Les conditions du débauchage fautif de salariés

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Négocier de mauvaise foi la reprise d’une société afin de débaucher ses salariés manifeste une intention de nuire qui est sanctionnée par la concurrence déloyale.

Concomitance des départs

Ce qui est sanctionnable, n’est pas uniquement la concomitance des départs des salariés (d’une branche spécifique d’une société par exemple), mais bien leur concomitance avec les dites négociations et surtout avec l’échec de ces mêmes négociations alors que dès avant la fin de celles-ci, le repreneur avait d’ores et déjà programmé la création de sa société (DEUZAIR) dont le début d’activité passait par le débauchage des salariés de la branche maintenance de la société SAITA (le repris).

Le transfert de clientèle

Toutefois, un transfert de clientèle pour des clients ayant le libre choix de leur prestataire et pouvant résilier périodiquement leurs contrats, ne suffit à caractériser un démarchage de clientèle constituant un acte de concurrence déloyale s’il ne s’accompagne de manoeuvres déloyales, de sorte qu’il convient de rechercher si de telles manoeuvres s’évincent des circonstances de la cause.

Affaire DEUZAIR

En l’espèce, les sociétés Foncières CMSA, CER FRANCE, VEC François LURTON, Monlycke Healthcare, parmi les clients cités par la société SAITA, ont rejoint la société DEUZAIR de la fin d’année 2016 à la fin d’année 2017, ce après avoir mis fin à leurs relations contractuelles avec la société SAITA, ce qui ne suffit pourtant pas à caractériser un démarchage fautif, ni davantage le fait que M. [U] s’était vu confier des fonctions de chargé d’affaires du service maintenance au terme desquelles il était en relation directe avec les clients assurant l’organisation, la coordination et les différentes réunions de chantiers.

Le fait que 4 autres salariés aient quitté l’entreprise pour la société DEUZAIR sur une période de trois ans, pour un débauchage total de 7 salariés sur les 20 que comptait la société SAITA, ce qui en soi n’est pas suffisant pour caractériser un acte de concurrence déloyale, n’ajoute, ni ne retranche à une manoeuvre positive de débauchage d’ores et déjà constituée.

7 employés sur les 20 de la société SAITA, dont il n’est pas indiqué qu’ils étaient liés par une clause de non concurrence, ont quitté la société SAITA pour être débauchés sur trois années par la société DEUZAIR créée par M. [F] et devenue E2M CVC.

Ce seul constat est toutefois insuffisant, même en présence d’un débauchage massif, et nonobstant les relations qui existaient entre la société SAITA et la société PH Holding, représentée par M. [F], pour caractériser en soi un acte positif de débauchage et partant de concurrence déloyale.

La responsabilité de droit commun

Selon l’article 1240 du Code civil, l’action en concurrence déloyale est une action de nature délictuelle nécessitant pour prospérer la triple démonstration d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.

Ainsi, si les accords de confidentialité se sont trouvés être le contexte d’une éventuelle concurrence déloyale, ils n’en sont pas la condition.

Les premiers juges ont encore justement rappelé que si, en application du principe de la liberté du travail, le salarié qui n’est pas tenu par une clause de non concurrence conserve toute liberté de partir travailler pour un concurrent, ce principe a pour limite, en matière de débauchage, le cas où celui ci s’accompagne de manoeuvres déloyales ou entraîne la désorganisation de l’entreprise.

L’absence de désorganisation

En l’absence de désorganisation qui en serait résultée, des manoeuvres déloyales ne sauraient être évincées de la seule concomitance du départ de plusieurs salariés qui à elle seule ne suffit à caractériser un acte de concurrence déloyale, même accompagnée d’un déplacement de clientèle.

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