L’Essentiel : La société S.A. FRAIKIN France a assigné DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES pour récupérer un dépôt de garantie de 20 265,60 € suite à la fin d’un bail commercial. FRAIKIN soutient avoir effectué des travaux pour remettre les lieux en état, sans dégradations constatées lors de l’état des lieux de sortie. En revanche, DELAGNES conteste cette restitution, affirmant que des dégradations justifient des retenues sur le dépôt. Le tribunal a finalement condamné DELAGNES à verser 12 303,60 € à FRAIKIN, tout en rejetant sa demande de dommages et intérêts et en condamnant DELAGNES aux dépens.
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Contexte de l’affaireLa société S.A. FRAIKIN France a assigné la S.A.S. DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES pour obtenir la restitution d’un dépôt de garantie versé dans le cadre d’un bail commercial. Ce bail, conclu le 29 décembre 2009, a pris fin le 31 décembre 2019. La demande a été formulée par acte de commissaire de justice le 1er juillet 2022. Demandes de la société demanderesseFRAIKIN France réclame le paiement de 20 265,60 € sous astreinte, ainsi que des intérêts au taux légal depuis le 3 janvier 2022. Elle demande également une indemnisation de 5 000 € pour préjudice et frais de conseil. La société soutient que le dépôt de garantie doit être restitué, ayant réalisé des travaux pour remettre les lieux en état, sans que des dégradations soient constatées lors de l’état des lieux de sortie. Réponse de la société défenderesseDELAGNES LOCATIONS ET SERVICES conteste les demandes de FRAIKIN France et réclame 5 000 € pour ses propres frais de conseil. Elle affirme que les travaux déduits du dépôt de garantie sont justifiés par des dégradations constatées lors de l’état des lieux de sortie. État des lieux et obligations contractuellesIl est établi qu’aucun état des lieux n’a été dressé à l’entrée dans les lieux, ce qui implique que la locataire est présumée avoir reçu les locaux en bon état. La locataire a versé un dépôt de garantie de 24 745 € et a donné congé le 13 juin 2019. Les travaux réalisés par la locataire avant l’état des lieux de sortie n’ont pas été validés par la société bailleresse. Analyse des travaux contestésLe tribunal examine plusieurs postes de travaux contestés par la société défenderesse. Il conclut que certains travaux, comme la rénovation des peintures, sont à la charge de la locataire après neuf années d’occupation. D’autres travaux, comme le revêtement de sol, sont également jugés nécessaires, mais le montant réclamé est ajusté par le tribunal. Décision du tribunalLe tribunal condamne DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES à payer 12 303,60 € à FRAIKIN France, avec des intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022. La demande de dommages et intérêts de la société demanderesse est rejetée, et aucune astreinte n’est prononcée. La société défenderesse est également condamnée aux dépens et à verser 2 500 € pour les frais de conseil de la demanderesse. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la présomption de bon état des lieux selon l’article 1731 du Code civil ?L’article 1731 du Code civil stipule que « le preneur est présumé avoir reçu les lieux en bon état de réparation locative, lorsqu’il n’a pas été dressé d’état des lieux à son entrée ». Cette présomption implique que, en l’absence d’un état des lieux contradictoire, le locataire doit rendre les lieux dans un état similaire à celui dans lequel il les a reçus, sauf preuve du contraire. Ainsi, dans le cas présent, la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES, en tant que locataire, est tenue de rendre les lieux en bon état, même si des dégradations sont survenues durant la période de location. Il est donc essentiel pour le bailleur de prouver que les dégradations constatées lors de l’état des lieux de sortie sont dues à la négligence du locataire, afin de justifier les retenues sur le dépôt de garantie. Quelles sont les obligations du locataire en matière d’entretien selon le bail commercial ?La clause « Entretien » du bail commercial stipule que « la locataire devra notamment faire entretenir et remplacer, si besoin est, et quelle que soit la cause en ce compris la vétusté ou la force majeure, tout ce qui concerne les installations à son usage personnel ». Cela signifie que le locataire est responsable de l’entretien des lieux, y compris des réparations nécessaires dues à l’usure normale ou à des dégradations. Dans le cas présent, le tribunal a constaté que certaines dégradations, telles que les murs en mauvais état et les traces de salissure, sont à la charge de la locataire, même si elles résultent de la vétusté. Il est donc crucial pour le locataire de maintenir les lieux en bon état et de réaliser les travaux nécessaires avant la restitution des locaux. Comment se calcule le montant des réparations à la charge du locataire ?Le tribunal a retenu que le montant des réparations à la charge de la locataire doit être évalué en fonction de la nécessité des travaux et de leur coût raisonnable. Dans cette affaire, le tribunal a examiné les factures présentées par la société DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES et a déterminé que certaines réparations étaient justifiées, tandis que d’autres ne l’étaient pas. Par exemple, pour la rénovation des peintures, le tribunal a estimé que le coût de 48 E TTC par mètre carré était raisonnable, aboutissant à un montant total de 1 824 E TTC pour les murs à rénover. Il est donc essentiel que le bailleur prouve que les travaux sont nécessaires et que les coûts sont justifiés pour pouvoir les imputer au locataire. Quelles sont les conséquences de l’absence de notification des travaux à réaliser par le bailleur ?L’absence de notification des travaux à exécuter par le bailleur dans les 48 heures suivant la fin du bail n’entraîne pas nécessairement une déchéance de son droit à réclamer le prix des réparations. En effet, le tribunal a précisé que cette clause n’est pas assortie d’une sanction, ce qui signifie que le bailleur peut toujours demander le remboursement des travaux nécessaires, même en l’absence de notification. Cela souligne l’importance pour le bailleur de conserver des preuves des dégradations et des travaux réalisés, afin de justifier ses demandes de retenue sur le dépôt de garantie. Quels sont les critères pour accorder des dommages et intérêts dans le cadre d’un litige locatif ?Pour qu’une demande de dommages et intérêts soit acceptée, il est nécessaire de prouver l’existence d’un préjudice réel et direct résultant du comportement de l’autre partie. Dans cette affaire, le tribunal a débouté la société FRAIKIN France de sa demande de dommages et intérêts, en considérant qu’aucun préjudice complémentaire n’était démontré. Cela signifie que, même si des travaux ont été nécessaires, la société demanderesse n’a pas réussi à prouver que ces travaux avaient causé un préjudice financier ou moral supplémentaire. Il est donc crucial pour une partie qui souhaite obtenir des dommages et intérêts de fournir des preuves tangibles de son préjudice. |
JUGEMENT DU : 25 Novembre 2024
DOSSIER : N° RG 22/02903 – N° Portalis DBX4-W-B7G-RAFS
NAC : 30B
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOULOUSE
POLE CIVIL – Fil 8
JUGEMENT DU 25 Novembre 2024
PRESIDENT
Monsieur GUICHARD, Vice-Président
Statuant à juge unique conformément aux dispositions des
articles R 212-9 et 213-7 du Code de l’Organisation judiciaire
GREFFIER lors du prononcé
DEBATS
à l’audience publique du 23 Septembre 2024, les débats étant clos, le jugement a été mis en délibéré à l’audience de ce jour.
JUGEMENT
Contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe.
