Y compris si un devis de réalisation de vidéo promotionnelle comprend la mention « Musique libre de droits », le diffuseur / client reste entièrement responsable en cas d’atteinte aux droits du producteur de phonogrammes. Il appartient au diffuseur d’appeler en la cause son prestataire.
Aux termes de l’article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle, « Le producteur de phonogrammes est la personne, physique ou morale, qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son. L’autorisation du producteur de phonogrammes est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, l’échange ou le louage, ou communication au public de son phonogramme autres que celles mentionnées à l’article L. 214-1 ». En l’espèce, la circonstance que la vidéo litigieuse a été réalisée, sur commande de la commune, par un tiers, la société MADRAS PRODUCTION, à laquelle toute latitude aurait été laissée, notamment quant au choix de la musique, et qui a indiqué sur ses devis « Musiques libres de droits », ne peut suffire à exonérer la commune de sa responsabilité à l’égard de l’association WHY COMPAGNIE pour avoir communiqué au public des phonogrammes sans l’autorisation du producteur, au sens du CPI. La commune avait la faculté d’appeler la société MADRAS PRODUCTION en intervention forcée dans l’instance, ce qu’elle a omis de faire. Nos conseils : 1. Attention à bien vérifier la compétence territoriale du tribunal judiciaire saisi, notamment en cas de litige relevant de la propriété intellectuelle, pour éviter tout risque de contestation ultérieure. 2. Il est recommandé de s’assurer que toutes les parties impliquées dans un litige sont correctement identifiées et appelées en garantie si nécessaire, afin de prévenir toute difficulté liée à la responsabilité des tiers. 3. Il est conseillé de respecter les droits de propriété intellectuelle, notamment en obtenant les autorisations nécessaires avant toute utilisation de phonogrammes ou de tout autre contenu protégé, pour éviter tout litige ultérieur et préserver les droits des titulaires. |
→ Résumé de l’affaireL’association WHY COMPAGNIE a produit l’album « Motozot » de l’artiste [C] [G] et a découvert que la municipalité de [Localité 4] en Guyane exploitait des extraits de cet album dans une vidéo sans autorisation. Après des négociations infructueuses, l’association a assigné la commune en justice pour obtenir réparation. Le tribunal judiciaire de Paris a condamné la commune à payer 1 500 euros de dommages et intérêts, mais a rejeté la demande de dommages pour manquement aux obligations de loyauté et de bonne foi. La commune a interjeté appel de ce jugement. Une ordonnance sur incident a rejeté la demande de radiation de l’affaire et condamné l’association aux dépens. La commune demande en appel l’annulation du jugement et la condamnation de l’association à payer 2 000 euros. L’association n’a pas conclu au fond.
|
→ Les points essentielsMOTIFS DE LA DECISIONEn application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées. Sur le chef non contesté du jugementLe jugement déféré n’est pas contesté, et est donc définitif, en ce qu’il a débouté l’association WHY COMPAGNIE de sa demande indemnitaire au titre du manquement de la commune de [Localité 4] à des obligations de loyauté et de bonne foi. Sur la compétence du tribunal judiciaire de ParisLa commune de [Localité 4] estime que le tribunal judiciaire de Paris a retenu à tort sa compétence territoriale qui n’a pu être disputée contradictoirement ; qu’en effet, le litige, portant sur l’utilisation « des droits d’image d’un film », concerne le contentieux de la propriété intellectuelle qui, pour la zone Antilles-Guyane, relève de la compétence du tribunal judiciaire de Fort-de-France conformément aux dispositions de l’article D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire et du tableaux VI audit code auquel renvoie ledit article. Sur l’atteinte au droit voisin de producteur de phonogramme de l’association WHY COMPAGNIELa commune de [Localité 4] conteste toute faute commise au préjudice de l’association WHY COMPAGNIE. Elle fait valoir qu’elle s’est adressée à M. [I], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne MADRAS PRODUCTION, afin de réaliser une vidéo promotionnelle de trois minutes ; que ce dernier