du même code, payer au locataire évincé une indemnité d’éviction, ce-dernier ayant droit au maintien dans les lieux jusqu’à son paiement et étant redevable d’une indemnité d’occupation le temps de son maintien dans les lieux.
Aux termes de l’article 789 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut ordonner toute mesure d’instruction.
En l’espèce, le refus de renouvellement délivré le 19 décembre 2018 par les propriétaires indivis, à la suite de la demande en renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2018 qui leur avait été faite par la société CPI, a mis fin à compter du 30 septembre 2018 au bail liant les parties, alors en tacite prolongation. Le principe de l’indemnité d’éviction n’est pas discuté par les parties, de même que le principe du paiement par le locataire d’une indemnité d’occupation statutaire depuis la date d’effet du congé jusqu’à la libération des lieux. En l’absence d’accord des parties sur le montant de ces indemnités, il est donc utile d’ordonner une mesure d’instruction aux fins de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction à laquelle les propriétaires indivis peuvent prétendre ainsi que le montant de l’indemnité d’occupation dont la société CPI est redevable le temps de son maintien dans les lieux.
Dès lors qu’aux termes de l’article L. 145-28 du code de commerce, le locataire a droit de se maintenir dans les lieux jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction et qu’au jour où il est statué, les bailleurs ne rapportent pas la preuve que la locataire a quitté les locaux, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande des bailleurs d’intégrer dans la mission de l’expert le chiffrage des réparations locatives qui devraient être supportées par la locataire.
Une mesure d’expertise sera donc ordonnée dans les conditions prévues aux termes du dispositif de la présente décision, aux frais avancés des propriétaires indivis, auteurs du congé refusant le renouvellement. Une indemnité d’occupation provisionnelle égale au dernier loyer pratiqué est justifiée pendant la durée de l’instance.
Au regard de la nature du litige il est de l’intérêt des parties de recourir, dans le cadre de l’expertise, à une mesure qui leur offre la possibilité de parvenir à une solution rapide et négociée par la médiation ; il convient en conséquence de la leur proposer.
Afin que les parties bénéficient des explications nécessaires à une décision éclairée sur l’acceptation d’une telle mesure, un médiateur sera commis pour recueillir leur avis, selon les modalités prévues au présent dispositif.
Il y a lieu de réserver les dépens et les demandes formées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’affaire sera renvoyée à la mise en état dans les termes du dispositif.
*
Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile,
Dit que la demande de mise hors de cause de la SAS Cabinet Maury Schwob et la demande subséquente au titre de l’article 700 du code de procédure civile relèvent de la compétence du juge du fond,
Dit que les demandes de fixation du montant de l’indemnité d’occupation qui serait due aux bailleurs, de fixation du montant de l’indemnité d’éviction qui serait due à la SARL CPI, d’évaluation des travaux de remise en état qui seraient imputables à la SARL CPI, relèvent de la compétence du juge du fond,
Se déclare, en conséquence, incompétent pour connaître de ces demandes,
Dit que le congé avec refus de renouvellement du bail signifié le 19 décembre 2018 à la SARL CPI, en réponse à la demande de renouvellement à effet du 1er octobre 2018 faite le 20 septembre 2018 par la société CPI, ouvre droit au profit de cette dernière au paiement d’une indemnité d’éviction prévue à l’article L. 145-14 du code de commerce et au maintien dans les lieux jusqu’au versement de cette indemnité, 1et au profit des bailleurs, la SCI Hauteville Bonne Nouvelle, Monsieur [ZX] [MV] [S] [JN], Madame [H] [JN], Monsieur [L] [MV] [S] [JN], Madame [CN] [JN], Madame [O] [E] née [N], Madame [F] [MV] [E], Monsieur [G] [GF] [EX], Monsieur [A] [G] [D], Madame [B] [ZG] [MV] [X] née [D], Madame [I] [Y] [C] née [V], Madame [J] [M] [TZ] née [V], Madame [Z] [MV] [PO] née [V], et Monsieur [GF] [R] [V], au paiement d’une indemnité d’occupation qui sera due à compter du 1er octobre 2018, pour les locaux objets du bail renouvelé le 1er octobre 2007, situés [Adresse 23] à [Localité 37],
Avant dire droit sur le montant de l’indemnité d’éviction, ordonne une mesure d’expertise judiciaire et commet en qualité d’expert :
Mme [P] [W]
[Adresse 9]
[Localité 39]
[XXXXXXXX01]
[XXXXXXXX04]
[Courriel 43]
avec mission, les parties ayant été convoquées et dans le respect du principe du contradictoire:
de se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission,visiter les lieux, les décrire, dresser le cas échéant la liste du personnel employé par le locataire,rechercher, en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par le bail, de la situation et de l’état des locaux, tous éléments permettant :1°) de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction dans le cas :
– d’une perte de fonds : valeur marchande déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, des frais et droits de mutation afférents à la cession de fonds d’importance identique, de la réparation du trouble commercial,