Copie revêtue de la formule
exécutoire délivrée
le
à
DEMANDERESSE
S.A. FRAIKIN FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocats au barreau de TOULOUSE, avocats postulant, vestiaire : 326, et Maîtres Djazia TIOURTITE et Virginie ESTEOULE du cabinet BIRD & BIRD AARPI, avocats plaidant au barreau de PARIS
DEFENDERESSE
S.A.S. DELAGNES LOCATIONS ET SERVICES, RCS Toulouse 320 462 716, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Philippe DUPUY de la SELARL DUPUY-PEENE, avocats au barreau de TOULOUSE, avocats plaidant/postulant, vestiaire : 114
Par acte de commissaire de justice du 1 juillet 2022, la société anonyme FRAIKIN France a fait assigner la SA DELAGNES LOCATION et SERVICES pour obtenir la restitution du dépôt de garantie qu’elle a versé en exécution d’un bail commercial conclu le 29 décembre 2009 et qui a pris fin le 31 décembre 2019.
Dans le dernier état de leurs écritures :
– La société demanderesse conclut à la condamnation de la société défenderesse à lui payer la somme de 20265.60 E sous astreinte et au débouté des demandes de celle-ci ; à titre subsidiaire, elle demande l’application d’un coefficient de vétusté de 50 % sur les peintures et la condamnation au reliquat sous astreinte et en tout état de cause les intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022, la somme de 5 000 E en réparation de son préjudice et la même somme pour les frais de conseil avec les dépens dont distraction et le rappel que l’exécution provisoire est de droit.
Elle fait valoir que le dépôt de garantie doit être restitué; qu’ensuite d’un pré-état des lieux elle a remis les lieux en état en réalisant des travaux pour la somme de 20 216.88 E ; que lors de l’état de sortie dressé par M° [O], il n’a été relevé aucune réparation à sa charge; que du dépôt initial de 24 745 E, il se déduit des travaux acceptés pour la somme de 1 304.40 E et la restitution partielle de 3 175 E ; que la société bailleresse n’établit pas que les travaux qu’elle impute aient été réalisés et qu’ils soient dus.
– La société défenderesse conclut au débouté des demandes et au paiement de la somme de 5 000 E pour ses frais de conseil.
Elle fait valoir que les travaux qu’elle décompte sont la conséquence des dégradations constatées dans l’état des lieux de sortie.
L’ordonnance de clôture a été prise le 23 novembre 2023.
Il est constant qu’à l’entrée dans les lieux, il n’a pas été dressé d’état des lieux en sorte que selon la clause du bail relative à cet état et l’article 1731 du code civil le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparation locative.
Il doit donc les rendre en cet état.
Il est constant que lors de la prise à bail à effet au 1 octobre 2010, la locataire a versé un dépôt de garantie de 24 745 E et que la bail a pris fin le 31 décembre 2019 à la suite d’un congé délivré à la requête de la locataire le 13 juin 2019.
Il n’est pas discuté qu’avant l’état des lieux de sortie, la locataire a fait réaliser des travaux, mais il ne résulte nullement des pièces produites l’existence d’un accord de la société bailleresse de donner quitus du fait de l’exécution de ces travaux.
La défenderesse décompte 7 postes de travaux dont 3 ne sont pas contestés (568.80 E, 420 E et 315.60 E).
Pour ce qui est des quatre autres :
La clause « Entretient » du bail stipule que “ la locataire devra notamment faire entretenir et remplacer, si besoin est, et quelle que soit la cause en ce compris la vétusté ou la force majeure, tout ce qui concerne les installations à son usage personnel (….) , ainsi que les fermetures et serrures des fenêtres, portes et volets, les glaces, vitres, parquets, carrelages, revêtements de sol et boiseries… ».
Cette clause dérogatoire est d’interprétation restrictive.
Le constat de sortie du 23 décembre 2019 dressé par M° [O] relève :
– Le mauvais état des murs du réfectoire :
La clause du bail « Entretien » ne met pas l’entretient des peintures en cas de vétusté à la charge de la locataire mais pour autant et après 9 années d’occupation, il n’est pas normal que les murs soient en mauvais état général avec des traces de noir et des rayures.
La rénovation des peintures est donc à la charge de la locataire.
La facture du 2 octobre 2020 porte sur la somme de 5 551 E HT.
