Calcul de l’ancienneté du salarié

Notez ce point juridique

Sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires ou situation de co-emploi, non alléguée en l’espèce, les contrats de travail successifs avec plusieurs sociétés du groupe ne permettent pas au salarié de se prévaloir de l’ancienneté acquise dans l’une de ces sociétés. Les mêmes principes s’appliquent a fortiori s’agissant de sociétés ne faisant pas partie d’un groupe.


M. [W] [D] a été engagé en tant qu’ingénieur expert par la société A.Com en janvier 2013, puis a travaillé pour la société holding Méridien à partir de juillet 2016 en tant que directeur du développement. Il a été licencié en juin 2020, ce qui a conduit à un litige prud’homal. Le conseil de prud’hommes de Dieppe a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et a accordé au salarié une indemnité. M. [W] [D] a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de confirmer le jugement sur certains points et d’infirmer sur d’autres, notamment en demandant des indemnités supplémentaires. La société Méridien conteste les demandes du salarié, arguant que le licenciement était justifié pour insuffisance de résultats et pour déloyauté du salarié.

– Somme de 5 000 euros allouée à M. [W] [D] à titre de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail
– Intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris
– Capitalisation des intérêts selon l’article 1343-2 du code civil
– Condamnation de la SAS Méridien aux dépens de la procédure d’appel
– Somme de 1 500 euros allouée à M. [W] [D] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile


Réglementation applicable

En application de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Pour que la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur soit justifiée ou fondée, et en tout cas non abusive, la cause du licenciement doit être réelle, doit concerner des faits objectifs, précis et matériellement vérifiables, dont l’existence ou la matérialité est établie et qui constituent la véritable raison du licenciement, mais également sérieuse, c’est-à-dire que les faits invoqués par l’employeur, ou les griefs articulés par celui-ci, doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige sur la cause du licenciement, ce qui interdit à l’employeur d’invoquer de nouveaux ou d’autres motifs ou griefs par rapport à ceux mentionnés dans la lettre de licenciement.

En application des dispositions de l’article R.1232-13 du code du travail, dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.

L’employeur dispose d’un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

Dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Cédric LIGER de l’AARPI ITER AVOCATS
– Me Pascale BADINA de la SELARL CABINET BADINA ET ASSOCIÉS
– Me Jérémy STANTON

Mots clefs associés

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 22/02243 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JD2P

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 04 AVRIL 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE DIEPPE du 28 Juin 2022

APPELANT :

Monsieur [W] [D]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1] (PUYS)

représenté par Me Cédric LIGER de l’AARPI ITER AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

S.A.S. MERIDIEN

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Pascale BADINA de la SELARL CABINET BADINA ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Jérémy STANTON, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 09 Février 2024 sans opposition des parties devant Madame ALVARADE, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame ALVARADE, Présidente

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DUBUC, Greffière

en présence de Mme Maréva HUBERT, Greffière stagiaire

DEBATS :

A l’audience publique du 09 février 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 04 avril 2024

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 04 Avril 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame ALVARADE, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [W] [D] a été engagé par la société A.Com en qualité d’ingénieur expert par contrat du 21 janvier 2013. A compter du 1er juillet 2016, il a travaillé pour la société holding Méridien, suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de directeur du développement, statut cadre. Il était soumis à une convention de forfait jours et percevait une rémunération composée d’une part fixe à hauteur de 5 000 euros et d’une part variable, déterminée en fonction des résultats obtenus par rapport aux objectifs fixés, outre diverses primes. M. [W] [D] était le seul salarié de la société.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987 (SYNTEC).

Après avoir été convoqué à un entretien préalable par lettre du 12 mai 2020 fixé au 26 mai 2020, la société a notifié au salarié son licenciement, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 3 juin 2020.

Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, le 21 octobre 2020, le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir diverses sommes tant en exécution qu’au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 28 juin 2022, le conseil de prud’hommes de Dieppe a dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, fixé le salaire de référence de M. [W] [D] à 5 000 euros par mois, condamné la société Méridien à lui payer les sommes de 15.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, l’a débouté de toutes ses autres demandes et mis les dépens à la charge de la société Méridien.

M. [W] [D] a interjeté appel de cette décision dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 janvier 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions remises le 21 décembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [W] [D] (le salarié) demande à la cour de :

« – confirmer le jugement en ce qu’il a dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, fixé le salaire de référence à 5 000 euros par mois, débouté la société Méridien de toutes ses demandes, et l’a condamnée aux dépens,

– infirmer le jugement pour le surplus,

– juger qu’il a travaillé de manière continue pour le compte des entreprises appartenant au groupe Méridien à compter du 21 janvier 2013 et qu’il dispose donc d’une ancienneté de 7 ans et 7 mois, son préavis expirant le 3 septembre 2020,

– en conséquence, condamner la société Méridien à lui verser les sommes suivantes :

à titre principal :

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 8 mois de salaire conformément au plafond de l’article L. 1235-3 du code du travail, en réparation de l’entier préjudice subi : 40 000 euros,

complément d’indemnité de licenciement : 5 694,44 euros,

– à titre subsidiaire :

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en réparation de l’entier préjudice subi, correspondant à 8 mois de salaire : 40 000 euros,

à titre infiniment subsidiaire :

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 4 mois de salaire: 20.000 euros,

en tout état de cause :

rappel de salaire pour la période d’arrêt de travail pour maladie au cours du premier semestre 2020 : 715,41 euros,

réparation du préjudice résultant des conditions brutales et vexatoires de la rupture du contrat de travail, correspondant à 3 mois de salaire : 15 000 euros,

dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 50 000 euros,

indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros,

– ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant 8 jours calendaires,

– assortir les sommes dues des intérêts au taux légal et prononcer la capitalisation des intérêts en application des dispositions du code civil,

statuant à nouveau et y ajoutant,

– juger qu’il a travaillé de manière continue pour le compte des entreprises appartenant au groupe Méridien à compter du 21 janvier 2013 et qu’il dispose donc d’une ancienneté de 7 ans et 7 mois, son préavis expirant le 3 septembre 2020 ;

– en conséquence, condamner la société Méridien à lui verser les sommes suivantes :

à titre principal :

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 8 mois de salaire conformément au plafond de l’article L. 1235-3 du code du travail, en réparation de l’entier préjudice subi : 40 000 euros,

complément d’indemnité de licenciement : 5 694,44 euros,

à titre subsidiaire :

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 4 mois de salaire : 20.000 euros,

en tout état de cause :

réparation du préjudice résultant des conditions brutales et vexatoires de la rupture du contrat de travail, correspondant à 3 mois de salaire 15 000 euros,

dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 50 000 euros,

indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance : 5 000 euros,

indemnité au titre des frais irrépétibles d’appel par application de l’article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros,

– débouter la société Méridien de ses demandes, fins et conclusions,

– ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant 8 jours calendaires,

– assortir les sommes dues des intérêts au taux légal et prononcer la capitalisation des intérêts en application des dispositions du code civil,

– condamner la société Méridien aux entiers dépens. »

Le salarié fait valoir que la lettre de licenciement ne précise pas le motif de la rupture du contrat de travail,

qu’au fond, les griefs invoqués sont injustifiés,

que son licenciement est en réalité motivé par la suppression de son poste pour des raisons stratégiques, tant économiques que financières,

que sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est par conséquent légitime et il devra être tenu compte d’une ancienneté décomptée à partir du 21 janvier 2021, date de début de la relation travaillée au sein de la société A.Com, qui s’est poursuivie avec la société EGB d’Eu et en dernier lieu avec la société Méridien,

que les manquements de l’employeur à son obligation d’exécuter loyalement le contrat de travail sont caractérisés,

qu’il a été en outre licencié dans des conditions particulièrement vexatoires.

