M. [N] [G] a été engagé par la société Fashion Partner Network en tant que responsable exploitation transport. Il a été licencié pour faute grave, ce qu’il conteste devant le conseil de prud’hommes. Suite à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de la société, le tribunal a jugé que le licenciement était justifié. M. [G] a interjeté appel et demande diverses indemnités, notamment pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, heures supplémentaires, dommages et intérêts pour préjudice moral, etc. La société demande la confirmation du jugement initial. L’Unedic demande également la confirmation du jugement et limite les indemnités pour licenciement injustifié. Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 16 janvier 2024.
Sur le bien-fondé du licenciement
La société a licencié le salarié pour faute grave, invoquant des agissements mettant en péril l’intégrité physique et morale de ses agents de sécurité. Cependant, le salarié conteste les faits et soutient que le licenciement est injustifié. Après examen des éléments fournis par les parties, la cour conclut que le licenciement n’est ni fondé sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse.
Sur les circonstances brutales et vexatoires entourant le licenciement
Le salarié allègue avoir été licencié de manière brutale et vexatoire pour des motifs calomnieux. Cependant, la société conteste ces allégations et la cour ne retient aucune circonstance brutale et vexatoire entourant le licenciement.
Sur la remise tardive des documents de fin de contrat
Le salarié critique le délai de remise de ses documents de fin de contrat par la société. Cependant, la cour estime que le délai n’est pas déraisonnable et que le salarié n’a pas subi de préjudice causé par ce délai.
Sur les violences volontaires avec arme par destination par les agents de sécurité, la dégradation du véhicule du salarié, la fouille illégale du véhicule et l’entrave à sa liberté d’aller et venir injustifiée
Le salarié demande une indemnisation pour les violences, la dégradation de son véhicule, la fouille illégale et l’entrave à sa liberté. Cependant, faute de preuves, la cour déboute le salarié de ses demandes.
Sur le remboursement de réparations du véhicule du salarié
La cour rejette la demande de remboursement des réparations du véhicule du salarié, faute de preuves établissant les dégradations causées par les agents de sécurité.
Sur les heures supplémentaires, le dépassement du contingent d’heures supplémentaires, les violations des durées maximales de travail et le manquement à l’obligation de sécurité
Le salarié réclame le paiement d’heures supplémentaires non rémunérées. Après analyse des éléments fournis, la cour accorde une somme au salarié au titre des heures supplémentaires.
Sur l’indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé
La cour ne retient pas la matérialité d’une situation de travail dissimulé au sens de la loi.
Sur les intérêts au taux légal et leur capitalisation
Les rappels de salaire et autres indemnités porteront intérêts au taux légal. La cour ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par la loi.
Sur la remise de documents
La société est condamnée à remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi conformes aux dispositions de l’arrêt.
Sur la garantie de l’AGS
L’AGS devra procéder à l’avance des créances conformément aux dispositions légales.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société est condamnée aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser une somme au salarié au titre des frais de procédure.
1. Il est essentiel pour l’employeur de fournir des éléments concrets et probants pour justifier un licenciement pour faute grave. Il est de sa responsabilité de prouver la réalité et la gravité des faits invoqués.
2. Il est important de respecter les procédures internes de l’entreprise, telles que le règlement intérieur, en ce qui concerne les fouilles des salariés. Tout manquement à ces règles peut remettre en cause la légalité des actions de l’employeur.
3. En cas de litige concernant les heures supplémentaires, il est primordial pour le salarié de présenter des éléments précis et vérifiables pour étayer sa demande. De même, l’employeur doit être en mesure de contrôler et de justifier les heures de travail effectuées par le salarié.
————————-
Sur le bien-fondé du licenciement
La lettre de licenciement pour faute grave notifié au salarié qui circonscrit le litige est ainsi rédigée :
‘(…) le 20 septembre 2019.
A cette date, nous pris connaissance de ce que vous aviez chargé dans votre véhicule de la marchandise en provenance de notre cliente, la société Nike qui avait été réceptionnée à tort à l’entrepôt auquel vous étiez affecté à [Localité 7].
(…)
Le 20 septembre 2019, la société de sécurité SRT a ainsi été mandatée par notre société pour effectuer des contrôles des biens transportés aux accès de l’entreprise. A leur arrivée, lesdits agents vous ont croisé alors que vous vous apprêtiez à quitter les lieux à bord de votre véhicule personnel. Ceux-ci en ont profité pour vous demander de les orienter vers le responsable exploitation transport de l’entrepôt, ce à quoi vous avez répondu qu’il s’agissait de vous.
Ceux-ci se sont alors présentés à vous et ont exposé les raisons de leur présence et vous ont proposé de démarrer par une vérification auprès de vous puisque vous étiez sur le point de quitter l’entrepôt.
Vous avez alors accepté de vous soumettre volontairement à ce contrôle en ouvrant votre coffre et en ouvrant une glacière se trouvant à l’avant de votre véhicule dans laquelle vous aviez annoncé la présence d’une gamelle, à la demande de l’un des deux agents de sécurité.
A l’ouverture de la glacière, les agents de sécurité de la société SRT ont toutefois aperçu qu’elle contenait des tee-shirts de la marque Nike encore placés dans leur emballage.