Sa date d’envoi est indifférente, la question étant uniquement de savoir si les travaux étaient nécessaires et à la charge de la locataire à son départ des lieux.
En, outre s’il est vrai que la bailleresse n’a pas notifié à la locataire dans les 48 heures de la fin du bail les travaux à exécuter par lui-même, le non-respect de cette clause qui n’est pas assortie d’une sanction, n’emporte pas une déchéance du bailleur pour réclamer le prix des réparations.
Selon les écritures non contestées de la demanderesse, la pièce a une surface à rénover de 45 mètres carrés, ce qui exclue une rénovation de ce prix.
Le tribunal retient une somme de 48 E TTC du mètre carré, soit la somme de 2 160 E TTC.
– La fourniture et la pose d’un revêtement en PVC.
Le constat dans la pièce d’accueil indique que le sol est ancien et qu’l existe des traces d’usure et de décoloration sur les zones de passage. Pour le bureau atelier, il retient un bon état général mais avec une découpe central.
La clause « Entretient du bail » met et entretient à la charge de la locataire et de plus une découpe n’est pas liée à la vétusté.
La facture porte sur la somme de 7 434 E TTC.
Ainsi que la locataire le fait valoir, elle ne détaille en rien les surfaces et pièces à reprendre et d’après les photographies (non numérotées dans le corps du constat), il apparaît que la surface à reprendre peut être estimée à 50 mètres carrés à 48 E TTC du mètre carré, soit la somme de 2 400 E.
– La peinture des murs.
Le constat pour le local sanitaire indique des traces de salissure et de noircissure sur la toile de verre et des traces de marquage sur les zones murales.
La clause du bail « Entretien » ne met pas l’entretient des peintures en cas de vétusté à la charge de la locataire mais pour autant et après 9 années d’occupation, il n’est pas normal que les murs présentent des traces de noir et de marquage.
La rénovation des peintures est donc à la charge de la locataire.
La facture du 2 octobre 2020 porte sur la somme de 3 564 E HT.
Selon les écritures non contestées de la demanderesse, la pièce a une surface à rénover de 38 mètres carrés, ce qui exclue une rénovation de ce prix.
Le tribunal retient une somme de 48 E TTC du mètre carré, soit la somme de 1 824 E TTC.
– La remise en peinture des portes et le ragréage de la cuisine.
Selon le constat dans le réfectoire la porte présente des traces d’autocollant et des écaillures de peinture et au sol la peinture du carrelage est usagée sur les zones de passage.
L’entretien des portes et des sols est à la charge du locataire même en cas de vétusté selon la clause susdite du bail.
Les rénovations sont donc à la charge de la locataire.
La facture indique la somme de 1578 E qui par son montant correspond à l’étendue de la rénovation.
La somme est donc due.
En sorte que le montant des sommes à déduire est de 7 962 E.
Il revient donc à la société locataire après compensation la somme de 12 303.60 E(20265.6-7962).
Aucun préjudice complémentaire n’est démontré et la société demanderesse sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Aucune astreinte ne saurait être prononcée dès lors que l’obligation de payer n’est pas une obligation de faire.
Les intérêts au taux légal auront pour point de départ la mise en demeure.
La société défenderesse qui succombe principalement supportera les dépens et en équité la somme de 2 500 E au titre des frais de conseil.
Il est inutile de rappeler au dispositif que l’exécution provisoire est de droit.
Le tribunal statuant à juge unique, publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par décision mise à disposition au greffe.
CONDAMNE la société DELAGNES LOCATIONS et SERVICES à payer à la société FRAIKIN France la somme de 12 303.60 E avec les intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022.
DIT n’y avoir à prononcer une astreinte.
DEBOUTE la société FRAIKIN France de sa demande de dommages et intérêts.
CONDAMNE la société DELAGNES LOCATIONS et SERVICES aux dépens dont distraction au profit de la Selas CLAMENS CONSEIL et à payer la somme de 2 500 E sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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