Par conclusions remises le 11 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la société Méridien (la société, l’employeur) demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a fixé le salaire de référence de M. [W] [D] à 5 000 euros par mois, débouté M. [W] [D] de toutes ses autres demandes,

statuant à nouveau,

– rejeter purement et simplement les pièces adverses n° 24 à 26 des débats,

– débouter M. [W] [D] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner M. [W] [D] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [W] [D] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

L’employeur fait valoir que le salarié ne peut revendiquer une ancienneté au 21 janvier 2013, ni au 15 mai 2015 alors qu’il a été embauché au sein de la société Méridien à compter du 1er juillet 2016, sans qu’aucune reprise d’ancienneté n’ait été stipulée,

que le licenciement pour insuffisance de résultats est fondé alors que le salarié s’est vu fixer des objectifs aux termes de son contrat de travail, réalistes et parfaitement réalisables, non atteints en raison de son manque d’implication, alors qu’il disposait des outils lui permettant d’exercer sa mission,

que le salarié a fait preuve de déloyauté en ne l’informant pas de son mandat social au sein de la SCCV « Le Domaine de Whitley », manquement suffisant à lui seul à motiver un licenciement pour cause réelle et sérieuse,

qu’il ne démontre pas une exécution déloyale du contrat de travail de sa part, ni ne justifie que son licenciement a eu lieu dans des conditions vexatoires.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 – Sur la demande de rejet des débats des pièces numérotées 24 à 26

La société sollicite le rejet des pièces numérotées 24 à 26 communiquées par le salarié.

La pièce 24 intitulée « compte-rendu du comité stratégique T1 2019/2020 du 21 janvier 2020 (p.13 et 14) », indique en page 13 « il reste à terminer de résoudre le problème [D] (l’avocat a été saisi et M. [D] est convoqué le 31 janvier) et finaliser l’embauche d’un chargé d’affaires sur Sucy » et en page 14 « Méridien convention collective non justifiée : à résilier après départ [D] ‘ risque rappel de salaire [D] sur forfait jours. Cabinet Decker (Me Joubin) sollicité sur le sujet ».

La pièce 25 intitulée « compte-rendu du comité stratégique T2 2019/2020 du 21 avril 2020 (p.13) » indique en page 13 « Méridien : suppression du poste commercial de [W] [D] : les courriers de convocation partiront dès son retour de maladie »

La pièce 26 intitulée « compte-rendu du comité stratégique T4 2019/2020 du 30 septembre 2020 (p.13) », indique en page 13 « Méridien : suppression du poste commercial de [W] [D] : Fait. ».

Il convient de rappeler que les causes d’illicéité de la preuve peuvent relever soit d’éléments de preuve dont l’administration porte atteinte à la vie privée, soit d’éléments de preuve dont l’obtention est déloyale ou irrégulière.

Il est toutefois désormais admis que l’obtention illicite d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats et que le juge doit, lorsque la question se présente à lui, apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance les droits antinomiques en présence et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte au principe de licéité et de loyauté de la preuve à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

Au cas particulier, il est reproché au salarié d’avoir produit trois pièces obtenues de façon déloyale ou irrégulière.

Ce grief n’apparaît pas fondé alors que ce dernier soutient, sans être sérieusement contredit, que dans le cadre de ses missions, il disposait d’une connexion VPN qui lui permettait d’avoir accès à distance aux éléments documentaires du serveur Com.acmd, accessible à l’ensemble des salariés. La cour observe en outre que ces comptes rendus consistent à restituer les résultats du groupe, les analyser et définir un plan d’action, les commentaires retranscrits ci-avant figurant dans un paragraphe « suivi actions » et étaient par conséquent susceptibles d’intéresser l’ensemble des salariés.

En tout état de cause, l’examen de la teneur des pièces litigieuses conduit la cour à considérer que leur communication ne porte pas atteinte de façon disproportionnée aux droits de l’employeur et qu’elle était indispensable au soutien de la défense du salarié dans le litige ayant fait suite à son licenciement.

Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté l’employeur de sa demande de rejet des pièces litigieuses.

2 – Sur l’ancienneté

Le salarié fait valoir que les années travaillées au sein de la société A.Com, auraient dû être prises en compte pour le calcul de son ancienneté au sein de la société Méridien,

que depuis cette date et jusqu’à son licenciement le 3 juin 2020, il a travaillé exclusivement pour l’ensemble des sociétés du groupe Méridien et a toujours été placé sous la direction des filiales du groupe,

que son contrat de travail du 24 janvier 2013 conclu avec la société A.Com stipule qu’il « accomplira ses missions d’ingénierie, d’audit, d’expertise et de conseils dans la perspective de favoriser la structuration des services travaux des sociétés Comefl et Com.acmd et d’assurer le développement de l’ensemble des entités détenues par M. [R], dont principalement ces dernières, sous l’autorité du gérant d’A.Com, M. [R], et/ou des responsables des sociétés Comefl et Com.acmd,

qu’à compter du 15 mai 2015, les sociétés A.Com et EGB d’Eu, filiales de la société holding Méridien, se sont entendues pour qu’il travaille à mi-temps pour leur compte, cette modification de son contrat de travail étant intervenue à l’initiative de M. [R], dans l’intérêt du groupe Méridien dans son ensemble,

que par la suite, pour des raisons stratégiques, il lui a été demandé de changer d’entité de rattachement et de travailler au profit de la société Méridien,

que c’est dans ces conditions qu’un contrat de travail a été régularisé le 20 juin 2016 dans la continuité des contrats conclus avec les sociétés A.Com et EGB d’Eu,

que le contrat prévoyait la poursuite des tâches au profit de la société EGB d’Eu et ses fonctions n’ont pas été modifiées du fait de cette nouvelle affectation, alors qu’il travaillait toujours sous la hiérarchie des filiales du groupe Méridien en vue de leur développement commercial.

L’employeur s’oppose à cette demande et soutient que l’ancienneté du salarié se fixe au 1er juillet 2016 soit à la date de son embauche au sein de la société Méridien,

que les sociétés A.Com et Méridien sont des entités distinctes sans lien juridique entre elles, que la société A.Com n’a jamais figuré au titre des filiales du groupe,

que le contrat de travail conclu avec la société A.Com produit par le salarié fait référence à une relation de client à prestataires de service, soit les sociétés Com.acmd et Comefl,

que le salarié ne peut non plus se prévaloir du contrat de travail avec la société EGB d’Eu quand bien même la société Méridien en assure la présidence, alors qu’elles constituent deux entités juridiquement distinctes l’une de l’autre,

qu’il importe peu que M. [R], directeur général de la société Méridien, ait par ailleurs occupé un mandat et/ou ait été associé au sein de ces sociétés,

que le salarié ne saurait donc revendiquer au sein de l’une des sociétés l’ancienneté acquise auprès de l’autre, en dehors d’une volonté expresse des parties.

Il résulte du dossier que les sociétés Com.acmd, Comefl et EGB d’Eu sont les sociétés filles de la société Méridien, qu’elles ont pour dirigeant M. [R], lequel est également directeur général et associé de la société Méridien, que la société A.Com, également dirigée par M. [R], ne figure pas, contrairement à ce qui est soutenu, au nombre des filiales de la société Méridien. Le fait que le salarié ait été employé par la société A.Com, laquelle fournissait des prestations aux sociétés filles (Com.acmd et Comefl), et qu’il ait travaillé également pour le compte de la troisième filiale, la société EGB d’Eu, dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel ne permet pas de dater la relation de travail à compter du 21 janvier 2013, alors que nonobstant la communauté de dirigeant ou les liens capitalistiques existant entre la société mère et les sociétés filles, elles n’en conservent pas moins leur personnalité propre.

En tout état de cause, il est constant que sauf dispositions conventionnelles ou contractuelles contraires ou situation de co-emploi, non alléguée en l’espèce, les contrats de travail successifs avec plusieurs sociétés du groupe ne permettent pas au salarié de se prévaloir de l’ancienneté acquise dans l’une de ces sociétés.

Les mêmes principes s’appliquent a fortiori s’agissant de sociétés ne faisant pas partie d’un groupe.

Le salarié ne peut donc prétendre revendiquer une ancienneté à compter du 21 janvier 2013, ni à compter du 12 mai 2015, alors qu’il n’est pas démontré une entente entre la société Méridien et les sociétés qui l’employaient pour des raisons de stratégie de groupe et qu’en réalité, c’est la même relation de travail qui se serait poursuivie.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

3 – Sur la demande de rappel de salaire au titre de la suspension du contrat de travail

Le salarié sollicite l’infirmation du jugement et la condamnation de la société au paiement de la somme de 715,41 euros à titre de rappel de salaire pour défaut de maintien dudit salaire pendant son arrêt maladie du 24 mars au 11 mai 2020, sans toutefois expliciter plus avant sa demande et préciser les modalités de calcul.

La société en réponse indique que le salarié a été absent 8 jours en mars, 21 jours en avril et 10 jours en mai, soit un total de 39 jours, qu’il a perçu, outre les indemnités journalières de la sécurité sociale, un maintien de salaire pour la période de maladie soit, 76,99 euros en mars 2020, 1 366,50 euros en avril 2020 et 455,50 euros en mai 2020.

Ces éléments chiffrés transmis par le cabinet d’expertise-comptable, n’ont pas été contestés par le salarié, qui sera débouté de sa demande, le jugement étant confirmé de ce chef.

4 – Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 3 juin 2020 est ainsi motivée :

« (…)

Vous êtes salarié de notre société depuis le 1er juillet 2016 en qualité de directeur de développement. Votre mission consiste, notamment, à assurer le développement Commercial du groupe et à suivre les affaires commerciales en cours.

Votre contrat de travail prévoyait ainsi, en son article 4, « La mission de M. [W] [D] sera de développer le chiffre d’affaires des sociétés Comefl, Com.acmd et EGB d’Eu, notamment en génie civil, tout corps d’état industriel, charpente et autres objets des sociétés du groupes (incluant EDF). M. [W] [D] assurera le suivi et la gestion de ses chantiers.

Votre contrat de travail faisait état d’un objectif de CA à hauteur de 965.000 euros HT. Parallèlement, des objectifs annuels étaient définis. Pourtant, je constate que les objectifs n’ont jamais été atteints depuis votre arrivée au sein de la société.

Ainsi pour un objectif de 985 Keuros, vous avez réalisez un CA HT de 400 Keuros (100 Keuros pour Comefl et 300 Keuros pour EGB d’Eu) en 2017, 0 Keuros en 2018, 212 Keuros en 2019 (153 Keuros pour Comefl et 59 Keuros pour Com.acmd) et 125 Keuros en 2020 (pour la société Comefl) au 31/05/2020.

Nous avons abordé ensemble à plusieurs reprises votre manque d’implication dans l’exercice de vos fonctions, qui vous empêchait d’atteindre vos objectifs. Des comptes rendus, entretiens notamment ont été organisés sans que cela ne fasse évoluer favorablement la réalité.

Au contraire, je constate que vous avez débuté une contestation systématique des consignes et observations qui vous étaient données. Malgré le temps qui vous a été laissé et notre accompagnement constant, il convient aujourd’hui de constater que les résultats ne sont toujours pas au rendez-vous.

Par ailleurs, j’ai appris que vous occupiez un mandat de gérance de la société ‘«Le Domaine de Whitley » depuis le mois de juillet 2019. En raison de votre absence à l’entretien préalable, je n’ai pas pu recueillir vos observations sur cela. Si ces fonctions sont rémunérées. je ne peux que vous rappeler l’article 7 de votre contrat « Exclusivité des services » ; et si elles ne le sont pas vous rappeler la loyauté qui repose sur charque partie au contrat et votre obligation de vous consacrer principalement aux missions pour lesquelles vous avez été embauché au sein de notre société. Vous auriez dû m’informer de ce mandat. Vous n’en avez rien fait, et je le regrette. (…)».

En application de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Pour que la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur soit justifiée ou fondée, et en tout cas non abusive, la cause du licenciement doit être réelle, doit concerner des faits objectifs, précis et matériellement vérifiables, dont l’existence ou la matérialité est établie et qui constituent la véritable raison du licenciement, mais également sérieuse, c’est-à-dire que les faits invoqués par l’employeur, ou les griefs articulés par celui-ci, doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige sur la cause du licenciement, ce qui interdit à l’employeur d’invoquer de nouveaux ou d’autres motifs ou griefs par rapport à ceux mentionnés dans la lettre de licenciement.

Sur les motifs du licenciement

Le salarié fait valoir que la lettre de licenciement ne précise pas le motif de la rupture du contrat de travail, la société se contentant de lister de prétendus griefs,

que cette dernière n’a pas cru bon de répondre à sa demande de précision des motifs.

Sur la motivation de la lettre de licenciement

L’employeur est tenu d’énoncer les motifs du licenciement dans la lettre le notifiant, l’absence de motif précis énoncé équivalant à une absence de motif.

Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et vérifiables, l’employeur est en droit, en cas de contestation, d’invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif, quand bien même elles ne figurent pas dans la lettre de licenciement.

Par ailleurs, en application des dispositions de l’article R.1232-13 du code du travail, dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.

L’employeur dispose d’un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

Dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement.

Il ne résulte pas des dispositions précitées que l’employeur soit tenu de répondre à une demande de précision du salarié, lequel en l’espèce n’en tire au demeurant aucune conséquence.

En tout état de cause, tels que libellés, les griefs visés dans la lettre de licenciement apparaissent suffisamment précis et matériellement vérifiables, en ce qu’il est invoqué une insuffisance de résultats, un manque d’implication et une violation de la clause d’exclusivité pour avoir occupé un mandat de gérance au sein de la société civile Le Domaine de Whitley.

Sur les caractères réel et sérieux des motifs

– l’insuffisance de résultats ‘ la non atteinte des objectifs

La société fait valoir que le salarié n’a jamais atteint les objectifs quantitatifs clairs et parfaitement réalisables qui lui étaient fixés, en dépit des mises en garde qui lui ont été adressées aux fins de redresser la situation, alors qu’il disposait de moyens propres à pouvoir les atteindre, ce en raison de son insuffisance professionnelle, de ses carences et d’un défaut d’implication,

qu’ainsi le chiffre d’affaires réalisé se fixait à 360.853 euros HT en 2017, 1 000 euros HT en 2018, 212.655 euros HT en 2019 et 125 000 euros HT au 31 mai 2020, pour un objectif annuel de 965 000 euros HT pour 2016 à 2019, puis de 1 000 000 euros HT en 2019 et 2020,

qu’il était en outre convenu lors de la réunion commerciale du 8 novembre 2018 que le salarié communique un rapport d’activité mensuel au directeur commercial de Com.acmd afin de faire état des devis et des visites qu’il avait initiés, ces comptes-rendus mensuels n’ont toutefois jamais été réalisés et transmis, le salarié s’inscrivant dans une attitude d’opposition constante à sa hiérarchie,

qu’il ne s’est par ailleurs jamais plaint d’une absence de mise à disposition de moyens lui permettant de mener à bien sa mission avant les alertes liées à son insuffisance de résultats,

qu’en signant son contrat de travail, le salarié a du reste reconnu avoir à sa disposition dès l’origine de la relation contractuelle l’ensemble de ses outils de travail,

que les documents produits (pièces 8-1 à 8-11) ne permettent pas de corroborer la thèse selon laquelle il n’aurait pas eu les moyens de mener à bien sa mission, pour n’avoir aucun lien avec l’absence d’outils de travail ou l’atteinte de meilleurs résultats, et les courriers dans lequel il dénonce le défaut de fourniture de moyens sont postérieurs aux alertes orales puis écrites (courriers du 7 mai 2019 et du 11 juin 2019) qui lui ont été adressées quant à l’insuffisance de ses résultats voir concomitante à l’engagement de la procédure de licenciement (courrier du 16 janvier 2020).

Elle produit :

– le compte-rendu de réunion du 8 novembre 2018, à laquelle le salarié a assisté, prévoyant une augmentation des objectifs de 965 000 euros HT à 1 million d’euros HT par an pour l’exercice clos en 2019,

– le courrier du 7 mai 2019, rappelant au salarié que ses objectifs pour la période 2017/2018 n’avaient pas été atteints et étaient inférieurs à 50 % de l’objectif sur chiffre d’affaires, le mettant en demeure de redresser la trajectoire avant fin août 2019 et lui rappelant l’interdiction de la vente à perte,

– le compte-rendu de la réunion commerciale du 11 décembre 2019, récapitulant comme suit le bilan du salarié, adressé par courriel du 16 janvier 2020 alors qu’il était en arrêt maladie :

« Objectif fixé d’un commun accord lors de la réunion commerciale du 8/11/2018 à 1 000 000 euros.

– Réalisé : marché PTI 153 355 euros, marge brute 11.595 euros soit 7,56%, Poste frontalier de [Localité 3] 59.300 euros, marge brute ‘ 5 700 euros soit -9.61%

– CA réalisé 212.655 euros très inférieur à l’objectif fixé. De plus la marge brute de 2,77% est très insuffisante pour assurer la pérennité de l’entreprise. »

Objectifs 2019-20 :

– L’objectif fixé pour l’exercice 2019-20 est de 1.000.000 euros (inchangé) de chiffre d’affaires (sachant que le nombre de devis passés en commande varie de 20 à 25%, il y a lieu de chiffrer à 4 ou 5.000.000 euros afin de tenir l’objectif. »

– le compte-rendu d’entretien individuel du 31 janvier 2020 au titre de 2019, mentionnant en commentaire « qu’il n’y a pas de problème relationnel mais aucun objectif n’est jamais atteint depuis 2016 », le compte rendu n’étant revêtu que de la signature du responsable hiérarchique, la société expliquant que le salarié a refusé de le signer.

Elle produit en outre à titre d’exemple les résultats chiffrés obtenus par des commerciaux, salariés de la société Com.acmd, à fin octobre 2019 ainsi que ceux de Mme [F], chargée d’affaires, qui a remplacé le salarié à compter du 1er mars 2021.

Le salarié fait valoir que qu’il ne s’est jamais vu fixer le moindre objectif annuellement et en fonction du développement de l’activité dans l’entreprise,

qu’aucun entretien d’évaluation annuel n’a été organisé, jusqu’au 4 février 2020 date à laquelle il lui a été communiqué le compte-rendu d’entretien du 31 janvier 2020 qu’il n’a ni complété ni signé, alors qu’il s’agissait d’un simulacre d’entretien destiné à lui reprocher une prétendue insuffisance professionnelle, et dont il a contesté les termes par courrier du 7 février 2020,

qu’il n’a pas été informé d’une augmentation des prétendus objectifs pour l’année 2019, le compte rendu de réunion du 8 novembre 2018, n’étant pas susceptible de valoir engagement contractuel, alors qu’il n’était au demeurant pas revêtu de sa signature,

que s’agissant des objectifs au titre de l’année 2020, ils ont été fixés en décembre 2019 et n’ont été portés à sa connaissance que le 16 janvier 2020,

qu’il a du reste été placé en arrêt de travail du 24 mars au 11 mai 2020, puis convoqué à un entretien préalable au licenciement le 12 mai 2020 et n’a donc travaillé que deux mois au cours de cette année,

qu’il ne lui a jamais été fait le moindre reproche concernant la non atteinte de ces objectifs avant 2019, soit pendant trois ans, par courrier du 7 mai 2019 et courriel du 16 janvier 2020 auxquels il a répondu de façon circonstanciée sans que l’employeur n’ait formulé aucune observation en réplique,

qu’au vu de sa situation, ainsi que de celle de l’entreprise, ces prétendus objectifs n’étaient ni réalistes, ni réalisables,

que contrairement aux stipulations contractuelles, la société n’a pas mis à sa disposition le matériel tel que prévu à l’article 6 de son contrat de travail et il n’a jamais réellement eu accès à la « base arrière » constituée des autres sociétés du groupe, ni été mis en mesure de bénéficier des services des sociétés Comefl et Com.acmd,

qu’il ne disposait pas des outils suffisants pour lui permettre d’exercer normalement ses fonctions, n’étant pas pourvu de moyens techniques, logistiques et financiers nécessaires au bon accomplissement de ses fonctions, ce qu’il a rappelé aux termes de divers échanges de correspondances entre mars 2018 et mars 2020, et en particulier dans deux courriers des 11 juin 2019 et 16 janvier 2020,

qu’une adresse courriel au nom du groupe Méridien ne lui a été fournie qu’à la fin de l’année 2018,

que du fait de la liquidation de la société EGB d’Eu, il n’a plus bénéficié de la qualification « génie civil », qui lui était utile alors qu’il était chargé de développer une offre globale de clos couvert, béton, charpente métallique, couverture, bardage, afin de permettre au groupe de se démarquer de la concurrence,

qu’il lui était confié des missions annexes l’empêchant de se consacrer à ses fonctions de directeur du développement, devant exercer des fonctions de conducteur de travaux sans lien avec son poste de directeur du développement.

Il conteste la valeur probante des éléments de comparaison produits par l’employeur, observant que les montants avancés par les salariés du panel ne correspondent pas à ceux mentionnés dans les états de suivi, les attestations de ces derniers ayant été manifestement établies pour les besoins de la cause,

que les résultats annoncés et présentés dans les conclusions de la société, comme ayant été atteints par les salariés en cause, ne sont nullement établis, aucune pièce ne venant justifier des résultats allégués,

que les états annuels de suivi produits ne concernent pas les mêmes périodes pour chacun des salariés, alors que ses résultats tiennent compte de la période de confinement et de la période pendant laquelle il a été placé en arrêt de travail, et qui se poursuit postérieurement à son licenciement,

que les résultats chiffrés retenus pour l’année 2019 ne concernent que la société Com.acmd, sans tenir compte de la société Comefl,

que s’agissant de Mme [F], elle a bénéficié des fruits de son travail, le chiffre d’affaires réalisé étant principalement la conséquence de son travail, ainsi que celui de M. [E], pour avoir tous deux respectivement participé à la préparation de trois contrats et d’un contrat, alors qu’il résulte des éléments produits que cette salariée n’a pas signé de contrats en dehors de ces quatre contrats.

Les objectifs déterminant la rémunération variable d’un salarié peuvent être fixés unilatéralement par la direction ou faire l’objet d’un accord entre les parties, soit que celles-ci aient négocié les objectifs dans leur totalité (assiette, nature, niveau), soit que les objectifs proposés par la direction aient été soumis à l’accord du salarié par signature.

Les objectifs doivent être réalisables, qu’ils soient déterminés unilatéralement par l’employeur ou d’un commun accord, par contrat ou avenant.

Il appartient à la juridiction de vérifier que les objectifs sont réalisables, atteignables, réalistes au vu des éléments fournis par l’une et l’autre des parties.

L’employeur doit rapporter la preuve du caractère réaliste des objectifs fixés.

Il sera par ailleurs rappelé que l’insuffisance de résultats ne peut constituer en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement, qu’il y a lieu de rechercher si le fait pour le salarié de ne pas avoir atteint ses objectifs alors qu’il bénéficiait des moyens nécessaires à leur accomplissement, relève d’une faute ou d’une insuffisance professionnelle, laquelle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due à une incompétence professionnelle ou une inadaptation à l’emploi, et qui constitue un motif réel et sérieux de licenciement, si elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.

L’article 4 du contrat de travail précise : « (‘) La mission de M. [W] [D] sera de développer le chiffre d’affaires des sociétés Comefl, Com.acmd et EGB d’Eu, notamment en génie-civil, tout corps d’état industriel, charpente et autres objets des sociétés du groupe (incluant EDF pour les zones). M. [W] [D] assurera le suivi et la gestion des chantiers.

Objectif : L’objectif de M. [W] [D] sera de réaliser un chiffre d’affaires annuel minimum de 965 000 euros HT. Si ce montant n’est pas atteint, la société Méridien pourra mettre un terme au présent contrat selon les conditions légales en vigueur.

Ce montant sera réévalué au fur et à mesure de l’évolution de la rémunération fixe de M. [D]. (‘)».

L’article 5 prévoit par ailleurs une rémunération forfaitaire brute mensuelle sur une base fixe, à hauteur de 5 000 euros par mois et une part variable annuelle si le chiffre d’affaires annuel dépasse 1.508.000 euros hors-taxes, outre une prime de 6 % maximum du résultat d’exploitation réalisée et une prime de 1 000 euros par tranche de 100.000 euros hors taxes négociés et signés par le salarié, plafonnée à 12.000 euros brut pour l’année.

Relativement aux frais engagés et aux outils de travail, l’article 6 du contrat de travail énonce « Les frais engagés lors de ses déplacements seront remboursés sur présentation de justificatifs originaux, dans la limite d’un plafond annuel de 10.000 euros (réévalué tous les ans de 1%) » et l’article 6 dispose : « pour que le salarié puisse effectuer sa mission, la société Méridien mettra à disposition de M. [W] les moyens suivants :

– Un véhicule de service à usage professionnel (véhicule à deux places) de type C4 (ou similaires),

– Un ordinateur et un téléphone portable,

de plus il disposera en base arrière de la structure des sociétés du groupe : Com.acmd, Comefl et EGB d’Eu pour la partie relevant des frais généraux (achats, visites sur site, secrétariat, aide administrative et chiffrage pour Com.acmd.)

Si le CA engendré justifiait ou rendait nécessaire l’embauche de personnel supplémentaire pour compléter les moyens requis par M. [W] [D], il serait alors décidé soit d’augmenter les moyens communs mis à disposition (dans augmenter le % de FG), soit d’attribuer les moyens spécifiques à M. [W] [D] (et donc relever le minimum de CA à réaliser). » ».

*Sur l’existence d’objectifs

Il résulte des pièces produites par l’employeur, contrairement à ce que soutient le salarié, que dans le cadre du développement commercial des sociétés Comefl, Com.acmd et EGB d’Eu, il lui était fixé un objectif global de 965 000 euros pour les exercices 2016, 2017 et 2018 puis d’1 million d’euros pour l’exercice 2019, reconduit en 2020, et que son salaire était susceptible d’être augmenté de la part variable en cas de dépassement à hauteur de 1 508 000 euros hors-taxes.

Le salarié ne saurait remettre en cause les termes de son contrat de travail, étant observé que les objectifs servant au calcul de la part variable du salaire peuvent être fixés unilatéralement par l’employeur, à la condition d’être réalistes et atteignables. Il était également avisé dès le 8 novembre 2018 de l’augmentation de cet objectif pour l’année 2019, alors qu’il ne peut être discuté qu’il était présent à la réunion qui s’est tenue à cette date. Il reconnaît du reste qu’il était astreint à la réalisation d’un objectif (courrier du 11 juin 2019) tout en précisant qu’il n’était pas tenu compte de la situation et de l’évolution du groupe Méridien et de la liquidation de la société EGB d’Eu en 2018. Cependant, il n’apparaît pas pertinent de lui reprocher de ne pas avoir respecté ses objectifs au titre de l’exercice arrêté à fin mai 2020, au regard du contexte de la crise sanitaire et de son arrêt maladie du 24 mars au 11 mai 2020, quand bien même, le chiffre d’affaires serait proratisé, les résultats ne pouvant être suffisamment significatifs.

*Sur le caractère réaliste des objectifs

Aux fins d’établir l’insuffisance de résultats, la société invoque la situation de salariés de la société Com.acmd et de la salariée embauchée après son licenciement, indiquant qu’ils ont obtenu de meilleurs résultats.

Chiffre d’affaires à fin octobre 2019

Carmaux (cellule commerciale du siège composé de deux technico-commerciaux et d’un directeur commercial), 9 341 114 euros,

M. [H] 1 205 804 euros,

M. [M] 3 701 976 euros,

M. [E] 1 293 167 euros,

M. [D] 59 300 euros,

Mme [F] chiffre d’affaires du 1er mars 2021 au 8 octobre 2021 : 860.000 euros HT

A la clôture du bilan, les résultats des intéressés s’établissaient comme suit, étant précisé que « [Localité 2] », avec le salarié avaient seuls la possibilité de démarcher le client EDF et que M. [H] officiait dans un tout autre secteur, soit la vente de pièces de chaudronnerie usinées dans les ateliers de la société.

– M. [H] : pour la période du 1er septembre 2018 au 31 août 2019

chiffre d’affaires facturé 1.210.334 euros, affaires terminées 1.122.924 euros, résultat 62.716 euros, prime 6 % de 62.716 euros = 3 763 euros

– M. [E] : pour la période du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019,

chiffre d’affaires facturé 1.917.961, affaires terminées 1.279.118, résultat 150.448,6 % de 150.448 = 9 027 euros

– M. [M] : pour la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020

chiffre d’affaires facturé 1.517.707, affaires terminée 3.595.111, résultat des affaires -372.752 absence de versement de prime,

– Mme [F] : affaires terminées arrêtées au 8 octobre 2021, près de 860.000 euros HT,

– M. [D] : pour la période du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020 chiffre d’affaires sur la période 212.654 euros soit 59.300 euros pour la société Com.acmd, 153.354 euros au sein de la société Comefl, total des affaires terminées 212 154 euros, résultat -33.696 euros.

Il n’est pas établi au vu des pièces et explications fournies par la société que le chiffre d’affaires réalisé par Mme [F] soit principalement la conséquence de sa seule prestation de travail, alors que le salarié justifie avoir participé avec M. [E], respectivement à la préparation de trois contrats et d’un contrat, et que cette salariée n’a signé aucun contrat en dehors de ceux-ci, et quand bien même, elle aurait finalisé les projets en cause, elle a nécessairement bénéficié du travail effectué en amont par ces derniers.

S’en tenant à la similarité des fonctions, en ce que tant les autres salariés cités en exemple par l’employeur que le salarié licencié, avait notamment pour mission de développer le chiffre d’affaires de la structure Com.acmd, en exceptant M. [H] dont l’activité est différente, et comparant les opérations réalisées au profit de la même société Com.acmd, à laquelle les premiers appartiennent et faisant partie du domaine d’intervention du second, éléments objectivement comparables, il ne peut qu’être observé que les salariés commerciaux ont réalisé un chiffre d’affaires – affaires terminées, nettement supérieur, ainsi que cela résulte des états annuels de suivi, ces résultats étant corroborés par le montant de la prime effectivement versée aux salariés.

Il importe peu que la période retenue ne soit pas identique, dès lors que l’objectif assigné au salarié n’aurait pu être atteint en tout état de cause, son chiffre d’affaires se fixant à 59.300 euros. Comparant cependant les résultats obtenus par MM. [E], du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019 et [M], 1er avril 2019 au 31 mars 2020, soit sur des périodes plus proches et moins longues que le salarié, le premier a réalisé un chiffre d’affaires de 1 279 118 et le second 3 595 111 euros, alors qu’aucun d’eux ne peut démarcher le client EDF de la société Com.acmd, de sorte qu’il conviendra d’admettre que les objectifs fixés étaient réalistes, alors que les discordances entre les montants annoncés aux états annuels de suivi et aux tableaux de production par salarié, ne sont qu’apparentes, les comptes étant respectivement arrêtés au 31 décembre 2019 et au 31 octobre 2019.

*Sur les moyens de la mission

Le salarié s’est plaint de la déloyauté de l’employeur, d’avoir été cantonné à des fonctions de conducteur de travaux sans commune mesure avec celles de directeur développement et Commerce région Nord et d’avoir été mis dans l’incapacité d’exercer ses fonctions.

Il produit son courrier du 11 juin 2019, dans lequel il indique qu’en ce qui concerne ses objectifs, il n’a jamais été mis en capacité d’atteindre ceux initialement arrêtés en raison des missions qui lui ont été affectées et de la charge de travail subséquente sur les différentes entités du groupe et par courrier du 16 janvier 2020, il ajoute, sans être contredit avoir dû poursuivre des missions secondaires et inhérentes au bon fonctionnement de plusieurs entités du groupe, dont la société EGB d’Eu et a accepté la gérance non rémunérée de la société Appoint-Com. Il produit en outre divers échanges de courriels.

Il est établi que le salarié était tenu d’assurer le suivi et la gestion de nombreux chantiers (27 chantiers pour EGB d’Eu, 25 chantiers pour Comefl/Com.acmd, 17 chantiers pour Comefl (marché hors cadre PTI)), alors qu’il lui incombait de suivre ses seuls chantiers en cours, que du reste, la société reconnaît qu’il n’a pas exercé ses fonctions telles que prévues à son contrat de travail, ains que cela résulte du compte-rendu du comité de direction du 17 novembre 2017 qui relève : « [W] [D] est réputé reprendre ses fonctions de responsable du développement de Méridien à partir du 1er Décembre 2017. ».

Sans qu’il soit démontré que le salarié était volontairement écarté de la gestion de clients existants de la société Méridien, ainsi que soutenu, à l’analyse des pièces produites, il apparaît qu’il était à tout le moins entravé dans l’exercice de ses actions, l’employeur refusant de déplacer 3 personnes sur une rencontre santé et sécurité dans le domaine nucléaire avec le client EDF alors qu’il s’agissait d’un client très important (courriel du 21 février 2019) et qu’il estimait cette réunion nécessaire au regard des enjeux sécuritaires, qu’il avait les plus grandes difficultés à joindre ses supérieurs hiérarchiques pour obtenir des réponses sur les dossiers en cours, en dépit de ses relances adressées par courriel ou par téléphone, et notamment concernant des clients prospects (courriels courant avril 2018 au directeur commercial, M. [B] « je n’arrive pas à te joindre, j’ai laissé plusieurs messages ‘sans succès » (‘)), pâtissant d’un manque de réactivité de l’employeur, qu’il s’est vu supprimer l’accès au portail d’achat du client EDF (courriel du 13 juin 2019), la société se contentant d’affirmer que cette suppression a été temporaire et était liée à une manipulation du gestionnaire du portail, qu’il n’a pu obtenir de cartes de visite au nom de la société Méridien qu’à la fin de l’année 2018, l’édition desdites cartes ayant par suite été bloquée par M. [Z] [P], Président du groupe Méridien, en juin 2019 (courriel du 3 juin 2019), qu’il ne disposait d’une autorisation d’engager la société Comefl que dans la limite de 50.000 euros du 19 octobre 2018 au 31 décembre 2020.

Il est par ailleurs établi qu’aucun moyen logistique n’était mobilisé pour lui permettre d’exercer pleinement ses fonctions,

qu’il ne disposait ni du véhicule de fonction, ni d’un ordinateur et d’un téléphone portables, comme prévu au contrat de travail, ceux-ci, ainsi qu’un bureau pour travailler, lui ayant été fournis par les sociétés EGB d’Eu, puis Appoint-Com après la liquidation judiciaire de la société EGB d’Eu le 11 juillet 2018, ce jusqu’en mars 2020, date à laquelle il a été mis fin à son mandat de gérant de la société Appoint.Com,

qu’une adresse courriel au nom du groupe Méridien ne lui a été fournie qu’à la fin de l’année 2018 et la société consentait, après plusieurs relances de sa part, à lui envoyer par la poste ses outils de travail, matériel qui s’avérait toutefois obsolète et en mauvais état, le 12 mai 2020, jour de l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement (courriel de relance du 13 avril 2020, rappelant le courriel du 21 mars 2020 resté sans réponse, indiquant que la société Appoint-Com lui a précisé qu’elle ne prendrait plus en charge l’ensemble de ses frais (voiture téléphone ordinateur Internet bureau secrétaire etc.).

Compte tenu de ce qui précède, le grief tiré de l’insuffisance de résultats n’apparaît pas suffisamment caractérisé. Il ne peut donc être reproché au salarié un manque d’implication, qui au demeurant n’est pas établi au regard des pièces du dossier.

– Sur le mandat de gérance au sein de la société civile de construction vente « Le domaine de Whitley » (la SCCV)

La société fait valoir que le salarié a fait preuve de déloyauté alors qu’il détenait un mandat social au sein de la SCCV « Le domaine de Whitley », en violation l’article 7 de son contrat de travail.

Elle explique que le salarié est cogérant de cette société avec M. [R], ancien associé de la société Méridien, qui avait été créée en vue d’acquérir l’intégralité des titres des sociétés Comefl et Com.acmd auprès de l’actionnaire historique (M. [R]), lequel devait progressivement se retirer au profit des associés de la société Méridien, que la situation s’est toutefois dégradée en raison de désaccords entre les associés, ayant entraîné la nomination d’un administrateur le 11 décembre 2018,

que la SCCV a vu son capital social augmenter de plus de 1.400.000 euros suite au rachat des parts détenues par M. [R] par la société Méridien,

que le salarié, cogérant, a trouvé un avantage indirect à ce conflit entre associés et à cette prise de cogérance,

qu’en outre, l’arrivée du salarié au sein de la SCCV coïncide avec la réclamation de sommes à la société Méridien de la part de M. [X] [U], architecte dirigeant d’une société A4 Architecte, ancien gérant de la SCCV, sans aucun contrat, bon de commande ou facture à l’appui,

que la violation par le salarié de son obligation de loyauté est caractérisée.

En défense, le salarié fait valoir qu’il n’a exercé aucune fonction au sein de la SCCV, qui n’est pas une société concurrente, et ne percevait aucune rémunération comme attesté par l’ancien expert-comptable de la société,

qu’il n’a accepté la gérance que dans le but de rendre service à M. [R], pour des raisons logistiques après la démission du précédent gérant,

qu’il ne lui a été demandé aucune prestation particulière en dehors de la réception des plis et des colis à l’attention de la société et la récupération de ses dossiers et archives,

qu’aucune obligation d’exclusivité ne saurait interdire toute activité professionnelle complémentaire, ce mandat social ne l’ayant pas empêché d’exercer pleinement ses fonctions, l’employeur n’ayant subi aucun préjudice du fait de ce mandat,

qu’il avait d’ailleurs accepté en 2018 qu’il exerce des missions complémentaires pour la société Appoint.Com,

qu’il n’est pas responsable des dissensions entre associés et c’est de façon gratuite que la société affirme qu’il y aurait trouvé un avantage indirect,

que l’augmentation de capital de la SCCV est intervenue le 25 juin 2015, soit près de 4 ans avant la prise de gérance et la société Méridien était informée de la demande de la société A4 Architectes au moins depuis le mois d’octobre 2018.

En l’espèce, aux termes de l’article 7 de son contrat de travail, il était prévu que le salarié devait réserver l’exclusivité de ses services rémunérés au groupe Méridien pendant toute la durée du contrat de travail et s’interdire, en particulier, de travailler pour le compte d’un autre employeur, même si ce dernier n’est pas susceptible de faire concurrence aux sociétés du groupe. Il lui était en outre interdit de se livrer, pendant la durée du (‘) contrat, à un quelconque acte de concurrence directe ou indirecte au détriment des sociétés du groupe. »

Il est constant que la clause par laquelle le salarié s’engage à consacrer l’exclusivité de son activité à son employeur porte atteinte à la liberté du travail et qu’elle n’est valable que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et si elle est justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché. Il conviendra d’admettre que ladite clause a été édictée dans le but de préserver les intérêts de la société Holding, était justifiée au regard des fonctions assumées par le salarié et proportionnée au but recherché.

L’interdiction de se livrer, pendant la relation contractuelle, à un quelconque acte de concurrence directe ou indirecte au détriment des sociétés du groupe est également légitime en ce qu’elle est la traduction de l’obligation de loyauté à l’égard de l’employeur, laquelle s’impose même en l’absence de stipulation spécifique du contrat de travail.

Il n’est pas discuté que le salarié est titulaire d’un mandat social au sein de la SCCV « Le domaine de Whitley » depuis le 22 mars 2019. Il est en outre établi qu’il ne percevait aucune rémunération, ni du fait de cette activité de gérance, ni au titre d’une fonction qu’il aurait occupée au sein de cette société et il ne résulte pas des éléments du dossier qu’il a accepté la gérance de la SCCV en vue d’en tirer un quelconque avantage direct ou indirect, alors que l’augmentation de son capital consécutive au rachat des actions de M. [R] dans la société Méridien était bien antérieure à sa nomination, que les dissensions entre les associés de la société Méridien sont apparues pour des raisons qui leur sont propres, étant précisé que si un administrateur a été nommé, c’est essentiellement en raison des difficultés financières du groupe, toute opération liée au capital des sociétés ayant été interdites, qu’il n’est démontré aucune man’uvre ayant déterminé le client M. [X] [U], dirigeant de la société A4 Architecte, a réclamé des sommes qu’il estimait lui être dues, peu important sa qualité d’ancien gérant de la SCCV.

En tout état de cause, il n’apparaît pas que le salarié n’a pas respecté l’obligation de réserver ses services rémunérés au groupe Méridien, ainsi qu’exigé par l’article 7 précité, et le seul fait de détenir un mandat de gérance, au demeurant sans aucune contrepartie, est insusceptible de caractériser un acte de concurrence directe ou indirecte au détriment de la société Méridien.

Il peut à tout le moins être reproché au salarié de ne pas avoir informé son employeur de cette prise de gérance, peu important l’absence d’implication financière. Ce seul manquement n’est toutefois pas de nature à justifier le prononcé d’un licenciement.

Le licenciement est dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans qu’il y ait à statuer sur la véritable cause de la rupture du contrat de travail.

Sur les conséquences financières

En application de l’article L 1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux.

Au moment de la rupture de son contrat de travail, le salarié comptait 3 années d’ancienneté et la société employait habituellement moins de onze salariés.

En application de l’article L.1235-3 du code du travail précité, le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure à 1 mois, ni supérieure à 4 mois.

En raison de l’âge du salarié, comme étant né en 1969, de son ancienneté dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi, les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice matériel et moral qu’il a subi en lui allouant la somme de 15.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

5 – Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Le salarié rappelle les dispositions de l’article L.1222-1 du code du travail, énonçant que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Il indique qu’il percevait une rémunération à hauteur de 6 500 euros, qu’il a accepté de réduire à hauteur de 5 000 euros lorsqu’il a pris ses fonctions de directeur du développement au sein du groupe, somme à laquelle devait s’ajouter une « part variable annuelle »,

qu’il n’a jamais été mis en mesure d’atteindre un quelconque objectif et ainsi percevoir la «part variable annuelle »,

qu’il a subi un préjudice en termes de rémunération perdue qu’il évalue au différentiel calculé mensuellement sur l’ensemble de la période travaillée,

que la déloyauté de l’employeur dans le versement du salaire ne saurait être contestée et devra être réparée,

qu’il n’a pas disposé des moyens nécessaires et performants dans le cadre de l’exécution de ses missions commerciales,

qu’il a effectué des missions connexes et des tâches subalternes sans lien avec son poste et mis à l’écart des clients récurrents de l’entreprise, avec une réduction de son périmètre géographique,

qu’il a dû effectuer des changements de lieu de travail réguliers et par conséquent des changements de domicile,

que la société n’hésitait pas à le solliciter afin qu’il continue son activité professionnelle au cours de son arrêt maladie,

qu’elle a également déclaré volée la carte Total qui était mise à sa disposition le mettant dans une situation embarrassante lorsqu’il s’est présenté à une pompe à essence,

que lors de la procédure de sauvegarde de la société, il lui a été demandé d’antidater le procès-verbal de désignation du représentant des salariés alors que les démarches obligatoires n’avaient pas été effectuées dans les délais impartis et le Président du groupe, M. [P], n’a pas hésité à modifier les bilans de la société EGB d’Eu pour en tirer profit à titre personnel.

L’employeur s’oppose à cette demande considérant que les manquements en cause ne sont pas caractérisés.

Il indique en réplique que le contrat de travail signé avec la société Méridien a force obligatoire entre les parties, le salarié ne pouvant prétendre à un différentiel de salaire, alors en outre que son précédent contrat avait été régularisé avec une autre société,

que ses choix de domicile qui lui sont personnels ne peuvent entrer en ligne de compte,

que s’agissant du procès-verbal de désignation du représentant des salariés pour la procédure collective, n’est caractérisée aucune intention de nuire, et en tout état de cause le procès-verbal porte la date de sa rédaction, soit le 19 décembre 2018, de sorte que le grief allégué est sans objet.

Outre les observations formulées par l’employeur, il apparaît à l’examen des courriels produits par le salarié pour justifier qu’il était l’objet de sollicitations durant son arrêt maladie, qu’il avait été relancé par un ingénieur Spie Batignolles et qu’il s’est de lui-même rapproché de Mme [C] [S], de la société Comefl, aux fins de l’interroger sur la suite à donner, qu’il ne verse au dossier aucun autre élément à l’appui de son affirmation. Par ailleurs, le dysfonctionnement de la carte de carburant, qui n’est pas démontré selon l’employeur, ne saurait constituer un manquement à l’exécution loyale du contrat de travail.

Les griefs subsistants tenant au défaut de moyens aux fins d’accomplir la mission confiée, à la fourniture tardive de matériel, de plus obsolète et à l’accomplissement de tâches sans lien avec le poste de travail sont caractérisés et justifient l’octroi de dommages-intérêts à hauteur de 5 000 euros, le jugement étant infirmé sur ce point.

6 – Sur les autres demandes

6-1-Sur les dommages-intérêts pour préjudice distinct

Le salarié fait valoir qu’il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement à son retour d’arrêt de travail, que les démarches en vue de le licencier ont été engagées dès qu’il n’a plus bénéficié de la protection en sa qualité de représentant des salariés,

que la société a maintenu la date et le lieu de l’entretien, alors qu’il avait suggéré qu’il ait lieu dans les locaux de Comefl à Eu, de sorte qu’il n’a pu se présenter en raison de son éloignement géographique et de sa santé fragile,

que la rupture du contrat de travail lui a causé un préjudice moral considérable compte tenu de son implication depuis son entrée au sein de l’entreprise.

Le salarié peut réclamer la réparation d’un préjudice particulier lié au caractère abusif et vexatoire de la procédure. Il lui appartient d’établir à cet égard un comportement fautif de l’employeur.

Il ne résulte pas des pièces versées aux débats des éléments établissant des circonstances particulières de mise en ‘uvre de la procédure de licenciement de manière brutale ou vexatoire, alors que les dispositions légales ont été respectées et que la société justifie qu’elle avait pris en charge l’ensemble des frais engendrés par le déplacement pour que le salarié puisse assister à l’entretien.

La demande d’indemnité présentée à ce titre ne peut par conséquent être accueillie, le jugement étant confirmé de ce chef.

6-2 -Sur les intérêts

Les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris à hauteur des sommes confirmées et du présent arrêt pour le surplus.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

7 – Sur les frais du procès

En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la société sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu’il a débouté M. [W] [D] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne la SAS Méridien à payer à M. [W] [D] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail,

Y ajoutant,

Dit que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris à hauteur des sommes confirmées et du présent arrêt pour le surplus,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

Condamne la SAS Méridien aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne la SAS Méridien à payer à M. [W] [D] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

La greffière La présidente

 

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