Compromis de Vente : décision de justice du 22 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01788

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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 22 MARS 2023

(n° , 17 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01788 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBLHD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Décembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL – RG n° 17/09229

APPELANTES

SCI [Localité 12] agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié audit siège en cette qualité

RCS de Créteil n° 817 924 665

Ayant son siège social

[Adresse 5]

[Adresse 9]

Représentée par Me Marie JANET de la SCP SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0249

SCI [Localité 12] 2 agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié audit siège en cette qualité29

RCS de Créteil n° 817 924 657

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représentée par Me Marie JANET de la SCP SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0249

INTIMEES

SCI JNK La SCI JNK prise en la personne de son gérant en exercice domicilié audit siège en cette qualité.

RCS de Créteil n° 440 005 064

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Olivier BAULAC de la SCP CABINET BAULAC & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0207

SCI DU [Adresse 3]

RCS de Paris n° 785 769 811

Ayant son siège social

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, Me Virginie LISITA, avocat au barreau de PARIS, toque: B1144, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Douglas BERTHE, conseiller, chargé du rapport et Madame Marie GIROUSSE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie RECOULES, Présidente de chambre

Monsieur Douglas BERTHE, Conseiller

Madame Marie GIROUSSE, Conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Sonia JHALLI

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Nathalie RECOULES, Présidente de chambre et par Laurène BLANCO, présent lors du prononcé.

Exposé du litige

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 11 octobre 2010, la SCI du [Adresse 3] a consenti à la SCI JNK un bail commercial portant sur des locaux en sous-sol, d’une surface de 250 m2, dépendant d’un ensemble immobilier situé au [Adresse 3] (94).

Le contrat a été passé pour une durée de neuf ans à compter du 15 octobre 2010 et moyennant un loyer principal annuel de 7 224 euros. Par avenant du 19 novembre 2013, le montant du loyer a été porté à la somme annuelle de 9 194 euros.

Dénonçant la survenance régulière d’infiltrations d’eau dans le local donné à bail, la SCI JNK a mandaté un huissier aux fins de constat le 24 mars 2015. 

Une réunion d’expertise contradictoire, en présence des experts d’assurance du bailleur et du locataire, a eu lieu le 09 décembre 2015. Le préjudice matériel de la société JNK a été estimé à la somme de 39 279 euros par l’expert désigné par son assureur et à la somme de 20 217,09 euros par l’expert du bailleur. 

Le 30 juin 2015, un compromis de vente portant sur les locaux donnés à bail a été signé entre la SCI du [Adresse 3] et les SCI Saint-Maur et SCI Saint-Maur 2. Par acte notarié du 10 juin 2016, la SCI du [Adresse 3] a cédé l’immeuble en indivision aux sociétés SCI Saint-Maur et SCI Saint-Maur 2. 

Par ordonnance du 13 juin 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a désigné M. [T] [A] en qualité d’expert judiciaire. Le 27 avril 2017, la même juridiction a rendu commune aux sociétés acquéreuses l’ordonnance précitée. 

Par exploit d’huissier délivré le 24 octobre 2017, la SCI JNK a fait assigner les SCI du [Adresse 3] devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins de remboursement des loyers versés et d’allocation de dommages et intérêts. 

Par jugement du 03 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Créteil a : 

– déclaré recevable la demande de sursis à statuer formulée par les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 mais au fond l’a rejetée ; 

– condamné in solidum la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à payer à la SCI JNK : 

– la somme de 350 627,63 euros au titre de la remise en état de l’intérieur des locaux litigieux ; 

– la somme de 3 000 euros, au titre du nettoyage des locaux ; 

– condamné in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 à payer à la SCI JNK : la somme de 9 162,40 euros au titre d’un préjudice locatif ; 

– condamné la SCI du [Adresse 3] à payer à la société JNK : 

– la somme de 22 221,78 euros au titre du préjudice locatif ; 

– la somme de 9 903,28 euros au titre des dommages mobiliers ; 

– condamné in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 au paiement de la somme de 916,24 euros par mois à la SCI JNK, à compter du 1er octobre 2017 et jusqu’au parfait achèvement des travaux d’étanchéité tels que préconisés par l’expert judiciaire M.[A], constaté par un architecte DPLG mission par l’une ou l’autre partie ou à défaut par tout autre sachant désigné d’un commun accord par les parties ; 

