En matière d’annonces de gains, les sociétés de vente par correspondance ont l’obligation de mettre en évidence sur les documents publicitaires envoyés aux consommateurs, l’existence d’un aléa affectant l’attribution du prix et perceptible à première lecture pour un consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé. Le cas opposé, le consommateur démarché a le droit au versement du gain annoncé.
Affaire Elite trade AG
Soutenant que plusieurs courriers publicitaires qui lui avaient été envoyés par la société Elite trade Ag, société spécialisée dans la vente par correspondance, lui avaient fait croire qu’il était le gagnant par tirage au sort d’un chèque de 9 500 euros, M. [O] [E] a fait assigner cette société en paiement de cette somme
L’article L121-20 du code de la consommation
Aux termes de l’article L121-20 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable au présent litige, ‘dès lors qu’elles sont déloyales au sens de l’article L121-1, sont interdites les pratiques commerciales mises en ‘uvre par les professionnels à l’égard des consommateurs, sous la forme d’opérations promotionnelles tendant à l’attribution d’un gain ou d’un avantage de toute nature par la voie d’un tirage au sort, quelles qu’en soient les modalités, ou par l’intervention d’un élément aléatoire.’
Une forme de pratique commerciale déloyale ?
L’article L.121-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable au présent litige, précise que ‘les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.
Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales :
- Les Pratiques commerciales trompeuses (Article L121-2) :
- Fournir des informations fausses ou susceptibles d’induire en erreur sur les caractéristiques essentielles du produit ou service (disponibilité, avantages, origine, etc.).
- Ne pas révéler l’existence d’un risque lié à l’utilisation du produit ou service.
- Utiliser des allégations, indications ou présentations fausses concernant le produit ou service.
- Ne pas respecter les engagements figurant dans le code de conduite auquel l’entreprise prétend souscrire.
- Fournir des informations fausses ou trompeuses sur les droits du consommateur.
- Les Pratiques commerciales trompeuses par omission (Article L121-3) :
- Omettre des informations substantielles que le consommateur moyen a besoin pour prendre une décision éclairée.
- Cacher ou fournir de manière inintelligible, ambiguë ou à contretemps des informations importantes.
- Ne pas indiquer clairement l’intention commerciale de la pratique si celle-ci n’est pas déjà apparente du contexte.
- Les Pratiques commerciales agressives (Article L121-4) :
- Utiliser du harcèlement, de la contrainte, y compris physique, ou de l’influence injustifiée pour altérer ou être susceptible d’altérer de manière significative la liberté de choix ou de conduite du consommateur en ce qui concerne le produit ou service.
Les quasi-contrats
Aux termes de l’article 1300 du code civil (anciennement 1371 du même code), les quasi-contrats sont des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit, et parfois un engagement de leur auteur envers autrui.
Responsabilité de la société organisatrice d’un jeu publicitaire
La société de vente par correspondance organisatrice d’un jeu publicitaire qui annonce un gain à une personne dénommée, sans mettre en évidence, à première lecture par un ‘consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé’, l’existence d’un aléa, s’oblige par ce fait purement volontaire, à le délivrer.
L’appréciation de la conscience que pouvait avoir de l’aléa le ‘consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé’ doit se faire au vu de l’ensemble des documents que celui-ci a reçus lors de l’annonce du gain.
Il ressortait des pièces versées que le règlement du jeu était présent au dos de chaque publicité reçue par celui-ci, que ce règlement était écrit en caractères normalement lisibles, malgré une présentation peu aérée et l’absence de tout paragraphe de séparation, qu’il mentionnait l’existence d’un aléa (notamment aux paragraphes 1, 3, 4 et 10), tout comme les modalités de participation et les gains mis en jeu (un premier prix de 9 500 euros et un prix garanti à chaque participant de 2 euros, le chèque certifié conforme), que les astérisques et dièses figurant sur les documents publicitaires faisaient toujours renvoi à la mention de l’existence d’un aléa ou au règlement mentionnant cet aléa, que les courriers envoyés par la société Elite trade AG à M. [E] évoquant un gain étaient rédigés au conditionnel (‘si vous êtes notre grand gagnant confirmé’ ou ‘si vous possédez ce n° nous pourrons déclarer alors’) et mentionnaient la procédure à suivre pour participer au tirage au sort et être éventuellement désigné grand gagnant, qu’enfin, si M. [E] a bien reçu un chèque de deux euros appelé ‘chèque certifié’, aucun courrier produit par ce dernier ne mentionnait que son numéro avait été désigné comme gagnant, du gain principal de 9 500 euros, par suite du tirage au sort de l’huissier de justice.
Il est ainsi démontré que la société Elite trade AG a mis en évidence sur les documents publicitaires envoyés à M. [E] l’existence d’un aléa affectant l’attribution du prix et perceptible à première lecture pour un consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé.