L’affaire concerne une infirmière libérale, Mme [C] [E], qui a été notifiée d’un indu de 3 188,25 euros par la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère. Suite à des observations formulées par Mme [E], la caisse a décidé de ne pas mettre en œuvre des pénalités financières mais a prononcé un avertissement à son encontre. Mme [E] a contesté cette décision devant le tribunal judiciaire de Quimper, qui a rejeté son recours. Elle a interjeté appel de ce jugement, demandant l’annulation de la procédure de contrôle d’activité, de la décision d’avertissement, ainsi que des dommages et intérêts. La caisse a demandé à la cour de confirmer le jugement du tribunal et de rejeter les demandes de Mme [E].
Motifs de la décision sur la régularité de la procédure de contrôle
La contestation de la régularité de la procédure de contrôle par Mme [E] est rejetée car elle n’a pas saisi la commission de recours amiable sur le bien-fondé ou la régularité de la procédure de contrôle dans les délais impartis.
Motifs de la décision sur la régularité de la procédure d’avertissement
La contestation de la régularité de la procédure d’avertissement par Mme [E] est également rejetée car elle a été informée des faits reprochés, a pu présenter ses observations écrites, et le directeur n’était pas obligé de répondre à sa demande d’entretien.
Motifs de la décision sur le bien-fondé de l’avertissement
La décision d’avertissement notifiée à Mme [E] est jugée fondée car les faits reprochés sont établis, la sanction est proportionnée et adaptée aux infractions commises, et aucune fraude n’a été alléguée.
Frais irrépétibles et dépens
Les frais irrépétibles ne sont pas accordés à la caisse, et les dépens de la procédure sont laissés à la charge de Mme [E] qui succombe à l’instance.
1. Il est important de respecter les délais de contestation et de recours prévus par la loi, notamment en cas de notification d’indu ou d’avertissement. Ne pas contester dans les délais impartis peut entraîner une irrecevabilité de la contestation ultérieure.
2. Il est essentiel de bien comprendre les différentes procédures en matière de recouvrement d’indu et de sanctions financières, et de les contester de manière distincte. Chaque procédure obéit à des règles spécifiques, et il est nécessaire de les respecter pour faire valoir ses droits.
3. En cas de contestation d’une décision administrative, il est primordial de vérifier la motivation de la décision et de s’assurer qu’elle est suffisante. Une décision motivée de manière adéquate permet de comprendre les faits reprochés et les raisons de la sanction, et facilite la contestation éventuelle devant les instances compétentes.
Sur la régularité de la procédure de contrôle
Mme [E] conteste la régularité de la procédure de contrôle ayant conduit à la décision de lui infliger un avertissement. Elle soulève des irrégularités telles que le non-respect du contradictoire, l’absence de communication des résultats du contrôle avant l’engagement de la procédure, et le non-respect des prescriptions de la CNIL. Cependant, elle n’a pas saisi la commission de recours amiable sur le bien-fondé ou la régularité de la procédure de contrôle, ce qui la rend irrecevable à contester la régularité du contrôle dans le cadre de l’instance sur la contestation de l’avertissement.
Sur la régularité de la procédure d’avertissement
Mme [E] conteste également la régularité de la procédure d’avertissement, arguant que la caisse ne lui a pas permis de présenter utilement ses observations de manière contradictoire. Cependant, la caisse soutient que Mme [E] a eu l’opportunité de s’expliquer sur les faits reprochés et que la décision d’avertissement a été motivée de manière adéquate. La notification de l’avertissement a été faite conformément aux dispositions légales, et Mme [E] a eu la possibilité de contester cette décision devant le tribunal.
