Les critères de l’insuffisance professionnelle

Notez ce point juridique

L’insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement (Cass. soc., 25 févr. 1985, n°84-40.446). Elle se distingue de la faute (Cass. soc., 31 mars 1998, n°96-40.399).

Contrairement aux autres motifs de licenciement, il suffit à l’employeur d’invoquer le grief d’insuffisance professionnelle, motif matériellement vérifiable, pour que la lettre soit dûment motivée (Cass. soc., 29 oct. 1997, n°95-44.152 ; Cass. soc., 20 nov. 1996, n°93-45.555; Cass. soc., 3 déc. 2003, n°01-45.039). Ainsi, doit être considérée comme suffisamment motivée la lettre énonçant une « insuffisance professionnelle préjudiciable aux intérêts de l’entreprise » (Cass. soc., 23 mai 2000, n°98-42.064).

L’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi relève du pouvoir patronal. Le juge ne saurait prétendre substituer son appréciation à celle de l’employeur, notamment dans l’appréciation des possibilités d’affectation du salarié dans un autre poste (Cass. soc., 11 févr. 1981, n°79-41.532). Ainsi, l’employeur ne peut se voir reprocher en présence d’un comportement légitimant le licenciement, de ne pas avoir choisi la solution d’un déclassement professionnel (Cass. soc., 12 déc. 1983, n°81-41.572).

Le caractère réel et sérieux du motif tiré des insuffisances professionnelles du salarié ne saurait être écarté en mettant en cause l’organisation du travail adoptée par l’employeur ou le mauvais fonctionnement du service (Cass. soc., 6 nov. 1984, n°82-41.853 ; voir encore Cass. soc., 24 oct. 1979, n°78-40.863).

Il demeure que l’incompétence alléguée doit reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l’employeur (Cass. soc., 6 juill. 1979, n°77-40.168).

Les griefs formulés doivent donc être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

Pour légitimer un licenciement, il n’est pas nécessaire que l’inadaptation à l’emploi ou l’incompétence se soient traduites par une faute professionnelle caractérisée (Cass. soc., 5 janv. 1984, n°81-42.766 ; Cass. soc., 13 nov. 1986, n° 84-41.231). L’inaptitude ou l’insuffisance professionnelle se manifeste dans les répercussions en tant qu’elle perturbe la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service.

Il n’est toutefois pas nécessaire, pour légitimer un licenciement, que l’insuffisance du salarié ait entraîné pour l’entreprise un préjudice chiffrable (Cass. soc., 9 juin 1983, n°81-40.960). Mais la légitimité du licenciement est évidemment renforcée lorsque l’incompétence du salarié affecte les résultats (Cass. soc., 5 janv. 1978, n°76-40.971).

Ainsi, la responsabilité dans de mauvais résultats d’un salarié, qui s’est révélé incapable de faire face à un accroissement de ses responsabilités qu’il avait accepté et qui se traduisait par une augmentation de sa rémunération, constitue un motif légitime de licenciement (Cass. soc., 28 mars 1985, n°82-40.899).

Bien que l’employeur soit seul juge pour apprécier l’insuffisance du salarié, la présentation des circonstances prend une importance particulière dans la mesure où elles peuvent faire apparaître une faute de l’employeur dans l’usage de ses pouvoirs d’appréciation. Entreront en ligne de compte la qualification professionnelle, l’ancienneté de services, les circonstances de l’engagement, les relations antérieures. Les juges s’appliquent, en particulier, à rechercher si des recadrages avaient été précédemment effectués (Cass. soc., 31 mai 1978, n°77-40.377).

La preuve de l’insuffisance professionnelle, dont la charge pèse exclusivement sur l’employeur, ne saurait reposer sur une approche subjective. Les juges ne peuvent se satisfaire de témoignages émettant des jugements de valeur et ne relevant aucun fait précis (Cass. soc., 18 juill. 1988, n°86-42.417). Il est nécessaire que la réalité de l’insuffisance soit établie et justifiée matériellement (Cass. soc., 19 juill. 1988, n°85-43.567), qu’elle repose sur des faits réels et vérifiables.


M. [U] [T] a été engagé par la S.A. La Compagnie des Alpes en tant que consolideur, puis promu responsable consolidation. Suite à des difficultés rencontrées dans ses nouvelles fonctions, il a demandé à être déclassé, mais a finalement été licencié pour insuffisance professionnelle. Il conteste ce licenciement et réclame la requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des indemnités et dommages-intérêts. La Cour de prud’hommes a jugé le licenciement comme étant pour cause réelle et sérieuse, mais M. [U] [T] a interjeté appel. Les parties ont des arguments divergents sur les raisons du licenciement, les compétences de M. [U] [T], les primes d’objectifs, la violation de l’obligation de sécurité et de la charte de déconnexion. L’affaire est en attente de délibéré après une audience en avril 2023.

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Sur le licenciement pour insuffisance professionnelle


L’article L.1232-1 du code du travail rappelle que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Celle-ci s’entend d’une cause objective, reposant sur des griefs suffisamment précis, vérifiables et établis, qui constituent la véritable raison du licenciement.
L’insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement (Cass. soc., 25 févr. 1985, n°84-40.446). Elle se distingue de la faute (Cass. soc., 31 mars 1998, n°96-40.399).
Contrairement aux autres motifs de licenciement, il suffit à l’employeur d’invoquer le grief d’insuffisance professionnelle, motif matériellement vérifiable, pour que la lettre soit dûment motivée (Cass. soc., 29 oct. 1997, n°95-44.152 ; Cass. soc., 20 nov. 1996, n°93-45.555; Cass. soc., 3 déc. 2003, n°01-45.039). Ainsi, doit être considérée comme suffisamment motivée la lettre énonçant une « insuffisance professionnelle préjudiciable aux intérêts de l’entreprise » (Cass. soc., 23 mai 2000, n°98-42.064).
L’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi relève du pouvoir patronal. Le juge ne saurait prétendre substituer son appréciation à celle de l’employeur, notamment dans l’appréciation des possibilités d’affectation du salarié dans un autre poste (Cass. soc., 11 févr. 1981, n°79-41.532). Ainsi, l’employeur ne peut se voir reprocher en présence d’un comportement légitimant le licenciement, de ne pas avoir choisi la solution d’un déclassement professionnel (Cass. soc., 12 déc. 1983, n°81-41.572).
Le caractère réel et sérieux du motif tiré des insuffisances professionnelles du salarié ne saurait être écarté en mettant en cause l’organisation du travail adoptée par l’employeur ou le mauvais fonctionnement du service (Cass. soc., 6 nov. 1984, n°82-41.853 ; voir encore Cass. soc., 24 oct. 1979, n°78-40.863).
Il demeure que l’incompétence alléguée doit reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l’employeur (Cass. soc., 6 juill. 1979, n°77-40.168).
Les griefs formulés doivent donc être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.
Pour légitimer un licenciement, il n’est pas nécessaire que l’inadaptation à l’emploi ou l’incompétence se soient traduites par une faute professionnelle caractérisée (Cass. soc., 5 janv. 1984, n°81-42.766 ; Cass. soc., 13 nov. 1986, n° 84-41.231). L’inaptitude ou l’insuffisance professionnelle se manifeste dans les répercussions en tant qu’elle perturbe la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service.
Il n’est toutefois pas nécessaire, pour légitimer un licenciement, que l’insuffisance du salarié ait entraîné pour l’entreprise un préjudice chiffrable (Cass. soc., 9 juin 1983, n°81-40.960). Mais la légitimité du licenciement est évidemment renforcée lorsque l’incompétence du salarié affecte les résultats (Cass. soc., 5 janv. 1978, n°76-40.971).
Ainsi, la responsabilité dans de mauvais résultats d’un salarié, qui s’est révélé incapable de faire face à un accroissement de ses responsabilités qu’il avait accepté et qui se traduisait par une augmentation de sa rémunération, constitue un motif légitime de licenciement (Cass. soc., 28 mars 1985, n°82-40.899).

Sur les primes d’objectifs


Pour être valable, une clause de variation du salaire doit être fondée sur des éléments objectifs, indépendants de la volonté de l’employeur et ne doit pas faire peser le

– 84.590,16 € nets de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 8.034 € bruts pour le solde de prime d’objectifs 2017/2018 + 803,40 € bruts de congés payés
– 10.901,21 € bruts pour le solde de prime d’objectifs 2018/2019 + 1.090,12 € bruts de congés payés
– 3.000 € nets de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité et du droit à la déconnexion
– 2.856 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les dépens de première instance
– 2.800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les dépens d’appel


Réglementation applicable

L’article L.1232-1 du code du travail rappelle que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Celle-ci s’entend d’une cause objective, reposant sur des griefs suffisamment précis, vérifiables et établis, qui constituent la véritable raison du licenciement.