lui a adressé un devis concernant la réalisation d’une vidéo promotionnelle de trois minutes pour un montant de 1500 euros, le descriptif mentionnant expressément « Musiques libre de droits »; que le tribunal s’est fondé à tort sur le projet de transaction reconnaissant à l’association le droit d’obtenir une somme de 2 000 €, la commune n’ayant pas encore pris l’attache d’un conseil au moment de ce projet de transaction ; qu’en tout état de cause, la responsabilité de la commune de [Localité 4] ne peut être recherchée, s’agissant d’une vidéo qui a été réalisée entièrement par un tiers identifiable et identifié ; que la commune de [Localité 4] n’a pas réalisé ni produit la vidéo litigieuse et encore moins choisi les musiques qui y sont incorporées ; que la commune de [Localité 4] ne pouvait donc pas juridiquement être condamnée pour une faute qui ne lui incombait aucunement ; qu’il appartenait à l’association WHY COMPAGNIE d’attraire le réalisateur de la vidéo litigieuse et non pas son acheteur. Ceci étant exposé, aux termes de l’article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle, « Le producteur de phonogrammes est la personne, physique ou morale, qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son. L’autorisation du producteur de phonogrammes est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, l’échange ou le louage, ou communication au public de son phonogramme autres que celles mentionnées à l’article L. 214-1 ». Il n’est pas contesté que les trois titres invoqués ‘ « Lérol », « Grajé » et « Bolérot » issus de l’album « Motozot » de [C] [G] ‘ ont été utilisés dans une vidéo promotionnelle diffusée par la commune de [Localité 4] pour présenter son budget, ladite vidéo présentant au demeurant, à sa toute fin, comme le tribunal l’a constaté, des crédits mentionnant « [C] [G] ‘Lérol’ ; [C] [G] ‘Grajé’, [C] [G] ‘Bolérot’ ». Il n’est pas davantage contesté que l’association WHY COMPAGNIE a la qualité de producteur de phonogramme pour les trois titres invoqués. La circonstance que la vidéo litigieuse a été réalisée, sur commande de la commune, par un tiers, la société MADRAS PRODUCTION, à laquelle toute latitude aurait été laissée, notamment quant au choix de la musique, et qui a indiqué sur ses devis « Musiques libres de droits » (pièces communiquées par la commune de [Localité 4]), ne peut suffire à exonérer la commune de sa responsabilité à l’égard de l’association WHY COMPAGNIE pour avoir communiqué au public des phonogrammes sans l’autorisation du producteur, au sens de la disposition précitée. La commune avait la faculté d’appeler la société MADRAS PRODUCTION en intervention forcée dans la présente procédure afin de rechercher sa garantie, ce qu’elle n’a pas fait. La diffusion non autorisée des trois titres a nécessairement causé à l’association un préjudice. Le tribunal a procédé à une juste appréciation de ce préjudice en l’estimant à 1 500 €, en prenant en compte la faible diffusion de la vidéo dont l’objet est la présentation du budget d’une commune de moins de 5 000 habitants, le fait que les titres ont été utilisés en fond sonore et le commencement d’accord intervenu entre les parties avant le procès. Il sera ajouté que selon la demanderesse en première instance, les trois titres n’ont été utilisés que par extraits dans la vidéo. Le jugement sera donc confirmé, y compris en ce qu’il a dit que les intérêts au taux légal assortissant la condamnation courent à compter de la décision du tribunal, et non à compter d’une mise en demeure. Sur les dépens et frais irrépétiblesLa commune de [Localité 4], partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées. Les montants alloués dans cette affaire: – La commune de [Localité 4] est condamnée aux dépens d’appel
– La demande de la commune de [Localité 4] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile est rejetée |
→ Réglementation applicable– Code de procédure civile
– Code de l’organisation judiciaire – Code de la propriété intellectuelle Article 455 du code de procédure civile: Article D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire: Article 954 du code de procédure civile: Article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Sarah Clémence PAPOULAR de la SELARL RSDA
– Me Jean-David COHEN de l’AARPI JAD & ASSOCIES |