Sur le bien-fondé de l’avertissement
La caisse justifie le bien-fondé de l’avertissement en se basant sur les anomalies constatées dans la facturation des majorations de nuit par Mme [E]. Ces anomalies ont été reconnues par Mme [E] elle-même dans ses observations. La décision d’avertissement a été considérée comme proportionnée aux fautes commises et adaptée aux griefs. Aucune fraude n’a été alléguée, et la sanction mesurée a été jugée appropriée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Enfin, la cour décide de ne pas accorder de frais irrépétibles à la caisse, et les dépens de la procédure sont laissés à la charge de Mme [E] qui succombe à l’instance. Elle ne peut donc prétendre à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Réglementation applicable
– Code de la sécurité sociale
– Code de la santé publique
– Code rural et de la pêche maritime
– Code de l’action sociale et des familles
– Code des relations entre le public et l’administration
– Code de procédure civile
Avocats
– Me Thibaud VIDAL de la SELEURL VIDAL AVOCATS
– Me Achour TAIBI
– Mme [G] [J]
Mots clefs
Définitions juridiques
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
9ème Ch Sécurité Sociale
ARRÊT N°
N° RG 20/03788 – N° Portalis DBVL-V-B7E-Q23V
Mme [C] [E]
C/
CPAM DU FINISTERE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 21 FEVRIER 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre
Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère
Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT lors des débats et Mme Adeline TIREL lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 13 Décembre 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 21 Février 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 29 Juin 2020
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Pole social du TJ de QUIMPER
Références : 19/00674
****
APPELANTE :
Madame [C] [E]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Thibaud VIDAL de la SELEURL VIDAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Achour TAIBI, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Mme [G] [J], en vertu d’un pouvoir spécial
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite d’un contrôle administratif de l’activité de Mme [C] [E], infirmière libérale, sur la période de décembre 2016 à décembre 2018, la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère (la caisse) lui a notifié le 20 mars 2019 un indu d’un montant total de 3 188,25 euros. Mme [E] n’a pas contesté cet indu.
Par lettre du 1er juillet 2019, le directeur de la caisse lui a notifié la mise en oeuvre d’une procédure de pénalités financières pour fraude d’un montant de 1 594,12 euros, précisant qu’elle disposait d’un délai d’un mois pour présenter ses observations.
Par courrier du 19 août 2019, à la suite d’observations formulées par Mme [E], le directeur de la caisse lui a notifié sa décision de ne pas mettre en oeuvre la procédure de pénalités financières mais a prononcé à son encontre un avertissement.
Le 17 octobre 2019, elle a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Quimper aux fins de voir annuler cet avertissement, lequel, par jugement du 29 juin 2020, a :
– fait droit à l’exception d’irrecevabilité soulevée in limine litis par la caisse ;
– dit le recours de Mme [E] sur ce fondement irrecevable ;
– débouté Mme [E] de son recours ;
– rejeté la demande de Mme [E] au titre des frais irrépétibles ;
– condamné Mme [E] aux dépens de l’instance.
Par déclaration adressée par fax le 28 juillet 2020, Mme [E] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 4 juillet 2020.
Par courrier recommandé posté le 28 juillet 2020 reçu à la cour le 30 juillet 2020, elle a formalisé une seconde déclaration d’appel.
Les deux dossiers ont fait l’objet d’une jonction le 2 septembre 2020.
Par ses écritures déposées à l’audience le 13 décembre 2023, auxquelles s’est référé et qu’a développées son conseil, Mme [E] demande à la cour, au visa de la Constitution, des articles 9 et 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 6 et 7 de la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 28 janvier 1981, 1353 du code civil, L.114-10, L.114-17-1, L.200-2, L.211-1, L.224-7, L.243-7, L.243-9, L.133-4 et L.315-1, R.133-9-1, R.147-2, R.315-1-1, R.315-1-2, R.611-64, D.253-6 et D.315-2 du code de la sécurité sociale, L.162-1-14 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au 21 décembre 2015, 25 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, L.121-1, L.122-1, L. 221-2, L.211-5 et L.211-8 du code des relations entre le public et l’administration, R.4127-102 du code de la santé publique, de la nomenclature générale des actes professionnels, des arrêtés des 23 avril 2017, 5 mai 2014 et 30 juillet 2004, des délibérations n°88-31 du 22 mars 1998, n°89-177 du 24 octobre 1989 et n°96-002 du 16 janvier 1996 de la CNIL et de la circulaire du 11 avril 1996 de la CNAMTS DGR n°36/96, de :
– réformer le jugement de première instance ;
– juger que la procédure de contrôle d’activité est irrégulière ;
– juger que la procédure de pénalité financière est irrégulière ;
– juger que la décision portant avertissement est insuffisamment motivée et entachée d’incompétence ;
– juger que la décision portant avertissement n’est pas fondée ;
En conséquence,
– annuler la procédure de contrôle d’activité ;
– annuler la décision portant avertissement ;
– condamner la caisse à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;
– rejeter les demandes et prétentions de la caisse.
Par ses écritures additionnelles et récapitulatives parvenues au greffe le 15 novembre 2022, auxquelles s’est référé et qu’a développées sa représentante à l’audience, la caisse demande à la cour, au visa des articles L.114-17-1, R.147-2 et R147-8 du code de la sécurité sociale ainsi que de leur application jurisprudentielle, de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal en date du 29 juin 2020 ;
– constater, à titre liminaire, que Mme [E] n’a pas contesté le bien-fondé de l’indu qui lui a été notifié le 20 mars 2019 préalablement à l’avertissement, qu’elle a d’ailleurs intégralement remboursé ;
– dire que la procédure des pénalités financières a été parfaitement régulière et contradictoire à l’égard de Mme [E], qui a été en mesure de formuler ses observations pendant toute la procédure ;
– dire que la notification d’avertissement est régulière en la forme et suffisamment motivée en droit pour satisfaire aux exigences des articles L.114-17-1 et R.147-2 du code de la sécurité sociale ;
– dire que Mme [E] n’apporte aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé du prononcé de l’avertissement notifié le 19 août 2019;
– confirmer le bien-fondé du prononcé de l’avertissement notifié à Mme [E] le 19 août 2019 ;
– rejeter sa demande de condamnation de la caisse au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– déclarer Mme [E] mal fondée dans ses prétentions pour la débouter de son recours.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la régularité de la procédure de contrôle
Mme [E] soutient que l’absence de contestation de la notification d’indu dans les délais ne fait pas obstacle, dans le cadre de la procédure distincte en contestation d’un avertissement, à la contestation du bien fondé des griefs et de la régularité de la procédure de contrôle.
Elle fait valoir dans ces conditions que la décision lui infligeant un avertissement a été prise à l’issue d’une procédure de contrôle irrégulière dès lors :
– qu’elle se fonde sur des anomalies relevées au cours d’une procédure non contradictoire ; qu’elle n’a en effet jamais eu communication des résultats du contrôle avant l’engagement de la procédure, n’a donc pas été à même de présenter des observations et de solliciter un entretien ; que la caisse a ainsi manqué au principe du contradictoire et aux droits de la défense ;
– qu’il n’est pas justifié de ce que les agents ayant mené le contrôle étaient agréés et assermentés conformément à l’article L. 114-10 du code de la sécurité sociale ;
– que la caisse n’a pas respecté les prescriptions des délibérations de la CNIL n° 88-31 du 22 mars 1988 et n° 89-117 du 24 octobre 1989 ; qu’il n’est pas en effet établi que la caisse a procédé à l’enregistrement des critères et raisonnements sur lesquels le contrôle était fondé ni que les agents étaient habilités à accéder et utiliser le système SIAM, ni même encore que le comité paritaire local a été informé de la motivation de la requête SIAM, de sa mise en route et de ses résultats.
Sur ce :
La procédure de recouvrement d’indu, visée à l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale et celle tendant à l’application d’une pénalité financière prévue à l’article L. 114-17-1 du même code sont en effet deux procédures distinctes, chacune obéissant à des règles qui lui sont propres y compris pour les contester.
Si Mme [E] souhaitait contester la procédure de contrôle s’inscrivant dans le cadre de l’action en recouvrement ayant conduit à la notification de l’indu, il lui appartenait d’exercer le recours visé à l’article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale auprès de la commission de recours amiable.
Force est toutefois de constater, comme la caisse le relève à juste titre, que Mme [E] n’a pas saisi la commission de recours amiable sur le bien-fondé ou la régularité de la procédure de contrôle alors même que la notification d’indu du 20 mars 2019 précisait expressément la possibilité de contester l’indu par lettre adressée à la commission de recours amiable, dont l’adresse était précisée, dans les deux mois suivant la réception de la notification ; cette notification lui indiquait également qu’elle pouvait dans le même délai, présenter ses observations écrites au directeur de la caisse et qu’à défaut de règlement dans le délai imparti ou de contestation, la somme réclamée sera récupérée sur les prestations à venir.
Comme observé par les premiers juges, cette notification distingue clairement :
– d’une part, les modalités de contestation de l’indu devant la commission de recours amiable,
– d’autre part l’information sur le fait que le comportement de l’intéressée relève de l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale qui permet au directeur de prononcer une éventuelle pénalité financière en sus du remboursement de l’indu, avec, dans ce cas une seconde notification mentionnant la suite contentieuse envisagée.
Parfaitement informée des voies et délais de recours s’agissant du recouvrement de l’indu et n’ayant pas élevé de contestations devant la commission de recours amiable sur le montant de l’indu, sur la régularité de la procédure de contrôle et sur le contenu du courrier de notification du 20 mars 2019, Mme [E] est irrecevable à contester la régularité du contrôle dans le cadre de l’instance sur la contestation de l’avertissement.
Sur la régularité de la procédure d’avertissement
Mme [E] soutient que la caisse ne l’a pas mise en mesure de pouvoir présenter utilement ses observations dans un cadre véritablement contradictoire, une fois informée par le courrier du 1er juillet 2019 de la mise en oeuvre de la procédure de pénalité financière, alors qu’après avoir adressé ses observations par écrit, elle avait sollicité un entretien le 1er août 2019 en application de l’article R. 147-2 du code de la sécurité sociale sans obtenir de réponse à cette demande autre que la notification de l’avertissement du 19 août 2019 ; qu’il y a eu violation du principe du contradictoire et des droits de la défense.
Elle ajoute qu’en vertu de l’article R.147-2 du code de la sécurité sociale, la caisse devait lui notifier l’avertissement avant le 15 août 2019 et que le non-respect de ce délai implique donc un abandon des poursuites.
Elle reproche également à la caisse, au visa de l’article R. 147-2 du code précité, de ne pas avoir informé la commission des pénalités financières de la notification de l’avertissement.
La caisse réplique que Mme [E] ne peut invoquer une quelconque violation du contradictoire et des droits de la défense dès lors qu’elle a, tout au long de la procédure, été en mesure de s’expliquer sur les faits reprochés dont elle avait parfaitement connaissance, notamment dans sa lettre du 26 juillet 2019, et qu’elle a pu saisir le tribunal puis la cour pour contester l’avertissement.
La caisse ajoute que Mme [E] est mal fondée à se prévaloir de l’absence d’entretien dès lors que, tenant compte de ses observations écrites, le directeur n’a pas donné suite à la procédure de pénalité financière et a opté pour un simple avertissement ; qu’en tout état de cause, l’article R. 147-2 prévoit le choix entre des observations écrites et un entretien, sans imposer ce dernier.
Elle indique par ailleurs que la notification du 19 août 2019 mentionne clairement l’information faite simultanément à la commission des pénalités, laquelle au surplus n’avait pas à être saisie.
Sur ce :
L’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose :
»I.-Peuvent faire l’objet d’une pénalité prononcée par le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, de la caisse mentionnée à l’article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles :
(…)
3° Les professionnels et établissements de santé, ou toute autre personne physique ou morale autorisée à dispenser des soins, à réaliser une prestation de service ou des analyses de biologie médicale ou à délivrer des produits ou dispositifs médicaux aux bénéficiaires mentionnés au 1° ;
II.-La pénalité mentionnée au I est due pour :
1° Toute inobservation des règles du présent code, du code de la santé publique, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l’action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d’une prestation en nature ou en espèces par l’organisme local d’assurance maladie, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée;
(…)
IV.-Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, de la caisse mentionnée à l’article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles notifie les faits reprochés à la personne physique ou morale en cause afin qu’elle puisse présenter ses observations dans un délai fixé par voie réglementaire. A l’expiration de ce délai, le directeur :
1° Décide de ne pas poursuivre la procédure ;
2° Notifie à l’intéressé un avertissement ;
3° Ou saisit la commission mentionnée au V. A réception de l’avis de la commission, le directeur :
a) Soit décide de ne pas poursuivre la procédure ;
b) Soit notifie à l’intéressé un avertissement ;
c) Soit notifie à l’intéressé la pénalité qu’il décide de lui infliger (…)’.