En vertu de l’article L.6321-1 du code du travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Frédéric MATCHARADZE de la SELARL FREDERIC MATCHARADZE, avocat au barreau de CHAMBERY
– Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat au barreau de CHAMBERY
– Me Sandrine DURIEU, avocat au barreau d’ANGERS

Mots clefs associés

– M. [U] [T]
– S.A. La Compagnie des Alpes
– Consolideur
– Responsable consolidation
– Licenciement pour insuffisance professionnelle
Conseil de prud’hommes de Chambéry
– Requalification du licenciement
– Indemnités et dommages-intérêts
– Violation de l’obligation de sécurité
– Charte de déconnexion
– Arrêt de travail et burnout professionnel
– Prime d’objectifs
– Formation et adaptation au poste
– Conditions de travail et santé mentale
– Caisse des dépôts et consignations
– Normes IFRS
Logiciel BFC
– Cour d’appel
– Article L.1235-3 du code du travail
– Conventions internationales
– Recherche d’emploi et préjudice économique
– Crise sanitaire et impact économique

– Consolideur: Personne chargée de consolider les comptes d’une entreprise
– Responsable consolidation: Personne responsable de la consolidation des comptes d’une entreprise
– Licenciement pour insuffisance professionnelle: Licenciement d’un salarié pour manque de compétences ou de résultats professionnels
– Conseil de prud’hommes de Chambéry: Tribunal chargé de régler les litiges entre employeurs et salariés à Chambéry
– Requalification du licenciement: Modification de la qualification d’un licenciement par les autorités compétentes
– Indemnités et dommages-intérêts: Sommes versées à un salarié en réparation d’un préjudice subi
– Violation de l’obligation de sécurité: Non-respect par l’employeur de son obligation de garantir la sécurité de ses salariés
– Charte de déconnexion: Document définissant les règles de déconnexion des salariés en dehors de leurs heures de travail
– Arrêt de travail et burnout professionnel: Arrêt de travail dû à un épuisement professionnel (burnout)
– Prime d’objectifs: Prime versée aux salariés en fonction de l’atteinte d’objectifs fixés par l’entreprise
– Formation et adaptation au poste: Processus visant à former les salariés et à les adapter à leur poste de travail
– Conditions de travail et santé mentale: Ensemble des conditions dans lesquelles les salariés exercent leur activité professionnelle et impact sur leur santé mentale
– Caisse des dépôts et consignations: Organisme financier public chargé de gérer des fonds pour le compte de l’État et des collectivités locales
– Normes IFRS: Normes comptables internationales (International Financial Reporting Standards)
– Logiciel BFC: Logiciel de gestion de la consolidation financière
– Cour d’appel: Juridiction chargée de juger en appel les décisions rendues par les tribunaux
– Article L.1235-3 du code du travail: Article du code du travail français traitant de la réparation du préjudice en cas de licenciement abusif
– Conventions internationales: Accords conclus entre plusieurs pays pour régir des domaines spécifiques
– Recherche d’emploi et préjudice économique: Préjudice subi par un individu du fait de sa recherche d’emploi infructueuse
– Crise sanitaire et impact économique: Conséquences économiques d’une crise sanitaire sur les entreprises et les salariés

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 08 MARS 2024

N° RG 22/00044 – N° Portalis DBVY-V-B7G-G4KX

[U] [T]

C/ SA COMPAGNIE DES ALPES agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice demeurant es qualité audit siège

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CHAMBERY en date du 16 Décembre 2021, RG F 19/00193

Appelant

M. [U] [T]

né le 14 Septembre 1970 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Frédéric MATCHARADZE de la SELARL FREDERIC MATCHARADZE, avocat au barreau de CHAMBERY

Intimée

SA COMPAGNIE DES ALPES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice demeurant es qualité audit siège

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat au barreau de CHAMBERY

Représentée par Me Sandrine DURIEU, avocat au barreau d’ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 Avril 2023 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Frédéric PARIS, Président,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseillère,

qui en ont délibéré

Mme Capucine QUIBLIER, Greffier à l’appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,

Exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties

M. [U] [T] a été engagé par la S.A. La Compagnie des Alpes en qualité de consolideur, statut cadre, catégorie niveau II de la classification des emplois CDA, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er décembre 2006, avec reprise d’ancienneté au 7 octobre 2002, moyennant un salaire brut mensuel forfaitaire s’élevant à 5.416,67 euros, versé sur 12 mois, soit une rémunération annuelle brute de 65.000 euros, assortie d’une prime d’objectifs pouvant varier de 0 à 10% de ce salaire, pour une durée de travail fixée à 214 jours sur l’année.

La S.A. Compagnie des Alpes est une filiale de la Caisse des dépôts et consignations. Elle appartient à un groupe ayant pour activité l’exploitation de domaines skiables et de parcs de loisirs. Elle emploie habituellement plus de 11 salariés. La convention collective d’entreprise du 18 juin 2009 est applicable.

Par avenant du 30 juin 2013, M. [U] [T] a été promu responsable consolidation, statut cadre, échelon niveau III, moyennant un salaire brut mensuel porté à 6.500 euros, versé sur 12 mois, soit une rémunération annuelle brute de 78.000 euros, outre une prime d’objectifs pouvant varier de 0 à 20% de celle-ci.

Courant novembre 2018, M. [T] a demandé à être déclassé et à retrouver son poste de consolideur.

Le salarié a été placé en arrêt de travail du 22 novembre 2018 au 7 décembre 2018, puis du 28 janvier 2019 au 1er février 2019, et du 26 février 2019 au 25 mars 2019.

Par courrier du 26 février 2019, M. [U] [T] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement.

Par LRAR du 13 mars 2019, M. [T] s’est vu notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle, avec dispense d’exécution du préavis de 4 mois.

Par requête déposée le 12 novembre 2019, M. [U] [T] a saisi le conseil de prud’hommes de Chambéry aux fins de solliciter la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et l’octroi de l’indemnité afférente, outre des rappels de primes d’objectifs, ainsi que des dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité et de la charte de déconnexion.

Par jugement en date du 16 décembre 2021, le conseil de prud’hommes de Chambéry a :

– dit et jugé que le licenciement de M. [U] [T] notifié pour insuffisance professionnelle repose sur une cause réelle et sérieuse,

– débouté M. [U] [T] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre,

– débouté M. [U] [T] de l’intégralité de ses autres demandes,

– débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [U] [T] aux entiers dépens de l’instance.

M. [U] [T] a interjeté appel à l’encontre de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 11 janvier 2022 via le réseau privé virtuel des avocats.

*

Par conclusions récapitulatives notifiées le 3 novembre 2022, auxquelles la Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, M. [U] [T] demande à la Cour de :

– Débouter la société Compagnie des Alpes de l’ensemble de ses demandes;

– Fixer à 7.667,06 € le salaire moyen de référence ;

– Réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Chambéry le 16 décembre 2021 dans l’intégralité de ses dispositions;

Statuant à nouveau,

– Dire et juger que le licenciement notifié le 13 mars 2019 ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;

– Condamner, en conséquence, la société Compagnie des Alpes à payer à M. [T] une indemnité de 184.000 €, nette de CSG, CRDS et de toute cotisation et charge sociale, au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– Condamner la société Compagnie des Alpes à payer à M. [T] les sommes suivantes:

*8.034 € au titre du solde de prime d’objectifs pour l’exercice 2017/2018, outre 803,40 € de congés payés afférents ;

*10.901,21 € au titre de la prime d’objectifs pour l’exercice 2018/2019, outre 1.090,12 € de congés payés afférents ;

– Condamner la société Compagnie des Alpes à payer à M. [T] une indemnité d’un montant de 61.300 € au titre de la violation de l’obligation de sécurité et de la charte de déconnexion ;

– Condamner la société Compagnie des Alpes à payer à M. [T] une somme de 2.856 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, s’agissant des frais exposés en première instance ;

– Condamner la société Compagnie des Alpes à payer à M. [T] une somme de 2.800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, s’agissant des frais exposés en cause d’appel;

– Condamner la société Compagnie des Alpes aux entiers dépens de l’instance et d’exécution, dont notamment les éventuels droits proportionnels de recouvrement.

M. [U] [T] soutient que :

A compter du 1er août 2013, il a été promu responsable consolidation en raison de ce qu’il donnait entière satisfaction à son employeur. Des anciens collègues attestent que ce choix était pertinent en raison de ses compétences professionnelles et de sa grande capacité de travail.

Il a été félicité. Son salaire était régulièrement augmenté, il bénéficiait de primes d’objectifs importantes, ainsi que de plans d’attribution gratuite d’actions de performance. Par de tels actes, l’employeur a montré expressément la reconnaissance qu’il avait de ses compétences, de sorte qu’un licenciement pour insuffisance professionnelle est abusif.

En 2015, sa situation professionnelle s’est modifiée avec l’arrivée d’une nouvelle responsable, Mme [S], qui a adopté un comportement agressif à son égard. Elle s’est surtout dégradée en 2018 avec la perte de ressources humaines et l’entrée en vigueur de nouvelles normes complexes pour lesquelles il n’avait pas été formé. Par ailleurs, il va être, de plus en plus, sollicité par sa hiérarchie au mépris de la charte de déconnexion pourtant applicable dans l’entreprise. Ceci va gravement impacter son état de santé au point qu’un burnout professionnel sera diagnostiqué.

La Caisse des dépôts et consignations a, de plus, cessé d’effectuer le travail de mise à jour et de paramétrage du logiciel BFC pour l’adapter à l’évolution des normes IFRS. Cette mission a été reprise, pour partie, par son collaborateur, M. [R], dont il a dû absorber le travail.

L’employeur doit assurer l’adaptation du salarié à son poste de travail. Il ne peut pas le licencier pour des erreurs qui sont précisément imputables à une absence de formation.

À aucun moment il n’a été consulté sur les changements de personnel qui lui ont été imposés au sein de son service.

Ni en 2018, ni en 2019, l’employeur n’a mis en place la moindre action d’accompagnement.

Il a alerté sa supérieure au sujet des difficultés structurelles auxquelles il faisait face, en demandant, en vain, un renfort en personnel. La société en était consciente puisqu’elle a pris des mesures, mais qui n’étaient que ponctuelles et insuffisantes, notamment l’affectation d’un stagiaire qu’il a fallu former et la mise à disposition d’un consultant extérieur qui n’est intervenu que trois semaines en octobre 2018.

C’est lui qui a fait les frais de ce sous-effectif en assumant une charge de travail exponentielle et en subissant une pression écrasante, puisque, par ailleurs, la directrice consolidation, Mme [S], a décidé de raccourcir considérablement les délais imposés à la réalisation du travail de son équipe.

Les travaux de consolidation ont, pourtant, été validés sans difficultés par les commissaires aux comptes.

La situation va atteindre un tel niveau de gravité que, ne pouvant plus accomplir ses fonctions, faute de moyens suffisants, il va demander son déclassement, comme un véritable appel à l’aide.

La société n’a donné aucune réponse à cette demande et prétend faussement, dans ses écritures, avoir refusé son déclassement pour des considérations de salaire, alors qu’il était prêt à se conformer à la rémunération correspondant au poste de consolideur.

Il a avisé les représentants du personnel, ainsi que le médecin du travail, de la mésentente manifestée par sa supérieure hiérarchique, Mme [S], à son égard. Ils n’ont donné aucune suite à cette alerte.

Son état de santé a été fragilisé au point de devoir prendre un traitement médicamenteux au titre d’un syndrôme anxiodépressif, puis d’être placé en arrêt de travail.

Au moment de l’établissement de la revue de consolidation du 31 décembre 2018, qui est une micro-clôture trimestrielle à usage exclusivement interne, il était dans un état dégradé du fait d’un burn-out professionnel.

Les griefs reprochés dans la lettre de licenciement sont inconsistants et ne sont étayés par aucune pièce. Les erreurs qui y sont mentionnées n’ont jamais été évoquées lors de l’entretien préalable et aucune explication ne lui a été demandée. Les faits reprochés sont ponctuels et exceptionnels, tenant au contexte.

L’employeur ne peut pas lui reprocher une insuffisance professionnelle dès lors qu’il ne disposait pas des moyens humains et de la formation nécessaires pour accomplir ses fonctions et qu’il n’a jamais fait l’objet de reproches antérieurement, lui laissant la possibilité de corriger ses actions.

Le barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse prévu à l’article L.1235-3 du code du travail n’est pas conforme aux textes internationaux auxquels la France est partie. Il doit être écarté.

Le préjudice qu’il a subi est particulièrement important. Il a multiplié les démarches pour essayer de retrouver un emploi, sans aucune limitation géographique, en vain.

Le salarié ne peut pas se voir privé d’une prime d’objectifs alors que l’employeur a failli dans la détermination de la mission, objet de l’objectif.

Les objectifs fixés pour la période du 1er octobre 2018 au 31 septembre 2019 n’ont jamais été définis et aucun élément n’indique s’ils ont été atteints ou non.

C’est l’employeur qui a la charge de définir les objectifs. À défaut, les primes sont dues.

En tout état de cause, en ayant refusé de lui accorder les actions de formation et les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses fonctions, l’employeur est responsable de la non-atteinte des objectifs.

Le salarié ne peut subir aucune diminution de sa rémunération, qu’elle soit fixe ou variable, lorsqu’il a été dispensé de préavis, de sorte que sa prime d’objectifs a été acquise sur la période du 1er octobre 2018 au 13 juillet 2019.

Alors que la société a signé un accord relatif au droit à la déconnexion, sa supérieure hiérarchique le sollicitait dans des courriels envoyés tard le soir, le week-end et entre midi et deux.

Le lien de causalité entre son état de santé et ses conditions de travail est clairement démontré par la chronologie des actes médicaux.

*

Par conclusions d’intimée notifiées le 10 juin 2022, auxquelles la Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, la S.A. Compagnie des Alpes demande à la Cour de :

à titre principal,

– Confirmer le jugement déféré;

– Débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes;

à titre très subsidiaire, si la Cour jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-Dire et juger que l’article L.1235-3 du code du travail est conforme aux conventions internationales engageant la France et qu’il y a lieu d’en faire application;

En conséquence,

-Limiter à 21.068,37 € l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse octroyée à M.[T] ;

Y ajoutant,

-Débouter M. [T] de l’ensemble de ses autres demandes;

En tout état de cause,

-Condamner M. [T] au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, avec pour ceux d’appel application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Audrey Bollonjeon, avocat associé de la Selurl Bollonjeon.

La S.A La Compagnie des Alpes fait valoir que :

Quelques mois seulement après la prise de ses nouvelles fonctions en tant que responsable consolidation, M. [T] a rencontré des difficultés, lesquelles sont allées croissantes et concernaient une partie substantielle de ses missions.

La direction, prenant en compte son ancienneté, lui a pourtant laissé une chance de s’adapter aux nouvelles exigences de son poste en lui apportant toute l’aide et le renfort qu’elle était en mesure de mobiliser, notamment en le déchargeant d’une partie importante et complexe de sa charge de travail au profit de sa supérieure hiérarchique pour lui permettre de se concentrer sur ses tâches habituelles, en recrutant un stagiaire pour une longue durée, et en ayant recours à un consultant expérimenté (expert-comptable) pendant 21 jours.

Elle a dû conclure à l’impossibilité de corriger la situation.

Malgré la mobilisation de son manager, son expérience et les efforts fournis, le salarié s’est lui-même senti dans l’incapacité d’assumer ses fonctions.

M. [T] reconnait son insuffisance professionnelle puisqu’il a demandé à être déclassé en tant que consolideur en novembre 2018 après plusieurs entretiens avec sa hiérarchie.

La direction n’a pas souhaité accéder à sa demande puisque cela aurait supposé de revoir l’ensemble de l’organisation du département, mais aussi en ce que M. [T], qui excluait de retrouver une rémunération de consolideur, avait certaines exigences salariales dont elle ne pouvait pas supporter le coût, sans compter qu’elle ne souhaitait pas, par ailleurs, créer d’inégalités entre les salariés.

Les griefs opposés par le salarié dans le cadre de la présente instance sont présentés comme ayant ‘contribué’ à ses carences professionnelles et non comme étant leur cause exclusive.

Aucun de ses arguments n’est justifié, ni en fait, ni en droit, et de nature à rendre le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’insuffisance professionnelle reprochée au salarié concerne uniquement ses fonctions de ‘responsable consolidation’ et non celles de consolideur, pour lesquelles il avait donné satisfaction.

Son expérience et les postes occupés précédemment pouvaient raisonnablement laisser penser qu’il disposait des qualités et compétences nécessaires pour évoluer sur un poste de ‘responsable consolidation’, analyse partagée par M. [T] qui s’est lui-même porté candidat. La qualification professionnelle de M. [T], laquelle était en adéquation avec les missions confiées, aurait dû lui permettre de les accomplir. Pour autant, il n’a pas réussi.

Le motif d’insuffisance professionnelle n’est pas fautif. Il ne peut donner lieu à sanction.

Si le travail n’était pas fait, cela ne résultait pas d’une mauvaise volonté du salarié, dont les efforts étaient manifestes, mais de son incompétence à son poste.

Dans ce contexte, il n’était pas cohérent de le priver, dès 2014, de ses primes, ce qui aurait constitué une sanction pécuniaire injustifiée et un traitement spécifique stigmatisant. Le versement de primes avait pour fonction de l’encourager.

Il n’y a, dès lors, aucune contradiction entre l’absence de sanction disciplinaire et le licenciement intervenu.

Une ancienneté importante ne s’oppose pas à un licenciement pour motif d’insuffisance professionnelle.

Si le service consolidation a connu des évolutions à la suite du départ d’un collaborateur senior et de l’affectation partielle d’un employé à d’autres tâches, la société a, toutefois, veillé à conserver les équilibres en maintenant, par le biais d’un renfort interne (Mme [S]) et externe (consultant et stagiaire alternant), l’effectif de deux salariés consolideurs collaborant avec le responsable consolidation, ainsi que le niveau de compétences sur lequel celui-ci pouvait compter, de sorte qu’il n’a pas été affecté.

Les changements de personnel de 2018, nécessités par le décès d’un collaborateur, dont les effets ont été neutralisés par la direction, ne peuvent expliquer les insuffisances du salarié qui, contrairement à ce qu’il soutient, n’a pas été privé des moyens humains de réaliser ses missions, et est la cause principale des difficultés rencontrées.

Des salariés attestent de la bienveillance du management de sa supérieure hiérarchique. Les attestations produites par M. [T] n’ont pas de lien avec le présent litige et ne font état d’aucun fait précis. Elles sont inopérantes.

Pour preuve de la suffisance des ressources humaines, après le départ de M. [T] le service a parfaitement fonctionné avec un effectif de deux salariés seulement, responsable consolidation inclus. Il est donc manifeste que M. [T] avait les moyens d’assumer ses missions. La configuration du service en septembre 2021 est la même que celle qu’a connue le salarié.

Contrairement à ses allégations, le salarié a suivi une session de formation relative à l’application des normes comptables internationales dites ‘IFRS’ en 2018, alors même qu’il était censé disposer de telles connaissances et que les tâches relatives à la mise en ‘uvre de la norme IFRS 16 ont été assumées par son subordonné, M. [R]. L’attestation tendancieuse de Mme [K] doit être écartée.

M. [R], membre de son équipe, a expliqué à M. [T] la méthodologie à retenir pour effectuer les reclassements, de sorte que son niveau de compétences aurait dû lui permettre d’accomplir un tel travail.

La norme IFRS 5 n’était pas nouvelle. Il était légitime d’attendre de M. [T], qui avait déjà occupé un poste de responsable consolidation dans une autre société du groupe, qu’il soit compétent pour l’appliquer. Or, il a échoué à le faire malgré l’aide apportée.

L’absence d’ajustement significatif relevée par les commissaires aux comptes n’est nullement imputable à l’action de M. [T], mais précisément aux mesures qu’elle a prises afin de pallier ses carences et de corriger les effets désastreux potentiels de son travail.

L’ensemble des tâches attendues au poste de responsable consolidation entre dans le champ d’évaluation de la compétence de M. [T], qui n’a pas à juger de ce qui est principal ou secondaire dans l’accomplissement de ses fonctions, l’employeur étant en droit d’attendre qu’une mission, quelle qu’elle soit, relevant de sa qualification professionnelle, soit accomplie correctement.

Il est faux de prétendre que les clôtures trimestrielles étaient d’importance secondaire et qu’elles avaient un usage exclusivement interne.

La gestion en autonomie de BFC, tâche autrefois dévolue à la Caisse des dépôts et consignations, est, désormais, réalisée par M. [R], assumant les fonctions de responsable consolidation depuis le départ de M. [T]. Il se fait assister, comme lui, d’une société externe. La volumétrie de ses besoins vis-à-vis de cette société depuis la mise en autonomie n’a pas changé, de sorte que l’argument relatif aux travaux de paramétrage de logiciel, abandonnés par la Caisse des dépôts, est inopérant.

Le médecin du travail n’a rien constaté d’anormal dans la situation professionnelle du salarié. Aucune recommandation ou observation particulière n’a été faite à l’employeur. Par ailleurs, le CSE, contacté par le salarié, n’a pas jugé nécessaire de saisir la direction de la société à son sujet, ce qui signifie qu’aucune atteinte à sa santé physique et mentale n’a été constatée.

Elle s’est conformée à l’ensemble de ses obligations. Aucun élément ne permet de démontrer que M. [T] a fait un ‘burnout’ en raison de son attitude.

Aucun reliquat de prime sur objectifs n’est dû au salarié au titre de l’exercice 2017/2018, la prime versée étant calculée en fonction des objectifs individuels remplis ou non par le salarié et de la performance globale du groupe.

S’agissant de l’exercice 2018/2019, la performance individuelle du salarié ne saurait être récompensée par une prime alors même qu’elle a été jugée insuffisante et a conduit à son licenciement.

Le salarié ne démontre pas du moindre lien de causalité entre une action ou une abstention de l’employeur et son état de santé, pas plus que de l’existence du préjudice allégué.

Les attestations médicales versées à la procédure par le salarié sont le fait de professionnels ayant manifestement outrepassé leurs fonctions.

Les mails produits par le requérant sont antérieurs à l’entrée en vigueur, au mois de mai 2018, de l’accord relatif à la déconnexion.

L’article 24 de la charte sociale européenne ne peut être invoqué dans un litige entre un salarié et son employeur car il est dépourvu d’effet direct horizontal. Par ailleurs, l’article 10 de la convention n°158 de l’OIT et l’article L. 1235-3 du code du travail plafonnant les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont compatibles.

Le calcul de l’ancienneté s’apprécie non à la fin du préavis mais à la date de rupture du contrat de travail, c’est-à-dire de l’envoi de la lettre de licenciement.

La rémunération servant de base au calcul d’une éventuelle indemnité est celle perçue les 6 derniers mois précédant l’arrêt de travail et non un salaire moyen de référence.

Les modalités de calcul de l’indemnité conventionnelle de licenciement tiennent compte de l’âge du salarié qui a perçu une indemnité complémentaire en raison de celui-ci, conformément à la convention d’entreprise.

Le salarié ne démontre pas avoir procédé à la moindre recherche d’emploi. Le préjudice allégué est théorique et ne revêt aucune réalité. Celui qui invoque un manquement aux règles de la responsabilité civile doit prouver cumulativement l’existence d’une faute, d’un lien de causalité et d’un préjudice.

Il doit être tenu compte de sa situation économique exceptionnellement difficile résultant de la crise sanitaire, la société exerçant son activité dans un secteur figurant au nombre de ceux qui ont été particulièrement affectés.

*

L’instruction de l’affaire a été clôturée le 27 février 2023.

La date des plaidoiries a été fixée à l’audience du 27 avril 2023.

L’affaire a été mise en délibéré au 22 juin 2023, prorogé au 8 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur le licenciement pour insuffisance professionnelle

L’article L.1232-1 du code du travail rappelle que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Celle-ci s’entend d’une cause objective, reposant sur des griefs suffisamment précis, vérifiables et établis, qui constituent la véritable raison du licenciement.

L’insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement (Cass. soc., 25 févr. 1985, n°84-40.446). Elle se distingue de la faute (Cass. soc., 31 mars 1998, n°96-40.399).

Contrairement aux autres motifs de licenciement, il suffit à l’employeur d’invoquer le grief d’insuffisance professionnelle, motif matériellement vérifiable, pour que la lettre soit dûment motivée (Cass. soc., 29 oct. 1997, n°95-44.152 ; Cass. soc., 20 nov. 1996, n°93-45.555; Cass. soc., 3 déc. 2003, n°01-45.039). Ainsi, doit être considérée comme suffisamment motivée la lettre énonçant une « insuffisance professionnelle préjudiciable aux intérêts de l’entreprise » (Cass. soc., 23 mai 2000, n°98-42.064).

L’appréciation des aptitudes professionnelles et de l’adaptation à l’emploi relève du pouvoir patronal. Le juge ne saurait prétendre substituer son appréciation à celle de l’employeur, notamment dans l’appréciation des possibilités d’affectation du salarié dans un autre poste (Cass. soc., 11 févr. 1981, n°79-41.532). Ainsi, l’employeur ne peut se voir reprocher en présence d’un comportement légitimant le licenciement, de ne pas avoir choisi la solution d’un déclassement professionnel (Cass. soc., 12 déc. 1983, n°81-41.572).

Le caractère réel et sérieux du motif tiré des insuffisances professionnelles du salarié ne saurait être écarté en mettant en cause l’organisation du travail adoptée par l’employeur ou le mauvais fonctionnement du service (Cass. soc., 6 nov. 1984, n°82-41.853 ; voir encore Cass. soc., 24 oct. 1979, n°78-40.863).

Il demeure que l’incompétence alléguée doit reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l’employeur (Cass. soc., 6 juill. 1979, n°77-40.168).

Les griefs formulés doivent donc être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

Pour légitimer un licenciement, il n’est pas nécessaire que l’inadaptation à l’emploi ou l’incompétence se soient traduites par une faute professionnelle caractérisée (Cass. soc., 5 janv. 1984, n°81-42.766 ; Cass. soc., 13 nov. 1986, n° 84-41.231). L’inaptitude ou l’insuffisance professionnelle se manifeste dans les répercussions en tant qu’elle perturbe la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service.

