Une rétrogradation du salarié associée à une surcharge de travail résultant d’un défaut d’organisation imputable à l’employeur, est un indice sérieux de harcèlement moral.
Mme [B] [N] a été employée par la Société ISS Facility Services en tant que chef d’équipe polyvalente à partir du 30 juin 2020, puis promue chef de site en juillet 2021. Elle a été en arrêt de travail à partir de novembre 2021 et a pris acte de la rupture de son contrat de travail en janvier 2022, invoquant un harcèlement moral et des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité.
Elle a saisi le conseil des prud’hommes pour faire reconnaître la rupture comme un licenciement nul et obtenir des indemnités pour harcèlement moral, violation des durées de travail, et travail dissimulé. Le conseil des prud’hommes a requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, accordant diverses indemnités à Mme [B] [N], mais a rejeté certaines de ses demandes.
Mme [B] [N] et la Société ISS Facility Services ont tous deux fait appel de cette décision. Mme [B] [N] demande à la cour d’appel de requalifier la prise d’acte en licenciement nul et d’augmenter les indemnités accordées, tandis que la société demande l’annulation des condamnations et de débouter Mme [B] [N] de toutes ses demandes.
L’audience en appel est prévue pour le 23 novembre 2023, avec une décision attendue pour le 7 mars 2024.
– Indemnité légale de licenciement: 1237,06 € nets
– Indemnité compensatrice de préavis: 4948,26 € brut
– Indemnité de congés payés afférents: 494,82 €
– Article 700 du Code de Procédure Civile (première instance): 800 €
– Rappel de salaire: 3516,08 €
– Dommages et intérêts pour harcèlement moral: 4000 €
– Indemnité pour travail dissimulé: 29268,78 € nets
– Indemnité pour licenciement nul: 29268,78 € nets
– Article 700 du Code de Procédure Civile (appel): 1500 €
– Dépens de l’appel: Montant non spécifié, mais à la charge de la société ISS Facility Services
Réglementation applicable
L’article L. 1152-1 du code du travail dispose qu’Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’employeur doit veiller à ce que ses salariés n’adoptent pas des agissements de harcèlement moral et doit prendre toutes dispositions pour prévenir ou faire cesser ce type de comportement.
En application de l’article L. 1154-1 du code du travail cas de litige, il appartient d’abord au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ; que l’employeur doit ensuite prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à tout harcèlement.
Les méthodes de gestion dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible notamment de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, ou d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel peuvent caractériser un harcèlement moral.
Le juge doit considérer les faits pris dans leur ensemble pour apprécier s’ils permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.
L’article L. 1152-2 du même code prévoit notamment qu’aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
En application de l’article L. 1152-3 du même code, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Laurent CLEMENT-CUZIN
Mots clefs associés
– Rappel de salaire
– Promotion
– Principe « à travail égal, salaire égal »
– Code du travail
– Egalité de rémunération
– Poste de responsable de contrat
– Courriels professionnels
– Avenant
– Période probatoire
– Principe de preuve
– Poste occupé
– Fonctions effectives
– Harcèlement moral
– Obligation de sécurité
– Surcharge de travail
– Manque de moyens humains et matériels
– Accidents du travail
– Modification unilatérale du contrat de travail
– Rétrogradation
– Obligation de l’employeur
– Durée maximale de travail
– Durée minimale du repos quotidien
– Durées maximales de travail
– Médecin du travail
– Syndrome d’épuisement professionnel
– Traitement médicamenteux
– Préjudices physiques et mentaux
– Prise d’acte
– Licenciement nul
– Licenciement sans cause réelle et sérieuse
– Indemnités
– Travail dissimulé
– Heures supplémentaires
– Bulletin de paie
– Indemnité forfaitaire
– Demandes accessoires
– Frais irrépétibles
– Dépens
– Article 700 du code de procédure civile
– Rappel de salaire : Somme versée au salarié pour compenser une sous-rémunération antérieure, souvent due à une erreur ou à un oubli.
– Promotion : Élévation d’un salarié à un poste de responsabilité supérieure, souvent accompagnée d’une augmentation de salaire.
– Principe « à travail égal, salaire égal » : Obligation légale selon laquelle les salariés effectuant un travail équivalent doivent recevoir une rémunération égale.
– Code du travail : Ensemble des normes législatives et réglementaires régissant les relations entre employeurs et salariés.
– Égalité de rémunération : Principe selon lequel les employés doivent être payés de manière égale pour un travail de valeur égale, sans discrimination.
– Poste de responsable de contrat : Fonction occupée par une personne chargée de la gestion et de l’exécution des termes d’un contrat.