Après vérification des marchandises, il est apparu que ces marchandises avaient été réceptionnées au sein de notre entrepôt de [Localité 7], au cours de la semaine du 9 au 13 septembre 2019 pour le compte de notre cliente, la société Nike. Ces marchandises devaient, plus précisément, être distribuées dans différents points de vente situés en Ile-de-France. Il est toutefois apparu que dans le lot desdites marchandises, deux cartons nous avaient été livrés par erreur. Ces cartons contenant également des marchandises de la marque Nike étant destinés à une distribution au Royaume-Uni, votre supérieur hiérarchique vous a demandé d’organiser le retour de ces cartons en vue de leur réacheminement vers le bon destinataire.
En dépit de la demande qui vous a été faite, ces deux cartons n’ont jamais été réexpédiés au Royaume-Uni. Les marchandises correspondent bien aux marchandises identifiées par les agents de sécurité le 20 septembre 2019.
Conscient de la grave violation de vos obligations professionnelles les plus élémentaires et craignant manifestement d’avoir à affronter les services de police, vous avez fait preuve d’une forte agressivité à l’égard des agents de sécurité et également de votre supérieur hiérarchique que ceux-ci avaient contacté par téléphone. Vous avez alors interrompu la discussion téléphonique et brusquement regagné le volant de votre véhicule pour quitter l’entreprise dans la plus grande précipitation. Surpris par votre attitude, les agents de sécurité ont tenté de vous arrêter en plaçant des poubelles devant la barrière de sortie des véhicules.
Vous vous êtes alors adonné à une surenchère à l’agressivité en fonçant sur lesdites poubelles et sur l’un des deux agents.
Par votre attitude, vous avez mis en péril l’intégrité physique de cet agent et porté gravement atteinte à l’intégrité morale de ces deux agents qui ressortent extrêmement choqués de l’attitude que vous avez adoptée, à tel point qu’ils n’ont pu poursuivre la mission pour laquelle ils avaient été mandatés par la société.
(…)
Dans ce contexte et compte tenu de la gravité de vos agissements et pour préserver nos intérêts commerciaux et notre climat social, votre maintien dans l’entreprise est impossible. Votre licenciement pour faute grave prend donc effet immédiatement, sans préavis ni indemnité de licenciement.
(…).
Contestant les faits en cause, le salarié soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en ce que ceux-ci ne sont pas établis par l’employeur, que les motifs du licenciement ont été inventés de toutes
Réglementation applicable
– Code du travail
– Code civil
– Code de commerce
– Code de procédure civile
– Code de la sécurité sociale
Avocats
– Me Nadia BOUZIDI-FABRE
– Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU
– Me Claude-Marc BENOIT
Mots clefs
– Licenciement pour faute grave
– Marchandise de la société Nike
– Contrôle des biens transportés
– Agents de sécurité de la société SRT
– Violation des obligations professionnelles
– Agressivité envers les agents de sécurité
– Intégrité physique et morale
– Faute grave
– Preuve de la faute grave
– Contestation des faits
– Jugement du tribunal correctionnel de Meaux
– Cause réelle et sérieuse du licenciement
– Faute grave imputable au salarié
– Preuve de la faute grave par l’employeur
– Contrôle du véhicule du salarié
– Droit d’opposition à la fouille
– Règlement intérieur de l’entreprise
– Fouille du salarié
– Déroulement du contrôle
– Respect des droits du salarié
– Indemnités de rupture
– Indemnité compensatrice de préavis
– Indemnité compensatrice de congés payés
– Indemnité légale de licenciement
– Rappel de salaire
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– Indemnité pour licenciement injustifié
– Procédure de redressement judiciaire
– Plan de redressement de la société
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– Violences volontaires avec arme par destination
– Dégradation du véhicule du salarié
– Fouille illégale du véhicule
– Entrave à la liberté d’aller et venir
– Remboursement des réparations du véhicule
– Heures supplémentaires
– Dépassement du contingent d’heures supplémentaires
– Violations des durées maximales de travail
– Obligation de sécurité
– Travail dissimulé
– Intérêts au taux légal
– Capitalisation des intérêts
– Remise de documents
– Garantie de l’AGS
– Dépens et frais irrépétibles
Définitions juridiques
————————-
– Licenciement pour faute grave: rupture du contrat de travail motivée par une faute grave commise par le salarié
– Marchandise de la société Nike: produits fabriqués et commercialisés par la société Nike
– Contrôle des biens transportés: vérification des marchandises transportées pour des raisons de sécurité
– Agents de sécurité de la société SRT: employés chargés de la sécurité au sein de la société SRT
– Violation des obligations professionnelles: non-respect des devoirs et responsabilités liés au travail
– Agressivité envers les agents de sécurité: comportement violent ou hostile envers les agents de sécurité
– Intégrité physique et morale: préservation de l’intégrité physique et psychologique d’une personne
– Faute grave: manquement grave aux obligations professionnelles pouvant justifier un licenciement
– Preuve de la faute grave: éléments permettant d’établir la réalité et la gravité de la faute commise
– Contestation des faits: remise en cause des accusations portées à l’encontre du salarié
– Jugement du tribunal correctionnel de Meaux: décision rendue par le tribunal correctionnel de Meaux
– Cause réelle et sérieuse du licenciement: motif légitime et justifié de la rupture du contrat de travail
– Faute grave imputable au salarié: faute grave dont le salarié est responsable
– Preuve de la faute grave par l’employeur: éléments permettant à l’employeur de prouver la faute grave du salarié
– Contrôle du véhicule du salarié: vérification du véhicule utilisé par le salarié dans le cadre de son travail
