Marks & Spencer (1) se voyait reprocher d’avoir, dans le cadre du service Google AdWords, d’avoir réserve les mots clefs et marques « Interflora » ainsi que ses déclinaisons.
Saisie de l’interprétation à donner à la notion d’usage illicite de marque, les juges européens ont rappelé que le simple usage de la marque d’un tiers sur Google AdWords n’était pas en lui-même contrefaisant. En effet, pour qu’il y ait contrefaçon, l’usage d’une marque par un tiers (pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels elle est enregistrée), doit porter atteinte à l’une des « fonctions » de la marque. La fonction essentielle de la marque est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service couvert par la marque (fonction d’indication d’origine), les autres fonctions étant, notamment, celles de publicité et d’investissement.
Se référant à la jurisprudence Google (2), la CJUE a considéré qu’il y a bien atteinte à la fonction d’indication d’origine de la marque lorsque l’annonce affichée à partir du mot clé correspondant à la marque ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers (en d’autres termes l’existence d’un risque de confusion).
Il y a également atteinte à la fonction d’investissement de la marque, lorsque l’usage de la marque par un tiers gêne de manière substantielle l’emploi, par le titulaire, de sa marque pour acquérir ou conserver une réputation susceptible d’attirer et de fidéliser des consommateurs. Dans une situation où la marque bénéficie déjà d’une réputation, il est porté atteinte à la fonction d’investissement lorsque cet usage affecte cette réputation et met ainsi en péril le fait d’attirer et de fidéliser des consommateurs.
Les juges européens ont également précisé que les marques notoires bénéficient d’une protection étendue : la sélection sans « juste motif », dans le cadre d’un service de référencement, de signes identiques ou similaires à une marque renommée d’autrui peut s’analyser comme un acte de parasitisme.
En revanche, est licite l’usage de la marque notoire pour des produits ou services distincts et dans le cadre d’une concurrence saine et loyale (exemple : offre de produits ou services de substitution, usage nécessaire de marques de tiers …)
Il appartient aux juridictions nationales, au cas par cas, de vérifier si le tiers a, par un usage de mots-clés correspondant à la marque de son concurrent, dans le cadre du service de référencement de Google, porté atteinte à l’une des « fonctions » de la marque ou commis un acte de parasitisme.
(1) Marks & Spencer est une société de droit anglais qui commercialise notamment un service de vente et livraison de fleurs.
(2) CJUE, 23 mars 2010, Google France & Google Inc. c/ Louis Vuitton Malletier, affaires jointes C-236/08 à C-238/08
Mots clés : Liens promotionnels
Thème : Liens promotionnels
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour de justice de l’Union européenne | Date : 22 septembre 2011 | Pays : France