Droit du numérique : Convention de partenariat pour des séjours à la Mecque / Hajj

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Cour d’appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 12 avril 2023, 21/01390

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/01390 – N° Portalis DBVH-V-B7F-IADR

CO

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES

09 février 2021 RG :2018J00038

S.A.R.L. COLIBRI VOYAGES

C/

S.A.S. R VOYAGES

Grosse délivrée

le 12 AVRIL 2023

à Me Sylvie SERGENT

Me Philippe REY

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 12 AVRIL 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de NIMES en date du 09 Février 2021, N°2018J00038

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Claire OUGIER, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre

Madame Claire OUGIER, Conseillère

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 12 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

S.A.R.L. COLIBRI VOYAGES, Société à responsabilité limitée, immatriculée au RCS de Toulouse sous le n° 791412943, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège social,

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Hidem DROUA, Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE :

S.A.S. R VOYAGES, inscrite au RCS de NIMES sous le n° B 798 248 274, prise en la personne de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe REY de la SCP REY GALTIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 09 Mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 12 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l’appel interjeté le 7 avril 2021 par la SARL Colibri voyages à l’encontre du jugement prononcé le 9 février 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l’instance n°2018J00038 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 28 décembre 2021 par l’appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 1er octobre 2021 par la SAS R voyages, intimée et appelante incidente, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l’ordonnance de clôture de la procédure du 2 novembre 2022 à effet différé au 9 mars 2023.

***

La société R voyages et la société Colibri voyages ont conclu le 22 juillet 2017 une convention de partenariat et de vente pour la vente de ‘packs’ de séjours pour pélerinage du ‘Hajj’ à la Mecque, packs fournis par la première et vendus par la seconde à ses clients.

Après un premier rappel par lettre simple le 6 octobre 2017 resté vain, la société R voyages mettait en demeure la société Colibri voyages de s’acquitter du solde de 67.386 euros restant dû sur la facture FA0137 du 17 juillet 2017, par lettre recommandée du 11 octobre 2017.

Par courrier en retour, la société Colibri voyages contestait devoir les sommes réclamées.

Sur requête de la société R voyages et par ordonnance du 12 décembre 2017, le tribunal de commerce de Toulouse enjoignait à la SARL Colibri voyages de lui payer la somme de 67.386 euros en principal, avec intérêt légal à compter du 11 octobre 2017, la condamnait aux dépens et disait qu’en cas d’opposition, l’affaire serait renvoyée devant le tribunal de commerce de Nîmes.

Sur l’opposition faite à cette ordonnance par la société Colibri voyages, et par jugement du 9 février 2021, le tribunal de commerce de Nîmes a, au visa des articles 1231-6, 1134, 1353, 1240 du code civil, et des articles 9 et 12 du code de procédure civile:

-déclaré l’opposition de la SARL Colibri voyages recevable en la forme, et partiellement fondée sur le fond,

-réformé partiellement l’ordonnance d’injonction de payer du tribunal de commerce de Toulouse le 12 décembre 2017,

-condamné la SARL Colibri voyages à payer à la SAS R voyages la somme de 62.196 euros, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2017, date de la mise en demeure,

-débouté les deux sociétés du surplus de leurs demandes,

-condamné la SARL Colibri voyages à payer à la SAS R voyages la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires,

-condamné la SARL Colibri voyages aux dépens de l’instance.

La société Colibri Voyages a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.

***

Dans ses dernières conclusions, l’appelante demande à la cour, au visa des articles 1217 et suivants, 1231-1 et suivants du code civil, de :

la recevoir en son appel et le dire bien-fondé,

infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

En conséquence, statuant à nouveau,

A titre principal,

statuer que la SAS R voyages a manqué à ses obligations contractuelles,

la condamner à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice tous chefs de préjudices confondus,

débouter la SAS R voyages de l’ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

statuer qu’elle ne restait redevable que de la somme de 15.718 euros en exécution de la convention la liant à la SAS R voyages,

ordonner la compensation de cette somme avec celle mise à la charge de la SAS R voyages,

Dans tous les cas,

débouter la SAS R voyages de l’ensemble de ses demandes,

confirmer le jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

condamner la SAS R voyages à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

la condamner aux entiers dépens, tant de première instance que d’appel.

Elle fait valoir que la convention prévoyait le nombre de packs maximal que devait lui fournir la société R voyages afin qu’elle-même les commercialise auprès de ses clients, mais que de fait, seulement 113 packs avaient été commercialisés, et non pas 120, et que devaient encore en être déduits les 3 packs offerts.

Seul le règlement des packs vendus pouvait utilement lui être demandé, dès lors que la prestation proposée était soumise à l’obtention d’un visa et ne dépendait donc pas d’elle.

Le listing de voyageurs produits par la société R voyages pour quantifier le nombre de clients permettait d’en recenser 118 seulement et comprenait des erreurs et doublons, seuls 110 packs pouvant ainsi faire l’objet d’une facturation.

Toutefois, certains de ces packs auraient compris des prestations réduites et pour un forfait moindre, ce que la société R voyages savait puisqu’elle les mentionnait elle-même sur sa facture : ‘4 packs formule 3* ‘ et qu’elle avait émis les billets avec une date de retour plus proche pour ces packs ‘non-standard’.

Or ceux-ci étaient facturés selon le standing de la prestation hotelière.

Ainsi outre les 98 packs standards facturés à 4.600 euros chacun -pour un total de 450.800 euros, 12 autres étaient facturés :

– pour 7 de court séjour en 5* à 4.200 euros chacun -pour un total de 29.400 euros,

– pour 4 en 3* à 3.500 euros -pour un total de 14.000 euros,

– pour 1 sans Médine à 2.500 euros.

C’est ainsi un montant global de 496.700 euros qui aurait du être facturé, et non pas 535.000 euros.

Il n’est pas contesté qu’elle s’est acquittée en plusieurs règlements d’une somme totale de 472.804 euros, et elle restait donc devoir un solde de 23.896 euros.

Vient encore en déduction de ce montant les sommes qu’elle a du régler pour le compte de la société R voyages compte tenu de ses défaillances, afin d’éviter que des clients se trouvent sans hébergement, soit un total de 8.178,36 euros

Elle n’est donc in fine débitrice que d’un reliquat de 15.718 euros à l’égard de l’intimée.

A l’inverse, les prestations de la société R voyages n’ont pas été conformes à ses engagements contractuels. Les clients ont subi de nombreux désagréments : certains n’ont pas obtenu de visas parce que la société R voyages aurait commercialisé plus de packs qu’il ne lui avait été alloué de places, ce dont elle n’a jamais cru devoir s’expliquer. Le plan de vol prévu n’a pas été respecté et l’information a été défaillante. A l’arrivée à l’hotel, certains clients ont encore attendu des heures en raison du défaut de diligence de la société R voyages qui n’avait pas réservé et payé un nombre de chambres suffisant.

C’est en raison de tous ces manquements qu’elle a retenu le paiement du solde du marché, de sorte que la société R voyages doit être entièrement déboutée.

Elle doit en revanche l’indemniser des préjudices, matériel et moral, qu’elle lui a occasionnés, ayant, par sa faute, du acquitter des prestations incombant à la société R voyages sur ses fonds personnels, gérer le mécontentement des cients et subir de ce fait une atteinte à son image.

***

Dans ses dernières conclusions, l’intimée forme appel incident et demande à la cour de :

dire infondé l’appel de la SARL Colibri voyages,

En conséquence,

confirmer le jugement entrepris,

Y ajoutant,

accueillir son appel incident,

Et statuant à nouveau,

condamner la SARL Colibri voyages à lui payer la somme de 67.386 euros en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2017, date de la mise en demeure,

débouter la SARL Colibri voyages du surplus de ses demandes,

la condamner à lui porter et payer la somme de 5.000 euros pour résistance abusive, la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Elle fait valoir que la convention conclue porte sur la vente de 120 packs à 4.600 euros, dont 3 gratuits, pour un montant dû de 535.000 euros, et un solde non acquitté de 67.386 euros.

Elle conteste en outre avoir commis une quelconque faute contractuelle.
La convention prévoyait clairement les dates de forfait, les hotels et les périodes, et s’agissant d’un forfait, les dates n’étaient pas modifiables.

Les modifications effectuées auprès de la clientèle l’ont été unilatéralement par la société Colibri voyages et ne relèvent donc que de sa seule responsabilité.

Le retard pris par l’appelante à la régler de son dû affecte sa trésorerie et lui cause un préjudice, de sorte qu’une indemnisation doit lui être allouée pour résistance abusive.

***

Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur le principal:

L’article 1103 du code civil dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

La convention de partenariat et de vente conclue le 22 juillet 2017 entre la société R voyages et la société Colibri voyages porte sur la vente « et promotion du produit Hajj 2017 présenté par l’agence R voyages, et du contre versement de la totalité des 120 packs (dont 3 places gratuites) réservés pour le Hajj 2017 » et à un prix de vente et de facturation pour l’agence Colibri voyages de 4.600 euros par pack.

Elle précise le contenu du forfait et mentionne que « aucune des deux parties ne pourra manquer gravement à ses obligations contractuelles en l’occurence la prise en charge totale de R voyages du forfait des clients Colibri voyages d’une part, d’autre part le réglement de la totalité de la prestation par Colibri voyages de deux semaines avant le départ ».

Enfin, il est encore précisé que, « à la demande de l’une ou l’autre partie, des modifications pourront être apportées à la présente convention moyennant accord écrit entre les parties. »

Il ne peut donc être sérieusement soutenu par la société Colibri voyages que ce serait un nombre de packs maximal alors que le contrat est parfaitement clair pour dire que 120 packs sont vendus -dont trois gratuits.

Le coût global de l’opération pour la société Colibri voyages est donc fixé, dès le départ, par la convention conclue, à 538.200 euros (117 packs payants x 4.600 euros).

La société R voyages admet dans la facturation de l’opération éditée le 17 juillet 2017 et qui cristallise le litige, que sur les 117 packs facturés, 4 l’ont été à un prix moindre en « formule 3* » à 3.800 euros.

La facture ainsi établie comprend :

– « 116 packs formule 5* contractuelle » à 4.600 euros pour un total de 533.600 euros,

– à déduire 3 places gratuites à 4.600 euros pour un total de 13.800 euros,

– outre 4 packs à 3.800 euros pour un total de 15.200 euros,

soit un montant global facturé de 535.000 euros.

En revanche, la société Colibri voyages ne démontre pas que les modalités convenues le 22 juillet 2017 auraient été modifiées d’un commun accord au-delà de ce que reconnait ainsi R voyages. Aucun document écrit tel qu’exigé par les stipulations initiales n’est produit, et aucune pièce n’établit la matérialité d’un acquiescement de la société R voyages à une quelconque autre modification.

Les parties s’accordent à dire que sur ce prix, la société Colibri voyages a déjà versé 472.804 euros. C’est donc un solde de 62.196 euros qui reste normalement dû par elle à la société R voyages comme il a été très justement retenu par les premiers juges.

L’article 1219 du code civil dispose que « une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et que cette inexécution est suffisamment grave ».

En l’espèce la société Colibri voyages ne conteste pas avoir reçu les 120 packs vendus, mais seulement la bonne exécution des prestations qu’ils contenaient.

Pour autant, elle échoue à en établir la preuve.

En effet, les attestations de clients qu’elle produit font état d’un retard à disposer des chambres, d’un hébergement qui « ne correspond pas à (leurs) attentes » en ce que les chambres étaient pour 8 personnes et non 4, et mentionnent que la société Colibri les aurait « relogés » tandis que R voyages serait resté taisante.

Or la convention conclue le 22 juillet 2017 ne définissait pas un nombre de personnes par chambre mais mentionnait seulement que « l’excédent pour chambre double est de 900 euros par personne ».

Aucun justificatif n’est apporté sur le problème rencontré sur place avec l’hôtel puisque les factures produites ne font état que de frais relatifs à des chambres sans précision.

Et la société Colibri voyages ne justifie d’aucune démarche ou réclamation qu’elle aurait adressée à la société R voyages quant à la prestation délivrée, ni au moment des difficultés alléguées, ni après, sauf à contester ensuite la facture présentée.

Enfin, les contrats que l’appelante a signés avec ses clients et qu’elle produit en pièce 2 ne peuvent engager qu’elle-même mais ne démontrent pas davantage une quelconque faute de la société R voyages qui y est tierce.

Le jugement déféré doit ainsi être encore confirmé en ce sens.

Sur les autres demandes :

Il n’est pas démontré par l’intimée que la société Colibri voyages ait abusé de ses droits, quand bien même en a-t-elle fait une appréciation erronée. Il n’y a donc pas lieu à une quelconque indemnisation à ce titre, comme retenu par les premiers juges.

Il n’est pas davantage démontré par l’appelante que la société R voyages aurait commis des fautes qui lui auraient causé des préjudices, de sorte que c’est encore à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande d’indemnisation.

Sur les frais de l’instance :

L’appelante, qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance d’appel et payer à la société R voyages une somme équitablement arbitrée à 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

:

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit que la SARL Colibri voyages supportera les dépens d’appel et payera à la SAS R voyages une somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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