Il n’est toutefois pas nécessaire, pour légitimer un licenciement, que l’insuffisance du salarié ait entraîné pour l’entreprise un préjudice chiffrable (Cass. soc., 9 juin 1983, n°81-40.960). Mais la légitimité du licenciement est évidemment renforcée lorsque l’incompétence du salarié affecte les résultats (Cass. soc., 5 janv. 1978, n°76-40.971).

Ainsi, la responsabilité dans de mauvais résultats d’un salarié, qui s’est révélé incapable de faire face à un accroissement de ses responsabilités qu’il avait accepté et qui se traduisait par une augmentation de sa rémunération, constitue un motif légitime de licenciement (Cass. soc., 28 mars 1985, n°82-40.899).

Bien que l’employeur soit seul juge pour apprécier l’insuffisance du salarié, la présentation des circonstances prend une importance particulière dans la mesure où elles peuvent faire apparaître une faute de l’employeur dans l’usage de ses pouvoirs d’appréciation. Entreront en ligne de compte la qualification professionnelle, l’ancienneté de services, les circonstances de l’engagement, les relations antérieures. Les juges s’appliquent, en particulier, à rechercher si des recadrages avaient été précédemment effectués (Cass. soc., 31 mai 1978, n°77-40.377).

La preuve de l’insuffisance professionnelle, dont la charge pèse exclusivement sur l’employeur, ne saurait reposer sur une approche subjective. Les juges ne peuvent se satisfaire de témoignages émettant des jugements de valeur et ne relevant aucun fait précis (Cass. soc., 18 juill. 1988, n°86-42.417). Il est nécessaire que la réalité de l’insuffisance soit établie et justifiée matériellement (Cass. soc., 19 juill. 1988, n°85-43.567), qu’elle repose sur des faits réels et vérifiables.

En vertu de l’article L.6321-1 du code du travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.

En l’espèce, les parties s’accordent sur le fait que, compte tenu, notamment, de son expérience et de ses qualités professionnelles, M. [T] [U] disposait des compétences nécessaires lui permettant d’endosser le poste de responsable consolidation au sein de la S.A. la Compagnie des Alpes, fonctions qu’il avait déjà occupées antérieurement (de 2002 à 2006) auprès d’une autre filiale de la Caisse des dépôts et consignations (Egis).

Pour autant, dans la lettre de licenciement du 13 mars 2019, qui fixe l’objet du litige, la S.A. la Compagnie des Alpes reproche à M.[T] [U] une insuffisance professionnelle, en l’occurrence:

– de ne pas parvenir à progresser et à délivrer de manière fiable les données dont il a la responsabilité malgré l’accompagnement et le soutien dont il a bénéficié, son investissement ne se reflétant pas dans les résultats obtenus sur le service, lesquels dépendent essentiellement du travail fourni par ses collaborateurs, qui ont été amenés à prendre de nouvelles responsabilités suite au changement d’organisation,

-de ne pas avoir pris la pleine mesure de ses fonctions et de s’être appuyé énormément sur les membres de son équipe gérant en autonomie des missions sur lesquelles il aurait dû s’investir et effectuer une revue systématique de leurs travaux, et de faire un usage trop important de la délégation auprès de ses collaborateurs sur les projets à réaliser,

-une absence de maîtrise des normes IFRS,

-la non atteinte d’objectifs fixés en 2017,

-des erreurs significatives dans le traitement, le reclassement et sur la capacité d’autofinancement des activités abandonnées à l’occasion de la clôture du 31 mars 2018 et de la consolidation annuelle, et de grosses difficultés à retraiter le tableau des flux de trésorerie de l’exercice se terminant le 30 septembre 2018,

-le fait que son manager ait du prendre en charge certaines de ses missions, compte tenu de ses difficultés, telles que la revue analytique du bilan et du compte de résultats et la justification de l’impôt et du taux d’impôt en consolidation,

-des erreurs lors de la revue de consolidation au 31 décembre 2018, avec des écritures et des explications incomplètes et incompréhensibles, celles relatives à l’impôt différé révèlant des anomalies significatives démontrant un niveau technique insuffisant,

-le fait qu’il était, pourtant, en pleine mesure de réaliser les missions confiées au regard de son parcours, malgré sa demande relative à un besoin de formation.

Au soutien de ses allégations, la S.A. Compagnie des Alpes produit:

-Le compte-rendu de l’entretien annuel d’évaluation du salarié au titre de l’exercice 2018/2019 réalisé le 16 novembre 2018 par Mme [S] [E], comprenant les commentaires suivants :

‘Compétences techniques en consolidation insuffisantes pour permettre à [U] de remplir pleinement et avec sérénité son rôle de responsable de la consolidation. Ce point a été détecté lors des années précédentes, cependant nos nombreuses sessions de travail n’ont pas permis d’amener [U] au niveau requis pour le poste.

[U] connaît l’outil BFC par c’ur mais trop souvent se réfugie derrière l’outil et n’essaie pas assez de comprendre les tâches qu’il accomplit, les raisons, leur justification comptable/conso et n’est pas en mesure de documenter tout seul et de façon satisfaisante les écritures qu’il a comptabilisées. Les CAC ont d’ailleurs signalé cette insuffisance.

[U] manque aussi de recul sur son travail et sur les données chiffrées qu’il fournit, et n’a pas en tête d’ordre de grandeur et/ou la rigueur dans son travail qui lui permettrait de détecter des erreurs ou des incohérences.’

‘ Cette année, avec les activités abandonnées, le problème s’est encore accentué : des erreurs ont été détectées lors de chaque consolidation, [U] n’a pas su gérer le sujet activités abandonnées et ses impacts dans le FCF et le TFT, ni même l’expliquer ensuite aux CAC, notamment au 31 mars. Enfin durant la consolidation de clôture du 30 septembre 2018, ce malgré l’intervention pendant environ 20 jours d’un expert en consolidation expérimenté pour l’aider, [U] a détecté une dernière erreur commise sur le restatement de l’exercice N-1 et du budget 2018, et a complètement perdu pied. Cette situation l’a mis dans un état de stress important’.

‘ Les nombreuses erreurs commises par [U] fragilisent la situation du service, sa capacité à délivrer un travail de qualité et l’appréciation du travail accompli par la direction générale. [U] doit davantage se vérifier, ne pas considérer systématiquement que ce qui sort de BFC est exact et corroborer ses résultats par des contrôles de cohérence et/ou des analyses complémentaires.

Il en résulte une perte de confiance progressive dans le travail de [U] et un surcroît de travail important pour moi qui dois désormais tout revérifier. Ceci complique donc fortement nos relations au vu de l’importance des données consolidées et de la situation de la société (côtée)’;

-L’attestation de suivi individuel de l’état de santé du salarié rédigée par le service de santé au travail le 12 février 2019 sur laquelle ne figure aucune mention spécifique;

-L’entretien annuel d’évaluation au titre de l’exercice 2019/2020 de M. [O] [R], ayant remplacé M. [T] [U] au poste de responsable consolidation, soulignant son implication et le fait que les divers objectifs aient été atteints avec un travail réalisé au-delà des attentes, et dans lequel ce salarié remercie sa hiérarchie pour son aide;

-Les entretiens annuels d’évaluation au titre des exercices 2019/2020 et 2020/2021de Mme [N] [B] au poste de responsable comptable holdings, indiquant que malgré des modifications importantes subies au sein de son équipe et un manque d’effectif, les objectifs ont été atteints, et dans lesquels cette salariée se dit satisfaite de l’aide et de l’écoute bienveillante apportées par sa hiérarchie;

-Une attestation de présence de la société Les Échos Médias mentionnant que M. [U] [T] a participé à la formation ‘ journée Arrêté des comptes 2018- règles françaises et IFRS’ qui s’est tenue le 27 novembre 2018 à [Localité 4];

– Les conventions d’assistance à l’établissement des comptes consolidés signées le 8 octobre 2018 et le 30 octobre 2018, démontrant que le service consolidation de la S.A. la Compagnie des Alpes a bénéficié, pour un total de 20 jours, du 12 au 31 octobre 2018, puis du 5 au 16 novembre 2018, de l’aide d’un expert-comptable pour établir les comptes consolidés du groupe en fonction du référentiel IFRS pour la période du 1er octobre 2017 au 30 septembre 2018;

-Les organigrammes du service consolidation de septembre 2021 et décembre 2016, desquels il ressort que le responsable consolidation a, désormais, sous son autorité, quatre salariés (dont deux consolideurs) au lieu de deux;

-Une attestation du 30 mai 2022 de M. [P] [D], informaticien, mentionnant que même s’il est rattaché à M. [O] [R], responsable consolidation (en qualité de ‘chef de projets transverses’ dans l’organigramme de septembre 2021 fourni), il ne travaille pas sur la consolidation du groupe, n’ayant aucune compétence dans ce domaine.

-Le contrat de travail à durée indéterminée de M. [C] [F], à compter du 3 septembre 2019 au poste de comptable général;

-Le contrat d’apprentissage de M. [L] [H] ayant débuté le 30 août 2018 pour finir le 31 août 2019, ayant pour maître de stage M.[R] [O];

Or, il s’avère, à l’examen de ces documents, qu’aucun d’entre eux n’est de nature à démontrer de la réalité de l’insuffisance professionnelle retenue à l’encontre de M. [T].

En effet, les appréciations littérales de sa supérieure hiérarchique formulées à l’occasion de l’évaluation qui s’est tenue à la fin de l’année 2018 ne sont étayées par aucune pièce alors qu’elles sont fermement contestées par le salarié qui, à l’inverse, fournit des éléments tendant à établir que son licenciement, intervenu trois mois seulement après ladite évaluation, est dénué de cause réelle et sérieuse.

La Cour observe que rien au dossier ne permet de vérifier, qu’antérieurement à la délivrance de la lettre de licenciement, des explications aient été demandées et recueillies par l’employeur auprès du salarié, s’agissant des erreurs et insuffisances qui y sont énumérées.

Or, le salarié fournit de telles explications dans ses écritures, alors même que lesdites erreurs et insuffisances ne sont nullement documentées par l’employeur dans le cadre de la présente procédure.

M. [T] avait déjà, point par point, le 21 décembre 2018, fait valoir ses observations par rapport à l’ensemble des reproches faits lors de son évaluation professionnelle au titre de l’exercice 2018/2019, ce à quoi sa N+1, Mme [S], avait répondu: ‘l’ensemble de ces remarques est réfuté et en tout état de cause pas de nature à justifier la non atteinte des attentes du poste compte tenu de la séniorité de [U] et du soutien dont il a bénéficié’.

Or, M. [T] [U] rapporte la preuve, qu’antérieurement au compte-rendu du 16 novembre 2018, aucune critique ne lui avait été adressée par son employeur, bien au contraire.

Il a, ainsi, fait régulièrement l’objet de gratifications financières, puisque:

– Il a bénéficié au titre des exercices 2013/2014 (15.600 €), 2014/2015 (15.600 €), 2015/2016 (15.951 €) et 2016/2017 (16.068 €) du plafond maximum de la prime d’objectifs, soit 20 % de sa rémunération annuelle;

-Il s’est vu attribuer des actions gratuites liées à sa performance personnelle (150 actions en 2014, 150 actions en 2015, 150 actions en 2016, 200 actions en 2017, 200 actions en 2018);

-Il lui a été alloué une prime exceptionnelle de 3.000 € compte tenu de son implication particulière sur l’année 2014;

-Il a obtenu une mesure d’augmentation individuelle de son salaire de 3 % à compter du 1er janvier 2016.

En outre, les attestations de M. [J], M. [Z] (son ancien responsable N+1) et M. [X] (expert en consolidation), produites par le salarié, confirment que durant leur collaboration M. [T] ne faisait l’objet d’aucun retour négatif de la part de la direction s’agissant de son poste de responsable consolidation.

D’ailleurs, il apparait qu’à l’occasion de l’évaluation annuelle pour l’exercice 2017/2018, son N+2, M. [M] indiquait au titre des commentaires: ‘Merci pour les efforts’.

De plus, il est constant, et cela ressort du rapport d’audit fourni par le salarié, que les comptes annuels de la S.A. la Compagnie des Alpes, s’agissant des clôtures de l’année 2018, ont été validés par les commissaires aux comptes, sans qu’il ne puisse être soutenu, comme le fait l’employeur, que le travail fourni par le salarié, en sa qualité de responsable consolidation, y est totalement étranger.

D’ailleurs, M. [T] justifie avoir été destinataire, au même titre que d’autres salariés, de plusieurs mails de remerciements et de félicitations de la part de sa responsable, Mme [S] [E] (le 28 octobre 2016, le 16 mars 2017, le 22 juin 2017, le 6 octobre 2017, le 12 décembre 2017, le 4 février 2018, le 11 décembre 2018), au sujet du travail fourni par l’ensemble des membres de l’équipe consolidation, incluant l’intéressé. À cet égard, il convient d’observer que le dernier message relatif à la publication des résultats annuels n’a été adressé que quelques semaines avant le licenciement du salarié.

Dès lors, il est établi que pendant quatre exercices au moins, M. [T] a donné parfaite satisfaction à son employeur sur son poste de responsable consolidation et que ses compétences professionnelles n’avaient, jusque là, jamais été remises en cause.

S’il est vrai que le salarié a demandé son déclassement vers un poste de consolideur, il en a exposé les motifs dans un courriel du 21 novembre 2018 adressé à ses responsables hiérarchiques dans lequel il fait référence, non à son insuffisance professionnelle, mais à une situation dégradée liée aux facteurs suivants:

-un manque d’effectif:

‘Jusqu’au mois de juin 2018, nous étions 3 au service consolidation.

Suite au décès de [V] [I], [N] [B] a repris le poste de responsable de la comptabilité suite à la proposition de la direction financière. Or, cela faisait deux ans que je la formais et elle était d’une grande aide au service consolidation.

Elle a été remplacée par [C] [F], qui a un profil junior et qui n’est pas encore opérationnel.

JF [R] quant à lui a pris de nouvelles fonctions depuis plusieurs mois et ne travaille plus que partiellement pour le service consolidation.

En conclusion de 3 personnes nous sommes passées à 1 personne et demie alors qu’il y a eu un accroissement de tâches pour cette dernière consolidation’;

-un manque de formation, du fait de l’absence ‘de passation de dossiers’ au départ de son prédécesseur et de l’existence de nouveaux sujets (activités abandonnées) pour lesquels il n’a jamais été formé;

-la réduction des délais de production des comptes (quelques jours au lieu de plusieurs semaines auparavant).

Au sujet de l’attestation de présence à la formation IFRS fournie par la S.A. Compagnie des Alpes, M. [T] soutient qu’il s’agirait d’un faux, sachant qu’il démontre avoir été en arrêt de travail à la date du 27 novembre 2018 de sorte qu’il n’a pas pu assister à cette session, ce dont témoigne, d’ailleurs, Mme [K], comptable de la société, qui expose, d’autre part, que la présentation n’avait pour but que de sensibiliser de manière très générale sur les évolutions de la norme, sans entrer dans le détail des différents sujets balayés.

De plus, il apparaît que M. [T], alors même qu’il occupait le poste de responsable consolidation, n’a pas été convié à plusieurs réunions qui se sont tenues en janvier 2019 relatives aux normes IFRS, notamment celles avec les commissaires aux comptes, ce que l’employeur ne conteste pas en l’expliquant par le fait qu’il en avait été déchargé au profit de M.[R]. Or, le salarié se voit précisément reprocher, dans la lettre de licenciement, des erreurs relatives à l’application de ces normes.

En outre, la Cour constate que l’effectif du service consolidation a connu des évolutions qui l’ont nécessairement impacté, contrairement à ce que soutient l’employeur, lequel prétend que les départs consécutifs de deux consolideurs expérimentés auraient seulement eu pour conséquence de mettre en exergue les insuffisances professionnelles de M. [T], jusque-là palliées par ces salariés.

Or, il est évident que de tels changements ont nécessairement eu pour effet d’alourdir la charge de travail et de pression du responsable consolidation qui s’est retrouvé aux commandes d’une nouvelle équipe, aux compétences amoindries, qu’il a dû former.

Ainsi, alors que son service était composé, en 2016, d’un responsable consolidation (lui-même) et de 2 consolideurs seniors à temps complet, M. [T] ne disposait plus, à ses côtés, en 2018, soit au moment où il lui est reproché une insuffisance professionnelle, que d’un consolideur confirmé à temps partiel et d’un consolideur junior venant d’être recruté. De plus, la S.A. la Compagnie des Alpes ne démontre aucunement que sa supérieure hiérarchique, Mme [S], ait consacré une partie substantielle de son temps à venir en soutien du service consolidation, ainsi qu’elle l’affirme.

Sur ce point, le salarié fournit trois attestations de personnes (M. [Z], M. [X], et M. [A]) ayant occupé des fonctions de responsable consolidation, identiques aux siennes, notamment celle de son N+1 de 2013 à 2015, lesquelles témoignent de ce que, compte tenu des modifications opérées, notamment en termes de ressources humaines, au sein du service consolidation, composé antérieurement, exclusivement, de consolideurs expérimentés à temps plein, lesquels ont été remplacés par un débutant et un stagiaire en contrat d’alternance qu’il a fallu former, de l’augmentation des exigences et des demandes, de la réduction des délais, de la complexité croissante des normes, et de l’extension du périmètre de consolidation, M. [T] [U] ne pouvait pas être en capacité, avec ce nouvel effectif, de faire face à l’ensemble des tâches confiées.

M. [T] a, d’ailleurs, alerté sa directrice, Mme [S], sur l’impact du supplément de tâches engendré par la réduction d’effectif, notamment à travers un courriel du 17 août 2018, dans lequel il demandait à ce que des moyens supplémentaires soient alloués à son service pour lui permettre de respecter les délais et objectifs fixés.

Bien que la direction ait tenté d’y apporter des réponses, il s’avère que celles-ci n’étaient manifestement pas suffisantes pour satisfaire au niveau d’exigences imposé par sa hiérarchie qui a continué à être le même, voire qui s’est accentué, puisqu’il apparaît que, concomitamment, malgré les difficultés objectivées, Mme [S], supérieure de M. [T], lui en demandait toujours davantage, notamment en termes de délais et de disponibilités.

Par ailleurs, il apparait que le service consolidation a du endosser une nouvelle mission, antérieurement dévolue à la Caisse des dépôts et consignations (mise à jour et paramétrage du logiciel BFC). Si cette mission a été attribuée à M. [R], M. [T] a, lui aussi, nécessairement été impacté du fait des redistributions engendrées.

Dès lors, il s’avère que le motif tiré de l’insuffisance professionnelle du salarié n’est, en l’espèce,

pas matériellement caractérisé, à défaut pour l’employeur de rapporter la preuve de faits réels et vérifiables.

Au surplus, la S.A. Compagnie des Alpes ne saurait reprocher à M. [U] [T] des erreurs, dont elle est, au moins pour partie, responsable, eu égard au contexte dégradé du service consolidation précédemment décrit et à l’inadaptation des moyens alloués à ce salarié, que ce soit sur le plan des ressources humaines ou de la formation.

Il apparait, en effet, que l’insuffisance professionnelle reprochée à M. [T] est objectivement contemporaine aux changements structurels ayant affecté le service consolidation dont il était responsable, lesquels se sont imposés à lui, de sorte qu’elle ne saurait lui être imputée directement.

Dans ces conditions, la Cour considère que le licenciement de M. [T] [U] est dénué de cause réelle et sérieuse.

L’assiette de l’indemnité due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse est constitué du salaire brut des six derniers mois (Cass. soc., 14 mai 2014, n°12-27.928, Cass. soc., 31 mars 2010, n°08-42.767).

Il ressort de l’attestation Unédic du 12 juillet 2019 destinée à Pôle emploi que le salarié a perçu au cours des six derniers mois complets précédant le dernier jour travaillé et payé un salaire mensuel brut moyen de 7.049,18 €.

M. [T] [U] avait une ancienneté de 16 années.

L’article L.1235-3 du code du travail prévoit une indemnité minimale de 3 mois de salaire et une indemnité maximale de 13,5 mois de salaire.

Ce barème n’est pas contraire à l’article 10 de la convention n°158 de l’organisation internationale du travail (OIT) prévoyant une indemnité adéquate, ainsi que l’a jugé la chambre sociale de la Cour de cassation (Cass. Soc., 11 mai 2022, n°21-14.490).

L’indemnité octroyée doit également tenir compte des circonstances de la rupture et de la situation du salarié.

M. [U] [T] s’est vu allouer une somme de 113.457,92 € lors de la rupture de son contrat de travail par chèque du 11 juillet 2019.

Il justifie, toutefois, d’une diminution sensible du train de vie de sa famille postérieurement à son licenciement, sachant qu’il est père de deux enfants, dont l’un, âgé de 15 ans, est affecté par des troubles autistiques nécessitant son inscription dans une école spécialisée.

Il produit un tableau décrivant sa situation financière avant et après son licenciement. Ses revenus (allocation chômage) ne s’élèvent plus qu’à 3.200 € environ par mois. Il a été contraint, en novembre 2019, de renégocier le remboursement de son crédit immobilier sur une durée plus longue, n’étant plus en capacité d’assumer les échéances, et des contrats ont également été résiliés pour la même raison. Il a, aussi, perdu le bénéfice de certaines actions qui lui avaient été attribuées gratuitement sous conditions.

Il démontre de très nombreuses recherches d’emploi sur l’ensemble du territoire national.

Dès lors, compte tenu de l’ancienneté du salarié, des circonstances ayant entouré son licenciement, et de la perte de revenus dont il démontre, il convient de lui allouer une somme de 84.590,16 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit une indemnité correspondant à 12 mois de salaire.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera, dès lors, infirmé de ce chef.

II. Sur les primes d’objectifs

Pour être valable, une clause de variation du salaire doit être fondée sur des éléments objectifs, indépendants de la volonté de l’employeur et ne doit pas faire peser le risque d’entreprise sur le salarié.

Quels que soient les paramètres de détermination de la rémunération variable et à moins que le salarié n’ait accepté le principe d’une prime discrétionnaire, l’employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié, de manière claire et précise, ses objectifs, ainsi que les éléments servant de base au calcul de son salaire et sur lesquels il se fonde pour déterminer le niveau d’atteinte desdits objectifs. Il ne peut se retrancher derrière le caractère confidentiel de certaines données (Cass. soc., 18 juin 2008, n°07-41.910). Les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle doivent être rédigés en français. S’ils le sont en anglais, le salarié peut « se prévaloir de leur inopposabilité» (Cass. soc., 29 juin 2011, n°09-67.492).

Lorsque les objectifs annuels sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier, dès lors qu’ils sont réalisables et qu’ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d’exercice, et non en cours d’exécution alors qu’il prend lui-même connaissance de leur niveau d’exécution (Cass. soc., 2 mars 2011, n°08-44.977, Cass. soc. 8 avril 2021, n°19-15.432 ).

L’absence de détermination des objectifs, ou une communication tardive des objectifs à réaliser, et de leurs conditions de calcul vérifiables, oblige l’employeur à indemniser le salarié du préjudice résultant de son impossibilité de les atteindre et, conséquemment, à lui verser, à ce titre, l’intégralité de sa rémunération variable (Cass.soc. 10 juillet 2013 n°12-17.921, Cass. Soc. 25 novembre 2020, n°19-17246).

La détermination du montant de la rémunération variable doit se faire en fonction des critères visés au contrat de travail et des accords conclus les années précédentes, et, à défaut, des données de la cause (Cass. Soc. 15 mai 2019 n° 17-20.615).

En l’espèce, l’avenant au contrat de travail du 1er décembre 2006 mentionne, s’agissant de la prime d’objectifs:

‘ M.[U] [T] pourra percevoir une prime d’objectifs dont le montant pourra varier de 0 à 20 % de la rémunération totale de base brute perçue entre le 1er octobre et le 30 septembre de l’exercice précédent, hors prime d’objectifs.

Le montant de la prime d’objectifs sera arrêté par le supérieur hiérarchique de M. [U] [T] en fonction de la réalisation des objectifs quantitatifs et qualitatifs sur l’exercice de référence. Ces objectifs seront définis au début de chaque exercice. La prime d’objectifs sera payée dans les six mois suivant la clôture de l’exercice.

La prime d’objectifs sera, le cas échéant, payée au prorata temporis, en fonction du temps passé dans l’entreprise au cours de l’exercice considéré.’

Dans ses écritures, la S.A. Compagnie des Alpes donne des détails au sujet de l’assiette, de la composition et des modes de calcul de la prime sur objectifs.

Or, aucune pièce de la procédure ne permet de démontrer que de tels éléments avaient été précisément portés à la connaissance du salarié.

En dehors du compte-rendu de l’entretien annuel effectué au titre de l’exercice 2018-2019 du 16 novembre 2018, aucun document produit par la S.A. la Compagnie des Alpes ne fait référence aux objectifs fixés à M. [T] [U].

En outre, force est de constater que ledit document se contente de procéder à une évaluation des objectifs 2017/2018 et que, s’agissant des objectifs 2018 /2019, il ne comporte aucune précision, sauf à indiquer, pour les objectifs 1, 2 et 3: ‘ à revoir dans le cadre de la nouvelle organisation du service qui reste à définir’ et, pour les objectifs 4 et 5, la mention: ‘null’.

D’ailleurs, par mails du 21 janvier 2019 et du 25 janvier 2019, M. [T] sollicitait sa hiérarchie afin d’avoir des informations au sujet de sa prime d’objectifs 2018, n’en ayant eu aucune jusqu’alors, à l’inverse de ses collègues.

Par conséquent, il apparait que la S.A. Compagnie des Alpes n’apporte pas la preuve d’avoir communiqué, en début d’exercice 2017/2018 et 2018/2019, à M. [T] [U], les objectifs qui lui étaient fixés, ce qui n’a pas permis à ce salarié d’anticiper la réalisation et l’atteinte des dits objectifs et d’adapter son activité de manière à pouvoir bénéficier de l’ensemble des primes composant sa rémunération variable.

La Cour observe que lors des 4 exercices précédents, le salarié s’était vu allouer la prime d’objectifs maximale, soit 20% de sa rémunération annuelle brute, et qu’il n’existe, au dossier, aucune raison objective justifiant qu’elle soit diminuée.

