Reconnaissance de la Faute Inexcusable de l’Employeur et Indemnisation des Victimes de l’Amiante en 10 Questions / Réponses

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Résumé de cette affaire : Monsieur [P] [R], employé par la société FONDERIES DU POITOU FONTE de 1991 à 2019, a été diagnostiqué avec une maladie professionnelle liée à l’inhalation de poussières d’amiante. Après la liquidation judiciaire de son employeur en 2019, il a reçu une indemnité de la CPAM pour son incapacité permanente. En novembre 2020, il a saisi le FIVA pour obtenir une indemnisation supplémentaire, qu’il a acceptée en février 2021. En juin 2021, il a demandé la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, ce qui a conduit à une action en justice en décembre 2021. Le tribunal a organisé les échanges de conclusions, et l’affaire a été plaidée en septembre 2024. Les liquidateurs de la société n’ont pas comparu, arguant que les créances n’avaient pas été déclarées avant la liquidation. La CPAM a indiqué qu’elle s’en remettait à la justice concernant la faute inexcusable et a précisé ses obligations de remboursement. Le tribunal a déclaré l’action recevable, a reconnu la faute inexcusable de l’employeur, et a fixé les indemnités dues à Monsieur [P] [R] et au FIVA.

Quels sont les délais de prescription pour agir en reconnaissance de la faute inexcusable ?

La prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable est régie par les articles L 431-2 et L 461-1 du Code de la sécurité sociale.

Ces articles stipulent que la victime d’une maladie professionnelle ou ses ayants droit disposent d’un délai de deux ans pour agir. Ce délai commence à courir à partir de l’un des événements suivants :

– La date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et son activité professionnelle.

– La cessation du travail en raison de la maladie constatée.

– La clôture de l’enquête.

– La cessation du paiement des indemnités journalières.

– La reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.

Il est important de noter que ce délai peut être interrompu par une action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.

Il ne recommencera à courir qu’à partir de la décision ayant reconnu ce caractère professionnel.

Dans le cas de Monsieur [R], le délai a commencé à courir le 13 juillet 2020, date à laquelle il a eu connaissance de la prise en charge de sa maladie professionnelle.

Quelles sont les conditions de recevabilité de l’action du FIVA en tant que créancier subrogé ?

L’article 53 de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 établit les conditions de recevabilité de l’action du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) en tant que créancier subrogé.

Selon le IV de cet article, l’acceptation de l’offre du FIVA ou une décision juridictionnelle définitive rend irrecevable toute autre action en réparation du même préjudice.

Le VI de la même loi précise que le FIVA est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage.

Cela signifie que le FIVA peut agir en justice pour obtenir réparation des préjudices qu’il a indemnisés, mais uniquement à hauteur des sommes qu’il a versées.

Dans le cas de Monsieur [R], le FIVA a été reconnu comme créancier subrogé après l’acceptation de son offre, ce qui lui permet d’agir en justice pour obtenir des indemnisations.

Le FIVA peut-il agir au nom d’un conjoint survivant de la victime de l’amiante ?

L’article 117 du Code de procédure civile stipule que le défaut de pouvoir d’une personne représentant une autre en justice constitue une irrégularité de fond, entraînant la nullité de l’acte de procédure.

De plus, l’article L 142-9 du Code de la sécurité sociale énonce les personnes qui ont qualité pour représenter les parties.

Il en résulte que le FIVA, en tant que créancier subrogé, n’a pas le pouvoir de représenter la victime ou ses ayants droit, y compris un éventuel conjoint survivant.

Ainsi, toute demande formée au nom du conjoint survivant de Monsieur [R] sera déclarée irrecevable, car le FIVA n’a pas le pouvoir de le représenter en justice.

Quelles sont les conséquences d’une procédure collective sur la recevabilité de l’action ?

Les articles L 452-1 et suivants du Code de la sécurité sociale, ainsi que les articles L 622-21 et L 641-3 du Code de commerce, précisent que l’indemnisation complémentaire allouée à la victime d’une faute inexcusable de l’employeur est versée directement aux bénéficiaires par la caisse primaire d’assurance maladie.

Cette caisse récupère le montant auprès de l’employeur.

Ainsi, la victime qui ne demande pas la condamnation de la société en liquidation judiciaire au paiement d’une somme d’argent n’a pas à déclarer sa créance et est recevable à voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.

Cependant, les sommes avancées par la CPAM pour lesquelles elle sollicite le remboursement de la SAS FONDERIE DU POITOU FONTE ne pourront pas être mises à la charge de la liquidation, faute de déclaration de créance dans les délais légaux.

Quelles sont les conditions pour établir la faute inexcusable de l’employeur ?

L’article L 461-1 du Code de la sécurité sociale présume d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles.

Pour établir la faute inexcusable de l’employeur, il faut démontrer que ce dernier avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour le protéger.

Cette obligation de sécurité de résultat est renforcée par les articles L. 4121-1 du Code du travail et L. 452-1 du Code de la sécurité sociale.

Il est indifférent que la faute inexcusable ait été la cause déterminante de l’accident ; il suffit qu’elle en ait été une cause nécessaire.

Dans le cas de Monsieur [R], il a été prouvé que la SAS FONDERIE DU POITOU FONTE avait connaissance des dangers liés à l’amiante et n’a pas pris de mesures pour protéger ses employés.

Comment se calcule la majoration des indemnités en cas de faute inexcusable ?

L’article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale prévoit que l’assuré, victime d’une faute inexcusable de son employeur, a droit à une majoration des indemnités déjà perçues.

Si ces indemnités ont été perçues sous forme de capital, la majoration ne peut excéder ce montant.

En cas de rente, la majoration est déterminée de manière à ce que la rente majorée ne puisse excéder la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité ou le montant du salaire en cas d’incapacité totale.

Cette majoration suit l’évolution du taux d’incapacité reconnu à la victime.

Dans le cas de Monsieur [R], la majoration de l’indemnité en capital a été fixée à son maximum légal, soit 1.983,69 euros.

Quels sont les préjudices réparables en cas de souffrances physiques et morales ?

L’article L 452-3 du Code de la sécurité sociale permet à la victime de demander des réparations pour les souffrances physiques et morales, ainsi que pour les préjudices esthétiques, d’agrément et résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

Ces réparations sont versées directement aux bénéficiaires par la caisse, qui en récupère le montant auprès de l’employeur.

Dans le cas de Monsieur [R], les pièces médicales et les attestations de ses proches ont permis d’établir des souffrances physiques et morales, justifiant une indemnité totale de 19.800 euros, dont 19.300 euros pour la souffrance morale et 500 euros pour la souffrance physique.

Comment est évalué le préjudice d’agrément ?

Le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique, qu’elle soit sportive ou de loisir.

Conformément à l’article 1353 du Code civil, il appartient à celui qui se prévaut d’un tel préjudice de prouver la pratique effective de cette activité jusqu’à la survenance de la maladie ou de l’accident.

Dans le cas de Monsieur [R], bien qu’il ait été indemnisé d’un préjudice d’agrément à hauteur de 2.400 euros, seules deux attestations de ses proches ont été fournies pour justifier de l’impossibilité d’exercer ses activités favorites.

Ainsi, l’indemnité a été fixée à 300 euros.

Quelles sont les implications des frais irrépétibles et des dépens dans ce type d’affaire ?

Les frais irrépétibles et les dépens sont des frais exposés devant le tribunal, rendus nécessaires par la procédure.

L’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel, ne fait pas obstacle à ce qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime puisse demander la réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale.

Cependant, les frais exposés ne sont pas compris dans les sommes que la caisse doit avancer.

Ainsi, le FIVA et Monsieur [R] ne pourront pas mettre à la charge de la liquidation judiciaire de l’employeur les dépens et les frais irrépétibles, qui resteront à leur charge.

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