Une enseigne lumineuse originale est éligible à la protection du droit d’auteur.
L’oeuvre, au sens du code de la propriété intellectuelle, est l’oeuvre de l’esprit prévue à l’article L. 111-1 selon lequel l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur l’œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. En application de l’article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle, les oeuvres de l’esprit sont protégées quels que soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. L’article L. 112-2, 10° du même code vise spécialement les oeuvres appliquées, éligibles à la protection du droit d’auteur. La protection conférée par le droit d’auteur ne peut s’appliquer à la forme d’une œuvre de l’esprit qu’à condition que cette dernière ne soit pas entièrement dictée par sa fonction. Il en résulte que la protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable. Dans ce cadre toutefois, il appartient à celui qui se prévaut du droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue. En effet, seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole. L’originalité d’une œuvre de l’esprit doit être appréciée dans son ensemble au regard des différents éléments qui la composent ; elle peut résulter de la combinaison d’éléments connus lorsque celle-ci est inédite et traduit un effort créatif (Cass. Civ. 1ère, 20 mars 2001, pourvoi n° 99-13.713 ; Cass. Com., 17 mars 2004, pourvoi n°03-18.067 ; Cass. Civ.1ère, 22 janvier 2009, pourvoi n° 07-20.334 ; Cass. Civ.1ère, 12 septembre 2018, pourvoi n° 17-18.390 ; Cass. Civ. 1ère, 24 octobre 2018, pourvoi n° 16-23.214). 1. Attention à bien démontrer l’originalité de votre œuvre de l’esprit en identifiant les éléments qui la rendent unique et qui portent votre empreinte personnelle. Cela est essentiel pour revendiquer la protection du droit d’auteur. 2. Il est recommandé de prouver la contrefaçon en mettant en évidence les ressemblances significatives entre votre œuvre et celle reproduite sans autorisation. Les différences mineures ne suffisent pas à écarter le caractère illicite de la reproduction. 3. Lorsque vous réclamez des dommages et intérêts, veillez à distinguer clairement les différents postes de préjudice (manque à gagner, préjudice moral, bénéfices indus) pour une indemnisation juste et adaptée à la nature du préjudice subi. |
→ Résumé de l’affaireLa société Live & Co a répondu à un appel d’offres de la société Talentsoft pour la conception, le montage et le démontage d’un stand sur des salons professionnels. Lors d’un salon en 2021, Live & Co a constaté qu’une enseigne lumineuse quasi identique à celle qu’elle avait créée pour Talentsoft était utilisée par la société EB Créations pour un concurrent de Talentsoft. Live & Co a alors mis en demeure EB Créations de cesser toute utilisation de l’enseigne litigieuse et l’a assignée en justice pour contrefaçon et concurrence déloyale. Live & Co demande des dommages-intérêts pour préjudice économique et moral. EB Créations conteste les accusations et demande à être déboutée de toutes les demandes.
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→ Les points essentielsSur l’originalitéLa société Live & Co soutient que la société EB Créations s’est rendue coupable de contrefaçon en reproduisant à l’identique son enseigne lumineuse. Elle expose les éléments qui ont contribué à la création de l’enseigne et revendique son originalité. La société EB Créations conteste cette originalité en arguant que la plupart des choix créatifs ont été dictés par la société Talentsoft et que l’enseigne n’est pas suffisamment originale. Appréciation du tribunalLe tribunal rappelle les critères d’originalité d’une œuvre de l’esprit et les conditions de protection par le droit d’auteur. Il analyse les caractéristiques de l’enseigne créée par la société Live & Co et conclut à son originalité, éligible à la protection du droit d’auteur. Il écarte les arguments de la société EB Créations et confirme l’originalité de l’enseigne. Sur la contrefaçonLa société Live & Co soutient que la société EB Créations a reproduit les caractéristiques essentielles de son œuvre, constituant ainsi une contrefaçon. La société EB Créations conteste cette accusation en mettant en avant des différences entre les deux enseignes. Appréciation du tribunalLe tribunal rappelle les dispositions légales sur la contrefaçon et analyse les similitudes entre les deux enseignes. Il conclut que la société EB Créations a reproduit l’œuvre de la société Live & Co sans autorisation, constituant ainsi une contrefaçon. Sur les mesures de réparationLa société Live & Co demande réparation pour un manque à gagner et un préjudice moral causés par la contrefaçon. La société EB Créations conteste ces demandes en arguant que les dommages-intérêts réclamés sont injustifiés. Appréciation du tribunalLe tribunal analyse les demandes de réparation de la société Live & Co et les arguments de la société EB Créations. Il conclut que la société Live & Co n’a pas démontré l’existence du manque à gagner allégué, mais accorde une somme en réparation du préjudice matériel et moral subi. Sur les dispositions finalesLa société EB Créations est condamnée aux dépens de l’instance et à verser des dommages-intérêts à la société Live & Co. L’exécution provisoire est ordonnée. Les montants alloués dans cette affaire: – 7.640 euros de dommages et intérêts à la société Live & Co
– 5.000 euros à la société Live & Co au titre de l’article 700 du code de procédure civile |
→ Réglementation applicable– Code de la propriété intellectuelle
– Code de procédure civile Article L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 112-2, 10° du code de la propriété intellectuelle: Article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 122-1 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 122-3 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle: Article L. 700 du code de procédure civile: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Floriane GUIBERT
– Me Marc PICHON DE BURY |