Les droits de Facebook sur sa base de données

Notez ce point juridique

Les sociétés américaines Meta ne peuvent se prévaloir de la protection accordée au producteur de base de données.

En application de l’article L. 341-2 du Code de la propriété intellectuelle, ces sociétés sont irrecevables à agir sur le fondement du droit suis généris du producteur de bases de données les deux sociétés américaines n’ayant ni leur siège social, ni leurs activités dans un Etat de l’Union Européenne.

S’agissant de la société irlandaise Facebook, sa recevabilité à agir a été contestée dès lors qu’au regard de l’article L. 341-1 du CPI elle n’a pu justifier avoir pris l’initiative et le risque d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel pour la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de la base de données.

Dans la requête en vue d’être autorisées à procéder à des opérations de saisie-contrefaçon, les sociétés Meta indiquaient seulement « Meta, en ce compris Meta Plateforms Ireland Ltd, investit chaque année des sommes considérables pour le maintien des bases de données soutenant Facebook et Instagram ».

Pour autant aucun argumentaire n’était précisé et aucune pièce n’était produite attestant de l’investissement de la société irlandaise.

Sur la recevabilité à agir en qualité de producteur de base de données de la société Meta Plateforms Ireland, il appartenait à celle-ci de justifier la vraisemblance de sa qualité de producteur de base de données.

Or, les seuls éléments internes à l’entreprise et qui ne sont corroborés par aucun autre, l’absence totale d’indication sur le contour et la réalité des investissements financiers, matériels ou humains opérés par la société irlandaise dans la constitution, la vérification ou la présentation du contenu des bases de données de Facebook et Instagram ne permettent pas de justifier à suffisance l’allégation selon laquelle cette société irlandaise serait coproductrice avec les sociétés américaines de ces bases de données la rendant ainsi recevable à faire procéder à une saisie-contrefaçon sur le fondement des articles L. 341-1, L. 341-2 et L. 343-1 du code de la propriété intellectuelle.

Dès lors, les opérations de saisie-contrefaçon ont été ordonnées et réalisées à la diligence de sociétés irrecevables à agir sur le fondement de la protection d’une atteinte aux droits sui generis de producteur de bases de données et la main levée des saisies opérées sur ce fondement a été prononcée (par application des articles L. 332-2 et L. 343-1 du code de la propriété intellectuelle).

L’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

« Le producteur d’une base de données bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel.

Cette protection est indépendante et s’exerce sans préjudice de celles résultant du droit d’auteur ou d’un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs ».

L’article L. 341-2 du même code limite la protection accordée comme suit :

« Sont admis au bénéfice du présent titre :

1° Les producteurs de bases de données, ressortissants d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ou qui ont dans un tel Etat leur résidence habituelle ;

2° Les sociétés ou entreprises constituées en conformité avec la législation d’un Etat membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur établissement principal à l’intérieur de la Communauté ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ; néanmoins, si une telle société ou entreprise n’a que son siège statutaire sur le territoire d’un tel Etat, ses activités doivent avoir un lien réel et continu avec l’économie de l’un d’entre eux.

Les producteurs de bases de données qui ne satisfont pas aux conditions mentionnées ci-dessus sont admis à la protection prévue par le présent titre lorsqu’un accord particulier a été conclu avec l’Etat dont ils sont ressortissants par le Conseil de la Communauté européenne ».

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne un appel interjeté par la société The Phantom Company suite à une ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris. Les sociétés Meta Platforms Inc, Meta Platforms Ireland Ltd et Instagram Llc sont les intimées dans cette affaire. Les dernières conclusions ont été remises par les parties et une ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2023.

Les points essentiels

Exposé des faits

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Facebook et Instagram

Facebook est un service de réseau social qui permet à ses utilisateurs de créer leurs propres profils et de se connecter les uns aux autres au moyen de leurs ordinateurs personnels ou appareils mobiles. L’accès au service requiert de l’utilisateur une inscription préalable et l’acceptation des conditions générales du service.

Instagram est un service de partage de photos et de vidéos qui permet à ses utilisateurs de consulter et commenter les publications d’autres utilisateurs au moyen de leurs ordinateurs personnels ou appareils mobiles. De la même manière, l’accès au service requiert de l’utilisateur une inscription préalable et l’acceptation des conditions générales du service.

Exploitation des services

Les services Facebook et Instagram sont exploités en Europe par la société Meta Platforms Ireland.

Marques détenues

La société Meta Platforms Inc est notamment titulaire de deux marques figuratives FACEBOOCK de l’Union Européenne et la société Instagram Llc est titulaire de la marque INSTAGRAM figurative de l’Union Européenne.

The Phantom Company

La société The Phantom Company, ayant pour nom commercial Phantombuster, est impliquée dans la conception, l’exploitation et la commercialisation de logiciels permettant l’extraction de données et la publication automatisée de contenus sur des plateformes telles qu’Instagram et Facebook.

Opérations de saisie-contrefaçon

Le 22 novembre 2022, les sociétés Meta Platforms Inc, Meta Platforms Ireland et Instagram Llc ont obtenu l’autorisation de faire procéder à des opérations de saisie-contrefaçon dans les bureaux de la société The Phantom Company, sur la base d’atteintes présumées aux droits sui generis de producteur de bases de données et aux droits des marques.

Décision de la cour

La cour a jugé que les sociétés Meta Platforms Inc et Instagram Llc n’étaient pas recevables à agir sur le fondement du droit sui generis du producteur de bases de données. Par conséquent, les opérations de saisie-contrefaçon ordonnées ont été jugées disproportionnées et la rétractation de l’ordonnance présidentielle du 22 novembre 2022 a été prononcée. Les sociétés Meta Platforms Inc, Meta Platforms Ireland Ltd et Instagram Llc ont été condamnées aux dépens et à verser une somme à la société The Phantom Company sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les montants alloués dans cette affaire: – La société The Phantom Company : 12 000 euros
– Les sociétés Meta Platforms Inc, Meta Platforms Ireland Ltd et Instagram Llc : frais de dépens de première instance et d’appel

Réglementation applicable

– Code de la propriété intellectuelle
– Code de procédure civile

Article L. 343-1 du Code de la propriété intellectuelle:
Le producteur d’une base de données bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Cette protection est indépendante et s’exerce sans préjudice de celles résultant du droit d’auteur ou d’un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs.

Article L. 716-4-7 du Code de la propriété intellectuelle:
Les titulaires de marques peuvent solliciter du juge des référés des opérations de saisie-contrefaçon en cas d’atteinte vraisemblable à leurs droits de propriété intellectuelle.

Article 495 du Code de procédure civile:
Une ordonnance est exécutoire de droit, même avant enregistrement, en cas d’urgence, nonobstant toute opposition de la partie saisie.

Article 700 du Code de procédure civile:
Le juge peut condamner la partie perdante à verser à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles.

Ces articles ont été cités et utilisés dans le cadre de l’affaire opposant les sociétés Meta Platforms Inc, Meta Platforms Ireland Ltd et Instagram Llc à la société The Phantom Company concernant des questions de contrefaçon de marques et de droits sui generis de producteur de bases de données.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN ASSOCIÉS
– Me Xavier CARBASSE de l’AARPI BEYLOUNI – CARBASSE – QUENY – VALOT – VERNET
– Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES
– Me Pauline DEBRÉ de LINKLATERS LLP
– Me Jean-François MERDRIGNAC de LINKLATERS LLP

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