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Données issues d’un serveur : les obligations de l’hébergeur

Une société qui assure l’hébergement d’un serveur de données n’est pas en droit d’utiliser les données hébergées à titre de preuve, ces données étant nécessairement obtenues de manière régulière.

Toutefois, la jurisprudence a consacré, en matière civile, un droit à la preuve qui permet de déclarer recevable une preuve illicite lorsque cette preuve est indispensable au succès de la prétention de celui qui s’en prévaut et que l’atteinte portée aux droits antinomiques en présence est strictement proportionnée au but poursuivi (Com., 15 mai 2007, pourvoi n° 06-10.606, Bull. 2007, IV, n° 130 ; 1ère Civ., 5 avril 2012, pourvoi n° 11-14.177, Bull. I 2012, n° 85 ; Soc., 9 novembre 2016, pourvoi n° 15-10.203, Bull. V 2016, n° 209 ; Soc., 30 septembre 2020, n° 19-12.058, publié ; Soc., 25 novembre 2020, n° 17-19.523, publié ; Soc. 8 mars 2023, n° 21-17.802, 21-20.798 et 20-21.848, publiés).

Ainsi, lorsque le droit à la preuve tel que garanti par l’article 6 § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ou ‘Convention européenne des droits de l’homme’ (CEDH), entre en conflit avec d’autres droits et libertés, notamment le droit au respect de la vie privée, il appartient au juge de mettre en balance les différents droits et intérêts en présence et d’apprécier, lorsque cela lui est demandé, si une preuve obtenue ou produite de manière illicite ou déloyale porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence (Ass. Plén., 22 décembre 2023, pourvoi n° 20-20.648).

De la même manière, le secret des affaires ne constitue pas, en soi, un obstacle à l’exercice du droit de la preuve, pour peu qu’il ne soit pas porté une atteinte disproportionnée aux droits de l’autre partie au regard de l’objectif poursuivi (voir, mutatis mutandis, 2ème Civ., 10 juin 2021, pourvoi n° 20-11.987, publié au Bulletin).

À ce titre, l’article L. 151-1 du code de commerce énonce qu’est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux critères suivants :

1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;

2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;

3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.

En application de l’article 9 du code de procédure civile et de l’article 1315, devenu 1353, du code civil, c’est à celui qui invoque la détention d’un secret et qui sollicite sa protection en justice d’apporter la preuve que l’information dont il se prévaut constitue effectivement un secret d’affaires (voir Com., 26 novembre 2013, n° 12-27.087).

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Abuser de l’internet perso au travail : le licenciement encouru

Télécharger illégalement de nombreux films et séries sur son temps de travail et sur son ordinateur professionnel expose à un licenciement pour faute.

Le manquement du salarié à son obligation contractuelle de consacrer l’intégralité de son temps de travail à l’exécution de la prestation attendue par l’employeur, telle que définie dans le contrat de travail, réitéré à de nombreuses reprises et de façon récurrente dans le temps, caractérise à lui seul-et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs- une faute grave, de nature à altérer de manière durable la confiance nécessaire dans une relation de travail et rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur.

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Sites de streaming illégaux : l’injonction de blocage aux FAI

L’injonction de blocage de site de contrefaçon de musique en ligne ((streaming illégal) faite aux FAI se révèle être une voie efficace.

L’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle réalise la transposition en droit interne de l’article 8§3 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, aux termes duquel :

“Les Etats membres veillent à ce que les titulaires de droits puissent demander qu’une ordonnance sur requête soit rendue à l’encontre des intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin.”

Le seizième considérant de cette directive rappelle que les règles qu’elle édicte doivent s’articuler avec celles isssues de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 08 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (dite “directive sur le commerce électronique”).

La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit dans l’arrêt Scarlet Extended c/ Sabam (C-70/10) du 24 novembre 2011 que :

« ainsi qu’il découle des points 62 à 68 de l’arrêt du 29 janvier 2008, Promusicae (C-275/06, Rec. p. I-271), la protection du droit fondamental de propriété, dont font partie les droits liés à la propriété intellectuelle, doit être mise en balance avec celle d’autres droits fondamentaux.

Plus précisément, il ressort du point 68 dudit arrêt qu’il incombe aux autorités et aux juridictions nationales, dans le cadre des mesures adoptées pour protéger les titulaires de droits d’auteur, d’assurer un juste équilibre entre la protection de ce droit et celle des droits fondamentaux de personnes qui sont affectées par de telles mesures.

Ainsi, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, les autorités et les juridictions nationales doivent notamment assurer un juste équilibre entre la protection du droit de propriété intellectuelle, dont jouissent les titulaires de droits d’auteur, et celle de la liberté d’entreprise dont bénéficient les opérateurs tels que les FAI en vertu de l’article 16 de la charte. (…)

D’autre part, ladite injonction risquerait de porter atteinte à la liberté d’information puisque ce système risquerait de ne pas suffisamment distinguer entre un contenu illicite et un contenu licite, de sorte que son déploiement pourrait avoir pour effet d’entraîner le blocage de communications à contenu licite.

En effet, il n’est pas contesté que la réponse à la question de la licéité d’une transmission dépende également de l’application d’exceptions légales au droit d’auteur qui varient d’un État membre à l’autre. En outre, certaines œuvres peuvent relever, dans certains États membres, du domaine public ou elles peuvent faire l’objet d’une mise en ligne à titre gratuit de la part des auteurs concernés. »

Dans l’arrêt UPC Telekable Wien du 27 mars 2014 (C-314/12), la Cour de justice a dit pour droit que :

« Pour ce qui est de la liberté d’entreprise, il doit être constaté que l’adoption d’une injonction, telle que celle en cause au principal, restreint cette liberté.

En effet, le droit à la liberté d’entreprise comprend notamment le droit, pour toute entreprise, de pouvoir librement disposer, dans les limites de la responsabilité qu’elle encourt pour ses propres actes, des ressources économiques, techniques et financières dont elle dispose.

Or, une injonction telle que celle en cause au principal, fait peser sur son destinataire une contrainte qui restreint la libre utilisation des ressources à sa disposition, puisqu’elle l’oblige à prendre des mesures qui sont susceptibles de représenter pour celui-ci un coût important, d’avoir un impact considérable sur l’organisation de ses activités ou de requérir des solutions techniques difficiles et complexes.

Cependant, une telle injonction n’apparaît pas porter atteinte à la substance même du droit à la liberté d’entreprise d’un fournisseur d’accès à Internet, tel que celui en cause au principal. »

Il s’en déduit qu’un juste équilibre doit être recherché entre la protection du droit de propriété intellectuelle, d’une part, et la liberté d’entreprise des fournisseurs d’accès à internet, et les droits fondamentaux des clients des fournisseurs d’accès à internet, en particulier leur droit à la protection des données à caractère personnel et leur liberté de recevoir et de communiquer des informations, d’autre part.

La recherche de cet équilibre implique d’écarter toute mesure prévoyant un contrôle absolu, systématique et sans limitation dans le temps, de même que les mesures ne doivent pas porter atteinte à la « substance même du droit à la liberté d’entreprendre » des fournisseurs d’accès à internet, lesquels doivent conserver le choix des mesures à mettre en œuvre.

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Des expériences numérique ne sont pas nécessairement protégées

Des stagiaires d’une agence ont concouru à la conception intellectuelle d »expériences’ virtuelles qui ont été intégrées dans l’oeuvre scénographique et ludique ‘Futur l’Expo’, comprenant 12 expériences, à laquelle les visiteurs du parc d’attraction du Futuroscope ont eu accès pendant deux ans et demi, exposition commandée et dirigée par la société du parc du Futuroscope et fruit de la fusion des multiples contributions.

Les stagiaires concepteurs ont revendiqué sans succès des droits d’auteurs sur leur contribution. La qualification d’oeuvre commune été retenue. Pour le reste de leurs apports, l’originalité n’a pas été retenue.

La spécificité de l’interface graphique, qui se caractérise par un bandeau en haut composé d’un titre et d’une mascotte à gauche, un titre ferré à gauche à droite de la mascotte, un carrousel de sélection, dont l’image centrale est agrandie et les deux latérales sont entrecoupées, la présence d’une ombre portée sur les éléments du carrousel, une aide à la navigation en bas de l’écran, la présence d’un bouton pour passer d’un mode à l’autre en bas à droite, la présence d’un plan vu de dessus de la chambre, la présence de points interactifs sur le plan ou encore les éléments illustrés et titrés en colonage sur la droite pour sélectionner une ambiance prédéfinie n’a rien d’original.

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Scrapping Facebook et Instagram : saisie annulée car disproportionnée

Une saisie-contrefaçon trop large ou disproportionnée peut être annulée.

C’est à juste titre que la société The Phantom Company poursuivi par Facebook pour Scrapping massif, soutient que la mission donnée au commissaire de justice par l’ordonnance présidentielle, est trop large et excessivement intrusive au regard d’une mesure probatoire concernant la seule contrefaçon des marques Facebook et Instagram.

En effet, si la requête distingue dans sa motivation les atteintes alléguées d’une part au droit du producteur de base de données et d’autre part au droit des marques, la mission donnée au commissaire de justice ne distingue pas ces deux objets.

Dès lors, la demande de communication des codes sources, d’informations sur le volume de données, ou des adresses IP, ou encore les informations sur les clients de la société The Phantom Company sollicitées apparaissent comme disproportionnées au regard de l’administration de la preuve des actes de contrefaçon de marques allégués.

Au regard de l’étendue de la mission confiée par le juge des requêtes au commissaire de justice alors que les sociétés requérantes ne sont pas recevables à agir sur le fondement du droit sui generis du producteur de bases de données, il a été fait droit à la demande de rétractation de l’ordonnance présidentielle.

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Les droits de Facebook sur sa base de données

Les sociétés américaines Meta ne peuvent se prévaloir de la protection accordée au producteur de base de données.

En application de l’article L. 341-2 du Code de la propriété intellectuelle, ces sociétés sont irrecevables à agir sur le fondement du droit suis généris du producteur de bases de données les deux sociétés américaines n’ayant ni leur siège social, ni leurs activités dans un Etat de l’Union Européenne.

S’agissant de la société irlandaise Facebook, sa recevabilité à agir a été contestée dès lors qu’au regard de l’article L. 341-1 du CPI elle n’a pu justifier avoir pris l’initiative et le risque d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel pour la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de la base de données.

Dans la requête en vue d’être autorisées à procéder à des opérations de saisie-contrefaçon, les sociétés Meta indiquaient seulement « Meta, en ce compris Meta Plateforms Ireland Ltd, investit chaque année des sommes considérables pour le maintien des bases de données soutenant Facebook et Instagram ».

Pour autant aucun argumentaire n’était précisé et aucune pièce n’était produite attestant de l’investissement de la société irlandaise.

Sur la recevabilité à agir en qualité de producteur de base de données de la société Meta Plateforms Ireland, il appartenait à celle-ci de justifier la vraisemblance de sa qualité de producteur de base de données.

Or, les seuls éléments internes à l’entreprise et qui ne sont corroborés par aucun autre, l’absence totale d’indication sur le contour et la réalité des investissements financiers, matériels ou humains opérés par la société irlandaise dans la constitution, la vérification ou la présentation du contenu des bases de données de Facebook et Instagram ne permettent pas de justifier à suffisance l’allégation selon laquelle cette société irlandaise serait coproductrice avec les sociétés américaines de ces bases de données la rendant ainsi recevable à faire procéder à une saisie-contrefaçon sur le fondement des articles L. 341-1, L. 341-2 et L. 343-1 du code de la propriété intellectuelle.

Dès lors, les opérations de saisie-contrefaçon ont été ordonnées et réalisées à la diligence de sociétés irrecevables à agir sur le fondement de la protection d’une atteinte aux droits sui generis de producteur de bases de données et la main levée des saisies opérées sur ce fondement a été prononcée (par application des articles L. 332-2 et L. 343-1 du code de la propriété intellectuelle).

L’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

« Le producteur d’une base de données bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel.

Cette protection est indépendante et s’exerce sans préjudice de celles résultant du droit d’auteur ou d’un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs ».

L’article L. 341-2 du même code limite la protection accordée comme suit :

« Sont admis au bénéfice du présent titre :

1° Les producteurs de bases de données, ressortissants d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ou qui ont dans un tel Etat leur résidence habituelle ;

2° Les sociétés ou entreprises constituées en conformité avec la législation d’un Etat membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur établissement principal à l’intérieur de la Communauté ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ; néanmoins, si une telle société ou entreprise n’a que son siège statutaire sur le territoire d’un tel Etat, ses activités doivent avoir un lien réel et continu avec l’économie de l’un d’entre eux.

Les producteurs de bases de données qui ne satisfont pas aux conditions mentionnées ci-dessus sont admis à la protection prévue par le présent titre lorsqu’un accord particulier a été conclu avec l’Etat dont ils sont ressortissants par le Conseil de la Communauté européenne ».

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Saisie de documents informatiques : l’inépuisable article 145 du code de procédure civile

Au regard du risque d’effacement des preuves lié à leur nature informatique et face à une volonté d’une société de dissimuler l’identité d’un distributeur, le recours à l’article 145 du CPC est justifié (en ce qu’il déroge au principe du contradictoire).

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime avant tout procès de conserver ou d’établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’article 145 du code de procédure civile suppose l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ces suppositions et démontrer que le litige potentiel n’est manifestement pas voué à l’échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur. De plus, si le demandeur dispose d’ores et déjà de moyens de preuve suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d’instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée. Enfin, ni l’urgence, ni l’absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d’application de ce texte.

L’article 493 du code de procédure civile dispose lui que l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Le juge doit donc rechercher également si la mesure sollicitée exigeait une dérogation au principe du contradictoire. Les circonstances justifiant cette dérogation doivent être caractérisées dans la requête ou l’ordonnance qui y fait droit.

Enfin il résulte des articles 497 et 561 du code de procédure civile que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé statuant sur une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête, est investie des attributions du juge qui l’a rendue devant lequel le contradictoire est rétabli. Cette voie de contestation n’étant que le prolongement de la procédure antérieure, le juge doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui.

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Contrefaçon de logiciel : le piège de l’assignation

Le défaut de pouvoir d’une personne figurant au procès verbal comme représentant d’une personne morale constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte (assignation pour contrefaçon de logiciel).

En application des dispositions combinées des articles 907 et 789-1° du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état est à l’instar du juge de la mise en état, depuis sa désignation jusqu’à la clôture de l’instruction, est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure.

En application des dispositions de l’article 909 du code de procédure civile, l’intimé doit à peine d’irrecevabilité relevée d’office déposer ses conclusions contenant le cas échéant appel incident dans les trois mois de la notification des conclusions de l’appelant.

Ces conclusions prises dans le délai de trois mois sont nécessairement des conclusions régulières.

Conformément aux dispositions des articles 117 et suivants du code de procédure civile constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte et dont la nullité peut être proposée en tout état de cause et prononcée sans que la personne qui s’en prévaut ait à justifier d’un grief, le défaut de capacité d’ester en justice.

En l’espèce, les conclusions d’intimés sont affectées de nullité en ce qu’elles contiennent des prétentions formulées au nom de la société Myriocom, prise en la personne de son représentant légal domicilié au dit siège, alors qu’à cette date et par jugement du tribunal judiciaire d’Angoulême en date du 4 février 2021 cette société avait été placée en redressement judiciaire et la société Silvestri Baujet désignée en qualité de mandataire judiciaire, de sorte que M. [F] n’avait plus qualité pour la représenter.

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La contrefaçon peut être établie par des captures d’écran de sites internet

Il appartient toujours au tribunal d’apprécier la valeur probante des pièces qui lui sont soumises

En application de l’article L.716-4-7 du code de la propriété intellectuelle, la contrefaçon de marque peut être prouvée par tous moyens.

Il en résulte que la contrefaçon de marque peut notamment l’être par des captures d’écran de sites internet, lesquelles ne sont pas dépourvues par nature de force probante (voir en ce sens, pour une contrefaçon de logiciel, Cour de cassation, chambre commerciale, 7 juillet 2021, n°20-22.048).

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Contrefaçon de marques de certification par courriers électroniques

Utiliser dans ses emails commerciaux une marque de certification sans être certifié est une contrefaçon.

La société AED a fait usage dans sa communication commerciale de marques déposées pour des services et des produits identiques à ceux visés à l’enregistrement, causant une atteinte à la fonction essentielle de ces marques, et ce sans y être autorisée, ce qui caractérise des actes de contrefaçon.

Le droit conféré par les marques de l’Union européenne est prévu par l’article 9 du règlement 2017/1001 qui dispose : “1. L’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d’une marque de l’Union européenne, le titulaire de cette marque de l’Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque :
a) ce signe est identique à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée; (…)”

L’atteinte au droit conféré par la marque de l’Union européenne est qualifiée de contrefaçon, engageant la responsabilité civile de son auteur, par l’article L. 717-1 du code de la propriété intellectuelle.
La Cour de justice de l’Union européenne a précisé que le droit exclusif du titulaire de la marque, qui n’est pas absolu, ne l’autorise à s’opposer à l’usage d’un signe par un tiers en vertu de l’article 9, dans les conditions énumérées au paragraphe 2, sous a) et b), que si cet usage porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque, et notamment à sa fonction essentielle, qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service (CJCE, 12 novembre 2002, Arsenal football club, C-206/01, point 51 ; plus récemment, CJUE, 17 novembre 2022, Impexeco, C-253/20, point 46 et jurisprudence citée).

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Contrefaçon de logiciel en ligne : la compétence du juge français

Pour emporter la compétence du juge français, un logiciel argué de contrefaçon doit pouvoir être téléchargeable directement sur un site accessible depuis la France par un public français.

En la cause, il n’est pas démontré que le public français est en mesure d’installer en France le logiciel argué de contrefaçon par l’intermédiaire du site rédigé en français et d’utiliser ledit logiciel, gratuitement ou moyennant rémunération, si bien que la preuve de ce que le dommage invoqué par les sociétés Communigate Inc, Mailspec et Communigate Software Development and Licensing est situé sur le territoire français n’est pas rapportée.

Les constatations ainsi opérées par l’huissier de justice établissent simplement qu’un site internet décliné lui-même en plusieurs sous-sites, décrivant les caractéristiques et les fonctionnalités du système Communigate Pro, est accessible à l’internaute français et que le site contient la marche à suivre pour télécharger une version gratuite du logiciel, permettant de le tester.

Néanmoins, l’huissier de justice n’indique pas dans son constat qu’il a pu télécharger le logiciel argué de contrefaçon, ni même sa version gratuite.

Pour mémoire, aux termes de l’article 46 du code de procédure civile, en matière délictuelle, le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.

Le règlement (UE) n° 1215 /2012 du parlement européen et du conseil concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, applicable au sein de l’Union européenne depuis le 10 janvier 2015, énonce que :

article 7 : une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre :

(…)

2) en matière délictuelle ou quasi-délictuelle, devant la juridiction du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire.

En matière de contrefaçon, la victime peut donc exercer son action, soit devant la juridiction de l’Etat du lieu d’établissement de l’auteur de la contrefaçon, compétente pour réparer l’intégralité du préjudice qui en résulte, soit devant la juridiction de l’Etat contractant dans lequel l’objet de la contrefaçon se trouve diffusé, apte à connaître seulement des dommages subis dans cet Etat.

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Escroquerie aux paiements en ligne : la négligence grave du client

Le client d’une banque commet une négligence grave dans la conservation de ses moyens de paiement et de dispositifs de sécurité qui y sont attachés, s’il communique par téléphone à un interlocuteur, son code secret de carte bancaire.

L’article L133-16 du code monétaire et financier dispose que :

« Dès qu’il reçoit un instrument de paiement, l’utilisateur de services de paiement prend toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées.

Il utilise l’instrument de paiement conformément aux conditions régissant sa délivrance et son utilisation qui doivent être objectives, non discriminatoires et proportionnées. »

L’article L133-17 du code monétaire et financier dispose que :

“I. – Lorsqu’il a connaissance de la perte, du vol, du détournement ou de toute utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données qui lui sont liées, l’utilisateur de services de paiement en informe sans tarder, aux fins de blocage de l’instrument, son prestataire ou l’entité désignée par celui-ci.

II. – Lorsque le paiement est effectué par une carte de paiement émise par un établissement de crédit, une institution ou un service mentionné à l’article L.518-1 et permettant à son titulaire de retirer ou de transférer des fonds, il peut être fait opposition au paiement en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaires du bénéficiaire tant que le compte du prestataire de services de paiement du bénéficiaire n’a pas été crédité du montant de l’opération de paiement”.

L’article L133-18 du code monétaire et financier dispose que :

« En cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’article L.133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ces raisons par écrit à la Banque de France. Le cas échéant, le prestataire de services de paiement du payeur rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu.

Lorsque l’opération de paiement non autorisée est initiée par l’intermédiaire d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, le prestataire de services de paiement gestionnaire du compte rembourse immédiatement, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, au payeur le montant de l’opération non autorisée et, le cas échéant, rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu. La date de valeur à laquelle le compte de paiement du payeur est crédité n’est pas postérieure à la date à laquelle il avait été débité.

Si le prestataire de services de paiement qui a fourni le service d’initiation de paiement est responsable de l’opération de paiement non autorisée, il indemnise immédiatement le prestataire de services de paiement gestionnaire du compte, à sa demande, pour les pertes subies ou les sommes payées en raison du remboursement du payeur, y compris le montant de l’opération de paiement non autorisée.

Le payeur et son prestataire de services de paiement peuvent décider contractuellement d’une indemnité complémentaire. »

L’article L.133-19 du code monétaire et financier dispose que :

« I. – En cas d’opération de paiement non autorisée consécutive à la perte ou au vol de l’instrument de paiement, le payeur supporte, avant l’information prévue à l’article L.133-17, les pertes liées à l’utilisation de cet instrument, dans la limite d’un plafond de 50 €.

Toutefois, la responsabilité du payeur n’est pas engagée en cas d’opération de paiement non autorisée effectuée sans utilisation des données de sécurité personnalisées ; de perte ou de vol d’un instrument de paiement ne pouvant être détecté par le payeur avant le paiement; de perte due à des actes ou à une carence d’un salarié, d’un agent ou d’une succursale d’un prestataire
de services de paiement ou d’une entité vers laquelle ses activités ont été externalisées.

II. – La responsabilité du payeur n’est pas engagée si l’opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l’insu du payeur, l’instrument de paiement ou les données qui lui sont liées.

Elle n’est pas engagée non plus en cas de contrefaçon de l’instrument de paiement si, au moment de l’opération de paiement non autorisée, le payeur était en possession de son instrument.

III. – Sauf agissement frauduleux de sa part, le payeur ne supporte aucune conséquence financière si le prestataire de services de paiement ne fournit pas de moyens appropriés permettant l’information aux fins de blocage de l’instrument de paiement prévue à l’article L.133-17.

IV. – Le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L.133-16 et L.133-17.

V. – Sauf agissement frauduleux de sa part, le payeur ne supporte aucune conséquence financière si l’opération de paiement non autorisée a été effectuée sans que le prestataire de services de paiement du payeur n’exige une authentification forte du payeur prévue à l’article L.133-44.

VI. – Lorsque le bénéficiaire ou son prestataire de services de paiement n’accepte pas une
authentification forte du payeur prévue à l’article L.133-44, il rembourse le préjudice financier causé au prestataire de services de paiement du payeur. »

Enfin, l’article L133-33 du code monétaire et financier dispose que :

« Lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, ou affirme que l’opération de paiement n’a pas été exécutée correctement, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre.

L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement. »

Ainsi, s’il appartient à l’utilisateur de services de paiement de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et d’informer sans tarder son prestataire de tels services de toute utilisation non autorisée de l’instrument de paiement ou des données sui lui sont liées, c’est au prestataire qu’il incombe de rapporter la preuve que l’utilisateur a agi frauduleusement ou n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations.

Cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisés.

Aucune présomption n’est attachée à l’infaillibilité supposée des instruments de paiement sécurisés dès lors que le risque de la fraude ne pèse pas sur l’utilisateur.

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Contrefaçon de contenus rédactionnels web : que faire ?

Des phrases courtes qui articulent des idées attendues selon un vocabulaire usuel, dans des structures standard ne peuvent être protégées par les droits d’auteur. Elles ne reflètent pas en elles-mêmes de choix créatifs reflétant la personnalité de leur auteur. Toutefois, en cas de copie de contenus internet, la concurrence déloyale peut être une option alternative.

Pour rappel, conformément à l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur l’œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.

En application de la directive 2001/29 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, qui harmonise la notion d’œuvre conditionnant la protection encadrée par ce texte, une oeuvre implique un objet original, c’est-à-dire une création intellectuelle propre à son auteur, qui en reflète la personnalité en manifestant ses choix libres et créatifs ; et cet objet doit être identifiable avec suffisamment de précision et d’objectivité, ce qui exclut une identification reposant essentiellement sur les sensations de la personne qui reçoit l’objet (CJUE, 12 septembre 2019, Cofemel, C-683/17, points 29 à 35).

Eu égard à ses objectifs, la protection associée au droit d’auteur, dont la durée est longue, est réservée aux objets méritant d’être qualifiés d’oeuvres (CJUE, Cofemel précité, point 50).

Par ailleurs, la propriété littéraire et artistique ne protège pas les idées ou concepts, mais seulement la forme originale sous laquelle ils se sont exprimés (Cass. 1re Civ., 29 novembre 2005, n°04-12-721 ; 1re Civ., 16 janvier 2013, n°12-13.027).

La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité civile édicté par l’article 1240 du code civil, consiste en des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre. L’appréciation de la faute doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits.

Constitue également une concurrence déloyale et est ainsi fautif au sens de l’article 1240 du code civil le fait, pour un agent économique, de se placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indument des investissements consentis ou de sa notoriété, ou encore de ses efforts et de son savoir-faire ; qualifié de parasitisme, il résulte d’un ensemble d’éléments appréhendés dans leur globalité (Cass. Com., 4 février 2014, n°13-11.044 ; Cass. Com., 26 janvier 1999, n° 96-22.457), et qu’il faut interpréter au regard du principe de liberté du commerce et de l’industrie.

Constitue encore une concurrence déloyale la pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L. 121-2 du code de la consommation qui confère à son auteur un avantage indû sur un concurrent.

Nos Conseils :

1. Attention à la nécessité de démontrer de manière concrète et circonstanciée les éléments constitutifs d’une contrefaçon de droit d’auteur, en mettant en avant l’originalité de l’oeuvre et les choix créatifs reflétant la personnalité de l’auteur.

2. Il est recommandé de prouver de manière claire et précise les éléments constitutifs d’une concurrence déloyale, en mettant en avant les agissements s’écartant des règles de loyauté et de probité professionnelle, ainsi que les éléments de parasitisme ou de pratique commerciale trompeuse.

3. Il est essentiel de fournir des preuves solides et vérifiables pour imputer des faits à une partie, en évitant les présomptions défavorables basées uniquement sur des coïncidences telles que des homonymies, et en respectant le principe selon lequel la charge de la preuve incombe à celui qui allègue un fait.

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Contrefaçon en ligne : identifiez d’abord le titulaire du nom de domaine

Pour établir une contrefaçon de contenus rédactionnels n’hésitez pas à faire (avec l’aide d’un commissaire de justice en cas de besoin), des captures du site archive.org. Cela pourra établir que le site indélicat contenait déjà, au mot près, vos propres textes.

En revanche pour associer la propriété du site en cause avec son auteur pensez à identifier le propriétaire du nom de domaine car présenter au juge un Kbis avec la dénomination du site est insuffisant à écarter toute homonymie.

En la cause, pour imputer ces faits, la demanderesse communique seulement l’extrait Kbis de celle-ci, qui indique qu’elle exerce son activité dans le même domaine (« E-commerce, vente en ligne de box pour enfants, accessoires, prêt à porter, jouets ») sous le même nom commercial, à savoir « Little men ». La demanderesse ne communique aucun autre élément. En particulier, le constat d’huissier portant sur le site internet litigieux ne montre pas les pages « mentions légales » et elle n’allègue ni ne démontre s’être renseignée sur le titulaire du nom de domaine du site litigieux.

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Message Gmail anonyme et diffamant : voici la procédure à suivre

Pour identifier l’auteur d’un email diffamant, la première étape est d’obtenir l’adresse IP avec laquelle le titulaire a créé son compte et celle avec laquelle il a envoyé ses message.

Pour ce faire, l’article 145 du CPC est le moyen à privilégier. Une demande de mesure d’instruction ne peut légitimement porter que sur des faits déterminés, d’une part, pertinents, d’autre part. Le juge doit ainsi caractériser le motif légitime d’ordonner une mesure d’instruction, non pas au regard de la loi susceptible d’être appliquée à l’action au fond qui sera éventuellement engagée, mais en considération de l’utilité de la mesure pour réunir des éléments susceptibles de commander la solution d’un litige potentiel.

Sont légalement admissibles, au sens de l’article 145 du CPC, des mesures d’instruction circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l’objectif poursuivi. Il incombe, dès lors, au juge saisi d’une contestation à cet égard, de vérifier si la mesure ordonnée est nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

Sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et dans le respect des dispositions précitées qui déterminent les cas dans lesquels peuvent être prescrites les mesures sollicitées, s’agissant de demandes tendant à la communication de données conservées par les hébergeurs ou fournisseurs d’accès à internet, le juge saisi peut prescrire à toute personne susceptible de contribuer à un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne de communiquer les données d’identification ayant servi à la diffusion des propos incriminés, à condition que ceux-ci soient pénalement répréhensibles si les faits devaient être considérés comme constitués et qu’une telle mesure soit légitime et proportionnée au but poursuivi.

Pour justifier du motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, il peut être avancé que les propos tenus contre une société ou une personne sont susceptibles de qualifications pénales, que le demandeur se réservera d’invoquer devant les juridictions pénales notamment au titre des délits de diffamation, de menaces, tel que prévu à l’article 222-17 du code pénal, et de chantage prévu à l’article 312-10 du code pénal.

Les messages peuvent potentiellement constituer le délit d’envois réitérés de messages malveillants émis par la voie des communications électroniques, sanctionné par l’article 222-16 du code pénal.

Une action pénale engagée sur le fondement de la diffamation publique envers particulier, réprimée par les articles 29 alinéa 1 et 32 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 envers un particulier et également de chantage, réprimés par l’article 312-10 du code pénal ne serait pas manifestement vouée à l’échec.

Dans la mesure où les propos litigieux sont susceptibles de constituer les délits de diffamation publique envers particulier et de chantage, un procès pénal est envisageable, une fois identifiée la personne à l’origine des courriers électroniques en cause.

Les faits litigieux, en ce que la qualification pénale de chantage est envisageable, ressortent de la lutte contre la criminalité et la délinquance grave, s’agissant d’un délit puni d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, de sorte qu’est proportionnée à l’atteinte alléguée et légalement admissible, la communication des données d’identification correspondant aux 1°, 2° et 3° de l’article précité.

Google (Gmail) a le statut d’hébergeur, tel que défini à l’article 6. I. 2 de la LCEN (“personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services”) s’agissant des propos envoyés depuis une adresse électronique Gmail. La société Google est donc astreinte à ce titre à l’obligation de conservation des données d’identification dans les conditions rappelées ci-dessous.

L’article 6 II de la LCEN prévoit que, dans les conditions fixées aux II bis, III et III bis de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques, les personnes mentionnées aux 1 et 2 du I du présent article détiennent et conservent les données de nature à permettre l’identification de quiconque a contribué à la création du contenu ou de l’un des contenus des services dont elles sont prestataires.

L’article L34-1 précité prévoit que les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver :

1° Pour les besoins des procédures pénales, de la prévention des menaces contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, jusqu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la fin de validité de son contrat ;

2° Pour les mêmes finalités que celles énoncées au 1° du présent II bis, les autres informations fournies par l’utilisateur lors de la souscription d’un contrat ou de la création d’un compte ainsi que les informations relatives au paiement, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la fin de validité de son contrat ou de la clôture de son compte ;
3° Pour les besoins de la lutte contre la criminalité et la délinquance grave, de la prévention des menaces graves contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la connexion ou de l’utilisation des équipements terminaux.”.

La nature des données mentionnées ci-avant, comme la durée et les modalités de leur conservation, sont précisées par le décret n°2021-1362 du 20 octobre 2021 relatif à la conservation des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu en ligne, pris en application de l’article 6-II sus mentionné. Ce texte précise en particulier, dans ses articles 2 à 5, les données mentionnées dans l’article L34-1 du code des postes et des communications électroniques, évoqué ci dessus :

– les informations prévues au 1° sont les suivantes : les nom et prénom, la date et le lieu de naissance ou la raison sociale, ainsi que les nom et prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom lorsque le compte est ouvert au nom d’une personne morale ; la ou les adresses postales associées ; la ou les adresses de courrier électronique de l’utilisateur et du ou des comptes associés le cas échéant ; le ou les numéros de téléphone.

– les informations prévues au 2° sont les suivantes : l’identifiant utilisé ; le ou les pseudonymes utilisés ; les données destinées à permettre à l’utilisateur de vérifier son mot de passe ou de le modifier, le cas échéant par l’intermédiaire d’un double système d’identification de l’utilisateur, dans leur dernière version mise à jour, outre le type de paiement utilisé ; la référence du paiement ; le montant ; la date, l’heure et le lieu en cas de transaction physique.

– les informations prévues au 3° sont les suivantes, pour les hébergeurs : l’identifiant de la connexion à l’origine de la communication ; et les types de protocoles utilisés pour la connexion au service et pour le transfert des contenus.

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Diffamation par email : attention aux délais

En matière de diffamation par email, un pourvoi, formé plus de trois jours non francs après le prononcé de l’arrêt, dont la date avait été communiquée aux parties conformément à l’article 462, alinéa 2, du code de procédure pénale à l’issue des débats, est irrecevable comme tardif en application de l’article 59 de la loi du 29 juillet 1881.

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Arbitrage international : l’audition par visioconférence possible

En matière d’arbitrage international soumis à la procédure devant la Chambre Internationale de la cour d’appel de Paris, l’audition par visioconférence est possible.

En application des articles 4.2 et 5.2 du protocole relatif à la procédure devant la Chambre Internationale de la cour d’appel de Paris du 7 février 2018 (ci-après « le protocole »), auquel les parties ont adhéré qui renvoient aux articles 184 et suivants du code de procédure civile et en application des sections du « Guide pratique de procédure devant la CCIP-CA » relatives à l’audition de parties, le conseiller de la mise en état apprécie l’opportunité de faire droit à la demande d’audition.

Ces dispositions sont applicables aux procédures de recours en annulation de sentence arbitrales internationales, le juge étant invité à apprécier l’opportunité d’une telle demande avec vigilance au regard de l’office traditionnellement limité reconnu au juge en cette matière (section N.2.1 du Guide)

La comparution personnelle des parties se déroule dans les conditions édictées aux articles 184 à 198 du code de procédure civile.

Le juge procède à l’interrogatoire des parties, en posant les questions qu’il estime utiles sur tous les faits dont la preuve est admise par la loi. Chaque partie peut ensuite être invitée par le juge à répondre aux questions que les autres parties souhaitent poser.

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Date de publication d’écrits diffamatoires : le Whois est sans intérêt

Le registre Whois ne permet pas d’établir avec certitude la première date de publication de propos diffamatoires.

Pour rappel, le Whois correspond à un protocole commun sur internet qui permet de consulter les informations d’enregistrement d’un nom de domaine ou d’un IP.

Dans ce Whois, le fait qu’apparaisse qu’une mise à jour, ‘updtated date’, a été effectuée ne correspond pas nécessairement à la première date de publication des propos litigieux, la mise à jour ayant pu porter sur un autre élément du domaine les cigales.org, ou seulement partiellement sur les propos incriminés.

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Diffamation sur internet : le piège de la prescription courte

Pour apprécier la prescription éventuelle de l’action en diffamation en ligne intentée, il convient de tenir compte de la première date de diffusion des propos à tout utilisateur potentiel d’internet, peu important la date à laquelle la personne qui s’estime diffamée a prix connaissance de l’existence de la publication.

Le fait que la victime ait donc pris connaissance des propos diffusés tardivement ne peut constituer en soi le point de départ du délai de prescription.

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d ‘agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Par dérogation au délai de droit commun prévu par l’article 2247 du code civil, l’article 65 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 enferme l’action civile résultant des crimes, délits et contraventions qu’ elle édicte dans un délai de trois mois à compter du jour de la commission des faits ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite.

Il ressort d’une jurisprudence constante que les infractions commises par voie de presse ont un caractère instantané, de sorte qu’elles sont réputées commises et consommées au moment de la publication, quel que soit le temps pendant lequel l’écrit est resté diffusé, publié ou disponible à la vente. Sur internet, le point de départ de la prescription est ainsi constitué de la première mise en ligne des propos litigieux et non de leur suppression du site : il appartient dès lors à celui qui se prévaut de la prescription de l’action de rapporter la preuve de cette première mise en ligne des propos contestés qui constitue la date de première mise à disposition des propos aux utilisateurs.

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Affaire Libération : le piège du droit de réponse en ligne

Une contradiction interne d’une demande d’insertion d’un droit de réponse lié au renvoi par certains termes à la publication « papier » et par d’autres à la publication « internet » du journal, génère une incertitude quant à l’article querellé, ce alors que le régime applicable au droit de réponse diffère selon le support en cause. Dans ces conditions, il ne peut être considéré que le directeur de publication a été mis en mesure d’identifier, sans doute possible et dans le délai contraint qui lui est imposé par la loi pour publier le droit de réponse, l’article auquel il se rapportait.

Au vu de ces éléments, le refus d’insertion dont il est demandé au juge des référés de remédier en urgence, ne présente pas les caractères d’un trouble manifestement illicite relevant des pouvoirs du juge de l’évidence.

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