Face à un impayé et une injonction de payer infructueuse, il est légal de publier un avis en ligne contre le débiteur rédigé comme suit : « quand comptez vous payer vos dettes ? »
Cet avis n’est constitutif ni de concurrence déloyale ni de parasitisme. La concurrence déloyale et le parasitisme consacrent des fautes susceptibles, dans les conditions fixées par l’article 1240 du Code civil, d’engager la responsabilité civile de leur auteur. Ils supposent la démonstration d’une faute et d’un préjudice en lien de causalité direct avec celle-ci. La faute en matière de concurrence déloyale s’apprécie au regard du principe général de libre concurrence qui est un principe fondamental des rapports commerciaux. Elle implique que tout commerçant a la possibilité d’attirer à lui la clientèle de ses concurrents sans que ceux-ci puissent le lui reprocher, de vendre des produits similaires à ceux d’un concurrent ou même identiques en l’absence de droit privatif dans la mesure où tout produit qui n’est pas l’objet d’un droit privatif est en principe dans le domaine public, et de vendre des produits similaires ou identiques de qualité moindre à un prix inférieur. Ainsi, même si la reprise procure à celui qui la pratique des économies, elle ne saurait à elle seule être tenue pour fautive sauf à vider de toute substance le principe de liberté ci-dessus rappelé. Il appartient donc au commerçant qui se plaint d’une concurrence déloyale de démontrer le caractère déloyal des méthodes développées par son concurrent. Il en va de même du parasitisme qui suppose de démontrer l’existence d’actes de captation indue des efforts et investissements du concurrent. Enfin et surtout, le demandeur doit démontrer l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle. |
→ Résumé de l’affaireRésumé des faits de l’affaire
Contexte : Procédure initiale : Jugement de première instance (18 mars 2022) : Appel : Demandes des parties en appel : Ordonnance de clôture : |
→ Les points essentielsRenvoi aux conclusions écrites des partiesEn application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux conclusions écrites des parties pour un exposé exhaustif de leurs prétentions et moyens. Jugement non critiqué sur plusieurs pointsLa cour constate que le jugement n’est pas critiqué sur plusieurs points, notamment la nullité de certaines marques et le rejet des demandes de contrefaçon de la société Officine [K] AG. Le jugement est confirmé sur ces points. Rejet de la demande de communication de documentsLa cour rejette la demande de communication de documents avant dire droit, estimant que l’examen de cette demande nécessite d’abord de statuer sur l’existence des actes de parasitisme. Rejet de la mise hors de cause de M. [M]La cour rejette la demande de mise hors de cause de M. [M], constatant qu’il est le titulaire du modèle dont la nullité est demandée, et complète le jugement sur ce point. Irrecevabilité des demandes de parasitisme de la société Officine [K]La cour déclare irrecevables les demandes de parasitisme formulées pour la première fois en appel par la société Officine [K], estimant qu’elles ne tendent pas aux mêmes fins que les demandes initiales de contrefaçon. Absence de parasitisme par la société TISMLa cour rejette les accusations de parasitisme formulées par les sociétés Officine [K] et Cartier contre la société TISM, estimant que les montres Augarde ne captent pas indûment la valeur économique de la montre Radiomir. Nullité du modèle français déposé par M. [M]La cour déclare nul le modèle français n°20200427 déposé par M. [M], estimant qu’il ne présente pas un caractère propre et procure une impression visuelle d’ensemble similaire à la montre Radiomir. Comportement fautif des appelantes envers la société TISMLa cour confirme que les appelantes ont agi de manière fautive en demandant la fermeture du compte Instagram de la société TISM et la suppression de publications Facebook, causant un préjudice à cette dernière. Condamnation aux dépens et frais irrépétiblesLes sociétés Officine [K] AG et Cartier sont condamnées aux dépens d’appel et doivent verser des indemnités à la société TISM et à M. [G] [M] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les montants alloués dans cette affaire:
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→ Réglementation applicable– Article 1240 du Code civil
– Article L442-6 du Code de commerce Article 1240 du Code civil: Article L442-6 du Code de commerce: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
– Me Vincent FAUCHOUX de la SELARL DEPREZ, GUIGNOT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0221 – Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050 – Me Maryne GUYOT de G SMART AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R241 – Me Alexandra MIRABELLI de G SMART AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R241 – Me Marie-Hélène FABIANI de G SMART AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R241 |
→ Mots clefs associés & définitions– Article 455 du code de procédure civile