– Courriels professionnels : Communications électroniques échangées dans un contexte professionnel.
– Avenant : Document modifiant les termes d’un contrat initial.
– Période probatoire : Durée pendant laquelle un nouvel employé est évalué pour déterminer s’il convient au poste.
– Principe de preuve : Règle selon laquelle celui qui avance un fait doit en apporter la preuve.
– Poste occupé : Fonction actuellement exercée par un salarié au sein d’une organisation.
– Fonctions effectives : Tâches réellement exécutées par un employé, parfois différentes de celles décrites dans son contrat.
– Harcèlement moral : Comportement abusif répété visant à dégrader les conditions de travail d’une personne.
– Obligation de sécurité : Devoir de l’employeur de garantir la sécurité et la santé de ses employés au travail.
– Surcharge de travail : Situation où un employé doit accomplir un volume de travail excessif, souvent au détriment de sa santé.
– Manque de moyens humains et matériels : Insuffisance des ressources nécessaires pour accomplir correctement le travail.
– Accidents du travail : Incidents survenant dans le cadre professionnel et causant des dommages physiques ou mentaux.
– Modification unilatérale du contrat de travail : Changement des termes du contrat par l’employeur sans l’accord du salarié.
– Rétrogradation : Action de rétrograder un employé, souvent avec une diminution de responsabilités et de salaire.
– Obligation de l’employeur : Ensemble des devoirs que l’employeur doit respecter envers ses employés.
– Durée maximale de travail : Limite légale du nombre d’heures qu’un employé peut travailler par jour ou par semaine.
– Durée minimale du repos quotidien : Temps minimum de repos que doit avoir un salarié entre deux journées de travail.
– Durées maximales de travail : Plafonds légaux sur le temps de travail autorisé sur différentes périodes.
– Médecin du travail : Professionnel de santé spécialisé dans la prévention des risques professionnels et la protection de la santé au travail.
– Syndrome d’épuisement professionnel : État de fatigue extrême causé par une surcharge de travail prolongée, aussi appelé burnout.
– Traitement médicamenteux : Utilisation de médicaments pour traiter une maladie ou un symptôme.
– Préjudices physiques et mentaux : Dommages causés à la santé physique ou mentale d’une personne.
– Prise d’acte : Rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en raison de manquements graves de l’employeur.
– Licenciement nul : Licenciement jugé sans effet légal en raison de son caractère discriminatoire ou d’autres violations graves.
– Licenciement sans cause réelle et sérieuse : Licenciement pour lequel l’employeur ne peut justifier d’une raison valable.
– Indemnités : Sommes versées à un salarié en compensation de certains préjudices ou à la suite d’une rupture de contrat.
– Travail dissimulé : Emploi non déclaré à l’administration, souvent pour éviter le paiement de charges sociales.
– Heures supplémentaires : Heures travaillées au-delà de la durée légale ou conventionnelle du travail.
– Bulletin de paie : Document détaillant le salaire, les déductions et les heures travaillées d’un employé.
– Indemnité forfaitaire : Somme fixe versée pour couvrir certains frais ou dommages.
– Demandes accessoires : Réclamations supplémentaires faites dans le cadre d’une procédure judiciaire.
– Frais irrépétibles : Frais de justice non susceptibles d’être remboursés par la partie adverse.
– Dépens : Frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire et pouvant être récupérés auprès de la partie perdante.
– Article 700 du code de procédure civile : Disposition permettant à une partie de demander à l’autre le remboursement des frais non compris dans les dépens.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 07 MARS 2024
N° RG 22/01791 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HDJA
[B] [N]
C/ Société ISS FACILITY SERVICES
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ALBERTVILLE en date du 22 Septembre 2022, RG F 22/00020
Appelante
Mme [B] [N]
née le 25 Juin 1991 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 2]
Représentée par Mme [D] [L] (Délégué syndical ouvrier)
Intimée
Société ISS FACILITY SERVICES,
demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Laurent CLEMENT-CUZIN de la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 23 novembre 2023 par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente de la Chambre Sociale, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Cyril GUYAT, conseiller, assisté de Monsieur Bertrand ASSAILLY, greffier, à l’appel des causes, dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré.
Et lors du délibéré par :
Madame Valéry CHARBONNIER, Président,
Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller
Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,
Exposé des faits, de la procédure et des prétentions
Mme [B] [N] a été engagé par la Société Iss Facility services en qualité de chef d’équipe polyvalente par contrat à durée indéterminée en date du 30 juin 2020.
La convention collective des entreprises de propreté et services associés est applicable.
La salariée a été promue au poste de chef de site en juillet 2021.
Mme [B] [N] a été placée en arrêt de travail à compter de novembre 2021.
Elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 22 janvier 2022.
Mme [B] [N] a saisi le conseil des prud’hommes d’Albertville en date du 24 février 2022 aux fins de voir notamment juger qu’elle a subi un harcèlement moral, que l’employeur n’a pas respecté son obligation de sécurité, que la prise d’acte doit produire les effets d’un licenciement nul, que l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé, et de se voir allouer diverses indemnités à ces titres.
Par jugement du’22 septembre 2022, le conseil de prud’hommes d’Albertville, a’:
– Fixé le salaire moyen de référence d'[B] [N] à 4.948,26 €,
– Requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– Condamné la Société ISS Facility Services au paiement des sommes suivantes :
* 9896,52 € nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 1237,06 € nets à titre d’indemnité légale de licenciement
* 4948,26 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 494,82 € d’indemnité de congés payés afférents
* 4000 € nets à titre d’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par la violation des durées maximales de travail et des manquements a l’obligation de sécurité
* 800 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
– Débouté [B] [N] du surplus de ses prétentions
– Débouté la Société ISS Facility Services de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour toute créance à caractère salarial dans la limite de neuf mois de salaire et pour tout document que l’employeur est légalement tenu de délivrer,
– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire totale,
– Condamné la Société ISS Facility Services aux entiers dépens.
Mme [B] [N] a interjeté appel de cette décision par le Réseau privé virtuel des avocats le 17 octobre 2022. La Société ISS Facility Services a formé appel incident.
Par dernières conclusions notifiées le 17 octobre 2022, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, Mme [B] [N] demande à la cour de:
– Réformer le jugement rendu en ce qu’il’a:
* Requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse
* Condamné la société ISS Facility Services au paiement de 9.896,52 € nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* Condamné la société ISS Facility Services au paiement de 1.237,06 € nets à titre d’indemnité légale de licenciement
* Condamné la société ISS Facility Services au paiement de 4.948,26 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 494,82 € d’indemnité de congés payés afférents
* Condamné la société ISS Facility Services au paiement de 4.000 € nets à titre d’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par la violation des durées maximales de travail et des manquements a l’obligation de sécurité
* Débouté [B] [N] du surplus de ses prétentions
*Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire totale.
Statuer à nouveau pour’:
– Juger ses demandes recevables et bien fondées’;
– Débouter la société ISS Facility Services de l’ensemble de ses demandes’;
– Condamner la société ISS Facility Services à lui payer’:
* A titre principal’une indemnité de 29689,56 euros au titre de la requalification de la prise d’acte en licenciement nul, 1237,06 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement, 4948,26 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, et 494,82 euros d’indemnité de congés payés y afférents.
* A titre subsidiaire une indemnité de 9896,52 euros au titre de la requalification de la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1237,06 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement, 4948,26 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, et 494,82 euros d’indemnité de congés payés y afférents.
– Condamner la société ISS Facility Services à lui payer :
* A titre principal une indemnité de 19793,03 euros au titre de l’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par le harcèlement moral
* A titre subsidiaire’une indemnité de 9896,52 euros au titre de l’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par la violation des durées maximales de travail, une indemnité de 9896,52 euros au titre de l’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par les manquements à l’obligation de sécurité.
* En tout état de cause une somme de 3516,08 euros à titre de rappel de salaire sur la base de la rémunération du poste de responsable de contrat.
– Condamner la société ISS Facility Services à lui payer une indemnité forfaitaire de travail dissimulé de 29689,56 euros.
– Condamner la société ISS Facility Services à lui payer une somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamner la société ISS Facility Services aux entiers dépens de l’instance et d’exécution, dont notamment les éventuels droits proportionnels de recouvrement’;
– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir dans l’intégralité de ses dispositions, en application de l’article 515 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 13 janvier 2023, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, la société ISS Facility Services demande à la cour de:
– Réformer le jugement du Conseil de Prud’hommes d’Albertville du 22 septembre 2022 en ce qu’il a :
* Requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* Condamné la Société ISS Facility Services au paiement des sommes suivantes :
– 9896,52 € nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1237,06 € nets à titre d’indemnité légale de licenciement,
– 4948,26 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 494,82 € d’indemnité de congés payés afférents,
– 4000 € nets à titre d’indemnité en réparation du préjudice distinct causé par la violation des durées maximales de travail et des manquements a l’obligation de sécurité,
– 800 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ,
* Débouté la Société ISS Facility Services de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* Condamné la Société ISS Facility Services aux entiers dépens,
– Confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes d’Albertville du 22 septembre 2022 en ce qu’il a :
* Débouté [B] [N] du surplus de ses prétentions,
Statuant à nouveau :
– Débouter Madame [B] [N] de l’intégralité de ses demandes,
– Condamner Mme [B] [N] à payer à la société ISS Facility Services la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [B] [N] aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2023. L’audience a été fixée au 23 novembre 2023. A l’issue, la décision a été mise en délibéré au 1er février 2024, délibéré prorogé au 7 mars 2024.
Motifs de la décision
Sur la demande de rappel de salaire
– Moyens
La salariée soutient qu’elle a été promue à compter du 1er octobre 2021 au poste de responsable de contrat’; qu’elle apparaît en tant que telle sur la présentation Powerpoint du comité de pilotage du site d’Ugitech’; que des courriels professionnels démontrent qu’elle avait pris ses nouvelles fonctions’; qu’elle n’a cependant ni signé d’avenant ni perçu d’augmentation de sa rémunération’; qu’aucune période probatoire n’avait été convenue entre les parties, de sorte que ce poste lui était définitivement attribué. Elle est donc en droit de solliciter un rappel de salaire sur la base de la rémunération que percevait son prédécesseur sur ce poste, en application du principe «’à travail égal, salaire égal’».
L’employeur soutient pour sa part que si une possibilité de promotion au poste de responsable de contrat a été évoquée avec la salariée, ce poste a finalement été pourvu durant son arrêt maladie, faute de visibilité quant à sa date de reprise du travail.
– Sur ce
Il résulte du principe ‘à travail égal, salaire égal’, dont s’inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9, L.2271-1.8° et L.3221-2 du code du travail, que l’employeur a l’obligation d’assurer une égalité de rémunération entre les salariés placés dans une situation identique effectuant un même travail ou un travail de valeur égale sauf à justifier de la disparité de salaire existante par des critères objectifs et étrangers à toute discrimination.
Sont considérés comme ayant une valeur égale par l’article L.3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, d capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.
En application de l’article 1315 du code civil, s’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe ‘à travail égal, salaire égal’ de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
Le poste occupé par un salarié s’apprécie en considération des fonctions qu’il remplit effectivement au sein de l’entreprise.
En l’espèce, la salariée produit un «’Powerpoint’» de l’entreprise daté du 8 octobre 2021 au sein duquel elle apparaît dans l’organigramme en tant que «’responsable contrat’», avec sous ses ordres notamment trois chefs d’équipe. Elle apparaît dans ce document en tant que «’directeur de contrat « »à compter du 1er septembre 2021, prenant la succession de M. [V].
Elle produit également plusieurs courriels qu’elle a envoyés en octobre et novembre 2021 notamment à son supérieur hiérarchique M. [J] et à la responsable des ressources humaines Mme [W], qu’elle signe «’responsable contrat ISS Ugitech’».
Elle produit enfin une attestation de M. [O], qui était son subordonné, qui indique que la salariée a été promu responsable de contrat début octobre 2021 «’devant toute l’équipe par le directeur organisationnel d’ISS’».
Elle verse enfin aux débats un échange de courriels entre elle et Mme [W] aux termes duquel elle rappelle à cette dernière qu’elle a été officiellement annoncée sur le poste de responsable de contrat début octobre 2021, et la responsable des ressources humaines lui répond dans un courriel du 28 décembre 2021 que le poste de responsable de contrat ne lui «’avait pas été définitivement attribué’».
Il résulte de l’analyse de ces éléments que la salariée démontre qu’elle remplissait effectivement à compter du mois d’octobre 2021 les fonctions de responsable de contrat en remplacement de M. [V].
Il ressort des propres écritures de l’employeur ainsi que des courriels produits (Mme [W] responsable des ressources humaines indique dans un courriel du 4 janvier 2022 que le poste de responsable de contrat aurait constitué pour la salariée une «’promotion’»), que ce poste de responsable de contrat constituait pour la salariée une promotion.
L’employeur, seul détenteur des pièces de nature à remettre en cause l’allégation de la salariée selon laquelle M. [V], son prédécesseur dans ces fonctions, percevait un salaire horaire de 21,50 euros brut, ne conteste aucunement ce point, tout comme il ne conteste pas le fait que la salariée effectuait le même travail que celui-ci.
Au regard de ces éléments, la décision sur ce point du conseil de prud’hommes sera infirmée.
Les demandes de la salariée au titre du rappel de salaire sur une base de salaire horaire de 21,50 euros au lieu de 17,15 euros pour les mois d’octobre et novembre 2021 et janvier 2022 apparaissent, au regard des fiches de paye produites aux débats, fondées dans leur montant, de sorte qu’il y sera fait droit.
Sur le harcèlement moral et le manquement à l’obligation de sécurité
– Moyens
Mme [B] [N]soutient ainsi avoir subi un harcèlement moral se traduisant par une surcharge de travail, un manque de moyens humains et matériels engendrant la survenance d’accidents du travail et la modification unilatérale de son contrat de travail ayant conduit à une rétrogradation de son poste.
Elle expose à ce titre qu’elle a effectué de nombreuses heures supplémentaires tout au long de la durée de son contrat, comme le démontrent les relevés d’heures qu’elle a tenus’; que l’employeur a violé la durée maximale de travail hebdomadaire, la durée maximale légale de travail quotidien, la durée minimale du repos quotidien ainsi que les règles relatives aux durées maximales de travail sur une période d’un peu plus d’un an’; qu’elle a alerté son employeur des heures travaillées et des manipulations comptables effectuées, mais que celui-ci n’a apporté aucune réponse’; que le médecin du travail avait également alerté l’employeur sur ses conditions de travail’; qu’elle a été soumise à une surcharge de travail’; qu’elle a été contrainte de travailler dans des conditions de sécurité inadmissibles notamment avec du matériel abîmé, ancien et dangereux bien qu’elle ait prévenu son employeur des problèmes matériels et humains rencontrés’; qu’elle a été victime de deux accidents de travail’; que durant son arrêt maladie, elle a constaté que des offres de recrutement sur son poste de responsable de contrat étaient diffusées en ligne’; qu’elle a été rétrogradée à son ancien poste à son retour d’arrêt maladie.
A titre subsidiaire, elle conclut qu’il résulte de ces éléments que l’employeur a également violé son obligation de sécurité à son égard et n’a pas respecté les règles relatives à la durée maximale du travail, ce qui lui a cause des préjudices distincts. Elle a été victime d’un syndrome d’épuisement professionnel, a dû suivre un traitement médicamenteux et a présenté des troubles physiques comme des nausées, des vomissements, des perturbations de l’humeur et des idées noires.
Elle soutient avoir subi, du fait du harcèlement moral dont elle a été victime, subsidiairement du fait de la violation des règles sur la durée maximale du travail et des manquements à l’obligation de sécurité un préjudice distinct de celui de la perte de son emploi.
La Société ISS Facility Services soutient pour sa part que le volume important d’heures de travail effectuées par la salariée n’a concerné que des périodes ponctuelles, soit 10 semaines entre mai et octobre 2021′; que l’employeur n’a jamais été à l’initiative de ce volume horaire et a insisté pour régulariser la situation’; que ce n’est que le 22 janvier 2022 que la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail alors que la situation concernant son volume important d’heures de travail avait été régularisée depuis octobre 2021. Ainsi il n’est démontré aucun fait constitutif de harcèlement moral.
Les accidents du travail dont a été victime la salariée ne sont pas liés à un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Par ailleurs la salariée ne démontre aucun préjudice distinct causé par une violation de l’obligation de sécurité ou par la prétendue violation des durées maximales du travail.
– Sur ce
L’article L. 1152-1 du code du travail dispose qu’Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’employeur doit veiller à ce que ses salariés n’adoptent pas des agissements de harcèlement moral et doit prendre toutes dispositions pour prévenir ou faire cesser ce type de comportement.
En application de l’article L. 1154-1 du code du travail cas de litige, il appartient d’abord au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ; que l’employeur doit ensuite prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à tout harcèlement.
Les méthodes de gestion dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible notamment de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, ou d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel peuvent caractériser un harcèlement moral.
Le juge doit considérer les faits pris dans leur ensemble pour apprécier s’ils permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.
L’article L. 1152-2 du même code prévoit notamment qu’aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
En application de l’article L. 1152-3 du même code, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.
En l’espèce, la salariée produit ses bulletins de paye dont il ressort qu’elle a dépassé à dix reprises sur une période de cinq mois, entre le 17 mai 2021 et le 25 octobre 2021, la durée maximale hebdomadaire légale du travail de 48 heures, avec des horaires hebdomadaires allant de 49 heures à 60 heures. Par ailleurs, la salariée effectuait depuis son embauche chaque mois un nombre significatif d’heures supplémentaires.
Elle justifie avoir informé son employeur de ce que son temps de travail journalier pouvait dépasser la durée légale maximale de 10 heures (courriel du 14 août 2021).
L’employeur avait nécessairement connaissance des nombreuses heures de travail effectuées par la salariée, celles-ci apparaissant notamment sur ses bulletins de paye.
La salariée produit un courriel envoyé à son employeur le 21 juin 2021 par lequel elle indique qu’elle travaillerait en moyenne 12 heures par jour, point sur lequel l’employeur ne réagit pas dans sa réponse, et par lequel elle évoque la nécessité de recruter, notamment un ou plusieurs chefs d’équipe. Suite à son accident du travail intervenu le 10 juillet 2021, le compte-rendu d’analyse conclut à la nécessité de mettre en place une nouvelle organisation afin d’augmenter l’effectif dans le but de limiter les risques liés à la vitesse et à la précipitation, la date de réalisation de cet objectif étant fixée à fin 2021.
Elle produit deux courriers du médecin du travail adressés à son médecin traitant:
-le premier daté du 1er mars 2021 mentionne que la salariée présente un syndrome d’épuisement professionnel manifeste avec troubles de l’humeur et idées noires’;
-le second daté du 10 novembre 2021 mentionne une «’Nouvelle dégradation de l’état de santé. Salariée ayant présenté un syndrome d’épuisement professionnel début 2021 avec nécessité de traitement médicamenteux. Conditions de travail dégradées ++ Absence d’amélioration malgré mes échanges avec l’employeur’: Changement d’employeur possible en janvier. Eloignement du monde professionnel nécessaire afin d’éviter une aggravation des symptômes jusqu’au mois de janvier’».
L’ensemble de ces éléments établit que la salariée faisait face à une surcharge de travail résultant d’un défaut d’organisation imputable à l’employeur. Bien qu’en ayant été clairement informé dans le courant de l’été 2021, cette surcharge de travail s’est perpétuée, ainsi qu’en atteste le dépassement par la salariée de la durée maximale hebdomadaire du travail sur trois semaines en octobre 2021. Le médecin du travail a constaté dans le cadre de son courrier du 10 novembre 2021 que malgré les échanges qu’il avait eus avec l’employeur, les conditions de travail de la salariée avaient continué à se dégrader.
Les deux courriers du médecin du travail permettent de présumer que la surcharge de travail dont était victime la salariée a contribué à dégrader ses conditions de travail et à altérer sa santé physique ou mentale.
Par ailleurs, il est établi que la salariée avait été promue en octobre 2021 au poste de responsable de contrat. Aucun avenant à son contrat de travail n’a été signé, l’employeur ne démontre pas qu’une période d’essai à ce poste avait été convenu. Il résulte des courriels produits par la salariée que l’employeur a décidé d’attribuer ce poste de responsable de contrat qu’elle occupait au moment de son arrêt maladie à une autre personne, et lui a annoncé qu’elle reprendrait le travail sur son ancien poste de «’chef de site’». S’agissant de cette situation, le directeur régional Centre-Est M. [R] expose à la responsable des ressources humaines, qui lui indique ne pas savoir quoi répondre aux interrogations de la salariée, les explications à lui apporter, et rajoute’«’elle ne va pas aimer, et si soucis on actera un arrêt de notre collaboration’».
Cette décision de l’employeur constitue une mesure de rétrogradation.
Ces éléments de fait établis, à savoir une surcharge de travail susceptible d’entraîner une dégradation de ses conditions de travail et une altération de son état de santé et rétrogradation durant son arrêt maladie, sont de nature à faire présumer l’existence d’un harcèlement moral.
En réponse, l’employeur expose qu’il n’aurait jamais été à l’initiative du volume horaire effectué par la salariée et qu’il aurait insisté pour régulariser la situation, évoquant un courriel de M. [J], directeur des opérations, du 31 août 2021, dans lequel celui-ci lui indique «’Pour en reparler ce mercredi, nous allons devoir réguler au plus vite et dès septembre le volume des heures supplémentaires à la baisse’».
Cependant, il est établi que l’employeur avait connaissance des nombreuses heures supplémentaires effectuées par la salariée depuis son embauche en juin 2020, du fait qu’il arrivait à celle-ci de dépasser la durée maximale hebdomadaire du travail. Pourtant, il a laissé perdurer cette situation, cette durée hebdomadaire ayant été à nouveau dépassée à trois reprises en octobre 2021. Par ailleurs, il n’est pas démontré par l’employeur que le contenu de ce courriel du 31 août 2021 concernait la situation de la salariée.
S’agissant de la rétrogradation, l’employeur se contente de soutenir que la salariée n’en aurait subi aucune puisqu’elle n’aurait jamais occupé le poste de responsable de contrat. Or, il a été établi qu’elle avait été promue à ce poste puis qu’elle avait été rétrogradée à son ancien poste de responsable de site durant son arrêt maladie. L’employeur ne produit aucun élément qui serait de nature à démontrer que cette décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à tout harcèlement.
L’employeur échouant à démontrer que les faits établis par la salariée ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral, ce dernier est établi. La décision sur ce point du conseil de prud’hommes est infirmée.
La salariée justifie par la production de deux courriers du médecin du travail qu’elle a souffert d’un syndrome d’épuisement professionnel début 2021, qu’un traitement médicamenteux lui avait été prescrit à cette époque, et que sa santé s’est à nouveau dégradée pour les mêmes raisons en novembre 2021. Le courrier de ce médecin évoquant l’arrêt de travail de novembre 2021 ne précise pas les symptômes développés par la salariée ni si un traitement médicamenteux lui a à nouveau été prescrit. Dans ce contexte, la salariée a en plus constaté que son employeur avait décidé de sa rétrogradation, après l’avoir promue en octobre 2021, avant son arrêt maladie.
Elle justifie ainsi d’un préjudice en lien avec le harcèlement moral qu’elle a subi, qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 4000 euros net à titre de dommages et intérêts.
Sur la prise d’acte
– Moyens
La salariée soutient que sa prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul puisqu’elle résulte du harcèlement moral qu’elle a subi dans le cadre de son contrat de travail, et subsidiairement les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des fautes de l’employeur résultant de la violation de son obligation de sécurité et du non-respect des durées maximales du travail.
L’employeur soutient pour sa part que les manquements allégués par la salariée, à les supposer avérés, ne sauraient être considérés comme suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
– Sur ce
Le salarié qui reproche à l’employeur des manquements à ses obligations peut prendre acte de la rupture de son contrat. Lorsque le salarié justifie de manquements suffisamment graves de la part de l’employeur pour empêcher la poursuite du contrat de travail, la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les juges du fond doivent examiner l’ensemble des manquements de l’employeur invoqués par le salarié sans se limiter aux seuls griefs énoncés dans la lettre de prise d’acte. Il appartient au salarié de démontrer l’existence de ces griefs.
Si les griefs invoqués par le salarié sont réels et suffisamment graves, la prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul si les manquements reprochés à l’employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement.
En l’espèce, la prise d’acte de la salariée est intervenue le 22 janvier 2022, soit très rapidement après qu’elle ait été informée par son employeur de sa décision de la rétrograder à son ancien poste à son retour d’arrêt maladie, ce dernier résultant notamment de la surcharge de travail à laquelle elle était exposée.
Ainsi, la prise d’acte de la salariée est la conséquence des faits de harcèlement moral dont elle a été victime dans le cadre de son travail et qui ont entraîné une altération de son état de santé. Ces manquements imputables à l’employeur apparaissent suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
En conséquence, la prise d’acte de la salariée produit les effets d’un licenciement nul. La décision sur ce point du conseil de prud’hommes est infirmée.
En application de l’article L. 1235-3-1 du code du travail, la salariée est en droit de se voir allouer à ce titre une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Sa demande se limite à un montant équivalent à ses six derniers mois de salaire.
Au regard des fiches de paye produites et de la fixation du salaire de la salariée pour octobre 2021 en fonction du taux horaire de 21,50 euros, il lui sera alloué une indemnité à ce titre de 29268,78 euros net.
Conformément à sa demande et au regard de son ancienneté et du salaire de référence calculé sur ses trois derniers mois de travail précédant son arrêt de travail (soit 4948,26 euros), il lui sera allouée une indemnité de licenciement de 1237,06 euros net.
Il lui sera alloué une indemnité de préavis d’un mois de salaire, soit 4948,26 euros, outre 494,82 euros de congés payés afférents.
Sur le travail dissimulé
– Moyens
Mme [B] [N] expose que sur ses huit premières fiches de paie, la société lui a versé des indemnités de travail de nuit importantes alors qu’elle n’a jamais travaillé de nuit’; que ce nombre d’heures de nuit sert en réalité à camoufler les heures supplémentaires qu’elle a effectuées’; qu’elle rapporte la preuve que le nombre d’heures supplémentaires inscrites sur certaines de ses fiches de paie est inférieur au nombre d’heure réellement accomplies.
La Société Iss Facility expose que’la salariée a été déclarée et payée de l’intégralité de ses heures, et qu’elle n’apporte aucun élément de nature à démontrer le caractère intentionnel d’une dissimulation d’heures travaillées.
– Sur ce
Aux termes des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Selon les dispositions de l’article L. 8223-1 du même code, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l’employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l’article L.’8223-1, de la volonté chez l’employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.
En l’espèce, le contrat de travail de la salariée du 30 juin 2020 et l’avenant du 1er novembre 2020 mentionnaient clairement les horaires de la salariée’à savoir, du lundi au vendredi de 6 heures à midi, et le samedi de 6 heures à 11 heures. Aucun horaire de nuit n’était mentionné. Le contrat de travail mentionnait que les horaires de travail pourraient varier, mais uniquement dans le cadre de la journée. Le contrat de travail de la salariée ne prévoyant pas d’horaires de nuit ni la possibilité d’un travail de nuit.
Or, dès son premier mois de travail, la salariée s’est vue rémunérer 91,5 heures de nuit, puis 87 heures en août 2020, 42 heures en septembre 2020, 79 heures en octobre 2020, 44 heures en novembre 2020, 71 heures en décembre 2020, 78’heures en janvier 2021, 76 heures en février 2021.
Au regard de son contrat de travail qui ne prévoyait que des horaires de jour, et du fait qu’elle a effectué ses horaires de jour sur les périodes considérées, ces heures de nuit ne pouvaient qu’être des heures supplémentaires, qui n’ont pas été déclarées comme telles sur les fiches de paye et n’ont pas donné lieu à majoration pour heures supplémentaires.
Dans un courriel du 21 juin 2021, la salariée informait son employeur de ce que le nombre d’heures déclarées la concernant, ainsi que d’autres salariés, n’était pas exact, «’des journées de 14 heures se transformant souvent en 7 heures de nuit ou en prime’».
L’employeur n’a jamais réagi à cette remarque de la salariée, il n’y répond pas plus dans le cadre de la présente instance.
Il résulte ainsi de l’analyse de ces éléments que l’employeur s’est intentionnellement soustrait à la déclaration de l’intégralité des heures supplémentaires effectuées par la salariée. Le travail dissimulé est établi.
La décision sur ce point du conseil de prud’hommes sera infirmée, et la Société Iss Facility services sera condamnée à verser à Mme [B] [N] la somme de 29268,78 euros net à titre d’indemnité au titre du travail dissimulé.
Sur les demandes accessoires
Il sera rappelé que le présent arrêt est exécutoire de droit, un éventuel pourvoi en cassation n’étant pas suspensif en application notamment de l’article 1009-1 du code de procédure civile.
Il convient de confirmer la décision de première instance s’agissant des frais irrépétibles et des dépens.
La Société Iss Facility services sera condamnée aux dépens de l’appel, ainsi qu’à verser à Mme [B] [N] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Les dépens ne comprendront pas les frais d’exécution et les droits de recouvrement, ces créances n’étant pas établies à ce jour, précision faite que le droit de recouvrement n’est pas dû par la partie qui demande l’exécution d’un titre exécutoire constatant une créance née de l’exécution d’un contrat de travail conformément aux article R. 444-53 et R. 444-55 du code de commerce.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare Mme [B] [N] et la Société Iss Facility services recevables en leurs appel et appel incident,
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes d’Albertville du 22 septembre 2022 en ce qu’il a’:
– condamné la société ISS Facility Services au paiement des sommes suivantes :
* 1237,06 € nets à titre d’indemnité légale de licenciement,
* 4948,26 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 494,82 € d’indemnité de congés payés afférents,
* 800 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– débouté la société ISS Facility Services de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société ISS Facility Services aux entiers dépens,
Infirme pour le surplus le jugement du conseil de prud’hommes d’Albertville du 22 septembre 2022,
Statuant à nouveau’:
Condamne la société ISS Facility Services à verser à Mme [B] [N] la somme de 3516,08 euros à titre de rappel de salaire,
Condamne la société ISS Facility Services à verser à Mme [B] [N] la somme de 4000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Condamne la société ISS Facility Services à verser à Mme [B] [N]’ la somme de 29268,78 euros net à titre d’indemnité au titre du travail dissimulé,
Dit que la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par Mme [B] [N] produit les effets d’un licenciement nul,
Condamne la société ISS Facility Services à verser à Mme [B] [N]’la somme de 29268,78 euros net à titre d’indemnité au titre du licenciement nul,
Y ajoutant’:
Condamne la société ISS Facility Services à verser à Mme [B] [N] la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
Condamne la société ISS Facility Services aux dépens de l’appel, qui ne comprendront pas les frais d’exécution et les droits de recouvrement.
Ainsi prononcé publiquement le 07 Mars 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président