Il appartient toujours au tribunal d’apprécier la valeur probante des pièces qui lui sont soumises
En application de l’article L.716-4-7 du code de la propriété intellectuelle, la contrefaçon de marque peut être prouvée par tous moyens. Il en résulte que la contrefaçon de marque peut notamment l’être par des captures d’écran de sites internet, lesquelles ne sont pas dépourvues par nature de force probante (voir en ce sens, pour une contrefaçon de logiciel, Cour de cassation, chambre commerciale, 7 juillet 2021, n°20-22.048). |
→ Résumé de l’affaireLa société [X] & Valentin, spécialisée dans la boulangerie et la pâtisserie, détient des marques et un nom de domaine portant son nom. Elle a constaté que la SAS DFS France et la SAS Sels utilisaient la dénomination « [X] » pour un point de vente de boulangerie et restauration, ce qui a conduit à un litige. [X] & Valentin a assigné les deux sociétés en contrefaçon de marque et concurrence déloyale. Les parties ont formulé des demandes de réparation et de condamnation. La SAS [X] & Valentin demande l’interdiction d’usage du nom « [X] » et des dommages et intérêts, tandis que la SAS DFS France et la SAS Sels contestent les accusations et demandent le rejet des demandes.
|
→ Les points essentielsSur la demande d’écarter les pièces des débatsLa société [X] & Valentin soutient que les pièces n°3.1, 3.2, 3.3, 7.1 et 9 produites par la société DFS France doivent être écartées des débats dans la mesure où elles sont constituées de photographies ou d’impressions d’écran dont l’origine et la date ne sont pas établies et sont insuffisantes à établir la réalité des faits soutenus en défense. La société DFS France répond qu’elle a produit un constat établi par un commissaire de justice reprenant les constatations tirées des pièces contestées. La société Sels n’a pas conclu à ce titre. En application de l’article L.716-4-7 du code de la propriété intellectuelle, la contrefaçon de marque peut être prouvée par tous moyens. Il en résulte que la contrefaçon de marque peut notamment l’être par des captures d’écran de sites internet, lesquelles ne sont pas dépourvues par nature de force probante. Au cas présent, la société [X] & Valentin se contente d’invoquer de manière générale que les pièces n°3.1, 3.2, 3.3, 7.1 et 9 produites par la société DFS France ne sont pas datées et ne détaillent pas leur origine. Ce faisant, elle n’articule aucun moyen permettant de considérer que ces pièces sont par nature dépourvues de force probante, l’argument ne portant que sur leur contenu. Dès lors, dans la mesure où il appartient au tribunal d’apprécier la valeur probante des pièces qui lui sont soumises, cela ne rend pas pour autant ces pièces irrecevables de sorte que la demande de la société [X] & Valentin visant à ce qu’elles soient écartées des débats doit être rejetée. Sur la demande en contrefaçon de marquesLe règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire a été codifié à droit constant par le règlement (CE) 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire, puis par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne. Selon l’article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle, est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services d’un signe identique ou similaire à la marque enregistrée. En l’occurrence, les marques verbales française “[X] & Valentin” n°4345867 et européenne “[X] & Valentin” n°016462921 sont composées des mêmes mots issus des prénoms français éponymes séparés par une esperluette. Le signe critiqué “[X]” reproduit le premier mot des marques invoquées, mais la similitude visuelle, auditive et conceptuelle est faible. Il résulte de l’ensemble une absence de risque de confusion pour le public pertinent, consommateur raisonnablement informé et moyennement attentif et avisé de produits de boulangerie, entre le signe “[X]” critiqué et les marques invoquées. Les demandes de la société [X] & Valentin fondées sur la contrefaçon de ces marques seront rejetées. Sur la demande en concurrence déloyaleLa société [X] & Valentin reproche aux défenderesses l’utilisation du même code couleur bleu associé au signe “[X]” pour exploiter leurs produits, y compris sur internet, et pour décorer leur boutique. Cependant, la société DFS France démontre que l’usage d’un bleu proche de celui utilisé par la demanderesse est banal, et que la proximité géographique alléguée est inopérante. Les faits critiqués par la société [X] & Valentin ne relèvent ni de la concurrence déloyale, à défaut de risque de confusion, ni du parasitisme. Sur la demande reconventionnelle en procédure abusiveLa société DFS France considère que la demanderesse a agi avec une légèreté blâmable dans le seul but de l’intimider. Cependant, la seule circonstance que la société [X] & Valentin soit déboutée de ses demandes n’est pas de nature à faire dégénérer son action en abus. La demande de la société DFS France à ce titre sera rejetée. Sur les demandes accessoiresLa société [X] & Valentin sera condamnée aux dépens, avec distraction au profit des avocats des sociétés DFS France et Sels. Elle sera également condamnée à payer des sommes au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire de droit n’a pas à être écartée en l’espèce. Les montants alloués dans cette affaire: – La société [X] & Valentin [Adresse 14] est condamnée à payer 10 000 euros à la société DFS France
– La société [X] & Valentin [Adresse 14] est condamnée à payer 2000 euros à la société Sels |
→ Réglementation applicable– Code de la propriété intellectuelle
– Code civil – Code de procédure civile Article L.716-4-7 du code de la propriété intellectuelle: Article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle: Article L.716-4 du code de la propriété intellectuelle: Article L.717-1 du code de la propriété intellectuelle: Article 1240 du code civil: Article 32-1 du code de procédure civile: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître François-Xavier BOULIN
– Maître Sophie HAVARD DUCLOS – Maître Nicolas SIDIER |