– Conclusions écrites des parties – Jugement non critiqué – Nullité de la marque semi-figurative française – Nullité de la marque figurative de l’Union européenne – Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle – Contrefaçon de marques – Parasitisme – Communication de documents – Origine des montres Augarde – Fournisseurs et production – Recevabilité des demandes au titre du parasitisme – Concurrence déloyale et parasitaire – Articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile – Notoriété de la montre Radiomir – Concurrence parasitaire – Valeur économique individualisée – Investissements et promotion – Sillage économique – Preuve de parasitisme – Liberté du commerce et de l’industrie – Dommages et intérêts – Réparation du préjudice – Article 1240 du code civil – Article 700 du code de procédure civile – Dépens d’appel – Frais non compris dans les dépens – Article 455 du code de procédure civile: disposition légale concernant les frais non compris dans les dépens
– Conclusions écrites des parties: arguments finaux présentés par les parties lors d’une procédure judiciaire – Jugement non critiqué: décision de justice qui n’a pas été contestée en appel – Nullité de la marque semi-figurative française: annulation de l’enregistrement d’une marque semi-figurative en France – Nullité de la marque figurative de l’Union européenne: annulation de l’enregistrement d’une marque figurative dans l’Union européenne – Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle: organisme chargé de la gestion des marques et des brevets au niveau de l’Union européenne – Contrefaçon de marques: violation des droits de propriété intellectuelle liés à une marque – Parasitisme: pratique commerciale consistant à profiter indûment de la notoriété d’une autre entreprise – Communication de documents: transmission de pièces justificatives ou de preuves lors d’une procédure judiciaire – Origine des montres Augarde: provenance des montres de la marque Augarde – Fournisseurs et production: partenaires fournissant les matières premières et processus de fabrication des produits – Mise hors de cause de M. [M]: exonération de responsabilité de la part de M. [M] dans une affaire judiciaire – Titulaire du modèle n°20200427: personne ou entreprise détenant les droits sur un modèle spécifique – Recevabilité des demandes au titre du parasitisme: possibilité de faire valoir des demandes juridiques basées sur des pratiques parasitaires – Concurrence déloyale et parasitaire: pratiques commerciales contraires à l’éthique et parasitaires – Articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile: dispositions légales concernant les dépens et les frais judiciaires – Notoriété de la montre Radiomir: renommée de la montre Radiomir sur le marché – Concurrence parasitaire: concurrence déloyale basée sur l’imitation des produits ou services d’une autre entreprise – Valeur économique individualisée: estimation monétaire spécifique à un produit ou service – Investissements et promotion: dépenses et actions de communication visant à promouvoir un produit ou service – Sillage économique: impact économique généré par une entreprise ou un produit sur son environnement – Preuve de parasitisme: éléments de preuve démontrant une pratique parasitaire – Liberté du commerce et de l’industrie: principe juridique garantissant la liberté d’exercer une activité commerciale ou industrielle – Dommages et intérêts: réparation financière accordée à une partie lésée – Réparation du préjudice: compensation du dommage subi par une partie – Article 1240 du code civil: disposition légale concernant la responsabilité civile – Article 700 du code de procédure civile: article régissant l’attribution des frais de justice – Dépens d’appel: frais engagés lors d’une procédure en appel – Frais non compris dans les dépens: frais supplémentaires non inclus dans les dépens judiciaires. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Marseille
RG n° 23/01044
DE MARSEILLE
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT N° 24/ DU 04 Juin 2024
Enrôlement : N° RG 23/01044 – N° Portalis DBW3-W-B7G-2VKA
AFFAIRE : S.A.S. PROGRESS9 (Me Emmanuel DOCTEUR)
C/ Société OPC INVEST et autres
DÉBATS : A l’audience Publique du 02 Avril 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette, Greffier
Vu le rapport fait à l’audience
A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 04 Juin 2024
Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DU JUGEMENT
réputée contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDERESSE
Société PROGRESS9
SAS immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 798 181 699, dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Emmanuel DOCTEUR, avocat postulant au barreau de MARSEILLE et par Maître Marie BRISWALDER de la société d’avocats AKLEA, avocat plaidant au barreau de LYON
C O N T R E
DEFENDERESSES
Société OPC INVEST
SAS immatriculée au RCS de TARASCON sous le n° 877 608 604, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
défaillante
Société ONE PLACE CORPORATE
société de droit suisse immatriculée sous le n° 890 609 266, dont le siège social est sis [Adresse 5] / SUISSE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
défaillante
L’OFFICE CANTONAL DES FAILLITES, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société ONE PLACE CORPORATE
dont le siège social est sis [Adresse 4] / SUISSE, pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
défaillant
La société PROGRESS9 a créé et commercialise depuis novembre 2014 sous le nom commercial « Expérience Hôtel » un logiciel CRM (ou GRC « Gestion de la Relation Client ») dénommé « Expérience » afin de permettre à ses clients (hôtels et groupes hôteliers) de faciliter la gestion de leur relation clients, et l’analyse de leur réputation en ligne.
Pour les besoins de son activité, la société PROGRESS9 a déposé la marque française verbale « Expérience Hôtel » n°4147963 le 13 janvier 2015, désignant les services suivants : « gestion des affaires commerciales ; relations publiques » ; « élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; conception de systèmes informatiques ; logiciel-service (SaaS) ; stockage électronique de données » et « services hôteliers » en classes 35, 42 et 43.
Au cours du printemps 2019, la société ONE PLACE CORPORATE, par le biais d’OPC INVEST, a contacté PROGRESS9 afin de lui proposer une éventuelle intervention au « Digital Tourisme Meeting 2019 » organisé par elle le 9 juin 2019 à [Localité 3]. Après divers échanges la société PROGRESS9 a fait connaître le 17 mai 2019 son intention de ne pas y participer.
Le 25 juin 2021, ONE PLACE a adressé une invitation à PROGRESS9 concernant le « Digital Tourism Meeting n°3 – 2021 » aux termes de laquelle il était à nouveau indiqué que « Expérience Hôtel – Progress9 » serait présente.
Le 5 août 2021 la société OPC INVEST a fait signifier à la société PROGRESS9 une ordonnance d’injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce de Paris. La société PROGRESS9 a formé opposition à cette ordonnance le 23 août 2021.
Le 9 février 2022 la société ONE PLACE CORPORATE a fait signifier à la société PROGRESS9 une nouvelle ordonnance d’injonction de payer rendue par le président du tribunal de commerce de Paris.
Par acte d’huissier des 26 et 28 novembre 2022 et 13 septembre 2023 la société PROGRESS9 a fait assigner les sociétés OPC INVEST et ONE PLACE CORPORATE, en présence de l’Office cantonal des faillites, ès qualité de liquidateur de la société ONE PLACE CORPORATE.
Les instances ont été jointes par ordonnance du 16 janvier 2024.
Aux termes de son exploit introductif d’instance, la société PROGRESS9 demande au tribunal de faire interdiction aux sociétés OPC INVEST et ONE PLACE CORPORATE de commettre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, de condamner lesdites sociétés à lui payer la somme de 350.000 € de dommages et intérêts en réparation des actes de dénigrement, parasitisme et désorganisation d’entreprise, outre 20.000 € au titre de la contrefaçon de la marque verbale « Expérience Hôtels » et 20.000 € au titre du préjudice moral résultant de ces actes de contrefaçon.
La société PROGRESS9 demande encore que soit interdit aux sociétés défenderesses d’utiliser et reproduire la marque « Expérience Hôtel » de quelque manière que ce soit, ou tout signe identique ou similaire pour une activité identique et/ou similaire à celle de PROGRESS9 ou pour en faire la publicité ; qu’il leur soit enjoint de supprimer tout propos dénigrant à son encontre, de cesser tout comportement délictueux à son encontre, et qu’il leur soit interdit de communiquer avec son personnel, le tout sous astreinte. Elle demande également la publication du jugement et la condamnation des sociétés OPC INVEST et ONE PLACE CORPORATE à lui payer la somme de 7.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes la société PROGRESS9 fait valoir que « One Place » s’est livrée à une campagne de dénigrement par la publication de propos qu’elle qualifie de mensongers et malveillants sur la page d’avis Google la concernant, sur sa page LinkedIn, en envoyant à des membres de son personnel plusieurs dizaines de courriels, lettres et messages téléphoniques, et d’avoir répandu ainsi des informations malveillantes sur la société, dans le but de contraindre celle-ci à lui verser des sommes d’argent, de nuire à sa réputation en laissant entendre qu’elle ne paie pas ses dettes.
La société PROGRESS9 reproche encore à « One Place » des agissements parasitaires par l’utilisation de la dénomination « Expérience Hôtel » sur ses communications dans le but d’attirer une clientèle à l’occasion de ses différents salons afin de réaliser des bénéfices plus importants et d’inciter d’autres opérateurs économiques à s’inscrire aux évènements qu’elle organisait, évitant ainsi des investissements et faisant l’économie d’autres stratégies de communication.
Sur la contrefaçon de marque la société PROGRESS9 fait valoir que les sociétés OPC INVEST et ONE PLACE CORPORATE ont utilisé sans autorisation la marque verbale « Expérience Hôtel » lors des salons « Digital Tourisme Meeting 2019 » et « Digital Tourism Meeting n°3 – 2021 », notamment en l’apposant sur les supports de communication.
La société OPV INVEST, assignée selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, la société ONE PLACE CORPORATE et l’Office Cantonal des Faillites, ès qualités, assignés selon les modalités prévues par la convention de La Haye du 15 novembre 1965, n’ont pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024.
La concurrence déloyale et le parasitisme consacrent des fautes susceptibles, dans les conditions fixées par l’article 1240 du Code civil, d’engager la responsabilité civile de leur auteur.
Ils supposent la démonstration d’une faute et d’un préjudice en lien de causalité direct avec celle-ci.
La faute en matière de concurrence déloyale s’apprécie au regard du principe général de libre concurrence qui est un principe fondamental des rapports commerciaux. Elle implique que tout commerçant a la possibilité d’attirer à lui la clientèle de ses concurrents sans que ceux-ci puissent le lui reprocher, de vendre des produits similaires à ceux d’un concurrent ou même identiques en l’absence de droit privatif dans la mesure où tout produit qui n’est pas l’objet d’un droit privatif est en principe dans le domaine public, et de vendre des produits similaires ou identiques de qualité moindre à un prix inférieur. Ainsi, même si la reprise procure à celui qui la pratique des économies, elle ne saurait à elle seule être tenue pour fautive sauf à vider de toute substance le principe de liberté ci-dessus rappelé.
Il appartient donc au commerçant qui se plaint d’une concurrence déloyale de démontrer le caractère déloyal des méthodes développées par son concurrent.
Il en va de même du parasitisme qui suppose de démontrer l’existence d’actes de captation indue des efforts et investissements du concurrent.
Enfin et surtout, le demandeur doit démontrer l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle.
La société PROGRESS9 reproche en premier lieu à « One Place » de s’être livrée à une campagne de dénigrement à son encontre.
Elle produit à l’appui de cette affirmation une photocopie d’une capture d’écran, non datée, d’une page « Experience Hotel, CRM hôtelier » nom commercial de la société PROGRESS9, accompagné d’un avis émis par « One Place » consistant en une question : « quand comptez vous assumer vos dettes ? ». Cette question n’apparaît en soi ni désobligeante ni dénigrante.
Un deuxième avis « en injonction de payer dans nos comptes validée par le tribunal de commerce. Est-digne de confiance ? » a été émise par un compte « [R]ADV » qu’il n’est pas possible de rattacher aux défenderesses.
Le troisième commentaire émis par « One Place » commençant par les termes : « nous avons une assignation en justice à vous adresser à titre personnel…. » est extrait d’une page dont la capture d’écran ne porte aucun titre. Il n’est donc pas établi qu’il a été effectivement adressé à la société PROGRESS9.
En outre la société PROGRESS9 indique elle-même avoir fait l’objet de deux ordonnances d’injonction de payer du tribunal de commerce de Paris signifiées les 5 août 2021 et 9 février 2022. Elle produit l’acte d’opposition à la première mais non à la seconde. Elle ne produit pas non plus les décisions constatant la caducité de ces ordonnances, de sorte que le tribunal ne peut vérifier ses affirmations sur ce point.
Il s’ensuit que l’inexactitude des commentaires dénoncés comme dénigrants n’est pas démontrée.
Les courriels adressés à des employés de la société PROGRESS9 les 26 août, 6, 7 et 27 septembre, 8 octobre 2021, certes rédigés en termes acrimonieux, ne font que faire état de poursuites judiciaires, en particulier les injonctions de payer ci-dessus rappelées, et d’une procédure devant les juridictions suisses.
Il n’est donc pas non plus démontré qu’ils fassent état de faits inexacts.
Les copies de SMS produites aux débats ne comportent pour leur part aucun élément permettant d’identifier leur destinataire.
Enfin la copie d’un courriel adressé par la société ALGOJUSTICE relative à un recouvrement de créance ne contient aucun élément permettant d’affirmer qu’il a été envoyé à l’initiative de l’une des défenderesses. Ce message est par ailleurs rédigé en termes courtois et n’est pas de nature à jeter le discrédit sur la société PROGRESS9.
Il n’est en tout état de cause pas démontré en quoi ces messages auraient perturbé le bon fonctionnement de la société PROGRESS9, provoqué un surcroît de travail ou le départ de certains salariés. Il n’est pas non plus démontré que la société Progress 9 aurait subi une perte de crédit auprès de ses clients ou que l’un de ceux-ci se serait détourné d’elle de ce fait.
Il ne résulte donc pas des éléments produits aux débats que les sociétés OPC INVEST et ONE PLACE CORPORATE se sont livrées à des actes de dénigrement de la société PROGRESS9.
La société PROGRESS9 reproche encore aux défenderesses un usage de la marque « Expérience Hôtel », tant au titre des faits de parasitisme que de contrefaçon.
L’action en concurrence déloyale peut être exercée cumulativement avec l’action en contrefaçon. Mais, si ces deux actions peuvent être mises en œuvre et accueillies en même temps, ce ne peut être qu’après avoir constaté que les conditions d’exercice, par hypothèses distinctes, de chacune de ces actions sont réunies. En particulier, il est nécessaire que chaque action repose sur des faits distincts.
Le cumul n’est possible, par exemple, que si aux faits de contrefaçon spécialement condamnés par la loi viennent s’ajouter d’autres faits dont le caractère abusif ou excessif résulte des principes généraux du droit ou des usages fondés sur des règles de la probité commerciale.
Une condamnation pour concurrence déloyale ne saurait être prononcée, dès lors que les faits relevés ne caractérisent pas une faute constitutive d’une telle concurrence, distincte de la participation à des faits de contrefaçon également retenue dans l’instance.
La société PROGRESS9 ayant déposé le 13 janvier 2015 auprès de l’INPI la marque verbale française « Expérience Hôtel » en classes 35, 42 et 43, n°4147963, il convient en premier lieu d’examiner les demandes faites au titre de la contrefaçon.
Il résulte d’un courriel envoyé le 1er juin 2020 à un salarié de la société PROGRESS9 par la société ONE PLACE CORPORATE que cette dernière a organisé le 23 juin 2020 un événement intitulé « Digital tourisme meeting». Parmi les participants à cet événement était mentionnée « Expérience Hôtel » au milieu d’une liste de plusieurs dizaines de noms ou marques commerciales.
L’utilisation de la marque « Expérience Hôtel » pour les meetings organisés en 2019 et 2021, seuls visés dans l’assignation au titre de la contrefaçon, n’est pas démontrée par la production des pièces produites aux débats. En effet l’invitation au meeting de 2019 ne porte aucune référence à « Expérience Hôtel » et aucune pièce n’est produite relativement au meeting de 2021.
Les faits d’usage non autorisé de la marque « Expérience Hôtel » en 2019 et 2021 ne sont donc pas démontrés et ne pourront donc donner lieu à aucune sanction ou réparation au titre de la contrefaçon ou du parasitisme.
Aucun fait distinct n’est allégué au soutien des demandes présentées au titre du parasitisme, qui seront également rejetées.
Il s’ensuit que la société PROGRESS9 sera déboutée de l’ensemble de ses demandes.
Succombant à l’instance, elle en supportera les dépens.
Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort :
Déboute la SAS PROGRESS9 de ses demandes ;
Condamne la SAS PROGRESS9 aux dépens.
AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE QUATRE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,