– Droit d’opposition à la fouille: possibilité pour le salarié de s’opposer à une fouille
– Règlement intérieur de l’entreprise: ensemble des règles et consignes à respecter au sein de l’entreprise
– Fouille du salarié: vérification du contenu des effets personnels du salarié
– Déroulement du contrôle: manière dont le contrôle des biens transportés ou du véhicule du salarié est effectué
– Respect des droits du salarié: garantie du respect des droits et libertés du salarié
– Indemnités de rupture: sommes versées au salarié en cas de rupture du contrat de travail
– Indemnité compensatrice de préavis: compensation financière versée au salarié en cas de rupture du contrat de travail sans préavis
– Indemnité compensatrice de congés payés: indemnité versée au salarié pour compenser les congés payés non pris
– Indemnité légale de licenciement: indemnité prévue par la loi en cas de licenciement
– Rappel de salaire: paiement des sommes dues au salarié pour des périodes de travail passées
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse: indemnité versée au salarié en cas de licenciement jugé injustifié
– Indemnité pour licenciement injustifié: indemnité versée au salarié en cas de licenciement jugé injustifié par le tribunal
– Procédure de redressement judiciaire: procédure permettant à une entreprise en difficulté de se restructurer
– Plan de redressement de la société: plan visant à redresser la situation financière et économique de l’entreprise
– Violences volontaires avec arme par destination: agression commise avec une arme par destination
– Dégradation du véhicule du salarié: dommages causés au véhicule utilisé par le salarié dans le cadre de son travail
– Fouille illégale du véhicule: vérification du véhicule du salarié effectuée de manière illégale
– Entrave à la liberté d’aller et venir: restriction injustifiée de la liberté de déplacement d’une personne
– Remboursement des réparations du véhicule: remboursement des frais de réparation du véhicule du salarié
– Heures supplémentaires: heures travaillées en plus de la durée légale du travail
– Dépassement du contingent d’heures supplémentaires: dépassement de la limite légale d’heures supplémentaires autorisées
– Violations des durées maximales de travail: non-respect des limites légales de durée du travail
– Obligation de sécurité: devoir de l’employeur de garantir la sécurité et la santé des salariés au travail
– Travail dissimulé: pratique illégale consistant à ne pas déclarer un travailleur ou à dissimuler une partie de son activité
– Intérêts au taux légal: ta
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 8
ARRET DU 07 MARS 2024
(n° , 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02574 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDLF2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Février 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DE MEAUX – RG n° F 20/00227
APPELANT
Monsieur [N] [G]
[Adresse 8]
[Localité 4] (PORTUGAL)
Représenté par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
INTIMÉES
Société NX LIFESTYLE LOGISTICS FRANCE anciennement FASHION PARTNER
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
S.E.L.A.R.L. GARNIER [V] prise en la personne de Maître [A] [V] en qualité de commissaire à l’exécution du plan
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 5]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Claude-Marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Isabelle MONTAGNE, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Isabelle MONTAGNE, présidente, rédactrice
Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente
Madame Sandrine MOISAN, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Madame Isabelle MONTAGNE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet à compter du 27 octobre 2017, M. [N] [G] a été engagé par la société Fashion Partner Network, qui exerce une activité de commissionnaire de transports multimodaux, dépôt et entreposage de marchandises, logistique et activités annexes, en qualité de responsable exploitation transport, statut agent de haute maîtrise, annexe 3 – groupe 6, coefficient 200, en référence aux dispositions de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.
Il exerçait ses fonctions de nuit au sein de l’établissement situé à [Localité 7].
Par lettre datée du 20 septembre 2019, l’employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 1er octobre suivant et l’a mis à pied à titre conservatoire à compter du 20 septembre 2019 à 9h30, puis par lettre datée du 10 octobre 2019, lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Par lettres datées des 30 octobre et 28 novembre 2019, le salarié, par l’intermédiaire respectivement de son assureur de protection juridique et de son conseil, a contesté le motif de son licenciement.
Le 29 avril 2020, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Meaux afin de faire juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d’obtenir la condamnation de son ancien employeur à lui payer des heures supplémentaires et diverses indemnités tant au titre de l’exécution que de la rupture du contrat de travail.
Par jugement du 3 juin 2020, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Fashion Partner Network. Par jugement du 24 septembre 2020, la même juridiction a nommé la SELARL Garnier-[V] en la personne de maître [A] [V] en qualité de co-mandataire judiciaire de ladite société.
Par jugement mis à disposition le 9 février 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont dit que le licenciement pour faute grave est justifié, ont débouté M. [G] de toutes ses demandes, ont débouté la société et les organes de la procédure collective de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et ont laissé les dépens à la charge de M. [G].
Le 9 mars 2021, M. [G] a interjeté appel à l’encontre de ce jugement en intimant notamment la SELARL Garnier-[V] en la personne de maître [A] [V].
Par jugement du 25 mars 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a arrêté un plan de redressement de la société pour une durée de dix ans et a désigné la SELARL Garnier-[V] en la personne de maître [A] [V] en qualité de commissaire à l’exécution du plan.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 10 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, M. [G] demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, en conséquence, de fixer la moyenne des salaires à la somme de 4 446,26 euros bruts, de dire que le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse, vu le plan de continuation adopté pour la société NX Lifestyle Logistics France anciennement Fashion Partner, de la condamner à régler les sommes suivantes, au besoin d’ordonner la fixation au passif de la procédure collective de la société NX Lifestyle Logistics France ses créances, se présentant comme suit :
* 8 892,52 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
* 889,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
* 2 362,07 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
* 1 970,76 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied du 20/09 au 10/10/2019,
* 197,07 euros au titre des congés payés afférents à la mise à pied du 20/09 au 10/10/2019,
* 8 892,52 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 13 338 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de son licenciement brutal et vexatoire,
* 4 446,26 euros à titre de dommages et intérêts pour la remise tardive de son solde de tout compte et des documents sociaux,
* 1 794,72 euros à titre de remboursement de la réparation de son véhicule du fait de sa dégradation par les agents de sécurité,
* 1 338 euros à titre de dommages et intérêts pour les violences volontaires avec arme par destination par les agents de sécurité, la dégradation de son véhicule, la fouille illégale du véhicule et l’entrave à sa liberté d’aller et venir,
* 34 682,16 euros à titre de rappels de salaire pour les heures supplémentaires pour la période du 27/10/2017 au 20/09/2019,
* 3 468,21 euros au titre des congés payés afférents,
* 16 100 euros au titre des repos compensateurs au-delà du contingent annuel pour les années 2018 et 2019,
* 1 610 euros au titre des congés payés afférents,
* 26 677 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
* 13 338 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation en matière de durée du travail et pour non-respect de l’obligation de sécurité de résultat en matière de protection de sa santé et de sa sécurité,
* 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
d’ordonner l’application des intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts, les entiers dépens, la remise des bulletins de salaire et de l’attestation Pôle emploi conformes, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de déclarer l’arrêt à intervenir et les condamnations prononcées opposables à l’AGS, qui garantira les créances.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 18 décembre 2023 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la société NX Lifestyle Logistics France, anciennement Fashion Partner, demande à la cour de confirmer le jugement, de :
– à titre principal, dire que le salaire de référence s’élève à 3 933,89 euros bruts et que le licenciement pour faute grave est fondé, débouter M. [G] de l’ensemble de ses demandes et le condamner à lui verser 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau en application de l’article 699 du code de procédure civile,
– à titre subsidiaire, dire que les griefs ayant fondé le licenciement constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement, limiter l’indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 7 299,73 euros bruts et l’indemnité de congés payés y afférents à hauteur de 729,97 euros bruts, l’indemnité légale de licenciement à hauteur de 2 045,62 euros, le rappel de salaire au titre de la période de mise à pied conservatoire à hauteur de 1 970,76 euros bruts et l’indemnité de congés payés y afférents à hauteur de 197,07 euros bruts et débouter celui-ci de toutes ses autres demandes indemnitaires,
– à titre infiniment subsidiaire, limiter à la somme de 3 933,89 euros les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et le débouter de toutes ses autres demandes,
– en tout état de cause, le condamner à lui verser 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 4 juin 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, l’Unedic, délégation CGEA, AGS d’Ile de France Est demande à la cour de :
– à titre principal, confirmer le jugement et débouter M. [G] de ses demandes,
– à titre subsidiaire, limiter à un mois l’indemnité pour licenciement injustifié, ‘fixer au passif de la liquidation les créances retenues’, lui dire le jugement opposable dans les termes et conditions de l’article L. 3253-19 du code du travail, vu les articles L. 3253-6, L. 3253-8 et L. 3253-17 du code du travail, dans la limite du plafond 5 toutes créances brutes confondues, exclure de l’opposabilité la créance éventuellement fixée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’astreinte, rejeter la demande d’intérêts légaux et dire ce que de droit quant aux dépens sans qu’ils puissent être mis à sa charge.
Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 16 janvier 2024.
MOTIVATION
Sur le bien-fondé du licenciement
La lettre de licenciement pour faute grave notifié au salarié qui circonscrit le litige est ainsi rédigée :
‘(…) le 20 septembre 2019.
A cette date, nous pris connaissance de ce que vous aviez chargé dans votre véhicule de la marchandise en provenance de notre cliente, la société Nike qui avait été réceptionnée à tort à l’entrepôt auquel vous étiez affecté à [Localité 7].
(…)
Le 20 septembre 2019, la société de sécurité SRT a ainsi été mandatée par notre société pour effectuer des contrôles des biens transportés aux accès de l’entreprise. A leur arrivée, lesdits agents vous ont croisé alors que vous vous apprêtiez à quitter les lieux à bord de votre véhicule personnel. Ceux-ci en ont profité pour vous demander de les orienter vers le responsable exploitation transport de l’entrepôt, ce à quoi vous avez répondu qu’il s’agissait de vous.
Ceux-ci se sont alors présentés à vous et ont exposé les raisons de leur présence et vous ont proposé de démarrer par une vérification auprès de vous puisque vous étiez sur le point de quitter l’entrepôt.
Vous avez alors accepté de vous soumettre volontairement à ce contrôle en ouvrant votre coffre et en ouvrant une glacière se trouvant à l’avant de votre véhicule dans laquelle vous aviez annoncé la présence d’une gamelle, à la demande de l’un des deux agents de sécurité.
A l’ouverture de la glacière, les agents de sécurité de la société SRT ont toutefois aperçu qu’elle contenait des tee-shirts de la marque Nike encore placés dans leur emballage.
Après vérification des marchandises, il est apparu que ces marchandises avaient été réceptionnées au sein de notre entrepôt de [Localité 7], au cours de la semaine du 9 au 13 septembre 2019 pour le compte de notre cliente, la société Nike. Ces marchandises devaient, plus précisément, être distribuées dans différents points de vente situés en Ile-de-France. Il est toutefois apparu que dans le lot desdites marchandises, deux cartons nous avaient été livrés par erreur. Ces cartons contenant également des marchandises de la marque Nike étant destinés à une distribution au Royaume-Uni, votre supérieur hiérarchique vous a demandé d’organiser le retour de ces cartons en vue de leur réacheminement vers le bon destinataire.
En dépit de la demande qui vous a été faite, ces deux cartons n’ont jamais été réexpédiés au Royaume-Uni. Les marchandises correspondent bien aux marchandises identifiées par les agents de sécurité le 20 septembre 2019.
Conscient de la grave violation de vos obligations professionnelles les plus élémentaires et craignant manifestement d’avoir à affronter les services de police, vous avez fait preuve d’une forte agressivité à l’égard des agents de sécurité et également de votre supérieur hiérarchique que ceux-ci avaient contacté par téléphone. Vous avez alors interrompu la discussion téléphonique et brusquement regagné le volant de votre véhicule pour quitter l’entreprise dans la plus grande précipitation. Surpris par votre attitude, les agents de sécurité ont tenté de vous arrêter en plaçant des poubelles devant la barrière de sortie des véhicules.
Vous vous êtes alors adonné à une surenchère à l’agressivité en fonçant sur lesdites poubelles et sur l’un des deux agents.
Par votre attitude, vous avez mis en péril l’intégrité physique de cet agent et porté gravement atteinte à l’intégrité morale de ces deux agents qui ressortent extrêmement choqués de l’attitude que vous avez adoptée, à tel point qu’ils n’ont pu poursuivre la mission pour laquelle ils avaient été mandatés par la société.
(…)
Dans ce contexte et compte tenu de la gravité de vos agissements et pour préserver nos intérêts commerciaux et notre climat social, votre maintien dans l’entreprise est impossible. Votre licenciement pour faute grave prend donc effet immédiatement, sans préavis ni indemnité de licenciement.
(…)’.
Contestant les faits en cause, le salarié soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en ce que ceux-ci ne sont pas établis par l’employeur, que les motifs du licenciement ont été inventés de toutes pièces dans le but de faire l’économie de mesures de reclassement, d’accompagnement et d’indemnisation quelques mois avant un accord de restructuration prévoyant des départs négociés, qu’en outre, la fouille de son véhicule par les agents de sécurité le 20 septembre 2019 à 4h30 était illégale, n’ayant pas été informé de ses droits, notamment de son droit d’opposition, et celle-ci ayant été effectuée en dehors de son consentement et en l’absence d’un tiers, conditions exigées par la loi et le règlement intérieur, qu’il a été l’objet d’un stratagème déloyal et illégal organisé par l’employeur.
La société conclut à l’existence d’une faute grave justifiant le licenciement en faisant valoir qu’alors qu’il faisait l’objet d’une opération de contrôle de son véhicule par des agents de sécurité à laquelle il avait donné son consentement, selon un mode opératoire régulièrement exécuté au sein de la société, le salarié, après la découverte d’un sac contenant des tee-shirts de marque Nike encore sous emballage, s’est soudainement soustrait à la fouille en refusant d’obtempérer à plusieurs reprises, en regagnant son véhicule, en quittant l’entreprise dans une grande précipitation et en fonçant sur un agent de sécurité et des poubelles que ce dernier avait placées pour l’empêcher de partir, que celui-ci a été déclaré coupable de ces faits par un jugement du tribunal correctionnel de Meaux du 23 juin 2023.
En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur qui l’invoque.
Au soutien de la faute grave, la société produit aux débats un compte-rendu d’incident non signé, établi par la société de sécurité SRT, les procès-verbaux de plaintes déposées le 20 septembre 2019 par M. [S] [O], agent de sécurité de la société SRT, victime des agissements du salarié et par M. [Z] [W], directeur, représentant la société Fashion Partners, une déclaration à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) de la mise en place d’une vidéo-surveillance dans la société, un contrat de prestation de services conclu avec la société SRT et son avenant, des pièces relatives à sa plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d’instruction du tribunal judiciaire de Meaux en date du 26 avril 2021 à la suite du classement sans suite de la procédure par le parquet et un jugement du tribunal correctionnel de Meaux du 23 juin 2023.
Le salarié produit son procès-verbal de plainte datée du 7 février 2020 pour dégradations de son véhicule, fouille de son véhicule et entrave à sa liberté d’aller et venir le 20 septembre 2019, un devis de réparation de la carrosserie de son véhicule daté du 2 mars 2020 ne comportant pas de cachet de la société émettrice, un document manuscrit établi par M. [Y], agent cynophile, sans précision de l’identité de son employeur, un avis de classement sans suite de la plainte de M. [O] à son encontre et le règlement intérieur de la société.
Force est en premier lieu de constater que M. [G] n’était pas présent, ni représenté à l’audience du tribunal correctionnel de Meaux du 23 juin 2023 l’ayant déclaré coupable de faits de vol avec violence n’ayant pas entraîné une incapacité totale de travail commis le 20 septembre 2019 à [Localité 7] sur la personne de M. [S] [O]. M. [G] indique qu’ayant déménagé, il n’a pas eu connaissance de cette audience, qu’il n’a jamais reçu la notification de ce jugement et n’a donc pas pu en interjeter appel, la société ne le lui ayant pas signifié. La société ne produit aucun élément en réponse à cette argumentation, sans cependant contester la caractère non définitif de ce jugement. Dans ces conditions, la cour ne peut que constater l’absence de caractère définitif de cette décision pénale, de sorte que celle-ci n’a pas autorité absolue en ce qui concerne ce qui a été jugé quant à l’existence du fait incriminé, sa qualification et la culpabilité ou l’innocence du salarié auquel le fait est imputé.
Par ailleurs, la société ne produit aucune pièce relative tant aux deux cartons de la marque Nike et leurs marchandises en cause, qu’à une quelconque demande faite au salarié de les réexpédier vers le Royaume-Uni et qu’à des ‘marchandises identifiées par les agents de sécurité le 20 septembre 2019’ qui, selon la lettre de licenciement, auraient correspondu aux marchandises réceptionnées par erreur.
Alors que dans sa plainte, M. [W] mentionne le visionnage des bandes de vidéo-surveillance des 17, 18 et 19 septembre 2019 qui mettraient directement en cause le salarié dans la manipulation des marchandises litigieuses, ces bandes de vidéo-surveillance ne sont pas produites aux débats, ce qui ne permet pas, face aux contestations du salarié et en l’absence de tout autre élément produit devant la cour, d’imputer à ce dernier les faits visés dans la lettre de licenciement préalablement au contrôle des agents de sécurité de la société SRT du 20 septembre 2019 vers 4 heures du matin.
S’agissant du contrôle du salarié par des agents de la société SRT, le salarié indique ne pas avoir été informé de son droit de s’opposer à cette vérification et que ce contrôle s’est effectué dans l’enceinte de l’entreprise en dehors de la présence de tiers.
Or, le règlement intérieur de l’entreprise prévoit en son article 1.3.8 relatif à la fouille des salariés que si la direction de l’entreprise, ou à défaut le chef de service, en cas de disparitions renouvelées et rapprochées de matériels, marchandises ou objets appartenant à l’entreprise et aux salariés, ‘se réserve le droit de demander au personnel de se soumettre, aux accès de l’établissement, à toute mesure de vérification des objets transportés’, ‘cette invitation devra être formulée en présence de tiers, représentant élu du personnel, ou, à défaut, membre du personnel afin d’éviter toute contestation ultérieure’, ‘les salariés seront informés de leur droit à s’opposer à cette vérification’, ‘en cas de refus, l’entreprise pourra alerter les services de police compétents’, ‘la fouille sera alors effectuée selon les règles prescrites par le code de procédure pénale, à savoir en présence d’un officier de police judiciaire’.
La société se borne à indiquer qu’il ressort de la propre plainte du salarié que celui-ci a obtempéré au contrôle de sécurité effectué par les agents de la société SRT, sans toutefois produire aucun élément établissant que le salarié a été informé de son droit de s’opposer à cette vérification et qu’une personne tierce était présente lors de cette fouille. Il s’ensuit que les dispositions du règlement intérieur afférentes à la fouille du salarié n’ont pas été respectées.
De surcroît, la cour relève ici que les déclarations de M. [O] dans son dépôt de plainte et le contenu du rapport d’incident de la société SRT ne sont pas concordantes sur le déroulement du contrôle de M. [G]. En effet, M. [O] déclare qu’à la demande faite au salarié de sortir son tee-shirt et sa gamelle de sa glacière, ‘il a alors saisi la glacière pour la poser sur le siège passager, le sac lui a échappé des mains et une dizaine de T shirt noir sous emballage voire plus se sont étalés sur le sol’, alors que le compte-rendu d’incident établi au nom de M. [I] en qualité de directeur général de la société SRT, présent lors des faits, mais ne comportant aucune signature, indique que : ‘j’ai demandé l’ouverture de cette dernière (la glacière), et il l’a juste entrouvert. J’ai quand même pu y apercevoir du carton, ce qui m’a étonné. Je lui ai demandé de l’ouvrir complètement et voir en-dessous du carton. C’est là que j’ai constaté beaucoup de vêtements noirs, encore sous blisters’, ce compte-rendu ne mentionnant à aucun moment que le sac a échappé des mains du salarié, laissant les marchandises litigieuses s’étaler au sol.
Enfin, lorsque le salarié s’est opposé formellement à la suite de la fouille, aucune mention n’est faite d’un recours aux services de police compétents afin d’effectuer la fouille selon les règles prescrites par le code de procédure pénale en présence d’un officier de police judiciaire.
Les constatations qui précèdent suffisent à retenir que la fouille du salarié n’a pas été effectuée dans des conditions garantissant à celui-ci le respect de ses droits dans le cadre d’une telle opération.
Sans qu’il y ait lieu d’examiner d’autres faits, il résulte de tout ce qui précède que le licenciement n’est fondé ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse.
Le salarié, qui a perçu un salaire moyen brut de 4 446,26 euros sur les trois derniers mois, moyenne la plus avantageuse, a donc droit à des indemnités de rupture qui seront fixées aux montants suivants :
* 8 892,52 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis à hauteur de deux mois de salaire,
* 889,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents,
* 2 362,07 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
* 1 970,76 euros à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire injustifiée,
* 197,07 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents.
En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ouvre droit au salarié, au regard de son ancienneté d’une année complète dans l’entreprise, à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont le montant est compris entre un mois et deux mois de salaire brut.
Agé de 39 ans au moment du licenciement pour être né le 5 février 1980, le salarié, qui produit des relevés émanant de Pôle emploi, indique ne pas avoir retrouvé d’emploi malgré des recherches en ce sens. Ses dernières conclusions mentionnent une adresse de domiciliation au Portugal.
Il convient de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 4 500 euros.
Aux termes de l’article L. 622-22 du code de commerce relatif à la procédure de redressement judiciaire : ‘Sous réserve des dispositions de l’article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant’.
Au vu du plan de redressement dont fait l’objet la société NX Lifestyle Logistics France, il convient de fixer les créances du salarié pour les sommes et les chefs sus-mentionnés au passif de la procédure collective de ladite société.
Le jugement sera infirmé sur ces points.
Sur les circonstances brutales et vexatoires entourant le licenciement
Le salarié soutient qu’il a été licencié brutalement et de façon vexatoire pour des motifs calomnieux.
La société réplique que ces allégations ne sont pas fondées.
Le salarié allègue des dégradations de son véhicule par les agents de sécurité de la société SRT à l’occasion du contrôle litigieux du 20 septembre 2019. Toutefois, ces dégradations ne sauraient en aucune manière être établies par sa plainte déposée le 7 février 2020, près de cinq mois après les faits et le devis qu’il produit, non signé et ne comportant aucun cachet de société, pour des réparations de la carrosserie de son véhicule, daté de six mois après les faits. L’absence de toute constatation de l’état de son véhicule au moment précis où se sont déroulés les faits ne permet pas de retenir ses allégations.
En outre, les agressions verbales et physiques qu’il déclare avoir subies de la part des agents de sécurité ne sont pas plus établies en l’absence de tout témoin extérieur aux faits.
La fraude à la loi invoquée à l’encontre de la société qui aurait voulu selon le salarié faire l’économie de mesures d’indemnisation en le licenciant avant la signature d’un accord de restructuration prévoyant des départs négociés n’est pas plus établie. En effet, la cour relève ici que l’accord en question aurait été signé le 16 mars 2020, soit plus de cinq mois après le licenciement suivant les indications figurant dans le jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société du 3 juin 2020 auquel le salarié renvoie, ce qui est totalement insuffisant pour établir un lien entre les deux événements.
Enfin, le salarié n’établit par aucun élément un préjudice distinct de celui causé par la rupture injustifiée, déjà réparé.
Aucune circonstance brutale et vexatoire entourant le licenciement n’étant caractérisée, il convient de le débouter de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur la remise tardive des documents de fin de contrat
Le salarié estime fautif le délai écoulé de vingt jours avant l’établissement de ses documents de fin de contrat par la société.
La société conclut au débouté de cette demande qu’elle n’estime ni fondée, ni justifiée.
Le délai critiqué ne présente pas de caractère déraisonnable eu égard aux formalités administratives nécessaires à l’employeur pour établir les documents de fin de contrat et en tout état de cause, le salarié ne justifie pas avoir subi un préjudice causé par ce délai, alors qu’il ressort de ses relevés établis par Pôle emploi qu’il a perçu des indemnités de chômage le 14 novembre 2019, soit dans le délai d’environ un mois suivant son licenciement et qu’il n’établit par aucun élément que Pôle emploi lui aurait versé ses indemnités avec retard.
Il convient de le débouter de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les violences volontaires avec arme par destination par les agents de sécurité, la dégradation du véhicule du salarié, la fouille illégale du véhicule et l’entrave à sa liberté d’aller et venir injustifiée
Le salarié sollicite une indemnisation au titre du préjudice causé par les violences volontaires avec arme par destination par les agents de sécurité, la dégradation de son véhicule, la fouille illégale du véhicule et l’entrave à sa liberté d’aller et venir injustifiée.
La société conclut au débouté de cette demande qu’elle n’estime ni fondée, ni justifiée.
Comme déjà relevé, force est de constater que les allégations du salarié quant à des violences verbales et physiques subies de la part des agents de sécurité de la société SRT et à des dégradations causées sur son véhicule ne sont vérifiées par aucun élément probant. Il en va de même quant à ses allégations d’une entrave opposée à sa liberté d’aller et venir.
En outre, il ne produit pas d’élément établissant un préjudice distinct causé par la fouille illégale de son véhicule, de celui causé par la rupture infondée, déjà réparé.
Il convient de le débouter de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur le remboursement de réparations du véhicule du salarié
Ainsi que déjà indiqué, aucun élément produit aux débats n’établit la matérialité de dégradations causées par des agissements des agents de sécurité de la société SRT sur le véhicule du salarié.
Il convient de le débouter de cette demande de remboursement qui n’est pas fondée et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les heures supplémentaires, le dépassement du contingent d’heures supplémentaires, les violations des durées maximales de travail et le manquement à l’obligation de sécurité
En application notamment de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Au soutien de sa demande d’heures supplémentaires, le salarié fait valoir qu’il a effectué un nombre considérable d’heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées, qu’en effet, compte tenu du manque de personnel du fait de la volonté de la société de faire des économies de personnel, il devait encadrer seul une équipe dont l’effectif variait tous les jours de 10 à 30 salariés, sans l’aide d’adjoint et qu’il manquait également en permanence d’effectif pour gérer les volumes des flux, ce qui l’a conduit à réaliser de très nombreuses heures supplémentaires de nuit et à dépasser régulièrement les durées maximales de travail de 8 heures par nuit et de 40 heures par semaine et le contingent annuel d’heures supplémentaires, que malgré ses sommations officielles de communiquer, la société ne lui a jamais fourni ses relevés de badgeuse ni de décomptes des heures supplémentaires effectuées.
Le salarié produit notamment un décompte journalier et hebdomadaire des heures supplémentaires qu’il allègue avoir accomplies pendant toute la durée de la relation contractuelle, établi sur la base de ses relevés d’heures personnels, mentionnant 1 184,05 heures supplémentaires sur la période du 27 octobre 2017 au 20 septembre 2019 pour un montant total de 34 682,16 euros dûs, outre les congés payés afférents.
Ces éléments conduisent ainsi à considérer que le salarié présente, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La société fait valoir que le salarié a été réglé de toutes les heures supplémentaires effectuées, à savoir 110 heures supplémentaires réglées en décembre 2018 au titre de 63,5 heures supplémentaires exécutées en octobre et novembre 2017, 5,2 heures supplémentaires exécutées en décembre 2017 et 41,3 heures supplémentaires exécutées en janvier 2018.
La société relève par ailleurs connaître des difficultés économiques et financières depuis plusieurs années et ne dispose pas d’un nombre de clients suffisants pour générer une surcharge de travail aussi importante et continue que celle alléguée par le salarié. Elle indique qu’en dehors de trois pics d’activité essentiels au cours de l’année (périodes des soldes d’hiver en janvier et d’été en juillet et période de Noël), son niveau d’activité était loin d’être élevé et de nature à pouvoir corroborer la charge de travail invoquée par le salarié, laquelle correspondrait à une charge de travail de plus de 150 % d’un temps plein, sans que celui-ci n’ait jamais adressé la moindre alerte pendant près de deux années.
Enfin, la société critique la valeur probante des éléments produits par le salarié sur les heures supplémentaires qu’il allègue avoir exécutées, manifestement établis selon elle pour les besoins de la cause.
Ce faisant, l’employeur ne produit aucun élément sur les heures de travail effectivement exécutées par le salarié.
Au vu des éléments produits par l’une et l’autre partie, la cour retient que l’ensemble des heures supplémentaires effectuées par le salarié à la demande de l’employeur ne lui ont pas été rémunérées, mais dans une moindre proportion cependant que celle qu’il allègue.
Il convient de lui allouer une somme de 3 000 euros au titres des heures supplémentaires et 300 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés incidents. Ces sommes seront fixées au passif de la procédure collective de la société. Le jugement sera infirmé sur ces points.
Aucun dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires, ni aucun manquement à l’obligation de sécurité et de santé n’étant établis, il convient de débouter le salarié de ses demandes au titre des repos compensateurs et du non-respect de la réglementation en matière de durée du travail et de non-respect de l’obligation de sécurité. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé
Aux termes de l’article L. 8221-5 du code du travail :
‘Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales’.
Aucun élément ne permet de retenir que la mention sur les bulletins de paie d’un nombre d’heures de travail effectuées inférieur à celui réellement accomplies procède d’un élément intentionnel.
Dans ces conditions, la cour ne retient pas la matérialité d’une situation de travail dissimulé au sens de l’article L. 8221-5 du code du travail.
Il convient de débouter le salarié de sa demande de ce chef et de confirmer le jugement sur ce point.
Sur les intérêts au taux légal et leur capitalisation
Conformément aux articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les rappels de salaire, l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité légale de licenciement et les indemnités compensatrices de congés payés porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes jusqu’au 3 juin 2020, date d’ouverture de la procédure collective, le cours des intérêts étant alors interrompu conformément aux dispositions de l’article L. 622-28 du code de commerce, et la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil sera ordonnée pour cette période.
Par application de ces dispositions, l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prononcée par le présent arrêt ne sera pas assortie d’intérêts au taux légal.
Sur la remise de documents
Eu égard à la solution du litige, il convient d’ordonner à la société de remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute le salarié de sa demande d’astreinte, celle-ci n’étant pas nécessaire.
Sur la garantie de l’AGS
En application de l’article L. 3253-8 du code du travail, l’assurance de garantie des salaires couvre notamment les sommes dues aux salariés à la date du jugement d’ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire et les sommes dues par l’employeur en raison de l’exécution ou de la rupture du contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire restent soumises, même après l’adoption d’un plan de redressement, qu’il soit par cession ou par continuation, au régime de la procédure collective.
Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l’AGS qui ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Eu égard à la solution du litige, le jugement sera infirmé en ce qu’il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.
La société sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à payer au salarié la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement en ce qu’il déboute M. [N] [G] de ses demandes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité légale de licenciement, du rappel de salaire pendant la période de mise à pied à titre conservatoire, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des heures supplémentaires et des indemnités compensatrices de congés payés incidents, et en ce qu’il statue sur la garantie de l’AGS, les intérêts et leur capitalisation, la remise de documents, les dépens et les frais irrépétibles,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
DIT que le licenciement pour faute grave n’est pas fondé,
FIXE les créances de M. [N] [G] au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société NX Lifestyle Logistics France aux sommes suivantes :
* 8 892,52 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
* 889,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents,
* 2 362,07 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
* 1 970,76 euros à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire injustifiée,
* 197,07 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents,
* 4 500 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3 000 euros au titre des heures supplémentaires pour la période comprise entre le 27 octobre 2017 et le 20 septembre 2018,
* 300 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés incidents,
DIT que les rappels de salaire, l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité légale de licenciement et les indemnités compensatrices de congés payés porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société Fashion Partner Network, désormais NX Lifestyle Logistics France de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes jusqu’au 3 juin 2020, date d’ouverture de la procédure collective et ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil pour cette période,
DIT que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prononcée par le présent arrêt ne sera pas assortie d’intérêts au taux légal,
ORDONNE à la société NX Lifestyle Logistics France la remise à M. [N] [G] d’un bulletin de salaire récapitulatif et d’une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt,
DÉCLARE le présent arrêt opposable à l’AGS qui ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail,
CONDAMNE la société NX Lifestyle Logistics France aux entiers dépens,
CONDAMNE la société NX Lifestyle Logistics France à payer à M. [N] [G] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement pour le surplus des dispositions,
DÉBOUTE les parties des autres demandes.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE