En matière de calcul des cotisations dues à un service de santé au travail, il est cohérent tant du point de vue de la doctrine propre de l’article L. 4622-6 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi de 2016 que de celle du code du travail dans son ensemble que la référence au salarié soit considérée non individuellement, mais par équivalent temps plein travaillé.
l’article L. 4622-6 du code du travail impose des modalités d’ordre public de fixation des cotisations dues par les employeurs indépendantes de l’utilisation réelle des services de la médecine du travail par ses adhérents, il s’ensuit que les visites d’embauche, qui rentrent dans le périmètre des missions habituelles, et même obligatoires, de la médecine du travail, ne peuvent donner lieu à une facturation séparée, en fonction des prestations accomplies. D’ailleurs, la circulaire du ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 9 novembre 2012, faisant une exacte application de ces dispositions, rappelle à son point 1.2.2. ‘Une facturation complémentaire n’est envisageable que si l’entreprise a une demande particulière liée à des circonstances inhabituelles et ponctuelles (survenue d’un nouveau risque professionnel, accidents, etc.)’. L’ALSMT ne peut en conséquence se prévaloir de son règlement intérieur qui autorise la facturation à l’acte des visites d’embauche aux employeurs adhérents, alors qu’il est contraire aux dispositions d’ordre public de l’article L. 4622-6 du code du travail. Le mode de calcul des cotisations dues à un service de santé au travail inter-entreprises est régi par les dispositions d’ordre public de l’article L. 4622-6 du code du travail. Dans sa rédaction issue de la loi du 7 juillet 2016, applicable à la période litigieuse, ce texte précisait que ‘Dans le cas de services communs à plusieurs entreprises, ces frais sont répartis proportionnellement au nombre des salariés’. Ce texte a été modifié par la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021, entrée en vigueur le 31 mars 2022, et il énonce désormais que ‘Au sein des services communs à plusieurs établissements ou à plusieurs entreprises constituant une unité économique et sociale, ces frais sont répartis proportionnellement au nombre des salariés comptant chacun pour une unité’. La Cour de cassation, faisant application de ce texte dans sa rédaction antérieure à la loi du 2 août 2021 a jugé ‘qu’aux termes de l’article L. 4622-6 du code du travail, les cotisations dues par les employeurs lorsqu’ils adhèrent à un service de santé au travail interentreprises correspondent aux dépenses afférentes à ces services réparties proportionnellement au nombre de salariés ; qu’il en résulte que la cotisation doit être fixée à une somme, par salarié équivalent temps plein de l’entreprise, correspondant au montant total des dépenses engagées par le service de santé interentreprises auquel adhère l’employeur rapporté au nombre total de salariés pris en charge par l’organisme ; que seul peut être appliqué le cas échéant à ce calcul un coefficient déterminé correspondant au nombre de salariés nécessitant une surveillance médicale renforcée’ (Soc. 19 sept 2018, n°17-16.219). Le Conseil constitutionnel, par décision 2021-931 du 23 septembre 2021 rendu sur question proritaire de constitutionnalité, a déclaré que l’article L. 4622-6 du code de travail dans sa rédaction issue de la loi du 7 juillet 2016 tel qu’interprété par la Cour de cassation était conforme à la Constitution. La circulaire du ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 9 novembre 2012, régulièrement publiée sur le site gouvernemental (à l’adresse https://www.guide-iprp.fr/sites/resources/files/CIRCULAIRE_DGT_IPRP_9112012.pdf), qui certes n’a de valeur impérative que dans les rapports entre l’administration et les administrés aux termes de l’article L. 312-3 du code des relations entre le public et l’administration (qui limite la possibilité de s’en prévaloir lorsque l’application est réclamée ‘à une situation qui n’affecte pas les tiers’) et non une force obligatoire globale comme l’a indiqué par erreur le tribunal, adopte le même mode de calcul que celui retenu par la Cour de cassation en précisant que ‘le coût de l’adhésion à un SSTI est calculé selon l’effectif de chaque entreprise adhérente, défini selon les modalités des articles L. 1111-2 et L. 1111-3 du code du travail’, c’est à dire en ETP de salariés (point 1.2.2.). Cette circulaire a été soumise à la censure du Conseil d’Etat qui dans sa décision du 30 juin 2014, n°365071, a relevé qu’elle donnait une exacte interprétation de l’article L. 4622-6 du code du travail, qui vise ‘à garantir un mode de répartition des frais indépendant des prestations effectivement réalisées par les services de santé au travail interentreprises’ et présente ‘un caractère d’ordre public’. L’application du règlement intérieur d’une société ne saurait faire échec aux dispositions d’ordre public de l’article L. 4622-6 du code du travail. Comme relevé plus haut, la circulaire, régulièrement publiée, n’a de valeur impérative que dans les rapports entre l’administration et les administrés ; la position de l’administration peut guider le raisonnement mais ne saurait s’imposer à la cour dans le présent litige. Le fait que la Cour de cassation a procédé par voie d’un obiter dictum dans son arrêt du 19 septembre 2018 ne saurait en amoindrir la portée. Il ne peut être fait abstraction ni du fait que le raisonnement de la Cour de cassation a été déclaré conforme à la constitution, ni du fait que le Conseil d’Etat a adopté un raisonnement identique à l’occasion du recours contre la circulaire du ministère du travail qui approuve le même mode de calcul. En outre, il résulte des travaux parlementaires que la modification de l’article L. 4622-6 du code du travail résulte d’un amendement sénatorial sur examen d’une proposition de loi émanant de l’assemblée nationale, retenu par la commission mixte paritaire. Il ressort des rapports à la commission des lois à l’Assemblée nationale et au Sénat, du rapport à la commission mixte paritaire et des interventions des parlementaires que cet amendement, dans un contexte de transformation des missions des SSTI, avait pour objet de modifier le mode de calcul existant. l ne s’agit donc pas d’une loi interprétative, mais d’une loi ayant vocation à modifier le droit existant, applicable uniquement pour l’avenir. L’article L. 4622-6 du code du travail impose un mode de fixation des cotisations des entreprises adhérentes d’ordre public, qui décorrèle le calcul des cotisations des prestations effectivement réalisées au profit de chaque entreprise adhérente. Le moyen qui consiste à dire que la prise en compte du nombre réel de salariés en équivalent temps plein introduit une répartition non conforme à l’utilisation des services par les adhérentes n’est donc pas opérant. En outre, il résulte des dispositions, également d’ordre public, des articles L. 1111-1, L. 1111-2 et L. 1111-3 du code du travail, applicables ‘pour la mise en oeuvre des dispositions du présent code’ en son entier, qu’un salarié doit être décompté au prorata de son temps de présence, soit dans le cas des salariés à temps partiel ‘en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leurs contrats de travail par la durée légale ou la durée conventionnelle du travail’ et pour les salariés présents durant une partie de l’année ‘à due proportion de leur temps de présence’. |
→ Résumé de l’affaireLa SARL K MON, exploitant un restaurant KFC, a demandé à l’ALSMT une régularisation de ses cotisations sur la base du nombre de salariés en équivalent temps plein. L’ALSMT a rejeté la demande et a demandé le paiement des cotisations dues. Suite à un litige, le tribunal judiciaire de Nancy a ordonné à l’ALSMT de rembourser à la SARL K MON une somme trop perçue au titre des cotisations, d’annuler la suspension de la SARL K MON, et de la réintégrer avec effet rétroactif. L’ALSMT a fait appel de cette décision, demandant le remboursement des cotisations dues et des dommages et intérêts pour préjudice subi. La SARL K MON a également fait appel, demandant des dommages et intérêts pour le préjudice subi suite à la suspension des visites médicales. L’affaire est en attente de délibéré.
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→ Les points essentielsSur la demande de retrait des développements qualifiés de diffamatoires figurant dans les conclusions de la SARL KFC [Localité 2]L’ALSMT réclame la suppression de propos diffamatoires figurant dans les conclusions de la SARL KFC [Localité 2]. Cependant, la cour considère que ces propos s’inscrivent dans le cadre de la problématique juridique soulevée et ne portent pas atteinte à l’honneur de l’ALSMT. La demande de retrait est donc rejetée. Sur le mode de calcul des cotisations dues par l’adhérent à un service de santé au travail inter-entreprises (SSTI)La cour confirme le mode de calcul des cotisations des employeurs adhérents à un service de santé au travail inter-entreprises, conformément à l’article L. 4622-6 du code du travail. Ce mode de calcul est d’ordre public et ne peut être remis en cause par le règlement intérieur de l’ALSMT. La demande de l’ALSMT est rejetée. Sur la facturation séparée des visites d’embaucheLa cour confirme que les visites d’embauche ne peuvent pas faire l’objet d’une facturation séparée, conformément à l’article L. 4622-6 du code du travail. Le règlement intérieur de l’ALSMT ne peut pas déroger à ces dispositions d’ordre public. La demande de remboursement des visites médicales d’embauche est donc confirmée. Sur les cotisations de l’année 2019 et les frais de recouvrementLa cour confirme le jugement qui a rejeté la demande de paiement des cotisations de l’année 2019 par l’ALSMT. De plus, la SARL KFC [Localité 2] ne peut être tenue de rembourser les frais de recouvrement demandés par l’ALSMT, étant donné la situation de crédit de cette dernière envers l’adhérente. Sur la suspension et la réintégration de la SARL KFC [Localité 2] et la demande de dommages-intérêtsLa cour confirme la réintégration de la SARL KFC [Localité 2] et rejette la demande de dommages-intérêts de l’ALSMT. Le préjudice subi par la SARL KFC [Localité 2] résulte de son propre fait, et elle n’a pas justifié d’un préjudice résultant de sa suspension. Sur la demande de dommages-intérêts de l’ALSMT résultant de l’inexécution par la SARL KFC [Localité 2] de ses obligationsLa cour confirme le rejet de la demande de dommages-intérêts de l’ALSMT, étant donné sa position débitrice envers la SARL KFC [Localité 2]. Aucun préjudice n’a été subi par l’ALSMT du fait du retard de paiement de la cotisation. Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civileLa cour confirme la condamnation de l’ALSMT aux dépens et au paiement de l’article 700 du code de procédure civile à la SARL KFC [Localité 2]. L’ALSMT est également condamnée aux dépens d’appel et au paiement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel. Les montants alloués dans cette affaire: – L’ALSMT réclame la suppression des propos diffamatoires dans les conclusions de la SARL KFC [Localité 2]
– La SARL KFC [Localité 2] n’a pas fait valoir de moyen de défense dans ses dernières conclusions – L’ALSMT considère que les propos litigieux sont diffamatoires – La demande de retrait des propos diffamatoires est rejetée – La SARL KFC [Localité 2] conteste l’absence de publicité de la circulaire – La SARL KFC [Localité 2] conteste l’interprétation de la Cour de cassation sur le mode de calcul des cotisations – La SARL KFC [Localité 2] conteste le mode de calcul des cotisations de l’ALSMT – Le tribunal a condamné l’ALSMT à rembourser à la SARL KFC [Localité 2] la somme de 1363,20 euros – L’ALSMT réclame le paiement de 2623,20 euros au titre des cotisations 2019 et 160 euros de frais de recouvrement – Le jugement a confirmé que les cotisations ont été acquittées en juin 2020 – L’ALSMT a été condamnée à rembourser à la SARL KFC [Localité 2] les factures des visites médicales d’embauche – L’ALSMT a été condamnée à payer à la SARL KFC [Localité 2] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile – L’ALSMT a été condamnée à régler à la SARL KFC [Localité 2] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile |
→ Réglementation applicable– Code du Travail
– Code de Procédure Civile Article L. 4622-6 du Code du Travail: Article D. 4622-4 du Code du Travail: Article 699 du Code de Procédure Civile: Article 700 du Code de Procédure Civile: Article 29 de la Loi du 29 juillet 1881: Article 41 de la Loi du 29 juillet 1881: Article 56 du Code de Procédure Civile: Article 58 du Code de Procédure Civile: Article L.1111-2 du Code du Travail: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier:
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→ Mots clefs associés & définitions– SARL K MON
– Restaurant KFC – ALSMT – Cotisations – Salariés en équivalent temps plein – Suspension – Remboursement – Visites médicales – Dommages et intérêts – Frais de recouvrement – Tribunal judiciaire de Nancy – Appel – Code du travail – Circulaire du 9 novembre 2012 – Cour de cassation – Conseil constitutionnel – Litige – Préjudice – Huissier – Procédure civile – Appel incident – Plaidoirie – Délibéré – SARL: Société à responsabilité limitée
– KFC: Kentucky Fried Chicken – ALSMT: Allocation de solidarité spécifique aux travailleurs migrants – Cotisations: Sommes versées par les employeurs et les salariés pour financer la protection sociale – Salariés en équivalent temps plein: Nombre de salariés exprimé en équivalent temps plein – Suspension: Interruption temporaire d’une procédure ou d’un contrat – Remboursement: Action de rendre de l’argent à quelqu’un – Visites médicales: Examens médicaux obligatoires pour les salariés – Dommages et intérêts: Somme d’argent versée en réparation d’un préjudice – Frais de recouvrement: Frais engagés pour récupérer une somme due – Tribunal judiciaire de Nancy: Juridiction compétente pour les affaires judiciaires à Nancy – Appel: Recours formé contre une décision de justice – Code du travail: Ensemble des lois et règlements régissant les relations de travail – Circulaire du 9 novembre 2012: Document officiel émis par une autorité publique le 9 novembre 2012 – Cour de cassation: Juridiction suprême en France pour les affaires civiles et pénales – Conseil constitutionnel: Institution chargée de contrôler la conformité des lois à la Constitution – Litige: Conflit entre deux parties pouvant être porté devant un tribunal – Préjudice: Dommage subi par une personne du fait de l’action d’une autre – Huissier: Officier ministériel chargé de signifier des actes de justice – Procédure civile: Ensemble des règles régissant les litiges entre particuliers – Appel incident: Recours formé par l’intimé contre une partie de la décision de justice – Plaidoirie: Argumentation orale des avocats devant un tribunal – Délibéré: Délai pendant lequel les juges délibèrent avant de rendre leur décision. |