Tweet outrancier et diffamatoire contre Ouest France : quel recours ?
Le Tweet de l’utilisateur d’un réseau social qui vise directement le rédacteur en chef du journal Ouest France qui assumerait “son islamo-gauchisme et son antisémitisme le plus abject”, et remet en cause, en outre, la qualité du travail effectué par le quotidien composé de “journaleux”, n’a pas été jugé comme manifestement illicite.
La juridiction a considéré que si outranciers que soient les propos employés par le titulaire du compte @chacha28011, et alors qu’il n’est pas envisageable de trancher la question du caractère diffamatoire de ces derniers à l’encontre du rédacteur en chef en l’absence de leur auteur, ceux-ci ne constituent pas un abus manifeste de la liberté d’expression dès lors, en particulier, qu’ils sont intervenus dans un contexte marqué « par les évènements récents à Gaza où doit être reconnu à toute personne un intérêt légitime à s’exprimer sur ce sujet, et notamment sur la manière dont le conflit est traité par les médias dont le demandeur est une figure importante, et qu’ils ont été publiés sur un compte X qui affiche ouvertement une dimension politique ».
Il n’y a donc pas lieu d’ordonner la suppression des propos litigieux, en l’absence de démonstration de la nécessité d’une telle mesure en l’espèce.
Pour rappel, dans la mesure où une action engagée devant le tribunal en application des dispositions de l’article 6 I 8, oppose non pas la personne qui allègue le dommage à la personne qui l’aurait causé, mais la première à l’hébergeur du contenu critiqué, aucun débat contradictoire n’est rendu possible pour évaluer la réalité de l’atteinte.
Dans ces conditions, seul un abus caractérisé de la liberté d’expression peut justifier que le juge prenne des mesures telles qu’un retrait de contenu, même partiel, ou la fermeture d’un support de diffusion de propos ou le blocage d’un site internet, celles-ci devant être adaptées et proportionnées au dommage dont la réalisation ou l’imminence est reconnue dès lors qu’elles portent atteinte à la liberté fondamentale qu’est la liberté d’expression.
Aux termes de l’article 6 I 8 de la LCEN, le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, peut prescrire à toute personne susceptible d’y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne.
Il convient néanmoins de rappeler qu’une mesure ne peut être ordonnée à ce titre que si elle est justifiée par le dommage, qu’elle est légalement admissible, et qu’elle ne cause pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de l’auteur des propos, à son droit à la protection de ses données personnelles, garantis par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, ainsi qu’à son droit à la liberté d’expression, garanti par l’article 10 de la même Convention.
S’agissant de droits fondamentaux, il revient au juge d’apprécier l’illicéité et la gravité du dommage visé à l’article 6 I 8 afin de déterminer si les mesures sollicitées de suppression de compte, de suppression de contenus et d’identification de leur auteur, par nature attentatoires au droit à la liberté d’expression et au droit à la vie privée de ce dernier, sont nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi.
La demande portée auprès du président du tribunal judiciaire, saisi sur le fondement des dispositions de l’article 6 I 8 de la LCEN, tendant à voir prescrire à toute personne susceptible d’y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne, qui ne relève pas d’une recherche de la responsabilité de l’hébergeur en cause, n’est pas conditionnée à une demande préalable de retrait du contenu auprès dudit hébergeur, même si cet élément peut le cas échéant être pris en compte dans le cadre de l’appréciation du caractère proportionné de la mesure sollicitée.
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