Responsabilité partagée pour des désordres dans un local commercial

Notez ce point juridique

Le sinistre subi dans les locaux loués et qui trouve son origine principale dans le défaut d’étanchéité d’une partie commune, constitue un défaut d’entretien au sens de l’article 14 de loi du 10 juillet 1965 engageant la responsabilité, objective, du syndicat des copropriétaires, les éléments de contexte quant à la date de connaissance par ce dernier du sinistre et quant à la gestion des travaux idoines subséquents étant inopérants.

La responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des désordres affectant les locaux loués doit donc être retenue.

La responsabilité de plein droit du syndicat est susceptible d’être engagée en présence de dommages causés aux copropriétaires ayant pour origine les parties communes, indépendamment de toute faute.

L’intermédiaire doit s’assurer, par des vérifications sérieuses, de la solvabilité réelle du locataire qu’il a trouvé.

Il est admis que le mandataire répond de toutes les défaillances qu’un mandataire prudent et diligent n’aurait pas commises, que ce soit par action ou par omission. Le mandataire est tenu par une obligation de moyens.


L’affaire concerne un litige entre plusieurs parties à la suite de dégâts des eaux survenus dans un local commercial loué par la société Gaz Confort Plus à Mme [R], représentée par la société Jacar Immobilier. Les infiltrations persistantes ont conduit à une expertise judiciaire et à plusieurs ordonnances de référé, aboutissant à des condamnations pour le paiement de loyers en arriéré et l’injonction de réaliser des travaux.

La société Gaz Confort Plus a ensuite assigné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble, la société Jacar Immobilier et Mme [R] pour obtenir réparation de ses préjudices, incluant des préjudices de jouissance et des préjudices moraux liés à la désorganisation et à l’image de l’entreprise. Le syndicat des copropriétaires a répliqué en contestant la responsabilité et en demandant que les coûts soient partagés avec Mme [R], tout en sollicitant la garantie de son assureur, la SA Generali Iard.

Mme [R] a nié toute responsabilité, attribuant les désordres aux parties communes gérées par le syndicat des copropriétaires, et a demandé que la société Jacar Immobilier soit tenue pour responsable des manquements dans la gestion du sinistre. La société Jacar Immobilier a rejeté les accusations de faute dans sa gestion et a demandé à être déboutée de toutes les demandes à son encontre, tout en cherchant à obtenir la garantie du syndicat des copropriétaires.

L’affaire, complexe, implique des questions de responsabilité et de réparation des préjudices dans le contexte de la copropriété et de la gestion immobilière, avec des implications financières significatives pour toutes les parties impliquées.

DECISION SUR LES DEMANDES DE JUGEMENT

Le tribunal a décidé de ne pas statuer sur les demandes de « juger » et de « dire et juger » car elles ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile mais sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

ORIGINE DES DESORDRES ET RESPONSABILITES

Il a été établi que les désordres dans le local commercial loué par la société Gaz Confort Plus provenaient d’un défaut d’étanchéité du mur pignon de l’immeuble, partie commune. La responsabilité du syndicat des copropriétaires et de la société Jacar Immobilier a été retenue dans des proportions de 90% et 10% respectivement.

REPARATION DES PREJUDICES

La société Gaz Confort Plus a été indemnisée pour son préjudice de jouissance et les frais de réfection du local, tandis que sa demande de préjudice de désorganisation et d’image a été rejetée faute de preuves. Le syndicat des copropriétaires a été condamné à prendre en charge une partie des frais de remise en état du local.

APPEL EN GARANTIE CONTRE LA SA GENERALI IARD

La demande de garantie du syndicat des copropriétaires auprès de la SA Generali Iard a été rejetée faute de preuves suffisantes.

DEMANDE RECONVENTIONNELLE DU SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES

La demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires a été rejetée, faute de preuves établissant la responsabilité de Mme [R] dans les désordres.

DEPENS ET FRAIS IRREPETIBLES

Le syndicat des copropriétaires a été condamné aux dépens et à verser des sommes à la société Gaz Confort Plus et à Mme [R] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande de la société Jacar Immobilier au même titre a été rejetée.

EXECUTION PROVISOIRE

La décision est exécutoire à titre provisoire en vertu de l’article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019.

CONCLUSION

En conclusion, les responsabilités ont été établies, les préjudices indemnisés et les demandes accessoires ont été tranchées. Les parties ont été déboutées de certaines demandes et condamnées aux dépens.

– 37.420,60 euros à la SARL Gaz Confort Plus (déduction faite de la provision de 12.565,81 euros)
– 877,61 euros à la SARL Gaz Confort Plus pour le reliquat des frais de réfection du local
– 4.000 euros à la SARL Gaz Confort Plus au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– 2.000 euros à Mme [N] [R] au titre de l’article 700 du code de procédure civile


Réglementation applicable

Selon l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes et il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

La responsabilité de plein droit du syndicat est donc susceptible d’être engagée en présence de dommages causés aux copropriétaires ayant pour origine les parties communes, indépendamment de toute faute.

La démonstration d’un dommage ayant pour origine les parties communes est la condition nécessaire mais suffisante pour justifier l’engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur ce fondement.

Le syndicat des copropriétaires ne peut s’exonérer de cette responsabilité qu’en rapportant la preuve d’une force majeure ou d’une faute de la victime ou d’un tiers.
Aux termes de l’article 1240 du code civil, « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Cass., ass. plèn. 13 janvier 2020 n°17-19.963).

L’article 1991 du code civil dispose que « le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.(…). »

L’article 1992 du même code ajoute que « le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion.
Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Maître Margot BAILLY
– Maître Marie-Laure TARRAGANO
– Maître Claire PRUVOST
– Maître Christian FOURN
– Maître Henri ROUCH

Mots clefs associés

– SARL Gaz Confort Plus
– Mme [N] [R]
– Administrateur de biens: société Jacar Immobilier
– Contrat de bail commercial
– Local à usage commercial
– Dégât des eaux
– Infiltrations persistantes
– Expertise judiciaire
– M. [W] [I] (expert judiciaire)
– Arriérés de loyers
– Travaux d’installation de ventilation
– Syndicat des copropriétaires de l’immeuble
– SA Generali Iard (assureur)
– Préjudice de jouissance
– Préjudice de désorganisation et d’image
– Articles 1240 et 1241 du code civil
– Article 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965
– Responsabilité du syndicat des copropriétaires
– Responsabilité de la société Jacar Immobilier
– Demande de réparation des préjudices
– Condamnations financières
– Article 700 du code de procédure civile
– Débats judiciaires
– Ordonnance de clôture
– Audience et délibéré

– SARL Gaz Confort Plus: société à responsabilité limitée spécialisée dans le confort gaz
– Mme [N] [R]: Madame [N] [R], personne physique
– Administrateur de biens: société Jacar Immobilier chargée de gérer des biens immobiliers
– Contrat de bail commercial: contrat de location pour un local à usage commercial
– Local à usage commercial: espace destiné à des activités commerciales
– Dégât des eaux: dommage causé par une fuite d’eau
– Infiltrations persistantes: présence continue d’eau dans un bâtiment
– Expertise judiciaire: évaluation technique réalisée par un expert dans le cadre d’une procédure judiciaire
– M. [W] [I] (expert judiciaire): Monsieur [W] [I], expert judiciaire
– Arriérés de loyers: loyers impayés
– Travaux d’installation de ventilation: travaux visant à mettre en place un système de ventilation
– Syndicat des copropriétaires de l’immeuble: organisation regroupant les copropriétaires d’un immeuble
– SA Generali Iard (assureur): société d’assurance Generali Iard
– Préjudice de jouissance: dommage causé par une atteinte à la jouissance d’un bien
– Préjudice de désorganisation et d’image: dommage lié à une perturbation de l’organisation et à une atteinte à l’image
– Articles 1240 et 1241 du code civil: articles du code civil relatifs à la responsabilité civile
– Article 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965: article de la loi sur la copropriété
– Responsabilité du syndicat des copropriétaires: obligation du syndicat des copropriétaires de réparer les dommages causés
– Responsabilité de la société Jacar Immobilier: obligation de la société Jacar Immobilier de réparer les dommages causés
– Demande de réparation des préjudices: demande visant à obtenir une indemnisation pour les dommages subis
– Condamnations financières: sanctions pécuniaires prononcées par le tribunal
– Article 700 du code de procédure civile: article du code de procédure civile permettant de demander le remboursement des frais de justice
– Débats judiciaires: discussions et arguments présentés lors d’une audience judiciaire
– Ordonnance de clôture: décision mettant fin à une phase de la procédure judiciaire
– Audience et délibéré: séance au cours de laquelle le tribunal entend les parties et délibère avant de rendre sa décision

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires délivrées le :
à Maître BAILLY, Maître FOURN, Maître PRUVOST et à Maître ROUCH

Copies certifiées conformes délivrées le :
Maître TARRAGANO

8ème chambre
1ère section

N° RG 20/11416
N° Portalis 352J-W-B7E-CTG46

N° MINUTE :

Assignation du :
05 Novembre 2020

JUGEMENT
rendu le 12 Mars 2024

DEMANDERESSE

Société GAZ CONFORT PLUS
[Adresse 2]
[Adresse 2]

représentée par Maître Margot BAILLY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0336

DÉFENDEURS

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 6] représenté par son syndic, le cabinet ISM GESTION
[Adresse 5]
[Localité 7]

représenté par Maître Marie-Laure TARRAGANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P075

S.A. GENERALI IARD
[Adresse 3]
[Adresse 3]

représentée par Maître Claire PRUVOST de la SELAS CHEVALIER – MARTY – PRUVOST Société d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0085
Décision du 12 Mars 2024
8ème chambre
1ère section
N° RG 20/11416 – N° Portalis 352J-W-B7E-CTG46

Société JACAR IMMOBILIER
[Adresse 1]
[Localité 7]

représentée par Maître Christian FOURN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0064

Madame [N] [R]
[Adresse 4]
[Adresse 4]

représentée par Maître Henri ROUCH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0335

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Monsieur Julien FEVRIER, Juge
Madame Muriel JOSSELIN-GALL, Vice-présidente

assistés de Madame Delphine PROVOST-GABORIEAU, Greffière lors des débats, et de Madame Lucie RAGOT, Greffière lors du prononcé,

DÉBATS

A l’audience du 10 Janvier 2024 tenue en audience publique devant Madame Laure BERNARD, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 21 septembre 2012, la SARL Gaz Confort Plus a conclu avec Mme [N] [R], représentée par son administrateur de biens, la société Jacar Immobilier, un contrat de bail commercial portant sur un « local à usage commercial comprenant une boutique » au sein de l’immeuble sis [Adresse 6], soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Le 9 novembre 2015, ce local a fait l’objet d’un important dégât des eaux.

En août 2018, compte tenu de la persistance des infiltrations, Mme [R] a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 12 octobre 2018,

a prononcé une mesure d’expertise judiciaire et désigné M. [W] [I] à cette fin, lequel a déposé son rapport le 06 août 2019.

Par ordonnance de référé du 17 janvier 2020, la société Gaz Confort Plus a été condamnée à régler à Mme [R] la somme de 16.563,33 euros au titre d’arriérés de loyers, selon décompte arrêté au mis de juillet 2019, et il a été fait injonction à Mme [R] de réaliser les travaux d’installation de ventilation suivant devis mentionné dans le rapport d’expertise précité.

Par acte d’huissier du 06 novembre 2020, la société Gaz Confort Plus a assigné devant la présente juridiction, en ouverture de rapport, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble en cause ainsi que la société Jacar Immobilier et Mme [R] afin d’obtenir leur condamnation à réparer ses préjudices.

Par acte du 08 mars 2021, le syndicat des copropriétaires a assigné en intervention forcée son assureur la SA Generali Iard.

Les procédures ont été jointes.

Par ailleurs, par nouvelle ordonnance rendue le 22 mars 2021 devenue définitive, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :
– condamné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6] à verser à la société Gaz Confort Plus les sommes suivantes à titre provisionnel :

7.898,49 euros au titre des frais des travaux de réfection du local,
12.565,81 euros au titre du préjudice de jouissance, sur la période de septembre 2016 à novembre 2018 inclus,
– dit d’y avoir lieu à référé sur les demandes provisionnelles dirigées à l’encontre de la société Jacar Immobilier.

Le contrat de bail entre la société Gaz Confort Plus et Mme [R] est arrivé à son terme au mois d’octobre 2021 et n’a pas été renouvelé.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 31 décembre 2021, la société Gaz Confort Plus demande au tribunal de :

« Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
Vu l’article 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis,
Vu le rapport d’expertise judiciaire du 6 août 2019,
Vu les pièces versées aux débats,
– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] et la société Jacar Immobilier à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 37.420,60 euros en réparation de son préjudice de jouissance subi entre le 9 novembre 2015 et le 7 avril 2021, dans les proportions prescrites par le rapport d’expertise, soit 33.678,54 euros à la charge du syndicat des copropriétaires, dont à déduire la provision déjà versée de 12.565,81 euros en exécution de l’ordonnance de référé du 22 mars 2021, et 3.742,06 euros à la charge de la société Jacar Immobilier,
A titre subsidiaire,

– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 37.420,60 euros en réparation de son préjudice de jouissance, dont à déduire la provision déjà versée de 12.565,81 euros en exécution de l’ordonnance de référé du 22 mars 2021 ;
– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] et à la société Jacar Immobilier à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 12.000 euros en réparation de son préjudice de désorganisation et d’image, dans les proportions prescrites par le rapport d’expertise, soit 10.800 euros à la charge du syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] et 1.200 euros à la charge de la société Jacar Immobilier ;

A titre subsidiaire,
– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 12.000 euros en réparation de son préjudice de désorganisation et d’image ;
– Condamner la société Jacar Immobilier à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 877,61 euros au titre des frais de réfection du local ;

A titre subsidiaire,
– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] à verser à la société Gaz Confort Plus la somme de 877,61 euros au titre des frais de réfection du local ;
– Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] et la société Jacar Immobilier à verser chacun à la société Gaz Confort Plus la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de les condamner aux entiers dépens. »

Se prévalant des conclusions de l’expertise judiciaire, la société Gaz Confort Plus sollicite l’engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires, au visa de l’article 14 de loi du 10 juillet 1965, et de la société Jacar Immobilier, au visa combiné des articles 1240 et 1241 du code civil, dans la survenance du sinistre ayant endommagé le local qu’elle occupait en qualité de locataire, et ce selon le partage retenu par l’expert.

Elle s’estime dès lors fondée à réclamer l’indemnisation de ses préjudices subséquents, consistant en un préjudice de jouissance des lieux loués, rendus impropres à leur destination contractuelle, et ce entre le 09 novembre 2015 et le 07 avril 2021, date de réalisation des travaux de réfection par le syndicat des copropriétaires, ainsi qu’en un préjudice moral d’image et de désorganisation, ayant été contrainte de transférer son matériel, ses supports, ses archives et sa comptabilité dans un autre local, l’accueil de la clientèle étant devenu dans de telles conditions d’humidité et d’insalubrité.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 22 juin 2021, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :

« Vu les articles 1240 et suivants du code civil,
– Joindre le dossier enrôlé sous le n°RG 20/11416 et 21/04069,

A titre principal
– Débouter la société Gaz Confort Plus de ses demandes,
A titre subsidiaire, s’agissant du préjudice de jouissance :
– Juger que sur la période de novembre 2015 à novembre 2016, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6] n’est pas responsable du préjudice de jouissance subi par la société Gaz Confort Plus,
– Juger que sur la période de novembre 2015 à novembre 2016, la réparation du préjudice de jouissance de la société Gaz Confort Plus incombe uniquement au cabinet Jacar Immobilier et Mme [R],
– Juger que sur la période de novembre 2016 à novembre 2018, la prise en charge de la réparation préjudice de jouissance doit être supportée de la façon suivante :
*30% à la charge du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6],
* 35% à la charge de Mme [R],
* 35% à la charge de la société Gaz Confort Plus,
– Juger qu’à compter de décembre 2018, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6] n’est pas responsable du préjudice de jouissance subi par la société Gaz Confort Plus,
A titre reconventionnel
– Juger que Mme [R] a participé à l’aggravation des dommages subis dans son local,
– Juger en conséquence que la prise en charge des travaux de remise en état du local doit être répartie de la façon suivante : (proposition à valider)
* 50% à la charge du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6],
* 50% à la charge de Mme [R],

En tout état de cause :
– Condamner la compagnie Generali à relever et garantir le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6] des sommes éventuellement mises à sa charge au titre de la remise en état du local appartenant à Mme [R], du préjudice de jouissance de la société Gaz Confort Plus, et du préjudice moral d’image et de désorganisation invoqué par la société Gaz Confort Plus,
– Condamner la société Gaz Confort Plus, le cabinet Jacar Immobilier et Mme [R] à la somme de 3.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. »

Le syndicat des copropriétaires conteste les conclusions expertales, et soutient avoir fait le nécessaire pour remédier aux désordres dès en avoir été informé par Mme [R], en novembre 2016.

Il prétend que seules doivent être retenues la responsabilité de la société Jacar Immobilier, arguant de l’inertie fautive de celle-ci dans la gestion du sinistre et dans l’exercice de sa mission d’administrateur de biens, ainsi que celles de la société Gaz Confort Plus et Mme [R], qui en leurs qualités respectives de locataire et de bailleur des lieux ont fait preuve de négligence en ne procédant pas aux travaux idoines et à l’aération des locaux et ont donc contribué à l’aggravation des dommages.

Le syndicat des copropriétaires conteste le préjudices allégués par la société demanderesse, qu’il estime infondés tant dans leur principe que dans leur quantum.

A titre reconventionnel, le syndicat des copropriétaires sollicite d’abord que le coût des travaux de remise en état du local soit mis à la charge de Mme [R] à hauteur de 50%, compte tenu de ce qu’il lui revenait, en sa qualité de bailleresse, d’assurer une bonne ventilation des lieux loués ainsi que la réalisation des travaux de réfection desdits locaux.

Il sollicite ensuite d’être garanti par son assureur, dont il affirme que les conditions sont réunies, contestant tout moyen de défense tenant à la prescription de son action ou à l’inopposabilité du rapport d’expertise.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 04 janvier 2022, Mme [R] demande au tribunal de :

« Vu les dispositions des articles 1991 et 1992 du code civil,
Vu les dispositions des articles 1303 à 1303-4 du code civil,
Vu la loi n°65-557 du 10 juillet 1965,
Vu les pièces versées aux débats,

A titre principal :
– Dire et juger que le syndicat des copropriétaire de l’immeuble du [Adresse 6] est responsable du préjudice de jouissance subi par la société Gaz Confort Plus ;
– Dire et juger que la remise en état du local commercial n’est que la conséquence directe des désordres affectant les parties communes de l’immeuble ;
– Dire et juger, par conséquent, que la prise en charge des travaux de remise en état incombe au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 6] et ne sauraient être pris en charge par Mme [R] ;

En conséquence :
– Dire et juger que la responsabilité de Mme [R] ne saurait être engagée à quelque titre que ce soit, de sorte qu’elle ne saurait être condamnée à la réparation du préjudice de jouissance subi par la société Gaz Confort Plus et des travaux de remise en état du local ;
– Débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 6] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions formulées à l’encontre de Mme [R] ;

A titre subsidiaire :
– Dire et juger que la société Jacar Immobilier doit répondre des dommages-intérêts qui résultent de l’inexécution de son mandat immobilier,

En conséquence :
– Condamner, à titre de garantie, la société Jacar Immobilier des sommes éventuellement mises à la charge de Mme [R] ;
En tout état de cause :
– Condamner tout succombant à verser à Mme [R] la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner tout succombant aux entiers dépens. »

En substance, Mme [R] conteste toute responsabilité dans la survenance des désordres subis par la société demanderesse au sein des lots qu’elle lui louait, se prévalant des conclusions du rapport d’expertise judiciaire, et conclut au rejet des demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires formées à son encontre.

A titre subsidiaire, Mme [R] sollicite la garantie de la société Jacar Immobilier, en sa qualité de mandataire, aux visas des articles 1991 et 1992 du code civil, arguant de ce que celle-ci a manqué à ses obligations en ne faisant pas toutes les diligences nécessaires pour s’assurer de la bonne gestion du sinistre ayant affecté le bien dont la gestion lui avait été confiée.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 10 janvier 2022, la société Jacar Immobilier demande au tribunal de :

« Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les pièces visées,
A titre principal :
– Débouter la société Gaz Confort Plus de l’intégralité de ses demandes ;
– Débouter Mme [R] de ses demandes formulées à l’égard du cabinet Jacar Immobilier ;

A titre subsidiaire :
– Condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 6] à relever et garantir indemne la société Jacar Immobilier de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au titre des demandes formées par la société Gaz Confort Plus.

En tout état de cause :
– Condamner la société Gaz Confort Plus, ou tout succombant, à verser à la société Jacar Immobilier la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ».

La société Jacar Immobilier conteste tout manquement fautif dans l’exercice de ses fonctions, soutenant notamment qu’il appartenait au seul locataire de procéder à la déclaration de sinistre, et soulignant l’absence de caractérisation d’un lien de causalité entre ses prétendues manquements, à les supposer, avérés, et les préjudices subis par la société demanderesse.

Il conclut également au rejet de la demande de garantie formée par Mme [R] à son encontre, pour le même moyen d’une absence de caractérisation de faute à son endroit.

Il sollicité à titre reconventionnel et subsidiaire, la garantie du syndicat des copropriétaires.

Bine que comparante, la SA Generali Iard n’a pris aucune écriture au fond dans les délais impartis par le juge de la mise en état.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux termes de leurs dernières écritures susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 12 octobre 2022.

L’affaire, appelée à l’audience du 10 janvier 2024, a été mise en délibéré au 12 mars suivant.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article 768 du code de procédure civile, tel que modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicables aux instances en cours à cette date : « Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions est annexé aux conclusions.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n’auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées. »

Il est à relever que, si aux termes de ses dernières écritures le syndicat des copropriétaires excipe de moyens tendant à démontrer que la garantie de son assureur est due, la SA Generali Iard n’a pris aucune conclusion au fond, de sorte que le tribunal n’a pas à examiner les moyens précités du syndicat des copropriétaires sur ce point.

En outre, la demande de jonction formée par le syndicat des copropriétaires est sans objet dès lors qu’il a déjà été procédé à cette mesure d’administration judiciaire.

Sur les demandes de « juger » et de « dire et juger »

Il n’y a pas lieu de statuer sur ces demandes, lesquelles ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile mais sont la reprise des arguments développés dans les écritures des parties.

Sur l’origine des désordres et les responsabilités

Sur la matérialité des désordres

Il est constant que le local commercial exploité depuis le mois de septembre 2012 par la société Gaz Confort Plus a subi, le 09 novembre 2015, un important dégât des eaux, qui a fait l’objet, le jour même, d’une déclaration de sinistre à l’assureur de la société locataire la SA Generali Iard, ainsi qu’un signalement à la société Jacar Immobilier en sa qualité de mandataire du bien loué.

A l’issue de l’expertise amiable diligentée sur l’initiative de l’assureur, au mois de mars 2016, le rapport du 20 juin 2016 faisait état d’un « dégât des eaux ayant généré des désordres aux agencements commerciaux du local (…). L’origine semble provenir d’une infiltration en provenance de la façade de l’immeuble. (…) Le taux d’humidité est de 100% et la fuite toujours active ne cesse d’aggraver les dommages. Dommages constatés : doublage de l’ensemble du local (…). »

Dans le cadre des opérations expertales judiciaires, il a été relevé par l’expert M. [I], lors de la première réunion sur place du 15 janvier 2019, « des dégradations sur les murs et au plafond de la pièce principale, ainsi que dans les toilettes et en fond du local. Les contrôles d’humidité réalisés sur le mur de gauche ont présenté des taux d’humidité de 15 à 30% en partie centrale et des taux de 60% en partie basse. Les contrôles d’humidité entrepris sur le mur de droite ont affiché des taux de 40 à 60%. Les contrôles d’humidité réalisés dans les toilettes du fond ont présenté des taux d’humidité de 30 à 60%. Nous avons relevé que les 2 pièces ne présentaient aucune ventilation, ce qui explique les taux d’humidité relevés. Les parties dégradées doivent absolument être grattées afin d’assécher les supports. Les 2 pièces doivent être ventilées réglementairement ».

Lors de la seconde réunion sur place du 09 mai 2019, l’expert judiciaire a quasiment relevé les mêmes taux d’humidité que ceux réalisés à l’issue de la première réunion.

Sur leur(s) cause(s) et les responsabilités

Selon l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes et il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

La responsabilité de plein droit du syndicat est donc susceptible d’être engagée en présence de dommages causés aux copropriétaires ayant pour origine les parties communes, indépendamment de toute faute.

La démonstration d’un dommage ayant pour origine les parties communes est la condition nécessaire mais suffisante pour justifier l’engagement de la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur ce fondement.

Le syndicat des copropriétaires ne peut s’exonérer de cette responsabilité qu’en rapportant la preuve d’une force majeure ou d’une faute de la victime ou d’un tiers.
Aux termes de l’article 1240 du code civil, « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Cass., ass. plèn. 13 janvier 2020 n°17-19.963).

L’article 1991 du code civil dispose que « le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.(…). »

L’article 1992 du même code ajoute que « le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion.
Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire. »

Il résulte de ces textes que l’intermédiaire doit s’assurer, par des vérifications sérieuses, de la solvabilité réelle du locataire qu’il a trouvé.

Il est admis que le mandataire répond de toutes les défaillances qu’un mandataire prudent et diligent n’aurait pas commises, que ce soit par action ou par omission. Le mandataire est tenu par une obligation de moyens.

Sur ce,

Aux termes des opérations d’expertise, l’expert judiciaire a conclu que les désordres dénoncés provenaient d’un défaut d’étanchéité du mur pignon de l’immeuble, partie commune.

Il conclut en ces termes (page 17 du rapport) :

« Après les constatations techniques que nous avons faites, les responsabilités nous apparaissent partagées comme suit :
90% à la charge du SDC
– défaut d’étanchéité du mur pignon de l’immeuble
10% à la charge de la société Jacar Immobilier
– laxisme important pour déclarer le sinistre de dégâts des eaux
– défaut de diligence ».

Il s’évince de la lecture combinée de ces éléments que le sinistre subi par la société Gaz Confort Plus au sein des locaux loués trouve son origine principale dans le défaut d’étanchéité d’une partie commune, ce qui constitue un défaut d’entretien au sens de l’article 14 de loi du 10 juillet 1965 engageant la responsabilité, objective, du syndicat des copropriétaires, les éléments de contexte quant à la date de connaissance par ce dernier du sinistre et quant à la gestion des travaux idoines subséquents étant inopérants.

La responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des désordres affectant les locaux loués par la société Gaz Confort Plus doit donc être retenue.

S’agissant de la société Jacar Immobilier, dont la qualité de gestionnaire du bien de Mme [R] n’est pas contestée, il ressort des éléments du débat que le jour même de la survenance du sinistre, la société Gaz Confort Plus lui a adressé une lettre recommandée avec accusé de réception, dont la réception n’est pas contestée, ainsi rédigée :

« Par la présente nous souhaitons vous informer du sinistre dont nous sommes victimes dans notre local commercial au [Adresse 6].
A ce jour, nous avons eu une perte d’exploitation car nous avons été dans l’obligation de transférer notre matériel, ligne téléphonique, supports, archives et employé vers une autre structure suite aux dégâts que vous pourrez vous-même constater.
Afin de faciliter le traitement de ce sinistre, nous vous joignons des photos (…). »

Par lettre simple du 18 août 2016, la société Gaz Confort Plus a relancé la société Jacar Immobilier, lui indiquant que « malheureusement nous et notre assurance Generali sommes toujours dans l’attente d’un retour de votre part depuis le 09 novembre 2015 (…). A ce jour nous sommes toujours en perte d’exploitation suite au transfert de notre matériel et employé vers une autre structure (…) ».

Or, ce n’est que le 07 de novembre 2016 que la société Jacar Immobilier va informer le syndicat des copropriétaires du sinistre survenu près d’un an plus tôt, auquel le syndicat des copropriétaires répondra « Nous avons bien reçu votre courrier recommandé et mandatons le plombier pour la recherche de fuite qui prendra contact avec Audit en Ligne pour les accès. Nous vous rappelons cependant que nous attendons la déclaration de sinistre de votre locataire qu’il aurait dû nous adresser dès l’apparition des désordres ».

Si la société Jacar Immobilier soutient qu’il ne lui revenait pas de faire parvenir au syndicat des copropriétaires la déclaration de sinistre de la société Gaz Confort Plus, il sera relevé que le mandat de gestion signé avec Mme [R] pour les lieux concernés n’est pas communiqué de sorte que le tribunal ne peut vérifier l’étendue des missions contractuellement fixées à la société défenderesse.

Au demeurant et en toute hypothèse, la gestion de ce genre de situation relève d’une mission classique d’un gestionnaire de bien, et la chronologie des échanges rappelée ci-dessus établit une attitude d’inertie fautive de la société Jacar Immobilier entre les mois de novembre 2015, date à laquelle elle a été informé du sinistre, et de novembre 2016, où elle a effectué les démarches utiles auprès du syndicat des copropriétaires, ce qui a ensuite permis de soumettre au vote de l’assemblée générale les travaux de reprise du mur pignon défectueux.

Cette négligence fautive, bien que circonscrite dans le temps, est de nature à engager la responsabilité de la société Jacar Immobilier à l’encontre de la société Gaz Confort Plus dès lors que ce manquement constitue à son endroit une faute délictuelle, qui a concouru à l’aggravation des dommages.

La responsabilité de la société Jacar Immobilier doit donc être également retenue.

S’agissant de Mme [R], dont la responsabilité n’a pas été retenue par l’expert, si le syndicat des copropriétaires prétend qu’elle a failli à son obligation de délivrance d’une chose conforme, en sa qualité de propriétaire bailleresse, en donnant à bail un local dénué de système de ventilation idoine, il doit être relevé que sur ce point, l’expert a expliqué que des travaux d’établissement de ventilations réglementaires auraient dû « être réalisés dès 2012, lors de la prise de contrat de location de Gaz Confort Plus », mais a précisé, en réponse au dire du conseil du syndicat des copropriétaires du 13 février 2019 que « le défaut de ventilation du local commercial n’est pas la cause des désordres, mais a empêché le bon assèchement des pièces dégradées ».

Or le syndicat des copropriétaires ne produit au débat aucune pièce de nature à venir contredire ces éléments et à établir que le défaut de ventilation du local, s ‘il constitue un manquement contractuel à l’égard de la société locataire, est également, en tout ou partie, à l’origine directe des désordres objets du litige et/ou de leur aggravation, alors que l’expert judiciaire a conclu à l’inverse.

Sa responsabilité dans la survenance du sinistre ne saurait dès lors être retenue.

Pour les mêmes motifs, la responsabilité de la société Gaz Confort Plus ne sera pas davantage retenue.

En conclusion, sont retenues les responsabilités du syndicat des copropriétaires, d’une part, et de la société Jacar Immobilier, d’autre part.

Eu égard à l’importance du sinistre, aux causes des désordres, et au rôle de chacune des parties responsables, et faute pour les parties de produire des éléments de preuve venant la contredire, il convient de retenir la ventilation de l’imputabilité du sinistre comme proposé par l’expert judiciaire :
90% à la charge du syndicat des copropriétaires,
10% à la charge de la société Jacar Immobilier.

Sur la réparation des préjudices

Le principe de la réparation intégrale du préjudice subi impose que la personne à l’origine des désordres indemnise celui qui les a subis de l’intégralité de ces préjudices, à les supposer caractérisés.

Il appartient au juge d’évaluer le montant d’un dommage dont il constate l’existence dans son principe (ex. : Civ. 3ème, 25 janvier 2006, n° 04-20.726).

Sur ce,

La société Gaz Confort Plus forme les prétentions indemnitaires suivantes :

– 37.420,60 euros en réparation de son préjudice de jouissance subi, dans les proportions retenues par l’expert à l’encontre de la société Jacar Immobilier et du syndicat des copropriétaires, ou subsidiairement à la seule charge du syndicat des copropriétaires, dont à déduire la provision déjà versée de 12.565,81 euros en exécution de l’ordonnance de référé du 22 mars 2021, ;
– 12.000 euros en réparation de son préjudice de désorganisation et d’image, dans les proportions prescrites par le rapport d’expertise à l’encontre du syndicat des copropriétaires et de la société Jacar Immobilier, ou à défaut à la seule charge du syndicat des copropriétaires ;
– 877,61 euros au titre des frais de réfection du local à la charge de la société Jacar Immobilier, ou subsidiairement du syndicat des copropriétaires.

S’agissant du premier chef de préjudice dit « de jouissance », la société Gaz Confort Plus argue de ce qu’à la suite du sinistre survenu dans les locaux qu’elle louait pour son activité commerciale, elle a été totalement privée de la possibilité d’user et de jouir desdits locaux, ce qui lui a causé un préjudice qu’elle chiffre à 100% des loyers dus, entre le 09 novembre 2015 et le 07 avril 2021, date de paiement par le syndicat des copropriétaires des frais de remise en état des locaux, soit 582,15 euros x 64,28 mois = 37.420,60 euros.

Il est établi que le sinistre subi a empêché la société Gaz Confort Plus de continuer à exercer son activité au sein des locaux endommagés à compter du mois de novembre 2015 ; il n’est par ailleurs pas contesté que les travaux de réfection du mur pignon, partie commune de l’immeuble, ont été réceptionnés le 27 novembre 2018.

L’expert judiciaire a validé ce préjudice, sur la période des mois de novembre 2015 à fin février 2019, pour une somme de 13.969,02 euros.

Dans le cadre de la procédure en référé ayant donné lieu à l’ordonnance du 22 mars 2021, définitive, le juge de l’évidence a ainsi condamné, à titre provisionnel, le syndicat des copropriétaires à régler à la société Gaz Confort Plus la somme de 12.565,81 euros au titre du préjudice de jouissance constitué des loyers réglés sur la période de septembre 2016 à novembre 2018 inclus, soulignant que « alors que sur cette période le local n’était plus exploitable, alors que la société Gaz Confort Plus a été condamné en justice par une décision définitive à régler les loyers dus, et qu’elle justifie s’en acquitter auprès de son bailleur (courrier du 24 septembre 2020). (…) Le préjudice financier n’est plus subi par Mme [R] (…) mais par la société Gaz Confort Plus tenue par une décision de justice au respect de ses obligations contractuelles de son bail. Le chiffrage de son préjudice de jouissance à hauteur des loyers versés sur la période n’est pas contestable ».

Par conséquent, il convient de considérer comme établi le préjudice de jouissance de la société Gaz Confort Plus, pour la période entre le 09 novembre 2015 et la fin du mois de février 2019, correspondant au montant du loyer afférent aux locaux.

S’agissant de la période postérieure au mois de février 2019, il n’est pas contesté que la société Gaz Confort Plus n’a pas pu réintégrer les locaux faute de réalisation des travaux de remise en état des lieux, tels que validés par l’expert à hauteur de 8.776,10 euros (devis de la société Allazard, du 11 juin 2019) ; or ces travaux, ne consistant pas en de simples travaux d’embellissements, devaient être assumés financièrement par le ou les responsables des désordres.

Il doit d’ailleurs être relevé que le syndicat des copropriétaires n’a pas relevé appel de l’ordonnance de référé du 22 mars 2021 précitée ayant mis à sa charge, à titre provisionnel un quantum de 90% desdits frais de travaux.

Par conséquent il doit être également retenu comme établi le préjudice de jouissance, consistant en la perte des loyers versés en exécution du contrat de bail, subi par la société Gaz Confort Plus à compter du mois de février 2019 et jusqu’au 07 avril 2021, date de paiement par le syndicat des copropriétaires de la provision accordée à la société demanderesse par le juge des référés au titre des travaux querellés.

Il convient dès lors de lui allouer, en réparation, la somme de 37.420,60 euros, au paiement de laquelle le syndicat des copropriétaires sera seul condamné, et déduction faite la provision déjà versée de 12.565,81 euros en exécution de l’ordonnance de référé du 22 mars 2021.

Pour les même motifs développés supra, il convient de condamner le syndicat des copropriétaires à prendre en charge le reliquat des frais de remise en état du local sinistré, soit la somme de 877,61 euros.

Concernant le chef de préjudice dit de « désorganisation et d’image », si la société Gaz Confort Plus soutient que le sinistre objet du présent litige lui a causé des tracas d’ordre organisationnel et a terni son image, elle ne produit aucune pièce de nature à venir justifier dudit préjudice, que ce soit dans son principe ou dans son quantum.

Elle sera donc déboutée de sa demande indemnitaire à ce titre.

A l’encontre de la société Jacar Immobilier, le seul préjudice dont la société Gaz Confort Plus pouvait réclamer l’indemnisation, eu égard à son attitude d’inertie fautive dans la gestion du bien entre les mois de novembre 2015 et novembre 2016, n’est pas un préjudice de jouissance et/ ou matériel stricto sensu mais une perte de chance de voir se réaliser plus rapidement les travaux de remise en état des parties communes, ce qu’elle ne sollicite pas aux termes de ses dernières écritures, fût-ce à titre subsidiaire.

Elle sera donc également déboutée de ses demandes indemnitaires dirigées à l’encontre de la société Jacar Immobilier à ce titre.

Sur l’appel en garantie à l’encontre de la SA Generali Iard es qualité d’assureur du syndicat des copropriétaires

L’article 1353 alinéa 1 du code civil dispose que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ».

Il appartient à celui qui réclame le bénéfice de l’assurance d’établir que sont réunies les conditions requises par la police pour mettre en jeu cette garantie ; à l’inverse il revient à l’assureur de prouver l’exclusion ou la déchéance de garantie qu’il allègue.

Sur ce,

S’il le prétend, le syndicat des copropriétaires succombe à établir sa qualité d’assuré de la SA Generali Iard au moment de la survenance du sinistre, dès lors qu’il se contente de produire au débat des conditions générales, sans être accompagnées des conditions particulières applicables, ni la fiche d’information correspondante.

Le tribunal n’est ainsi pas en mesure de déterminer sir la police d’assurance dont le syndicat des copropriétaires sollicite le bénéfice trouvait à s’appliquer au moment dudit sinistre, et le cas échéant si et dans quelles conditions la garantie doit s’appliquer.

Par conséquent la demande de garantie du syndicat des copropriétaires auprès de la SA Generali Iard doit être rejetée.

Sur la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires

Aux termes de l’article 1240 du code civil, « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Sur ce fondement, il incombe à la partie demanderesse, de rapporter la triple preuve de l’existence, d’une faute d’un préjudice et d’un lien causal entre les deux.

L’article 9 du code de procédure civile dispose que « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

Sur ce,

Aux termes de ses dernières écritures, le syndicat des copropriétaires sollicite une répartition de la prise en charge des travaux de remise en état du local à concurrence de 50% à l’encontre de Mme [R].

Si, comme relevé supra, Mme [R] a manqué à son obligation de délivrance d’une chose conforme à son locataire en mettant à sa disposition un local dénué de système de ventilation réglementaire, il n’est pas établi que cette faute est à l’origine des désordres dénoncés au sein du local et ayant nécessité les travaux de remise en état litigieux.

En outre, la demande du syndicat des copropriétaires telle que formée au dispositif de ses écritures constitue une demande indéterminée, en l’absence de montant précisé du coût desdits travaux.

Pour l’ensemble de ces raisons, la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Partie succombant principalement au litige, le syndicat des copropriétaires sera condamné aux dépens ainsi qu’à verser à la société Gaz Confort Plus une somme de 4.000 euros et à Mme [R] une somme de 2.000 euros, le tout au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de rejeter la demande de la société Jacar Immobilier formée au même titre des frais irrépétibles.

En application de l’article 514 modifié par le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

Il n’y a pas lieu en l’espèce d’écarter l’exécution provisoire de droit.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6], à payer à la SARL Gaz Confort Plus les sommes de :

– 37.420,60 euros, déduction faite la provision déjà versée de 12.565,81 euros en exécution de l’ordonnance du président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé du 22 mars 2021,
– 877,61 euros au titre du reliquat des frais de réfection du local,

REJETTE le surplus des prétentions indemnitaires de la SARL Gaz Confort Plus,

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice, de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA Generali Iard, et de sa demande reconventionnelle de prise en charge à 50% des frais de remise en état du local par Mme [N] [R],

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice, à payer à la SARL Gaz Confort Plus une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice, à payer à Mme [N] [R] une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6], représenté par son syndic en exercice, aux dépens,

RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes,

Fait et jugé à Paris le 12 Mars 2024.

La GreffièreLa Présidente

 

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