Il apparaît qu’au titre de l’exercice 2017/2018, M. [T] aurait pu percevoir un montant maximal de prime sur objectifs à hauteur de 16.068 € (soit 20 % de 80.340 €), et qu’il n’a obtenu qu’une somme de 8.034 €, de sorte qu’il convient de condamner la S.A. la Compagnie des Alpes à lui verser un solde de prime d’objectifs d’une valeur de 8.034 € bruts, outre les congés payés afférents à hauteur de 803,40 € bruts.

Au titre de l’exercice 2018/2019, M. [T] a perçu une prime de 3.158,29 € correspondant à l’objectif du groupe, alors qu’il aurait pu bénéficier d’un montant maximal de 14.059,50 € (proratisé sur la période du 1er octobre 2018 au 13 juillet 2019, soit 10,5 mois de temps de présence dans l’entreprise), de sorte qu’il convient de condamner la S.A. la Compagnie des Alpes à lui payer un solde de prime d’objectifs d’une valeur de 10.901, 21 € bruts, outre les congés payés afférents à hauteur de 1.090,12 € bruts.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera donc également infirmé sur ce point.

III. Sur l’obligation de sécurité et le droit à la déconnexion

L’article L.4121-1 du code du travail prévoit que :

‘L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L.4161-1 ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes’.

Le droit à la déconnexion, c’est-à-dire le droit pour le salarié de ne pas être joignable en dehors de son temps de travail a été depuis longtemps reconnu par la jurisprudence. Il est le corollaire du droit au repos quotidien minimal (C. trav., art. L. 3131-1). Mais certaines circonstances tenant au bon fonctionnement de l’entreprise permettent des dérogations.

Le 16 avril 2018, un accord relatif au droit à la déconnexion était conclu au sein des sociétés du groupe la Compagnie des Alpes, duquel il ressort que : ‘ Par son comportement professionnel et son exemplarité, le responsable hiérarchique est le premier garant de l’équilibre de vie des salariés dont il a l’autorité hiérarchique. Il attachera une importance particulière au respect du droit à la déconnexion et ne sollicitera pas ses salariés en dehors des périodes de travail, sauf en cas de circonstances exceptionnelles telles que définies dans l’article 1 du présent accord’ (article 5 promotion de l’exemplarité managériale).

Or, M. [T] [U] produit aux débats 16 courriels envoyés par sa supérieure hiérarchique, Mme [S], sur une période allant du 28 décembre 2016 au 5 février 2019, par lesquels il était sollicité tard le soir, la nuit, le samedi, le dimanche, et pendant sa pause déjeuner, nécessitant une réponse/action dans un délai contraint, parfois même immédiate (cf mail du 3 mai 2018 à 19h33).

Il fournit, par ailleurs, une attestation de sa compagne relative à l’impact sur leur vie familiale et sur son état de santé de telles sollicitations, lesquelles ne lui permettaient pas de pouvoir faire une coupure avec son travail, plus particulièrement s’agissant de la période de septembre à décembre 2018. Elle évoque, également, des échanges téléphoniques professionnels pendant ses jours de repos.

Dès lors, outre le fait que son employeur, après la perte de ses collaborateurs et l’étiolement des ressources humaines, n’a pas mis à sa disposition les moyens et formations nécessaires lui permettant de satisfaire à ses missions techniques grandissantes, il apparait que sa supérieure hiérarchique directe a exercé sur M. [U] [T] une pression réelle, en le sollicitant à des heures et des moments indus.

D’autre part, M. [T] [U] communique plusieurs attestations d’anciennes relations de travail, témoignant d’un comportement inadapté de son manager, Mme [S] [E], à son égard:

-Attestation de Mme [K]: « Mme [S] est une personne agressive dans son comportement. Elle agresse verbalement ses collaborateurs et ce devant des personnes de son équipe ou étrangères au service. Ce sont très souvent des reproches disproportionnés voire infondés dont moi-même j’ai été confrontée. C’est une personne qui n’accompagne pas ses équipes, qui ne les soutient pas et qui n’assume pas ses responsabilités de manager en reportant les fautes sur les membres de ses équipes et/ou sur les membres des autres services en utilisant un ton inapproprié, voire disproportionné’.

‘Par rapport à [U] [T], qui était basé à [Localité 3], et moi à [Localité 4], j’ai assisté à de nombreuses conversations téléphoniques extrêmement gênantes où [E] [S] (à [Localité 4]) ne

se gênait pas pour utiliser un ton très agressif et rabaissant avec [U] [T] (à [Localité 3]). Je me souviens d’une conversation téléphonique en particulier qui a gêné les

membres du service présents dans l’open space au point de devoir sortir.

Fin 2017/2018, Mme [S] utilisait un ton très agressif envers [U] (à [Localité 3]) sur sa manière de manager son équipe. (…)

Les propos de Mme [S] étaient intenables et odieux envers [U] et nous avons vu un collègue préférer sortir du bureau pour ne pas être contraint d’entendre la suite de la conversation. » ;

-Attestations de M.[J] : « Les relations humaines sont compliquées, basées sur la mise en faiblesse en dénigrant le travail de ses collaborateurs par des propos désobligeants, tels que : «[U] n’assure pas son rôle de responsable ! ». Je ne comprenais pas cette remarque, [U] fédérait le service, les tâches de chacun étaient bien définies, les délais respectés, les objectifs atteints. »

« Ces propos étaient tenus devant ses collègues mais en son absence. »

« Elle nous a signifié à plusieurs reprises et avec le sourire que, comparativement au rythme de travail de son ex-cabinet comptable, on travaillait en mi-temps thérapeutique à la CDA ».

M. [A] parle, quant à lui, dans son attestation, d’une « relation toxique », en raison du caractère « dur et méprisant» de Mme [S].

Par ailleurs, M. [T] [U] justifie avoir pris contact avec des membres du CSE dès janvier 2019 pour leur signaler les difficultés qu’il rencontrait avec sa hiérarchie directe, c’est-à-dire avec Mme [S] [E].

En outre, il convient de relever qu’aucune réponse n’a été apportée par son employeur à sa demande de déclassement, alors même que M. [T] était prêt à redevenir consolideur au salaire qu’il avait auparavant (cf ses observations du 21 décembre 2018), contrairement à ce que soutient la S.A. la Compagnie des Alpes dans ses écritures.

Une telle absence de considération, face à un mal-être professionnel ainsi exprimé par ce salarié, ne pouvait, à l’évidence, qu’accentuer celui-ci.

A ce sujet, M. [T] [U] démontre qu’un traitement médicamenteux (antidépresseur et anxiolytique) lui a été prescrit au titre d’un ‘burnout avec syndrome anxiodépressif’ à compter du 10 novembre 2018, avant que plusieurs arrêts de travail ne lui soient délivrés pour le même motif. Il justifie également de la mise en place d’un suivi psychologique à compter du 14 janvier 2019.

Dans ces conditions, la Cour considère que la S.A. Compagnie des Alpes a manqué à son obligation de sécurité à l’égard de M. [U] [T], en le privant notamment de son droit à la déconnexion, et qu’il convient de la condamner à lui verser une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera, dés lors, infirmé de ce chef.

IV. Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La S.A. la Compagnie des Alpes succombant intégralement, elle devra assumer la charge des entiers dépens, tant en 1ère instance qu’en cause d’appel.

M. [T] [U] produit les notes d’honoraires évaluatives établies par son avocat.

Sur cette base, il convient de condamner la S.A.la Compagnie des Alpes à verser à M. [T], sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 2.856 € en première instance, et une somme de 2.800 € en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dans les limites de l’appel,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Chambéry du 16 décembre 2021 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

-Fixe à 7.049,18 € le salaire mensuel brut moyen perçu par M. [U] [T] au cours des 6 derniers mois;

-Dit que le licenciement de M. [U] [T] notifié le 13 mars 2019 pour insuffisance professionnelle ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse;

-Condamne la S.A. la Compagnie des Alpes à verser à M. [U] [T] les sommes suivantes:

*84.590,16 € nets de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

*8.034 € bruts au titre du solde de prime d’objectifs pour l’exercice 2017/2018, outre 803,40 € bruts de congés payés afférents;

*10.901,21 € bruts au titre du solde de prime d’objectifs pour l’exercice 2018/2019, outre 1.090,12 € bruts de congés payés afférents;

*3.000 € nets de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité et du droit à la déconnexion;

*2.856 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

-Condamne la S.A. la Compagnie des Alpes aux entiers dépens de l’instance;

Et y ajoutant,

-Condamne la S.A. la Compagnie des Alpes à payer à M. [T] [U] une somme de 2.800€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel;

-Condamne, en cause d’appel, la S.A. la Compagnie des Alpes aux entiers dépens de l’instance et d’exécution, comprenant notamment les éventuels droits proportionnels de recouvrement

Ainsi prononcé publiquement le 08 Mars 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle CHUILON, Conseillère en remplacement du Président légalement empêché, et Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier P/Le Président

 

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