La prescription des créances salariales en 10 Questions / Réponses

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Résumé de cette affaire : La société Sud Nord logistics, spécialisée dans la mise en containers et la manutention, a engagé M. [M] [V] en tant que manutentionnaire en mai 2013. En janvier 2019, un redressement judiciaire a été prononcé à son encontre. M. [V] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement en avril 2019 et a été licencié pour faute grave en mai 2019, en raison d’injures et de comportements inappropriés. En mai 2020, M. [V] a assigné la société devant le conseil de prud’hommes, contestant la légitimité de son licenciement. En septembre 2021, le conseil a jugé que le licenciement était fondé. M. [V] a interjeté appel. En octobre 2023, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société. M. [V] a formulé plusieurs demandes de créances, tandis que la société et l’AGS ont contesté ses prétentions. La cour a confirmé certaines décisions tout en fixant des créances au passif de la société, notamment pour heures supplémentaires et préjudice lié à l’absence de repos compensateur.

Sur les fins de non-recevoir tirées de la prescription

La prescription est un moyen de défense qui permet à une partie de faire valoir que la demande de l’autre partie est irrecevable en raison de l’écoulement du temps. Conformément à l’article L. 3245-1 du Code du travail, l’action en paiement des créances salariales se prescrit par trois ans à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit. Ainsi, dans le cas où un salarié saisit le conseil de prud’hommes après l’expiration de ce délai, sa demande sera déclarée irrecevable. Dans l’affaire en question, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes le 29 mai 2020, ce qui signifie que les créances antérieures au 29 mai 2017 sont effectivement prescrites. Cependant, les créances devenues exigibles à compter du 14 mai 2016, date de rupture du contrat, sont recevables. Les intimées ne peuvent donc pas se prévaloir de la prescription pour les demandes portant sur la période postérieure à cette date.

Sur la prescription des créances salariales

L’article L. 3245-1 du Code du travail précise que l’action en paiement des salaires se prescrit par trois ans. Cette prescription commence à courir à partir du moment où le salarié a eu connaissance des faits lui permettant d’agir. Dans le cas présent, le salarié a été licencié le 14 mai 2019, ce qui lui permet de réclamer des sommes dues pour les trois années précédant cette date. Ainsi, les créances salariales antérieures au 14 mai 2016 sont prescrites, tandis que celles postérieures à cette date sont recevables. Il est donc essentiel pour les employeurs de garder une trace des paiements effectués et des heures travaillées pour éviter des litiges liés à la prescription.

Sur la prescription des demandes portant sur la rupture du contrat de travail

L’article L. 1471-1 du Code du travail stipule que toute action relative à la rupture du contrat de travail se prescrit par un an à compter de la notification de la rupture. Dans cette affaire, le salarié a été licencié le 14 mai 2019, et a saisi le conseil de prud’hommes le 29 mai 2020. Il est donc important de noter que le délai de prescription d’un an était en cours au moment de la saisine. Cependant, l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 a suspendu les délais de prescription pendant la période d’urgence sanitaire. Ainsi, les actions qui auraient dû être prescrites entre le 12 mars et le 23 juin 2020 sont réputées avoir été intentées dans les délais si elles ont été introduites avant le 23 août 2020. Le salarié est donc recevable à réclamer ses créances, et l’AGS ne peut pas opposer la prescription.

Sur l’exécution du contrat de travail

L’article L. 3171-4 du Code du travail impose à l’employeur de fournir des éléments justifiant les horaires de travail en cas de litige. Le salarié doit également présenter des éléments précis concernant les heures non rémunérées qu’il prétend avoir effectuées. Dans cette affaire, le salarié a produit un tableau détaillé des heures qu’il estime avoir effectuées, ainsi que des courriers attestant de ses réclamations. L’employeur, de son côté, a contesté ces heures en produisant des éléments sur les horaires d’ouverture de l’entreprise. Le juge doit alors évaluer l’ensemble des éléments fournis par les deux parties pour déterminer l’existence d’heures supplémentaires. Dans ce cas, le juge a établi l’existence d’heures supplémentaires, mais dans une moindre mesure que celle alléguée par le salarié.

Sur la contrepartie obligatoire en repos

L’article L. 3121-30 du Code du travail prévoit une contrepartie obligatoire en repos pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel. Cette contrepartie s’ajoute à la rémunération des heures au taux majoré ou au repos compensateur. L’article D. 3121-23 précise que si le salarié ne peut pas bénéficier de cette contrepartie avant la fin de son contrat, il a droit à une indemnité en espèces. Dans cette affaire, le salarié n’a pas pu demander la contrepartie en repos, ce qui lui donne droit à une indemnisation. Les juges doivent évaluer les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent pour déterminer le montant de l’indemnité. Il a été décidé d’allouer une somme de 900 euros au salarié pour réparer le préjudice subi.

Sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

L’article L. 8221-5 du Code du travail définit le travail dissimulé comme le fait pour un employeur de ne pas délivrer de bulletin de paie ou de mentionner un nombre d’heures inférieur à celui réellement effectué. L’article L. 8223-1 stipule qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Pour qu’une indemnité pour travail dissimulé soit accordée, il faut prouver l’intention de dissimulation de l’employeur. Dans cette affaire, le juge a constaté que l’intention de dissimulation n’était pas établie, ce qui a conduit au rejet de la demande d’indemnité. Il est donc déterminant pour les salariés de fournir des preuves solides pour établir l’intention de l’employeur dans de tels cas.

Sur la demande tendant au rappel de salaire au titre de retenues injustifiées

Le salarié a soutenu que son employeur lui imposait de reverser une somme d’argent sous peine de licenciement. Cependant, la seule plainte produite ne permet pas d’établir la réalité des faits allégués. Il incombe au salarié de prouver ses allégations par des éléments tangibles. Dans ce cas, le conseil de prud’hommes a rejeté la demande, considérant que le salarié n’avait pas apporté de preuves suffisantes. Il est donc essentiel pour les salariés de documenter leurs réclamations pour éviter le rejet de leurs demandes.

Sur les congés payés

Le salarié a affirmé qu’il n’avait pas pris tous ses congés payés avant son licenciement. Cependant, les pièces du dossier montrent qu’il avait pris des congés en janvier et février 2016, et que l’indemnité compensatrice versée correspondait à sa créance. Il est important de noter que les employeurs doivent tenir des registres précis des congés pris par leurs employés. Dans cette affaire, le jugement a été confirmé en ce qui concerne le rejet de la demande de congés payés non pris. Les salariés doivent être vigilants quant à la gestion de leurs congés pour éviter des litiges futurs.

Sur le bien-fondé du licenciement pour faute grave

L’article L. 1235-1 du Code du travail stipule que l’employeur doit prouver le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement. En cas de licenciement pour faute grave, l’employeur doit démontrer que la faute rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Dans cette affaire, les faits reprochés au salarié ont été établis par des attestations et des preuves fournies par l’employeur. Le juge a donc confirmé que le licenciement était justifié par des motifs sérieux. Il est essentiel pour les employeurs de documenter les comportements inappropriés des salariés pour justifier un licenciement.

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur l’existence de circonstances brutales et vexatoires

Le salarié a soutenu que son licenciement était vexatoire en raison de la volonté de l’employeur de l’évincer après ses réclamations. Cependant, les éléments du dossier ne corroborent pas cette affirmation. Il est important pour les salariés de prouver que leur licenciement a été motivé par des circonstances vexatoires pour obtenir des dommages et intérêts. Dans ce cas, le jugement a été confirmé en ce qui concerne le rejet de cette demande. Les salariés doivent être conscients de la nécessité de fournir des preuves solides pour soutenir leurs allégations.

Sur l’inopposabilité à la procédure collective et à l’AGS des demandes relatives à la rupture du contrat de travail

L’article L. 622-7 du Code de commerce interdit le paiement de toute créance née antérieurement à l’ouverture d’une procédure collective. Dans cette affaire, les créances du salarié ont pris naissance avant l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire. Les créances salariales doivent donc être fixées au passif de la procédure collective. L’AGS ne peut pas se prévaloir des dispositions de l’article L. 621-22 du Code de commerce dans ce cas. Il est déterminant pour les salariés de comprendre que leurs créances doivent être déclarées dans le cadre de la procédure collective pour être prises en compte.

Sur les intérêts

Le tribunal a prononcé le redressement judiciaire de la société le 7 janvier 2019. Le salarié a saisi le conseil des prud’hommes le 29 mai 2020. L’ouverture de la procédure collective a arrêté le cours des intérêts légaux. Il n’y a donc pas lieu d’accorder des intérêts dans cette affaire. Les salariés doivent être conscients que les intérêts peuvent être suspendus en cas de procédure collective.

Sur les frais du procès

Le jugement a été infirmé concernant la condamnation aux dépens et au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. La société devra assumer la charge des dépens de première instance et d’appel. Il est important pour les parties de comprendre que les frais de justice peuvent être à la charge de la partie perdante. Dans ce cas, la société a été condamnée à verser une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700. Les parties doivent être préparées à assumer les frais liés à leurs actions en justice.

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