– débouté la SCI JNK de ses autres demandes indemnitaires ; 

– débouté la SCI JNK de sa demande d’expertise ; 

– débouté les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 de l’intégralité de leurs demandes ; 

– condamné la SCI du [Adresse 3] au paiement de la somme de 2000 euros à la SCI JNK au titre des frais irrépétibles, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; 

– condamné in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 au paiement de la somme de 3 000 euros à la SCI JNK au titre des frais irrépétibles, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; 

– débouté en conséquence les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2, et la SCI du [Adresse 3] de leurs demandes en paiement d’une somme au titre des rais irrépétibles ; 

– fait masse des dépens, en ceux compris les frais d’expertise judiciaire dont la SCI JNK a fait l’avance ; 

– condamné la SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2, ainsi que la SCI du [Adresse 3] au paiement pour moitié chacune de la masse des dépens de l’instance ; 

– rejeté toutes autres demandes ; 

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision. 

Par déclaration du 17 janvier 2020, les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 ont interjeté appel total du jugement. 

Par conclusions déposées le 05 juin 2020, la SCI JNK a interjeté appel incident partiel du jugement.

Par conclusions déposées le 09 juillet 2020, la SCI du [Adresse 3] a interjeté appel incident partiel du jugement. 

Par ordonnance du 20 mai 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la jonction des procédures n°20/01788 et n°20/02967, la présente procédure se poursuivant désormais sous le premier numéro.

Moyens

Motivation

MOTIFS DE L’ARRÊT

Sur l’opposabilité de l’expertise judiciaire à la SCI Saint-Maur et à la SCI Saint-Maur 2 :

Il résulte des articles 6, 15 et 16 du code de procédure civile qu’à l’appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d’alléguer les faits propres à les fonder, que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions ainsi que les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense, que le juge ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement. Il est par ailleurs de jurisprudence constante que le juge du fond ne peut refuser d’examiner des rapports d’expertise établis de façon non contradictoire régulièrement versés aux débats, soumis à la libre discussion des parties et corroboré par d’autres éléments de preuve (Cass. ch. mixte 28-9-2012 n° 11-18.710 ; Civ. 1ère , 9 sept. 2020, n° 19-13.755).

En l’espèce, l’expertise judiciaire a été communiquée dans le cadre des débats en première instance et en appel. Ce document n’est pas l’unique élément de preuve soumis à la juridiction, si bien que celle-ci ne fondera pas sa décision sur cette seule expertise. Elle a été soumise à la discussion des parties et l’intimée exerce légitimement un droit lui étant garanti en cherchant à fonder ses prétentions par des éléments de preuve qui se corroborent. Il appartiendra donc à la cour d’examiner le rapport d’expertise judiciaire de Monsieur [T] [A] du 5 septembre 2017 au regard des autres éléments probant lui étant soumis.

La demande d’inopposabilité de ce rapport sera donc rejetée, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point et il convient de constater qu’à hauteur d’appel, les bailleresses ne sollicitent pas de sursis à statuer.

Sur les obligations de jouissance paisible et de délivrance conforme :

Selon les articles 1719 et 1720 du code civil, le bailleur a l’obligation de délivrer une chose apte à l’usage auquel elle est destinée aux termes du bail, doit l’entretenir en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée, en assurer la jouissance paisible au locataire pendant la durée du bail et la maintenir en bon état de réparations.

En l’espèce, le bail commercial du 11 octobre 2010 et son avenant du 19 novembre 2013 stipulent que les locaux sont destinés à l’usage de studio de musique et à la sous-location pour l’activité de garage automobile. Son article 9.4 indique que le bailleur conservera à sa charge les grosses réparations définies par l’article 606 du code civil et les frais de ravalement. Il résulte en outre des « clauses particulières » du bail que le preneur s’est engagée « à prendre en charge les réparations concernant les infiltrations visibles à ce jour dans le local à hauteur de 3 500 € HT, soit 4.186 € TTC » en échange d’une diminution de loyer équivalente répartie sur 36 mois à condition que la réalisation des travaux soit justifiée. S’agissant des infiltrations visibles au 11 octobre 2010, le cabinet [M], agent immobilier ayant négocié les conditions de location et rédigé le bail, atteste que l’infiltration en question était alors exclusivement localisée en sous-face de la rampe d’accès des véhicules.

Il en résulte que l’infiltration citée par le contrat se trouvait mineure et que le bailleur reconnaissait en avoir la charge, ce dernier devant en supporter le coût. Il n’est pas démontré que le preneur se serait alors abstenu d’effectuer la réparation et qu’il aurait donc contribué à son dommage dans la mesure où il est établie que le bailleur lui-même a procédé aux remboursements par diminutions de loyers du preneur.

Par courriers recommandés avec accusés de réception des 2 novembre 2012, 18 juillet 2013 et 23 aout 2014, le preneur a fait connaître à son bailleur, la SCI du [Adresse 3], les dégâts des eaux qu’il avait subi à raison d’infiltrations et fuites répétées. Le 24 mars 2015, il faisait constater par voie d’huissier des infiltrations d’eau à divers endroits du bien loué et notamment sur le plafond.

Un rapport non contradictoire réalisé le 9 décembre 2015 par l’assureur du locataire constatait des infiltrations récurrentes de la dalle de béton et un manque d’étanchéité nécessitant de réparer la dalle de couverture.

La SCI Du [Adresse 3] a vendu le local le 10 juin 2016 aux SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2. Le compromis de vente du 30 juin 2015 précise que « le prix de vente tient compte des travaux qui seront à réaliser ». Dans un courrier du 4 février 2016, Mme [G] [R], co-gérante de l’acquéreur, affirme avoir pleinement conscience des travaux qui seront à réaliser, à savoir la réfection de l’étanchéité de la dalle. L’acte de vente du 10 juin 2016 stipule quant à lui que l’acquéreur reconnaît avoir été informé que des travaux seront à réaliser pour l’étanchéité de la dalle, le prix ayant été fixé en considération de cette situation.

L’expert judiciaire M. [T] [A], en conclusion de son rapport déposé le 5 septembre 2017 constate différentes infiltrations par le plafond dans la zone « studio de musique », soit 60% de la surface, récurrentes depuis l’année 2014, des infiltrations provoquant des fuites d’ampleur plus importante par le plafond de la zone « garage » depuis l’année 2012. L’expert estime que les locaux sont définitivement inutilisables depuis l’aggravation notable des infiltrations entre octobre 2016 et juin 2017, le tableau électrique ayant en effet été très sérieusement affecté par une arrivée d’eau importante ayant provoqué des courts circuits. La surface louée était aux termes de ses constatations totalement impropre à sa destination.

Il résulte d’un procès-verbal de constat qu’au 14 septembre 2017que les travaux de réfection de la dalle entrepris par les nouveaux bailleurs étaient achevés.

Il en résulte que les bailleurs successifs avaient connaissance de l’existence de dégâts des eaux et d’infiltrations d’eau récurrentes nécessitant des réparations importantes sur la dalle de couverture relevant des grosses réparations prévues à l’article 606 du code civil et incombant au bailleur au titre du bail.

Dès lors, la non-réalisation des travaux constitue un manquement fautif des bailleurs à leur obligations de délivrance et d’assurer une jouissance paisible au locataire, leur responsabilité étant engagée à ce titre.

Sur les préjudices :

1° Le préjudice locatif :

Le préjudice locatif sur la période de novembre 2012 au 14 septembre 2017 s’est progressivement majoré avec le temps et le preneur n’a tiré qu’un avantage partiel de la mise à disposition des lieux jusqu’à ce que les locaux deviennent totalement impropre à leur destination à compter de juin 2017. Dès lors, l’allégation au terme de laquelle le preneur ne s’acquitterait plus de son loyer depuis le mois de juillet 2021 n’est pas de nature à affecter l’évaluation de son préjudice locatif antérieur. Le fait que le preneur ait été autorisé à sous-louer doit être également pris en considération du point de vue de la perte de loyers pour le preneur à compter d’août 2013 comme en atteste la lettre du sous-locataire du 4 juillet 2017.

Chaque bailleur est responsable du préjudice subi par le locataire à raison de la période où il avait juridiquement cette qualité – le promettant restant propriétaire – soit, pour la SCI du [Adresse 3] de novembre 2012 au 10 juin 2016 et pour les SCI [Localité 12] et Saint Maur 2, du 11 juin 2016 au 14 septembre 2017. Il résulte des éléments du dossier que la SCI du [Adresse 3] est ainsi redevable d’un préjudice locatif de 21 305 € tandis que les SCI [Localité 12] et [Localité 12] 2 sont redevables d’un préjudice locatif de 10 079 € et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

2° Sur le préjudice de nettoyage des locaux :

S’agissant du préjudice de nettoyage des locaux, il ne résulte d’aucun élément du dossier que le preneur ait engagé des frais de ce chef de sorte que la demande d’indemnisation à ce titre n’est pas fondée. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point.

3° Sur les dommages mobiliers :

S’agissant des dommages mobiliers (équipements musicaux, mobilier et moquette) qui ne sont pas contestés, ils s’élèvent à la somme de 9 903,28 euros. Dans la mesure où ils sont intervenus antérieurement à la date de vente du 10 juin 2016, ils seront mis à la charge exclusive de la SCI du [Adresse 3] et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

4° Sur le préjudices de perte de jouissance, de perte d’exploitation, de préjudice moral et de perte d’image artistique :

S’agissant des préjudices de perte de jouissance, de perte d’exploitation, de préjudice moral et de perte d’image artistique, aucune pièce n’est produite à l’appui de cette réclamation par le preneur. En outre, la SCI JNK, société civile immobilière ayant pour activité la gestion immobilière et non la création musicale ne peut se prévaloir du préjudice personnel qu’aurait subi son gérant, M. [V] [S]. Aucune somme ne sera accordée de ce chef et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

5° Sur les frais de remise en état des locaux :

S’agissant des frais de remise en état des embellissements de la zone « studio » ayant entraîné un préjudice de 6842,28 € TTC et de remise en état des sols, parois et plafond de la zone garage ayant entraîné un préjudice de 17897,55 € TTC, il est constant que les dommages sont apparus dès l’année 2015 et ont persisté jusqu’au 14 septembre 2017. Les manquements des bailleurs successifs ayant contribué au même dommage, la SCI Du [Adresse 3] et les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 seront tenues in solidum à réparation à hauteur de 24 739,83 € TTC.

En revanche et après sa première visite du 23 septembre 2016, soit le 14 juin 2017, l’expert a constaté de nouveaux dommages sur les installations électriques ayant entraîné un préjudice de 10 888 € TTC alors que la SCI Du [Adresse 3] n’était plus propriétaire depuis le 10 juin 2016. Ce sera donc la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 qui seront tenues à la réparation de ce nouveau dommage. Le jugement entrepris étant infirmé sur ce point, il n’y aura donc pas lieu à rectifier l’erreur matérielle que contient son dispositif.

Sur la nécessité de faire réaliser des travaux d’étanchéité et le préjudice du locataire postérieur à la date du 14 septembre 2017 :

Il résulte des articles 10, 143 et 144 du code de procédure civile que les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d’office, être l’objet de toute mesure d’instruction légalement admissible qui peut être ordonnée en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer.

La société JNK sollicite la désignation d’un expert et produit :

– un rapport de visite du 14 mai 2020 de l’architecte [D] [W] au terme duquel les travaux qu’ont fait réaliser les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 sur la dalle de couverture par l’entreprise ISOLIREN n’ont pas été réalisés dans les règles de l’art,

– des constats d’huisser des 27 avril 2017, 15 janvier 2018, 21 mars 2019 21 juin 2020, et 7 février 2022 aux termes desquels les infiltrations persistent.

Il résulte de ces éléments que les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2, à qui incombent dorénavant exclusivement les obligations de délivrance et de jouissance paisible, ne satisfont toujours pas auxdites obligations et que le préjudice du locataire se trouve persistant, que dès lors les bailleresses ne sauraient invoquer la responsabilité de l’entreprise ISOLIREN pour s’exonérer de leur responsabilité propre à ce titre à l’égard du preneur alors qu’elles ont qualité de maîtres de l’ouvrage.

Par ailleurs, la cour n’est pas en mesure de déterminer dans quelle mesure les préjudices du preneur persistent ni quels travaux restent précisément à réaliser dès lors qu’il n’est pas contesté que des travaux d’étanchéité sont intervenus après que l’expert judiciaire a déposé son rapport. Il conviendra donc d’ordonner une expertise pour déterminer les désordres persistants après la réalisation des travaux ainsi que les divers nouveaux préjudices qui en découleraient dans les termes qui seront fixés au dispositif de l’arrêt. Cette expertise tendant notamment à déterminer les préjudices du preneur, il convient que ce dernier fasse l’avance de la consignation. Par ailleurs, il convient de rappeler que la SCI Du [Adresse 3] est partie au présent litige et que dans le souci du respect du contradictoire, il est légitime qu’elle ait accès aux opérations d’expertises, sans que cela ne préjuge sur la mise en jeu éventuelle de sa responsabilité. En outre, le nouveau préjudice de la société JNK n’étant à ce stade pas déterminé, il n’y a pas lieu de condamner solidairement la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à lui payer la somme de 916,24 € par mois à compter du 1er octobre 2017 jusqu’au parfait achèvement des travaux d’étanchéité. Il n’y a donc pas lieu non plus à condamner les SCI [Localité 12] et [Localité 12] 2 à effectuer les travaux d’étanchéité sous astreinte dans la mesure où les malfaçons allégués sur les réparations entreprises et la nature des reprises à réaliser restent à ce stade à déterminer.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire :

Selon les articles 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au présent contrat et 1728 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et le preneur est tenu de deux obligations principales, soit d’user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail et de payer le prix du bail aux termes convenus. L’article 1225 du code civil dispose que la clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat, que la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse et que la mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. L’article L 145-41 du code de commerce dispose quant à lui que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux et que le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

En l’espèce, le bailleur a fait délivrer une sommation de faire le 18 avril 2018 sur le fondement d’une sous-location à laquelle il n’aurait pas consenti.

Or il résulte de l’avenant du 19 novembre 2013 au contrat de bail du 11 octobre 2010 que moyennent une augmentation de loyer, le preneur est désormais autorisé à sous-louer sans accord préalable du bailleur. Cette autorisation revêt de façon non équivoque une portée générale et ne comporte pas de restriction à un domaine d’activité ou à un sous-locataire en particulier, étant à ce titre rappelé qu’aucune disposition du bail initial ne prévoyait par ailleurs que le sous-locataire devait faire l’objet d’un agrément du bailleur. L’infraction au bail reprochée par la sommation n’est pas caractérisée et la cour ne saurait ainsi constater l’acquisition de la clause résolutoire. Il n’y aura donc pas lieu à statuer sur l’expulsion du locataire, le sort des meubles et une indemnité d’occupation. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

C’est en vain que les bailleresses font valoir que la SCI JNK s’abstient désormais de régler les loyers dans la mesure où elles ne font valoir aucun commandement de payer à ce titre et qu’elles s’abstiennent de solliciter une résiliation judiciaire du bail, la cour ne pouvant statuer ultra petita.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront confirmées.

La SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 qui succombent devront supporter les dépens de l’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile. Il n’y a donc pas lieu de considérer qu’il y ait eu dépens à raison de la nouvelle expertise décidée par le présent arrêt, les frais afférents n’étant pas à ce stade exposés. En outre, il apparaît équitable que la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 indemnisent la la SCI JNK de ses frais irrépétibles d’appel à hauteur d’un montant de 4 000 €.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt mixte contradictoire et en dernier ressort,

REJETTE la demande d’inopposabilité du rapport d’expertise judiciaire de Monsieur [T] [A] du 5 septembre 2017,

INFIRME partiellement le jugement du 03 décembre 2019 du le tribunal de grande instance de Créteil en ce qu’il a : 

– condamné in solidum la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à payer à la SCI JNK : 

– la somme de 350 627,63 euros au titre de la remise en état de l’intérieur des locaux litigieux,

– la somme de 3 000 euros, au titre du nettoyage des locaux,

– condamné in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 à payer à la SCI JNK la somme de 9 162,40 euros au titre d’un préjudice locatif,

– condamné la SCI du [Adresse 3] à payer à la société JNK la somme de 22 221,78 euros au titre du préjudice locatif,

– condamné in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 au paiement de la somme de 916,24 euros par mois à la SCI JNK, à compter du 1er octobre 2017 et jusqu’au parfait achèvement des travaux d’étanchéité tels que préconisés par l’expert judiciaire M.[A], constaté par un architecte DPLG mission par l’une ou l’autre partie ou à défaut par tout autre sachant désigné d’un commun accord par les parties,

– débouté la SCI JNK de sa demande d’expertise,

Le confirme pour le surplus,

et statuant à nouveau sur ces chefs,

CONDAMNE in solidum les SCI Saint-Maur et Saint-Maur 2 à payer à la SCI JNK la somme de 10 079 € euros au titre d’un préjudice locatif,

CONDAMNE la SCI du [Adresse 3] à payer à la société JNK la somme de 21 305 € au titre du préjudice locatif,

REJETTE la demande d’indemnisation au titre du nettoyage des locaux,

CONDAMNE in solidum la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à payer à la SCI JNK la somme de 24 739,83 € TTC au titre de la remise en état de l’intérieur des locaux litigieux,

CONDAMNE in solidum la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à payer à la SCI JNK la somme de 10 888 € TTC au titre de remise en état des installations électriques,

Y ajoutant,

ORDONNE une mesure d’expertise,
DÉSIGNE en qualité d’expert :

M. [T] [A]

Diplôme d’architecte D.E.S.A

[Adresse 6]

[Localité 8]

portable : [XXXXXXXX01]

courriel : [Courriel 11]

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,
avec mission de :

relever et décrire les désordres et malfaçons persistants et affectant l’immeuble litigieux sis au [Adresse 3], ainsi que les non conformités, malfaçons et/ou inachèvements allégués au regard des travaux réalisés par les bailleresses et les documents contractuels liant les parties,

en détailler l’origine, les causes et l’étendue, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables, et dans quelles proportions,

indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination et à la jouissance paisible du preneur,

dire si les travaux qu’ont fait réaliser les bailleresses ont été conduits conformément aux documents contractuels et aux règles de l’art,

donner son avis sur les solutions appropriées pour y remédier, décrire précisément et de façon détaillée les travaux qui resteraient utiles à réaliser, évaluer leur coût à 1’aide de devis d’entreprises fournis par les parties et leur durée prévisible,

donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres, malfaçons et inachèvements ou non conformités et sur leur évaluation,

rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties donner, le cas échéant, son avis sur les comptes entre les parties,

soumettre aux parties un avis utile à une solution transactionnelle du litige et, le cas échéant, constater tout accord ou conciliation entre les parties.

DIT que pour procéder à sa mission l’expert devra :

convoquer et entendre l’ensemble des parties au présent litige, assistées, le cas échéant, de leurs conseils et recueillir leurs observations à I’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,

se faire remettre toutes pièces utiles à I’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés,

se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis,

à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations, l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :

– en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,

– en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du conseiller de la mise en état du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent,

– en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées,

en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse,

au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse et rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai.

FIXE à la somme de 3 000 € la provision concernant les frais d’expertise qui devra être consignée par la SCI JNK à la régie de cette cour dans les trois mois de l’avis de consignation adressé par le greffe.
DIT que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque et de nul effet,
DIT que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248,263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe de la cour d’appel de Paris dans les dix mois de la réception de l’avis de consignation sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du conseiller de la mise en état,

RENVOIE le dossier à l’audience de mise en état du mercredi 26 juin 2022,
DÉSIGNE Douglas BERTHE, conseiller, pour suivre l’exécution de la mesure d’instruction en qualité de conseiller de la mise en état,

Condamne in solidum la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 à payer à la SCI JNK la somme de 4 000 € en indemnisation de ses frais irrépétibles d’appel,

Condamne in solidum la SCI du [Adresse 3], la SCI [Localité 12] et la SCI [Localité 12] 2 aux dépens de l’appel,

REJETTE les autres demandes.

Le greffier La Présidente

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