– de la possibilité d’un transfert de fonds, sans perte conséquente de clientèle, sur un emplacement de qualité équivalente, et, en tout état de cause, le coût d’un tel transfert, comprenant : acquisition d’un titre locatif ayant les mêmes avantages que l’ancien, frais et droits de mutation, frais de déménagement et de réinstallation, réparation du trouble commercial,
2°) d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert,
3°) de déterminer le montant de l’indemnité due par le locataire pour l’occupation des lieux, objet du bail depuis le 1er octobre 2018 jusqu’à leur libération effective,
à titre de renseignement, dire si, à son avis, le loyer aurait été ou non plafonné en cas de renouvellement du bail et préciser, en ce cas, le montant du loyer calculé en fonction des indices qui aurait été applicables à la date d’effet du congé,
Dit que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe de la 18ème Chambre – 1ére section du tribunal judiciaire de Paris avant le 30 novembre 2025,
Fixe à la somme de 6.000 (six mille) euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, somme qui devra être consignée par les propriétaires indivis des locaux à la régie du tribunal judiciaire de Paris (Paris 17ème, Parvis du tribunal, atrium sud, 1er étage à droite) au plus tard le 15 janvier 2025,
Dit que, faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet,
Dit que le juge de la mise en état conservera le contrôle de cette expertise,
Fixe l’indemnité d’occupation provisionnelle pour la durée de l’instance au montant du dernier loyer contractuel en principal, outre les charges,
Vu l’article 131-4 du code de procédure civile
Donne injonction aux parties de rencontrer un médiateur, en la personne de Mme [XY] [RF],
[Adresse 16]
[Localité 35]
[XXXXXXXX05]
[Courriel 45]
Dit que le médiateur n’interviendra qu’après que l’expert l’aura informé qu’il a adressé aux parties sa note de synthèse,
Dit qu’après avoir apporté cette information au médiateur, et en attendant que celui-ci ait mené à bien sa mission, l’expert suspendra ses opérations d’expertise,
Dit que le médiateur ainsi informé par l’expert aura pour mission :
* d’expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d’une mesure de médiation,
* de recueillir leur consentement ou leur refus de cette mesure,
Dit qu’à l’issue de ce premier rendez-vous d’information, dans l’hypothèse où au moins l’une des parties refuserait le principe de la médiation, ou à défaut de réponse d’au moins l’une des parties dans le délai fixé par le médiateur, ce dernier en aviser l’expert et le juge chargé du contrôle des expertises ; le médiateur cessera alors ses opérations, sans défraiement, et l’expert reprendra le cours de sa mission,
Dit que dans l’hypothèse où les parties donneraient leur accord à la médiation :
* le médiateur pourra commencer immédiatement les opérations de médiation,
* le médiateur en informera l’expert, et le cours de l’expertise demeurera suspendu, sauf si des investigations complémentaires sont nécessaires à la solution du litige,
Dit qu’au terme de la médiation, le médiateur informera l’expert et le juge chargé du contrôle des expertises, soit que les parties sont parvenues à un accord, soit qu’elles n’y sont pas parvenues,
Dit que si les parties sont parvenues à un accord, l’expert déposera son rapport en l’état de la dernière note aux parties qu’il aura établie, et pourra solliciter la taxation de ses honoraires correspondants,
Dit que si les parties ne sont pas parvenues à un accord, les opérations d’expertise reprendront,
Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 23 janvier 2025 à 11h30 pour contrôle du versement de la consignation,
Rappelle que sauf convocation spécifique à l’initiative du juge de la mise en état ou d’entretien avec ce dernier sollicité par les conseils, les audiences de mise en état se tiennent sans présence des conseils, par échange de messages électroniques via le RPVA ; que les éventuelles demandes d’entretien avec le juge de la mise en état doivent être adressées, par voie électronique, au plus tard la veille de l’audience à 12h00 en précisant leur objet, l’entretien se tenant alors le jour de l’audience susvisée à 11h00,
Réserve les dépens et les frais irrépétibles,
Faite et rendue à Paris le 19 Novembre 2024.
Le Greffier Le Juge de la mise en état
Christian GUINAND Diana SANTOS CHAVES
SERVICE DE LA RÉGIE
Tribunal Judiciaire de Paris, [Adresse 7],
[Localité 40]
Accueil ouvert du lundi au vendredi de 9h30 à 12h et de 13h à 16h
Atrium sud, 1er étage, à droite en sortant de l’ascenseur ou de l’escalier
Tel. : [XXXXXXXX06] – [XXXXXXXX03] / fax : [XXXXXXXX02]
[Courriel 48]
Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :
– virement bancaire : IBAN : [XXXXXXXXXX044] / BIC : [XXXXXXXXXX049]
en indiquant impérativement le libellé suivant : C7 “prénom et nom de la personne qui paye” pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + numéro de RG initial
– chèque : établi à l’ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)
– à défaut espèces : jusqu’à l.000,00€ maximum
Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courrier ou fax) ;
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