Coexistence d’une marque avec un signe distinctif antérieur de portée locale

Notez ce point juridique

Les dispositions de l’article L 713-6 II du Code de la propriété intellectuelle qui prévoient la coexistence d’une marque avec un signe distinctif antérieur de portée locale sont limitées au nom commercial, l’enseigne et le nom de domaine, et ne s’appliquent pas au nom d’une association assimilable à une dénomination sociale.

Les dispositions de l’article L 713-1 aliéna 2, si elles consacrent le principe de non rétroactivité du dépôt de marque, n’ont pas pour effet de conférer au titulaire de droits antérieurs une protection excédant celle prévue par les articles L 711-3 et L 713-6.

Les dispositions de l’article L 711-3 s’appliquent au nom d’une association qui, comme la dénomination sociale d’une société, permet d’identifier la personne morale.

Résumé de l’affaire

L’Association Nationale des Croqueurs de Pommes a créé une marque semi-figurative en 1999 pour désigner ses produits et services liés à la promotion des variétés fruitières. En 2015, elle a retiré son agrément à l’Association Les Croqueurs de Pommes du Terroir du Jarez pour non-respect des statuts, l’invitant à cesser d’utiliser le signe « Croqueurs de Pommes ». En 2020, elle a mis en demeure cette association de cesser tout usage de la marque et de transférer un nom de domaine. En 2021, elle l’a assignée en contrefaçon de marque. Les parties ont des prétentions divergentes, l’Association Nationale demandant l’interdiction d’usage du signe, des dommages et intérêts, et des publications, tandis que l’Association du Terroir du Jarez conteste toute contrefaçon, se basant sur son usage antérieur de la dénomination sociale et le caractère descriptif de son signe.

Les points essentiels

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera relevé à titre liminaire que la défenderesse n’oppose aucune irrecevabilité fondée sur un défaut d’usage sérieux de la marque ou la prescription.

Les actes de contrefaçon de marque

Il résulte de l’article L 713-1 du Code de la propriété intellectuelle que l’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits ou services qu’il a désignés.
Ce droit s’exerce sans préjudice des droits acquis par les tiers avant la date de dépôt ou la date de priorité de cette marque.

La réparation des préjudices résultant de la contrefaçon

Il convient d’interdire à l’ASSOCIATION LES CROQUEURS DE POMMES DU TERROIR DU JAREZ de poursuivre les actes de contrefaçon de la marque semi-figurative n°99 784 010 et notamment de faire usage du signe LES CROQUEURS DE POMMES DU TERROIR DU JAREZ pour la désignation des produits ou services couverts par l’enregistrement, sous astreinte provisoire de 100 € par infraction constatée passé le délai de deux mois suivant la signification de la présente décision.
Il n’y a pas lieu de se réserver la liquidation de l’astreinte.

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

L’ASSOCIATION LES CROQUEURS DE POMMES DU TERROIR DU JAREZ supportera les dépens de l’instance et sera condamnée à verser à l’ASSOCIATION NATIONALE DES CROQUEURS DE POMMES la somme de 4 000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’exécution provisoire est de droit.

Les montants alloués dans cette affaire: – 2 000 € à l’ASSOCIATION NATIONALE DES CROQUEURS DE POMMES en indemnisation du préjudice causé par la contrefaçon
– 4 000 € à l’ASSOCIATION NATIONALE DES CROQUEURS DE POMMES au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Réglementation applicable

– Article L 713-1 du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 713-2 du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 713-3-1 du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 713-6 I du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 713-6 II du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 711-3 du Code de la propriété intellectuelle
– Article L 714-3 du Code de la propriété intellectuelle
– Article 14 de la Directive UE 2015/2346
– Article L 716-4-10 du Code de la propriété intellectuelle
– Article 700 du Code de procédure civile

Texte de l’article L 713-1 du Code de la propriété intellectuelle:
Il résulte de l’article L 713-1 du Code de la propriété intellectuelle que l’enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits ou services qu’il a désignés. Ce droit s’exerce sans préjudice des droits acquis par les tiers avant la date de dépôt ou la date de priorité de cette marque.

Texte de l’article L 713-2 du Code de la propriété intellectuelle:
Selon l’article L 713-2 2°) du Code de la propriété intellectuelle, est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services, d’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.

Texte de l’article L 713-3-1 du Code de la propriété intellectuelle:
Il résulte de l’article L 713-3-1 du même code que sont notamment interdits, en application des articles L. 713-2 et L. 713-3, les actes ou usages suivants :
4° L’usage du signe comme nom commercial ou dénomination sociale ou comme partie d’un nom commercial ou d’une dénomination sociale ;
5° L’usage du signe dans les papiers d’affaires et la publicité ;

Texte de l’article L 713-6 I du Code de la propriété intellectuelle:
L’article L 713-6 I 2°) du même code dispose qu’une marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires, conformément aux usages loyaux du commerce de signes ou d’indications qui sont dépourvus de caractère distinctif ou qui se rapportent à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci.

Texte de l’article L 713-6 II du Code de la propriété intellectuelle:
En application de l’article L 713-6 II, une marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires, d’un nom commercial, d’une enseigne ou d’un nom de domaine, de portée locale, lorsque cet usage est antérieur à la date de la demande d’enregistrement de la marque et s’exerce dans les limites du territoire où ils sont reconnus.

Texte de l’article L 711-3 du Code de la propriété intellectuelle:
En application de l’article L 711-3 du Code de la propriété intellectuelle, ne peut être valablement enregistrée, et si elle est enregistrée est susceptible d’être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France, notamment une dénomination ou une raison sociale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Pierre BUISSON
– Maître Sandrine VARA
– Maître Jean-Christophe GUERRINI

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