L’article R. 147-2 du même code dispose :
‘I.-Lorsqu’il a connaissance de faits susceptibles de faire l’objet de la pénalité financière mentionnée à l’article L. 114-17-1, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l’engagement de la procédure mentionnée à l’article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu’à l’issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu’elle dispose d’un délai d’un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.
(…)
A l’issue du délai d’un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l’expiration de ce délai, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :
1° Soit décider d’abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe ladite personne dans les meilleurs délais ;
2° Soit, dans un délai de quinze jours, prononcer un avertissement, sauf si les faits relèvent des cas prévus aux 3° et 4° du II de l’article L. 114-17-1. L’avertissement précise les voies et délais de recours. Il en informe simultanément la commission prévue à l’article L. 114-17-1
3° Soit, dans un délai de quinze jours, saisir la commission mentionnée au V de l’article L. 114-17-1 et lui communiquer les griefs et, s’ils existent, les observations écrites de la personne en cause ou le procès-verbal de l’audition. Il en informe simultanément cette personne et lui indique qu’elle aura la possibilité, si elle le souhaite, d’être entendue par la commission.
(…)’.
Comme indiqué ci-dessus, Mme [E] s’est vu, par lettre du 20 mars 2019 réceptionnée le 23 mars, notifier un indu de 3 188,25 euros ainsi que le fait que son comportement relevait de l’article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, pouvant entraîner le prononcé d’une pénalité financière en sus du préjudice subi.
Le 1er juillet 2019, la direction de la caisse lui a adressé la lettre suivante, portant comme objet ‘notification des faits reprochés susceptibles de faire l’objet d’une pénalité financière en application des articles L. 114-17-1 et R. 147-2 du code de la sécurité sociale’ :
‘Madame,
Dans le cadre de ses missions de contrôle, la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère a procédé à une analyse administrative de votre activité portant sur la facturation des majorations pour la période de décembre 2016 à décembre 2018. Après étude, il est constaté que pour 3 assurés, vous avez facturé des majorations de nuit non prescrites. Ces anomalies ont engendré pour mon organisme un préjudice financier de 3 188,25 euros, soldé à ce jour, notifié le 20 mars 2019.
Je vous informe que votre comportement constitue une des irrégularités inscrites à l’article R. 147-8 du code de la sécurité sociale (CSS). En conséquence, les constats opérés par la caisse me conduisent à engager à votre encontre la procédure des pénalités financières prévue à l’article L. 114-17-1 du CSS.
Conformément aux dispositions de l’article R. 147-8 du CSS, le montant maximum de la pénalité financière encourue que vous pourriez devoir régler peut atteindre 50% des sommes indûment versées soit 1 594,12 euros (3 188,25€/2).
En vertu des dispositions de l’article R. 147-2 du CSS, vous pouvez, dans le mois suivant la réception de ce courrier, présenter vos observations.
Je vous invite à m’apporter les précisions utiles sur les faits notifiés et sur votre situation afin que je puisse décider, de façon éclairée, de poursuivre ou non la procédure.
A l’issue du délai d’un mois ou après votre audition, je pourrais :
-soit abandonner la procédure. Vous serez alors informée de cette décision dans les meilleurs délais,
– soit, dans un délai de 15 jours, prononcer un avertissement,
– soit, dans un délai de 15 jours, saisir la commission mentionnée à l’article L. 114-17-1 du CSS pour qu’elle puisse donner son avis sur le prononcé d’une éventuelle pénalité financière. Dans cette hypothèse, vous serez informée de cette saisine et de votre possibilité de présenter vos observations devant cette commission.
Vous trouverez en pièces jointes les textes régissant la procédure des pénalités financières.
Je vous prie (…)’.
Par lettre datée du 26 juillet réceptionnée par la caisse le 1er août 2019, Mme [E] a présenté ses observations par écrit sur les dossiers de cinq patients en contestant toute fraude, ajoutant:
‘il est vrai que nous ne sommes pas très attentives ni suffisamment rigoureuses dans les tâches administratives liées à notre profession. Cette facette de notre travail en libéral est trop lourde pour nous. Face au refus de dérogations d’installation d’une collaboratrice au sein de notre cabinet, nous devons faire face à une bureaucratie importante que nous effectuons sans enthousiasme. Ceci peut parfois entraîner des erreurs dans la saisie des prescriptions médicales.
Nous restons à votre disposition pour de plus amples informations.
Bien cordialement.’
Par lettre du 19 août 2019 réceptionnée le 20 août, Mme [R], directrice adjointe de la caisse, pour le compte du directeur M. [V], a informé Mme [E] qu’au vu des éléments du dossier et des observations qu’elle avait formulées, il a été décidé de ne pas appliquer de sanction financière et de prononcer à son encontre un avertissement, la rédactrice ajoutant en informer simultanément la commission et procéder au classement du dossier. Il y était enfin précisé que Mme [E] disposait d’un délai de deux mois à compter de la réception du courrier pour contester cette décision devant le tribunal de grande instance de Quimper dont l’adresse était mentionnée.
C’est en vain que Mme [E] se prévaut d’une violation du principe du contradictoire et des droits de la défense dès lors :
– qu’elle a été parfaitement informée des faits reprochés par la lettre du 1er juillet 2019 (‘Après étude, il est constaté que pour 3 assurés, vous avez facturé des majorations de nuit non prescrites. Ces anomalies ont engendré pour mon organisme un préjudice financier de 3 188,25 euros, soldé à ce jour, notifié le 20 mars 2019″);
– qu’elle a été informée de la possibilité de présenter ses observations dans le délai d’un mois, ce qu’elle a fait par sa lettre du 26 juillet 2019 en les détaillant par dossier ;
– que si son conseil a effectivement sollicité un entretien par lettre du 1er août 2019 reçue par la caisse le 5 août, le directeur n’avait cependant aucune obligation de faire droit à cette demande, ayant reçu les observations écrites circonstanciées de Mme [E] qu’il pouvait estimer suffisantes ;
-que la lettre du 19 août 2019 mentionne que la commission est simultanément informée de l’avertissement ; qu’à supposer que cette information n’ait pas été effective, il n’est pas établi que la procédure de sanction en serait pour autant entachée d’irrégularité justifiant l’annulation de l’avertissement.
Les premiers juges rappellent par ailleurs à juste titre que Mme [E] a pu avoir accès aux éléments en possession de la caisse et répondre à ses conclusions pendant la phase judiciaire.
Outre que l’article R. 147-2 du code de la sécurité sociale ne prévoit aucune sanction pour le défaut de respect du délai de 15 jours offert au directeur de la caisse pour prendre sa décision, la cour constate que le texte applicable ne prévoit pas que la notification de cette décision soit réceptionnée dans le délai de 15 jours. Au surplus, cet article prévoit une notification de l’abandon des poursuites dans les meilleurs délais, ce qui induit nécessairement que la décision d’abandon ne peut se présumer du seul fait que la notification de la décision ne serait pas intervenue dans le délai de 15 jours.
En tout état de cause, en application des règles de computation des délais de procédure, prévues aux articles 640 et suivants du code de procédure civile, le délai de 15 jours n’a commencé à courir que le lendemain de l’expiration du délai d’un mois laissé à Mme [E] pour faire valoir ses observations, soit le 2 août 2019. Lorsque le délai est exprimé en jour, le premier ne compte pas, si bien que la fin du délai expirait le 17 août qui est un samedi. Le directeur avait donc bien jusqu’au premier jour ouvrable suivant, soit le 19 août 2019, pour prendre sa décision.
Le moyen de nullité sera dans ces conditions écarté.
Sur la régularité de la décision d’avertissement
– sur l’absence de délégation de signature
Mme [E] fait valoir que l’avertissement qui lui a été notifié est irrégulier en ce que la décision n’a pas été signée par le directeur de la caisse mais par une personne ne justifiant d’aucune délégation de signature régulière et publiée.
L’article R. 122-3 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose :
‘(…) Il [le directeur] peut déléguer, sous sa responsabilité, une partie de ses pouvoirs à certains agents de l’organisme. Il peut donner mandat à des agents de l’organisme en vue d’assurer la représentation de celui-ci en justice et dans les actes de la vie civile.
En cas de vacance d’emploi, d’absence momentanée ou d’empêchement du directeur, ses fonctions sont exercées par le directeur adjoint. En cas d’absence ou d’empêchement du directeur ou du directeur adjoint ou à défaut de directeur adjoint, les fonctions de directeur sont exercées par un agent de l’organisme désigné dans les conditions prévues au 7° de l’article R. 121-1. (…)’.
L’article D. 253-7 alinéa 1er du même code confirme que ‘conformément aux dispositions de l’article R. 122-3, en cas de vacance d’emploi, d’absence momentanée ou d’empêchement du directeur, ses fonctions sont exercées par le directeur adjoint (…)’.
Il résulte de ces dispositions que le directeur adjoint d’une caisse qui exerce les fonctions de directeur de celle-ci en cas de vacance d’emploi, d’absence momentanée ou d’empêchement du titulaire, a à ce titre délégation pour exercer l’ensemble des pouvoirs propres et délégués de celui-ci, la preuve de cette absence ou de cet empêchement résultant de l’intervention même du directeur adjoint. ( 2e Civ. 19 septembre 2013, n° 12-23.344 ; 4 mai 2017, n° 16-16.777)
Le directeur adjoint n’a donc pas à justifier d’une délégation de pouvoir ou de signature.
La décision du 19 août 2019 notifiant l’avertissement à Mme [E] signée par Mme [R] en sa qualité non contestée de directrice adjointe de la caisse pour le compte de M. [V] directeur ne souffre donc d’aucune irrégularité tirée de l’absence de délégation de signature.
– sur l’insuffisance de motivation
Au visa de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration, Mme [E] soutient que la décision du 19 août 2019 prononçant une sanction est irrégulière en ce qu’elle ne comporte pas une motivation suffisante ; qu’il n’y est fait état d’aucune considération de droit ou de fait, les griefs étant énoncés de manière imprécise, les dispositions législatives ou réglementaires applicables n’étant pas citées et la liste des actes litigieux n’étant pas fournie ; qu’il n’y est pas non plus fait référence à la notification d’indu, ne serait-ce que pour s’en approprier les motifs, étant observé que ladite notification est elle-même insuffisamment motivée.
La caisse réplique que l’avertissement, qui intervient à l’issue de la procédure d’indu parfaitement motivée, est lui-même motivé puisque la lettre du 19 août 2019 rappelle les faits reprochés, le montant du préjudice subi et notifié le 20 mars 2019, les étapes de la procédure, la phase d’observations, la décision ainsi que les voies et délais de recours ; que Mme [E] encore une fois était parfaitement informée des faits reprochés et a pu présenter ses observations le 26 juillet 2019.
Sur ce :
La lettre de notification de l’avertissement du 19 août 2019 a informé Mme [E] :
– que le 1er juillet 2019, elle lui avait notifié son intention d’engager une procédure de pénalité financière en raison d’irrégularités commises à son préjudice ;
– que dans le cadre de ses missions de contrôle, la caisse avait en effet procédé à une analyse administrative de son activité portant sur la facturations des majorations pour la période de décembre 2016 à décembre 2018 ; qu’après étude, il avait été constaté que pour trois assurés, elle avait facturé des majorations de nuit non prescrites, ces anomalies engendrant un préjudice financier pour l’organisme de 3 188,25 euros, soldé à ce jour, notifié le 20 mars 2019 ;
– que Mme [E] a fait des observations le 26 juillet 2019 comme la possibilité lui en avait été appelée ;
– qu’au vu des éléments du dossier et des observations qu’elle avait formulées, il a été décidé de ne pas appliquer de sanction financière et de prononcer à son encontre un avertissement, la rédactrice ajoutant en informer simultanément la commission et procéder au classement du dossier;
– qu’elle disposait d’un délai de deux mois à compter de la réception du courrier pour contester cette décision devant le tribunal de grande instance de Quimper dont l’adresse était mentionnée.
La caisse ne remet pas en cause l’application au cas d’espèce de l’article L.211-2 du code des relations entre le public et l’administration imposant une motivation pour les décisions administratives individuelles infligeant une sanction.
Force est de constater que la lettre du 19 août 2019 répond à cette exigence de motivation en ce qu’elle :
– rappelle les circonstances ayant donné lieu au constat d’anomalies qu’elle énonce et à la notification du 20 mars 2019 précisant le préjudice subi par l’organisme,
– indique tenir compte des observations présentées par Mme [E] dans sa lettre du 26 juillet 2019 pour écarter l’application d’une pénalité financière au profit d’un simple avertissement.
La notification rappelle enfin les voies et délais de recours.
Ce moyen sera ainsi également écarté.
Sur le bien-fondé de l’avertissement
Selon l’article R. 147-8 du code de la sécurité sociale :
‘Peuvent faire l’objet d’une pénalité les professionnels de santé libéraux, fournisseurs et prestataires de services, laboratoires de biologie médicale et praticiens statutaires à temps plein des établissements publics de santé dans le cadre de leur activité libérale :
1° Ayant obtenu ou tenté d’obtenir, pour eux-mêmes ou pour un tiers, le versement d’une somme ou le bénéfice d’un avantage injustifié en ayant :
a) Présenté ou permis de présenter au remboursement des actes ou prestations non réalisés ou des produits ou matériels non délivrés ;
b) Procédé au détournement de l’usage d’une des cartes mentionnées à l’article L. 161-31 et L. 161-33 ;
2° N’ayant pas respecté les conditions de prise en charge des actes produits ou prestations soumis au remboursement dans les cas suivants :
a) Non-respect des conditions de prise en charge ou prescription prévues lors de l’inscription au remboursement par l’assurance maladie des actes, produits ou prestations mentionnés aux articles L. 162-1-7, L. 162-17 et L. 165-1, ou des conditions prévues à l’article L. 322-5, y compris les règles prises pour l’application du deuxième alinéa de l’article L. 315-2, ou encore les non-respects des conditions de prescriptions spécifiques prévues aux articles L. 4141-2, L. 4151-4, L. 4321-1, L. 4311-1 et L. 4362-10 du code de la santé publique ;(…)’.
Il appartient au juge saisi d’un recours formé contre la pénalité prononcée dans les conditions qu’il précise, de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l’adéquation du montant de la pénalité à l’importance de l’infraction commise par cette dernière. ( 2e Civ. 15 février 2018, n° 17-12.966)
En l’espèce, la matérialité des faits ressort des éléments du dossier ; Mme [E] a du reste reconnu dans sa lettre du 26 juillet 2019 des erreurs d’inattention et un manque de rigueur de sa part.
Ces anomalies procédaient de la facturation de majorations de nuit alors que les prescriptions médicales, qui sont produites aux débats, ne mentionnaient pas l’exécution impérieuse de nuit comme prévu par la NGAP dont l’article 14 des dispositions générales précise, s’agissant de ce type de majorations: ‘Pour les actes infirmiers répétés, ces majorations peuvent être perçues lorsque la prescription du médecin indique la nécessité impérieuse d’une exécution de nuit’.
Aucune fraude n’est alléguée par la caisse à l’encontre de Mme [E], dont les observations ont été prises en compte par la direction de l’organisme pour s’en tenir à un simple avertissement.
Cette sanction mesurée est adaptée aux griefs et proportionnée à la gravité des fautes commises, la cour relevant à cet égard que si pour deux des trois patients concernés, les majorations injustifiées n’ont été observées que sur quelques jours pour l’un et trois mois pour l’autre, elles se sont en revanche répétées tout au long de la période contrôlée s’agissant du troisième.
La caisse justifie ainsi du bien-fondé de l’avertissement notifié à Mme [E].
Sur les frais irrépétibles et les dépens
L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la caisse.
Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de Mme [E] qui succombe à l’instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l’application des dispositions l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Réforme le jugement entrepris et dit que le présent dispositif se substitue à celui du jugement entrepris ;
Statuant à nouveau,
Dit que Mme [E] est irrecevable à contester la procédure de contrôle d’activité ;
Dit que la procédure d’avertissement est régulière ;
Dit que la décision d’avertissement est régulière et bien fondée ;
Déboute en conséquence Mme [E] de sa demande d’annulation de l’avertissement notifié le 19 août 2019 ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [E] aux dépens.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE