Affichage publicitaire contraire au règlement local : une concurrence déloyale

Notez ce point juridique

Y compris en matière d’affichage publicitaire, le défaut de respect de la réglementation administrative dans l’exercice d’une activité commerciale constitue une faute génératrice d’un trouble commercial pour un concurrent.

Cependant, il est constant que si une autorisation administrative requise a été accordée, le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’appréciation préalable, par le juge administratif, de la légalité et de la portée de cette autorisation.


La SARL Mediavenue et la SAS Mediatik LED sont en conflit concernant l’installation de panneaux publicitaires lumineux sur la commune d'[Localité 10]. Mediavenue estime que cette installation est illégale et constitue un acte de concurrence déloyale, tandis que Mediatik LED affirme avoir respecté les autorisations en vigueur. Le tribunal de commerce de Besançon a donné raison à Mediatik LED, déboutant Mediavenue de ses demandes. Mediavenue a interjeté appel de cette décision, demandant l’annulation ou l’infirmation du jugement et réclamant des dommages et intérêts. Mediatik LED maintient sa position et demande à la cour de confirmer le jugement initial. L’affaire est en attente de délibéré.

Motifs de la décision

A titre liminaire, la cour constate que la demande aux fins d’annulation du jugement critiqué formée par la société Mediavenue dans sa déclaration d’appel n’est suivie d’aucun moyen ni demande dans ses conclusions ultérieures, de sorte qu’elle n’est pas soutenue.

Par ailleurs, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de «’donner acte’», de «’constater’» ou de «’dire et juger’» qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

Sur les faits de concurrence déloyale reprochés à la société Mediatik LED

En application des articles 1382 et 1383 du code civil, devenus les articles 1240 et 1241 du même code, la responsabilité délictuelle d’une personne est engagée dès lors que celle-ci a commis une faute, par son fait ou par sa négligence ou son imprudence, causant de manière directe et certaine un dommage à autrui.

Sur ces fondements, les faits de concurrence déloyale ou parasitaire peuvent donner lieu à indemnisation sous réserve pour le demandeur de rapporter la preuve d’une faute, d’un préjudice certain et du lien de causalité entre les deux.

Il en résulte ainsi que le défaut de respect de la réglementation administrative dans l’exercice d’une activité commerciale constitue une faute génératrice d’un trouble commercial pour un concurrent.

Cependant, il est constant que si une autorisation administrative requise a été accordée, le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’appréciation préalable, par le juge administratif, de la légalité et de la portée de cette autorisation.

En l’espèce, la commune d'[Localité 10] a, par convention d’occupation temporaire du domaine public signée le 10 février 2017, autorisé la société Mediatik LED à implanter sur la parcelle cadastrée ‘n°[Cadastre 1] section 581AM’ deux panneaux LED simple face d’une surface de quatre mètres carrés environ, d’une emprise au sol de deux mètres carrés et d’une hauteur de six mètres maximum.

Le maire de la commune a par ailleurs signé le 19 juin 2018 un arrêté d’autorisation d’enseigne au bénéfice de la société Mediatik LED sur le terrain situé [Adresse 2], conformément aux termes de la demande déposée le 15 juin précédent.

L’implantation de deux panneaux lumineux ‘installés quasiment dos à dos’ entre le numéro 1 et le numéro 3 de la route de [Localité 8] a été constatée par huissier de justice les 30 octobre 2019 et 04 février 2021.

Il est constant entre les parties que les panneaux objets des deux constats d’huissier de justice précités sont ceux objets de la convention d’occupation temporaire du domaine public et de l’arrêté d’autorisation d’enseigne susvisées, leur pose ayant nécessité des travaux électriques mentionnant comme adresse du chantier ‘[Adresse 11]’ aux termes de la facture n° 0323-600384034 établie le 11 janvier 2018 par la SA Enedis et le [Adresse 4] aux termes de la facture n° 29829 établie le 13 février 2018 par la SAS Electro-Vuillez.

L’extrait du procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la commune d'[Localité 10] du 02 décembre 2016, autorisant l’implantation confiée à la société Mediatik LED, se limite à viser comme lieu d’implantation la rue de [Localité 8] ‘à l’entrée de la zone, à proximité de la maison médicale et de [Localité 12]’.

Etant observé que les deux constats d’huissier de justice susvisés précisent tous deux que l’implantation a bien été exécutée sur la parcelle cadastrée section AM n° [Cadastre 5] visé par la convention d’occupation temporaire du domaine public signée le 10 février 2017, il résulte de l’ensemble de ces éléments que si l’emplacement des panneaux est mentionné de manière approximative dans les différents documents ci-avant énumérés, les deux panneaux litigieux sont ceux dont l’implantation a été autorisée par la commune.

Si la société Mediavenue invoque l’illégalité de ces implantations au regard du règlement local de publicité, elle ne produit cependant aucun élément de nature à établir que les installations litigieuses ne sont pas conformes à la convention d’occupation temporaire du domaine public du 10 février 2017 et à l’arrêté valant autorisation d’enseigne et pré-enseigne du 19 juin 2018.

Dès lors, en l’absence de remise en cause de l’autorisation administrative susvisée et en application des dispositions ci-avant rappelées, l’appelante est malfondée à invoquer l’illégalité de l’installation, les échanges de courriers entre la commune d'[Localité 10] et la CAGB ainsi que le préfet du [Localité 9] étant sans incidence sur la validité de l’autorisation administrative.

La société Mediavenue n’établit donc pas la commission par la société Mediatik LED d’une faute liée à l’illégalité de l’exploitation des panneaux lumineux et de la poursuite d’une activité illicite.

Par ailleurs, cette dernière n’établit pas la réalité des préjudices qu’elle invoque, à défaut de caractériser une perte de clientèle et une captation indue de chiffre d’affaires, de même qu’une atteinte personnelle à son crédit et à son image et des dépenses de procédure injustifiées.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu’il a débouté cette dernière de l’ensemble de ses demandes et a rejeté par ailleurs la demande indemnitaire subsidiaire formée à hauteur de 500 000 euros hors taxes par la société Mediatik LED.

Enfin, le coût des deux constats d’huissier de justice établis les 30 octobre 2019 et 04 février 2021 n’entre pas dans la catégorie des dépens tels qu’énumérés à l’article 695 du code de procédure civile.

– La SARL Mediavenue est condamnée aux dépens d’appel
– La SARL Mediavenue est condamnée à payer à la SAS Mediatik LED la somme de [Cadastre 1] 000 euros


Réglementation applicable

– Code civil
– Code de procédure civile

Article 1240 du Code civil:
« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

Article 1241 du Code civil:
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

Article 695 du Code de procédure civile:
« Les dépens sont constitués par l’ensemble des frais exposés par les parties à l’instance, à l’exception des frais irrépétibles. »

Article 1382 du Code civil:
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

Article 1383 du Code civil:
« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT – PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON
– Me Isabelle GRILLON de la SCP C.G.B.G., avocat au barreau de BESANCON

Mots clefs associés

– Décision
– Cour
– Demande
– Annulation
– Moyen
– Conclusions
– Faits
– Concurrence déloyale
– Responsabilité délictuelle
– Faute
– Préjudice
– Causalité
– Réglementation administrative
– Autorisation
– Implantation
– Panneaux LED
– Autorisation d’enseigne
– Huissier de justice
– Travaux électriques
– Facture
– Conseil municipal
– Illégalité
– Remise en cause
– Validité
– Exploitation
– Perte de clientèle
– Captation indue
– Atteinte personnelle
– Image
– Dépenses de procédure
– Jugement
– Confirmation
– Demandes
– Indemnitaire
– Coût
– Dépens

– Décision: acte par lequel une autorité compétente tranche une question litigieuse
– Cour: juridiction chargée de rendre la justice
– Demande: requête adressée à une autorité pour obtenir quelque chose
– Annulation: action d’annuler, de rendre nul
– Moyen: instrument ou procédé permettant d’atteindre un but
– Conclusions: résumé des arguments présentés lors d’un procès
– Faits: éléments concrets et vérifiables constituant la réalité d’une affaire
– Concurrence déloyale: pratique commerciale trompeuse visant à éliminer un concurrent
– Responsabilité délictuelle: obligation de réparer un dommage causé à autrui
– Faute: acte contraire à la loi ou aux règles de conduite
– Préjudice: dommage subi par une personne du fait de l’action d’une autre
– Causalité: lien de cause à effet entre un acte et ses conséquences
– Réglementation administrative: ensemble des règles édictées par l’administration
– Autorisation: permission donnée par une autorité compétente
– Implantation: action de s’installer quelque part de manière permanente
– Panneaux LED: dispositifs d’affichage lumineux à diodes électroluminescentes
– Autorisation d’enseigne: autorisation nécessaire pour installer une enseigne commerciale
– Huissier de justice: officier ministériel chargé de signifier des actes de procédure
– Travaux électriques: travaux liés à l’installation ou à la réparation d’installations électriques
– Facture: document détaillant les prestations fournies et leur coût
– Conseil municipal: assemblée délibérante d’une commune
– Illégalité: caractère de ce qui est contraire à la loi
– Remise en cause: contestation ou remise en question d’une décision ou d’une situation
– Validité: qualité de ce qui est valide, conforme à la loi
– Exploitation: action de tirer profit de quelque chose
– Perte de clientèle: diminution du nombre de clients d’une entreprise
– Captation indue: action de s’approprier indûment quelque chose
– Atteinte personnelle: atteinte portée à l’intégrité physique ou morale d’une personne
– Image: représentation mentale ou visuelle d’une personne ou d’une chose
– Dépenses de procédure: frais engagés pour mener une procédure judiciaire
– Jugement: décision rendue par un tribunal
– Confirmation: acte de confirmer, de valider une décision
– Demandes: requêtes adressées à une autorité pour obtenir quelque chose
– Indemnitaire: relatif à l’indemnisation d’un préjudice
– Coût: montant à payer pour obtenir un bien ou un service
– Dépens: frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

CS/LZ

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 22/00371 – N° Portalis DBVG-V-B7G-EPPD

COUR D’APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 26 MARS 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 12 janvier 2022 – RG N°2021000496 – TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON

Code affaire : 39H – Demande en cessation de concurrence déloyale ou illicite et/ou en dommages et intérêts

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Michel WACHTER, Président de chambre.

M. Cédric SAUNIER et Madame Anne-Sophie WILLM, Conseillers.

Greffier : Melle Leila ZAIT, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

L’affaire a été examinée en audience publique du 23 janvier 2024 tenue par M. Michel WACHTER, président de chambre, M. Cédric SAUNIER et Madame Anne-Sophie WILLM, conseillers et assistés de Melle Leila ZAIT, greffier.

Le rapport oral de l’affaire a été fait à l’audience avant les plaidoiries.

L’affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.R.L. MEDIAVENUE

RCS de BESANCON n° 539 751 271

sise [Adresse 3]

Représentée par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT – PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON

ET :

INTIMÉE

S.A.S. MEDIATIK LED

RCS de Besançon n° 811 579 325

sise [Adresse 6]

Représentée par Me Isabelle GRILLON de la SCP C.G.B.G., avocat au barreau de BESANCON

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Michel WACHTER, président de chambre et par Melle Leila ZAIT, greffier lors du prononcé.

Faits, procédure et prétentions des parties

La SARL Mediavenue et la SAS Mediatik LED exploitent toutes deux une activité de publicité via notamment des panneaux lumineux.

Au cours de l’année 2017, la société Mediatik LED a installé deux écrans numériques de publicité sur la commune d'[Localité 10] en invoquant une convention d’occupation précaire du domaine public du 10 février 2017 et une autorisation d’enseigne et de pré-enseigne délivrée par ladite commune le 19 juin 2018.

Estimant cette installation illégale, car contraire au règlement local des publicités, et constituer dès lors des faits de concurrence déloyale, la société Mediavenue a initié plusieurs actions en référé et au fond devant la juridiction administrative et en référé devant le tribunal de commerce de Besançon, lesquelles n’ont pas abouti.

Saisi au fond d’une demande visant à faire interdiction sous astreinte à la société Mediatik LED de poursuivre la conclusion de contrats ne respectant pas les règles applicables, à ordonner le dépôt des deux dispositifs litigieux et à l’indemnisation de ses préjudices avec publication de la décision, ainsi que d’une demande reconventionnelle indemnitaire, le tribunal de commerce de Besançon a, par jugement rendu le 12 janvier 2022 :

– ‘dit’ que la société Mediavenue n’apporte pas la preuve que la société Mediatik LED ait commis une faute en exploitant des dispositifs lumineux sur la commune d'[Localité 10] ;

– ‘dit’ que la concurrence déloyale invoquée par la société Mediavenue n’est pas caractérisée ;

– débouté cette dernière de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– débouté la société Mediatik LED de sa demande ‘au titre d’une procédure abusive’ ;

– condamné la société Mediavenue à payer à la société Mediatik LED la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Mediavenue aux entiers dépens, liquidés à la somme de 69,59 euros ;

– débouté les parties du surplus de leurs conclusions fins et prétentions.

Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré :

– que la société Mediatik LED a effectué les installations litigieuses en conformité avec la convention d’occupation temporaire du domaine public du 10 février 2017 et surtout l’arrêté valant autorisation d’enseigne et pré-enseigne du 19 juin 2018 faisant état d’une conformité de l’installation avec le règlement local de publicité ;

– que les actions engagées devant la juridiction administrative par la société Mediavenue tendant à la suspension de l’arrêté susvisé, à la dépose des enseignes et à l’annulation de l’arrêté et de la convention d’occupation temporaire du domaine public n’ont pas abouti, de sorte que le caractère illégal des installations n’est pas établi et qu’aucune faute n’est caractérisée ;

– qu’aucun abus de droit d’agir imputable à la société Mediavenue n’est cependant établi.

Par déclaration du 02 mars 2022, la société Mediavenue a interjeté appel de ce jugement en sollicitant son annulation ou son infirmation en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la société Mediatik LED de sa demande « au titre d’une procédure abusive » et, selon ses dernières conclusions transmises le 28 novembre 2022, elle conclut à son infirmation et demande à la cour statuant à nouveau de :

– ‘juger’ que la société Mediatik LED à commis une faute de concurrence déloyale à son préjudice en ne respectant pas la réglementation applicable ;

– faire interdiction à celle-ci de poursuivre ses agissements litigieux entendus comme la conclusion de contrats commerciaux sans respecter les règles applicables aux dispositifs publicitaires, sous astreinte de 1 000 euros par contrat conclu illégalement et ce dans les huit jours suivant la signification de la décision à intervenir ;

– lui ordonner de déposer ses deux dispositifs publicitaires illicites y compris le socle en béton supportant ceux-ci, situés [Adresse 2], dans un délai de quinze jours suivant la date de ‘l’ordonnance à intervenir’, puis sous astreinte de 300 euros par jour de retard;

– la condamner à lui verser :

. une indemnité d’un montant de 505 264 euros HT au titre de son préjudice commercial ‘à parfaire’ ;

. une indemnité d’un montant de 15 153 euros HT au titre des dépenses liées aux procédures engagées ;

. une somme de 10 000 euros au titre de l’indemnisation de son préjudice moral ;

. la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers frais et dépens, notamment le coût des deux constats d’huissier de justice ;

– ordonner la publication par extraits de la décision à intervenir aux frais de la société Mediatik LED dans deux joumaux au choix de la société Mediavenue ;

– subsidiairement, débouter la société Mediatik LED de sa demande de versement de la somme de 500 000 euros H, outre la TVA au taux de 20 %, en réparation du préjudice subi, dans l’hypothèse d’un enlèvement des panneaux publicitaire lumineux.

Elle fait valoir :

– que la convention d’occupation temporaire du domaine public est sans incidence sur la légalité de l’implantation effectuée ;

– que l’arrêté du 19 j uin 2018 ne porte que sur un seul dispositif, situé [Adresse 2], alors que les deux panneaux litigieux sont implantés entre le n° 1 et le n° 3 de la route de [Localité 8], de sorte que la société Mediatik LED ne justifie pas avoir obtenu les autorisations administratives nécessaires ;

– que les dispositifs litigieux ne respectent ni la réglementation nationale, l’article R. 581-42 du code de l’environnement interdisant la publicité numérique dans les agglomérations de moins de dix mille habitants, ni le règlement local de publicité adopté par la commune le 15 janvier 2016 dont l’article 1.4 n’autorise que les journaux lumineux, à l’exclusion des messages publicitaires, au surplus limités à quatre mètres carrés ;

– que l’illégalité des dispositifs publicitaires exploités par la société Mediatik LED a été admise:

. tant par la commune d'[Localité 10], en ce qu’elle a envisagé une modification de la réglementation communale puis une médiation ;

. que par l’autorité préfectorale, le préfet ayant notamment enjoint au maire par courrier du 22 octobre 2018 de ‘faire cesser immédiatement l’infraction par le démontage des deux dispositifs publicitaires illicites’ ;

– que dès lors, cette exploitation, en connaissance de cause depuis l’année 2018, constitue une faute et nécessairement un acte de concurrence déloyale envers l’ensemble des professionnels de la publicité, en créant un trouble commercial du fait d’une perturbation du marché et une distorsion injustifiée de concurrence entre les entreprises qui ne se préoccupent pas des contraintes légales et celles qui s’efforcent de les respecter ;

– que ni la circonstance que l’administration n’ait pas retiré l’autorisation, ni le fait que l’exploitation respecte la convention d’occupation, ne sont exonératoires de responsabilité ;

– qu’en application de la jurispudence, il résulte nécessairement un préjudice des faits de concurrence déloyale ;

– ainsi, que son préjudice commercial se caractérise par la perte de clientèle résultant de l’inégalité des moyens employés et par l’absence de captation du chiffre d’affaires réalisé indument, la sanction de la faute commise par la société Mediatik LED et de son enrichissement fautif devant consister dans la restitution à la société Mediavenue des profits illicites et donc des gains qu’elle a pu réaliser chiffrés à la somme de 631 581 euros HT entre les années 2018 et 2022;

– qu’elle est donc en droit de réclamer à la société Mediatik LED, à titre de réparation, la somme de 505 264 euros HT correspondant à la marge brute correspondant à 80 % du chiffre d’affaires susvisé, outre la somme de 15 153 euros HT correspondant aux frais exposés pour initier les actions utiles auprès de la préfecture du Doubs puis devant le tribunal de commerce ;

– que par ailleurs, elle a subi un préjudice moral lié à l’atteinte portée à son crédit et à son image, dans la mesure où le comportement de la société Mediatik LED jette un discrédit sur la profession, estimé à la somme de 10 000 euros ;

– que la société Mediatik LED ne peut valablement invoquer un préjudice dans le cas où l’enlèvement des panneaux serait ordonné, en ce que ce démontage serait la conséquence de sa propre faute.

La société Mediatik LED a répliqué en premier et dernier lieu par conclusions transmises le 26 août 2022 pour demander à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, y ajoutant de condamner la société Mediavenue à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens et subsidiairement de la condamner au versement de la somme de 500 000 euros HT, outre la TVA à 20 %, en réparation du préjudice subi dans l’hypothèse d’un enlèvement des panneaux publicitaire lumineux.

Elle expose :

– qu’elle n’a commis aucune faute, en ce que les deux supports ont été installés sur la base d’une convention d’occupation précaire du domaine public et d’un arrêté municipal, dont la validité n’a été remise en cause par aucune juridiction et dont la légalité est désormais établie ;

– qu’aucune violation de l’article 1.4 du règlement local de publicité n’est caractérisée, en ce que les installations respectent les conditions encadrant les publicités numériques, non interdites dans la mesure où les images ne sont pas fixes et diffusent notamment des informations publiques, de sorte qu’elles correspondent à l’appelation de ‘journaux lumineux’ ;

– que la demande de retrait des panneaux ayant été formulée par la préfecture n’est fondée sur aucune infraction, de sorte qu’à l’issue de ses contestations formées par courrier du 19 juillet 2019, l’autorité administrative a abandonné sa demande ;

– que dès lors aucun acte de concurrence déloyale n’est caractérisé ;

– que la société Mediavenue n’a subi aucun préjudice financier dans la mesure où son chiffre d’affaires généré au cours de l’année 2018 est similaire à celui réalisé avant l’implantation des dispositifs en 2016, tandis qu’elle n’a déposé aucune demande d’installation de panneaux lumineux à [Localité 7] et qu’elle exploite l’essentiel de son activité hors de cette localité ;

– que dans le cas où elle serait contrainte à l’enlèvement des panneaux, elle subirait un préjudice chiffré à 500 000 euros HT sur la base d’un chiffre d’affaires générée par ces deux dispositifs publicitaires de 70 759 euros HT par année d’exploitation.

Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 02 janvier 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 13 janvier suivant et mise en délibéré au 26 mars 2024.

En application de l’article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

Motifs de la décision

A titre liminaire, la cour constate que la demande aux fins d’annulation du jugement critiqué formée par la société Mediavenue dans sa déclaration d’appel n’est suivie d’aucun moyen ni demande dans ses conclusions ultérieures, de sorte qu’elle n’est pas soutenue.

Par ailleurs, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de «’donner acte’», de «’constater’» ou de «’dire et juger’» qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

– Sur les faits de concurrence déloyale reprochés à la société Mediatik LED,

En application des articles 1382 et 1383 du code civil, devenus les articles 1240 et 1241 du même code, la responsabilité délictuelle d’une personne est engagée dès lors que celle-ci a commis une faute, par son fait ou par sa négligence ou son imprudence, causant de manière directe et certaine un dommage à autrui.

Sur ces fondements, les faits de concurrence déloyale ou parasitaire peuvent donner lieu à indemnisation sous réserve pour le demandeur de rapporter la preuve d’une faute, d’un préjudice certain et du lien de causalité entre les deux.

Il en résulte ainsi que le défaut de respect de la réglementation administrative dans l’exercice d’une activité commerciale constitue une faute génératrice d’un trouble commercial pour un concurrent.

Cependant, il est constant que si une autorisation administrative requise a été accordée, le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’appréciation préalable, par le juge administratif, de la légalité et de la portée de cette autorisation.

En l’espèce, la commune d'[Localité 10] a, par convention d’occupation temporaire du domaine public signée le 10 février 2017, autorisé la société Mediatik LED à implanter sur la parcelle cadastrée ‘n°[Cadastre 1] section 581AM’ deux panneaux LED simple face d’une surface de quatre mètres carrés environ, d’une emprise au sol de deux mètres carrés et d’une hauteur de six mètres maximum.

Le maire de la commune a par ailleurs signé le 19 juin 2018 un arrêté d’autorisation d’enseigne au bénéfice de la société Mediatik LED sur le terrain situé [Adresse 2], conformément aux termes de la demande déposée le 15 juin précédent.

L’implantation de deux panneaux lumineux ‘installés quasiment dos à dos’ entre le numéro 1 et le numéro 3 de la route de [Localité 8] a été constatée par huissier de justice les 30 octobre 2019 et 04 février 2021.

Il est constant entre les parties que les panneaux objets des deux constats d’huissier de justice précités sont ceux objets de la convention d’occupation temporaire du domaine public et de l’arrêté d’autorisation d’enseigne susvisées, leur pose ayant nécessité des travaux électriques mentionnant comme adresse du chantier ‘[Adresse 11]’ aux termes de la facture n° 0323-600384034 établie le 11 janvier 2018 par la SA Enedis et le [Adresse 4] aux termes de la facture n° 29829 établie le 13 février 2018 par la SAS Electro-Vuillez.

L’extrait du procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la commune d'[Localité 10] du 02 décembre 2016, autorisant l’implantation confiée à la société Mediatik LED, se limite à viser comme lieu d’implantation la rue de [Localité 8] ‘à l’entrée de la zone, à proximité de la maison médicale et de [Localité 12]’.

Etant observé que les deux constats d’huissier de justice susvisés précisent tous deux que l’implantation a bien été exécutée sur la parcelle cadastrée section AM n° [Cadastre 5] visé par la convention d’occupation temporaire du domaine public signée le 10 février 2017, il résulte de l’ensemble de ces éléments que si l’emplacement des panneaux est mentionné de manière approximative dans les différents documents ci-avant énumérés, les deux panneaux litigieux sont ceux dont l’implantation a été autorisée par la commune.

Si la société Mediavenue invoque l’illégalité de ces implantations au regard du règlement local de publicité, elle ne produit cependant aucun élément de nature à établir que les installations litigieuses ne sont pas conformes à la convention d’occupation temporaire du domaine public du 10 février 2017 et à l’arrêté valant autorisation d’enseigne et pré-enseigne du 19 juin 2018.

Dès lors, en l’absence de remise en cause de l’autorisation administrative susvisée et en application des dispositions ci-avant rappelées, l’appelante est malfondée à invoquer l’illégalité de l’installation, les échanges de courriers entre la commune d'[Localité 10] et la CAGB ainsi que le préfet du [Localité 9] étant sans incidence sur la validité de l’autorisation administrative.

La société Mediavenue n’établit donc pas la commission par la société Mediatik LED d’une faute liée à l’illégalité de l’exploitation des panneaux lumineux et de la poursuite d’une activité illicite.

Par ailleurs, cette dernière n’établit pas la réalité des préjudices qu’elle invoque, à défaut de caractériser une perte de clientèle et une captation indue de chiffre d’affaires, de même qu’une atteinte personnelle à son crédit et à son image et des dépenses de procédure injustifiées.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu’il a débouté cette dernière de l’ensemble de ses demandes et a rejeté par ailleurs la demande indemnitaire subsidiaire formée à hauteur de 500 000 euros hors taxes par la société Mediatik LED.

Enfin, le coût des deux constats d’huissier de justice établis les 30 octobre 2019 et 04 février 2021 n’entre pas dans la catégorie des dépens tels qu’énumérés à l’article 695 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Constate que la demande tendant à l’annulation du jugement rendu entre les parties le 12 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Besançon n’est pas soutenue ;

Confirme, dans les limites de l’appel, ledit jugement ;

Condamne la SARL Mediavenue aux dépens d’appel ;

Et, vu l’article 700 du code de procédure civile, la déboute de sa demande et la condamne à payer à la SAS Mediatik LED la somme de [Cadastre 1] 000 euros.

Le greffier, Le président de chambre,

 

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