L’article L.214-3 du code de la propriété intellectuelle n’édicte aucune obligation de négociation préalable entre les organisations des artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes et les organisations d’utilisateurs de phonogrammes, ni aucune obligation quant à la mise en place par l’autorité publique de conditions censées permettre une telle négociation, relatives notamment à la désignation des branches d’activité et à la définition de la représentativité des organisations professionnelles visées à cet article.
Compétence du ministre de la culture
Le ministre de la culture était compétent, en application de l’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, en l’absence d’accord entre les professionnels concernés au sens de l’article L. 214-3, pour prendre les arrêtés nécessaires.
Aucune des 17 questions préjudicielles soumises par plusieurs exploitants de discothèques concernant les redevances SPRE dues au titre de leurs activités, n’ont convaincu les juridictions. La condition du caractère sérieux des difficultés soulevées n’était pas remplie.
Question préjudicielle : nécessité d’une difficulté sérieuse
Au sens de l’article 49 du code de procédure civile, lorsque la solution d’un litige dépend d’une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente. Elle sursoit à statuer jusqu’à la décision sur la question préjudicielle.
L’article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle organise un mécanisme de négociation d’accords spécifiques à chaque branche d’activité entre les organisations représentatives des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et des utilisateurs de phonogrammes.
L’article 24 de cette même loi prévoyait que le barème de la rémunération équitable serait fixé par une commission à défaut d’accord entre les organisations représentatives des bénéficiaires de la rémunération équitable et des utilisateurs redevables de ladite rémunération, intervenu dans les six mois de l’entrée en vigueur de la loi ou l’expiration du précédent accord ; de même, les versions ultérieures de ce texte, codifié à l’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, prévoyaient que barème de la rémunération équitable serait fixé par une commission à défaut d’accord entre les organisations représentatives des bénéficiaires de la rémunération équitable et des utilisateurs redevables, intervenu avant 30 juin 1986 ou à l’expiration du précédent accord.
Ces textes ne prévoyaient aucun formalisme pour constater le défaut d’accord. En outre, les décisions contestées de la commission sont prises au visa de la loi du 3 juillet 1985 et ‘notamment de son article 24″ (décision du 9 septembre 1987) ou des ‘article L. 214-1 à L. 214-5 (…) du code de la propriété intellectuelle’, de sorte que, comme le souligne la SPRE, ces visas valaient constatation par la commission que la condition de l’absence d’accord entre les bénéficiaires de la rémunération et les utilisateurs de phonogrammes dans le délai légal était remplie.
Il est donc indifférent, quant à la légalité des arrêtés et de celle, subséquente, des décisions prises à leur visa, que le ministre de la culture n’ait jamais pris, comme l’affirmait l’exploitant de discothèque, les dispositions réglementaires nécessaires à l’entrée en vigueur de l’article L. 214-3 CPI.
Position conforme du Conseil d’État
Au demeurant, dans un arrêt n° 86672 du 5 juillet 1989, rejetant la demande d’annulation de l’arrêté du 27 janvier 1987 du ministre de la culture, le Conseil d’Etat a considéré qu’au regard des termes mêmes du dernier alinéa de l’article 24 de la loi du 3 juillet 1985, qui dispose que les organisations appelées à désigner les membres de la commission ainsi que nombre de personnes que chacune est appelée à désigner sont déterminées par arrêtée du ministre chargé de la culture, ce dernier pouvait légalement fixer par arrêté la composition de la commission.
De même, est indifférente, en ce qui concerne la légalité des arrêtés, l’absence d’accord entre les organisations des bénéficiaires de la rémunération et des utilisateurs due au fait que les branches d’activité et les conditions de représentativité des organisations concernées n’aient jamais été définies.