→ Résumé de l’affaireDans cette affaire, la société Le Splendid et M. [J] ont été condamnés solidairement à payer à la BRED Banque Populaire des sommes d’argent en application de l’article 700 du code de procédure civile. M. [J] a également été condamné à payer des frais supplémentaires.
Concernant le solde débiteur du compte courant professionnel, le tribunal a confirmé que la dette du Splendid n’était pas éteinte malgré une provision comptable pour pertes sur créances irrécouvrables. En ce qui concerne le prêt cautionné, M. [J] a tenté d’invoquer le bénéfice de subrogation en raison de la vente du fonds de commerce du Splendid, mais sa demande a été rejetée faute de preuves de préjudice. Enfin, l’appel en garantie formulé par M. [J] contre le Splendid a été jugé irrecevable car il s’agissait d’une demande nouvelle en cause d’appel. M. [J] a été condamné à payer des dépens et des frais irrépétibles à la BRED Banque Populaire. |
→ Les points essentielsLes montants alloués dans cette affaire:
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→ Réglementation applicable |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier:
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→ Mots clefs associés & définitions |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/17919
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 22 MAI 2024
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/17919 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGSJW
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Septembre 2022 – tribunal de commerce de Paris – 7ème chambre – RG n° 2021038955
APPELANT
Monsieur [R] [J]
né le [Date naissance 4] 1984 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représenté par Me Layachi BOUDER de l’ASSOCIATION BOUDER HASSANE, avocat au barreau de Paris, toque : R082
INTIMÉES
Ste Coopérative banque Pop. BRED BANQUE POPULAIRE
[Adresse 3]
[Localité 5]
N°SIRET : 552 091 795
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Carina COELHO, avocat au barreau de Paris, toque : E0694, avocat plaidant
S.A.R.L. LE SPLENDID
[Adresse 1]
[Localité 5]
N°SIRET : 805 204 302
représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
non constituée (signification de la déclaration d’appel en date du 30 janvier 2023 – procès-verbal de remise à l’étude en date du 30 janvier 2023)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Vincent BRAUD, président.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Vincent BRAUD, président
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère
MME Laurence CHAINTRON, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
– par défaut
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Vincent BRAUD, président, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
La société L’Oranger devenue Le Splendid, par changement de dénomination sociale en assemblée générale du 1er juin 2017, exerce une activité de bar brasserie. [R] [J] en a été le gérant depuis sa constitution jusqu’au 28 août 2018.
La BRED Banque populaire a ouvert à l’Oranger un compte courant professionnel le 6 octobre 2014.
Le 9 octobre 2014, la BRED Banque populaire a octroyé un prêt no 06255853 d’un montant de 100 000 euros, d’une durée de 108 mois et remboursable en 84 mensualités de 1 332,17 euros hors assurance, au taux de 3,24 % l’an, prêt destiné à l’acquisition d’un fonds de commerce de bar-brasserie restaurant, garanti par le cautionnement solidaire de [R] [J] à hauteur de 25 000 euros, incluant le principal, les intérêts, et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard du prêt.
Par acte sous seing privé du 1er juillet 2018, la société à responsabilité limitée Le Splendid a vendu à la société à responsabilité limitée La Renaissance le fonds de commerce de bar, brasserie, restauration au prix stipulé de 56 000 euros dans les conditions prévues aux articles L. 141-12 et suivants du code de commerce.
À partir de décembre 2018 et pendant quatre mensualités, le Splendid n’a pas honoré ses échéances.
Par lettre recommandée du 25 mars 2019, doublée d’une lettre simple, retournée avec la mention « Destinataire inconnu à l’adresse », la BRED Banque populaire a mis en demeure le Splendid de payer 48 337,03 euros sous quinzaine.
Par lettre recommandée du 25 mars 2019, doublée d’une lettre simple, revenue avec la mention « Défaut d’accès ou d’adressage », la BRED Banque populaire a mis en demeure [R] [J] de procéder au règlement de la somme de 25 000 euros au titre de son engagement de caution relatif au prêt no 06255853.
De nouvelles mises en demeure furent adressées par la BRED Banque populaire au Splendid le 1er avril 2021 ainsi qu’à [R] [J] au titre de son engagement de caution. Ces mises en demeure sont restées vaines.
Par exploits en date du 8 juillet 2021 et du 19 juillet 2021, la BRED Banque populaire a assigné le Splendid et [R] [J] devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement réputé contradictoire en date du 21 septembre 2022, le tribunal de commerce de Paris a :
‘ Débouté la société Le Splendid et [R] [J] de l’ensemble de leurs demandes ;
‘ Condamné la société Le Splendid à payer à la BRED Banque populaire la somme de 1 350,51 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2021 jusqu’à parfait paiement ;
‘ Condamné solidairement la société Le Splendid et [R] [J], celui-ci au titre de son engagement de caution et dans la limite de 25 000 euros, à payer à la BRED Banque populaire la somme de 54 308,51 euros avec intérêts de 6,24 % à compter du 19 avril 2021 jusqu’à parfait paiement ;
‘ Ordonné la capitalisation des intérêts pour ceux échus depuis une année entière au moins ;
‘ Condamné in solidum la société Le Splendid et [R] [J] aux entiers dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 90,93 euros dont 14,94 euros de taxe sur la valeur ajoutée ;
‘ Condamné in solidum la société Le Splendid et [R] [J] à payer à la BRED Banque populaire la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
‘ Rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour le présent jugement.
Par déclaration du 18 octobre 2022, [R] [J] a interjeté appel du jugement contre la BRED Banque populaire et le Splendid.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 30 décembre 2022, [R] [J] demande à la cour de :
INFIRMER LE JUGEMENT ENTREPRIS,
EN CONSEQUENCE,
DÉCLARER la BRED BANQUE POPULAIRE SA irrecevable et en tous cas mal fondée en toutes ses demandes ;
La CONDAMNER au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
A TITRE SUBSIDIAIRE,
CONDAMNER la société LE SPLENDID à relever et garantir M. [J] de toutes condamnations mises à sa charge au profit de la BRED,
CONDAMNER la société LE SPLENDID au paiement de la somme de 20.000 €uros à titre de dommages et intérêts ainsi qu’à celle de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de M. [R] [J].
CONDAMNER la société LE SPLENDID et la BRED aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 22 février 2023, la société anonyme coopérative de banque populaire BRED Banque populaire demande à la cour de :
– RECEVOIR la BRED BANQUE POPULAIRE en ses demandes et les déclarer recevables et bien fondées,
– DEBOUTER Monsieur [R] [J] et la SARL LE SPLENDID de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 21 septembre 2022 en toutes ses dispositions et ainsi en ce qu’il :
‘ Déboute la société Le Splendid et [R] [J] de l’ensemble de leurs demandes ;
‘ Condamne la société Le Splendid à payer à la BRED Banque populaire la somme de 1 350,51 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 avril 2021 jusqu’à parfait paiement ;
‘ Condamne solidairement la société Le Splendid et [R] [J], celui-ci au titre de son engagement de caution et dans la limite de 25 000 euros, à payer à la BRED Banque populaire la somme de 54 308,51 euros avec intérêts de 6,24 % à compter du 19 avril 2021 jusqu’à parfait paiement ;
‘ Ordonne la capitalisation des intérêts pour ceux échus depuis une année entière au moins ;
‘ Condamne in solidum la société Le Splendid et [R] [J] aux entiers dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 90,93 euros dont 14,94 euros de taxe sur la valeur ajoutée ;
‘ Rappelle que l’exécution provisoire est de droit pour le présentjugement ;
Y ajoutant,
– CONDAMNER Monsieur [J] à payer à la BRED BANQUE POPULAIRE la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– CONDAMNER Monsieur [J] aux entiers dépens de l’instance et de ses suites.
La déclaration d’appel a été signifiée le 30 janvier 2023 en l’étude à la société Le Splendid, qui n’a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 février 2024 et l’audience fixée au 28 mars 2024.
CELA EXPOSÉ,
Sur le solde débiteur :
[R] [J] soutient que la dette du Splendid au titre du solde débiteur de son compte courant professionnel est éteinte par sa déductibilité comptablement constatée par la constitution au profit de la société BRED Banque populaire d’une provision pour pertes sur créances irrécouvrables.
La société BRED Banque populaire estime en premier lieu que [R] [J] est irrecevable dans sa demande d’irrecevabilité, parce que la demande de la banque au titre du solde débiteur est formulée contre la société Le Splendid. Elle objecte en second lieu que le transfert en interne de la créance litigieuse sur un compte contentieux en vue de son recouvrement n’est ni une provision comptable, ni un abandon de créance.
[R] [J] est en effet dépourvu d’intérêt à défendre à la demande en payement du solde débiteur dirigée contre la seule société Le Splendid, dont il ne s’est pas porté caution à ce titre.
En outre, le tribunal ne peut qu’être approuvé en ce qu’il a considéré que le transfert en interne, par la banque, sur un compte contentieux de la créance litigieuse que constitue le solde débiteur du compte courant du Splendid, n’a pas pour effet d’éteindre ladite créance, ni ne vaut abandon de celle-ci. Le jugement querellé sera donc confirmé en ce qu’il déboute [R] [J] de ce chef de demande.
Sur le prêt :
[R] [J] fait valoir que le fonds de commerce du Splendid était grevé de deux inscriptions du 17 novembre 2014 au profit de la société BRED Banque populaire (sa pièce no 2 : état des privilèges) ; que la vente du fonds a été publiée le 16 août 2018 dans un journal d’annonces légales et le 11 octobre suivant au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ; que le créancier négligent en opposition de la distribution du prix de cession du fonds de commerce entre les mains du séquestre conventionnel s’est privé de toute possibilité de recouvrement et de droit de suite.
La société BRED Banque populaire objecte que, pour invoquer le bénéfice de subrogation, la caution doit avoir subi un préjudice résultant de la perte du droit par le créancier ; que le droit perdu doit constituer un avantage effectif qui aurait permis à la caution d’être plus facilement remboursée par le débiteur ; que cette preuve n’est pas rapportée par [R] [J] qui ne produit pas le décompte de distribution du prix de cession établi par le séquestre.
Aux termes de l’article 2314 du code civil dans sa rédaction applicable à l’espèce, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de la caution. Toute clause contraire est réputée non écrite.
La société BRED Banque populaire admet qu’elle n’a pas formé opposition au payement du prix de cession du fonds de commerce financé par le prêt cautionné.
Toutefois, s’il est constaté que le manquement imputé à faute au créancier n’a causé aucun préjudice à la caution, celle-ci ne peut revendiquer le bénéfice de l’article 2314 précité (1re Civ., 24 oct. 2006, no 05-18.698). Il convient donc de rechercher si [R] [J] aurait pu retirer un profit effectif des droits susceptibles de lui être transmis (1re Civ., 25 juin 1980, no 79-11.591).
Or, l’appelant se contente d’affirmer que la société BRED Banque populaire aurait pu aisément recouvrer sa créance, sans verser aux débats le décompte de distribution du prix de cession établi par le séquestre, qui permettrait de démontrer le préjudice allégué. [R] [J] n’est donc pas fondé à invoquer le bénéfice de subrogation, étant au surplus ajouté qu’en vertu de l’article L. 143-12, alinéa premier, du code de commerce dans sa rédaction applicable à l’espèce, les privilèges du vendeur et du créancier gagiste suivent le fonds en quelques mains qu’il passe.
Le jugement querellé, qui n’est pas autrement critiqué, mérite donc pleine confirmation en ce qu’il déboute [R] [J] de sa demande d’irrecevabilité de ce chef, et en ce qu’il le condamne en sa qualité de caution de la société Le Splendid.
Sur l’appel en garantie :
Aux termes de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
La société BRED Banque populaire observe au regard de ce texte que l’appel en garantie formulé par [R] [J] contre le Splendid est une demande nouvelle en cause d’appel.
Aux termes de l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Aux termes de l’article 566 du même code, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Aux termes de l’article 567 du même code, les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.
La demande formée en appel par une partie contre ses codéfendeurs en première instance, alors que ceux-ci n’avaient élevé aucune prétention contre elle, n’est pas une demande reconventionnelle (3e Civ., 3 déc. 2008, no 07-16.748).
[R] [J] demande à titre subsidiaire la condamnation de la société Le Splendid à le relever et garantir de toutes condamnations mises à sa charge au profit de la société BRED Banque populaire.
Cette demande n’a pas été formulée en première instance par [R] [J] qui ne concluait qu’au rejet des prétentions de la société BRED Banque populaire ; elle ne tend pas aux mêmes fins. Il s’en déduit que cette prétention est nouvelle comme formée pour la première fois en appel.
La demande de garantie n’est pas l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la prétention soumise par [R] [J] aux premiers juges qui tendait à déclarer la société BRED Banque populaire irrecevable et en tous cas mal fondée en toutes ses demandes.
Elle ne constitue pas une demande reconventionnelle puisqu’elle est dirigée contre son codéfendeur en première instance, alors que le Splendid n’avait élevé aucune prétention contre lui.
[R] [J] est donc, au regard des articles 564 à 567 précités, irrecevable en sa demande de garantie.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelant en supportera donc la charge.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1o À l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2o Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.
La somme allouée au titre du secundo ne peut être inférieure à la part contributive de l’État majorée de 50 %.
Sur ce fondement, [R] [J] sera condamné à payer à la société BRED Banque populaire la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
LA COUR,
CONFIRME le jugement ;
Y ajoutant,
DÉCLARE [R] [J] irrecevable en sa demande subsidiaire tendant à voir condamner la société Le Splendid à le relever et garantir de toutes condamnations mises à sa charge au profit de la société BRED Banque populaire ;
CONDAMNE [R] [J] à payer à la société BRED Banque populaire la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [R] [J] aux entiers dépens.
* * * * *
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT