La portée de la cassation et les obligations de reprise du personnel en 10 Questions / Réponses

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Résumé de cette affaire : Mme [C] [N] a été engagée en tant qu’agent de sûreté par la société AEROSUR, devenue VIGIMARK SURETE, à partir du 25 février 2002. Le 1er mars 2012, le tribunal de commerce de Beauvais a ouvert une liquidation judiciaire de VIGIMARK SURETE, mettant fin à l’activité au 31 mars 2012. En mars 2012, CAPITAL SECURITE a repris certains marchés de VIGIMARK SURETE et a tenté de transférer les contrats de travail selon un accord de 2002. Cependant, plusieurs salariés, dont Mme [N], ont été licenciés pour motif économique. Mme [N] a saisi le conseil de prud’hommes en janvier 2010 pour un rappel de salaire, et a obtenu un jugement en sa faveur en février 2012, mais a interjeté appel. En juin 2015, elle a déposé une nouvelle requête concernant la violation des dispositions sur le transfert des salariés. Le jugement du 25 avril 2018 a déclaré ses demandes irrecevables pour prescription. La cour d’appel de Paris a confirmé cette décision en mai 2020, mais a infirmé le jugement de février 2012. Mme [N] a alors formé un pourvoi en cassation, qui a été partiellement accueilli en mars 2022, entraînant un renvoi de l’affaire devant la cour d’appel. Dans ses dernières conclusions, Mme [N] a demandé la reconnaissance de la violation des dispositions conventionnelles et une indemnité de 44 000 euros pour préjudice matériel. De son côté, CAPITAL SECURITE a demandé la confirmation du jugement de 2018 et le déboutement de Mme [N]. La cour a finalement infirmé le jugement de 2018 concernant les demandes de Mme [N] et a condamné CAPITAL SECURITE à lui verser 15 000 euros pour le préjudice résultant du refus de transfert de son contrat de travail, tout en déboutant Mme [N] du surplus de ses demandes.

1. Quelle est la portée de la cassation selon le Code de procédure civile ?

La portée de la cassation est définie par l’article 624 du Code de procédure civile, qui stipule que « la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce ». Elle s’étend également à toutes les dispositions du jugement cassé qui ont un lien d’indivisibilité ou de dépendance nécessaire. Ainsi, lorsque la cassation touche un chef de dispositif, cela entraîne l’annulation de tout ce qui y est lié, indépendamment du moyen ayant conduit à cette décision. En outre, l’article 638 précise que « l’affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l’exclusion des chefs non atteints par la cassation ». Cela signifie que la juridiction de renvoi doit réexaminer l’affaire dans son ensemble, sauf pour les parties non concernées par la cassation.

2. Quelles sont les obligations de l’entreprise entrante lors de la reprise du personnel ?

Selon l’article 2.5 de l’accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel, l’entreprise sortante doit communiquer à l’entreprise entrante la liste du personnel transférable dans un délai de 8 jours ouvrables après que l’entreprise entrante s’est fait connaître. Cette liste doit être accompagnée de copies des contrats de travail et des justificatifs de formation des salariés concernés. L’entreprise entrante doit ensuite convoquer les salariés à un entretien individuel dans un délai maximum de 10 jours. Les salariés qui ne se présentent pas à cet entretien doivent justifier leur absence dans les 24 heures, sinon ils seront exclus de la liste du personnel transférable. À l’issue des entretiens, l’entreprise entrante doit communiquer à l’entreprise sortante, dans un délai de 3 jours, la liste des salariés qu’elle propose de reprendre, qui doit correspondre à un minimum de 85 % de la liste du personnel transférable.

3. Quelles sont les conditions de transfert des salariés selon l’accord du 5 mars 2002 ?

L’article 2.4 de l’accord du 5 mars 2002 stipule que les salariés susceptibles d’être transférés doivent totaliser 6 mois d’ancienneté sur le site concerné, dont 4 mois de présence minimum. Les salariés travaillant sur plusieurs sites doivent être occupés à plus de 50 % de leur temps de travail sur le site pour entrer dans le champ d’application de l’accord. Cette condition est appréciée sur les 6 mois précédant le transfert. Il est important de noter que l’ancienneté n’est pas nécessairement à temps plein, ce qui signifie que des périodes de travail à temps partiel peuvent être prises en compte.

4. Quelles sont les conséquences d’une non-conformité aux obligations de reprise ?

En cas de non-respect des obligations de reprise, comme le non-transfert d’un salarié qui remplit les conditions, cela peut entraîner une perte de chance pour le salarié concerné. Dans le cas de Mme [N], la cour a constaté qu’elle avait effectivement droit à la reprise de son contrat de travail, mais que la société CAPITAL SECURITE avait méconnu les dispositions de l’accord du 5 mars 2002. Cela a conduit à une condamnation de la société à verser des dommages-intérêts à Mme [N] pour le préjudice subi, en raison de la violation des dispositions conventionnelles.

5. Comment est déterminé le pourcentage de salariés à reprendre ?

L’accord du 5 mars 2002 impose que la proposition de reprise de l’entreprise entrante corresponde à un minimum de 85 % de la liste du personnel transférable, sauf si ce nombre n’est pas nécessaire à l’exécution du marché. Le juge doit examiner si la nouvelle configuration du marché justifie une réduction de la masse salariale. Si l’entreprise entrante propose de reprendre moins de 85 % de la liste, elle doit reprendre la totalité du nombre de personnes nécessaires à l’exécution du marché. Dans le cas de la société CAPITAL SECURITE, elle a été condamnée pour avoir proposé de reprendre moins de 85 % des salariés, ce qui était contraire aux dispositions de l’accord.

6. Quelles sont les implications d’une collusion frauduleuse entre entreprises ?

La collusion frauduleuse entre entreprises, comme alléguée par Mme [N], peut avoir des conséquences juridiques significatives. Cependant, la cour a constaté qu’il n’y avait pas de preuve suffisante pour établir une collusion entre VIGIMARK SURETE et CAPITAL SECURITE. Cela signifie que les demandes de Mme [N] concernant la responsabilité solidaire des deux entreprises ont été rejetées. Il est essentiel de prouver l’existence d’une collusion pour engager la responsabilité des entreprises, ce qui n’a pas été le cas ici.

7. Quelles sont les modalités de réparation du préjudice en cas de non-transfert ?

La réparation du préjudice en cas de non-transfert d’un salarié peut se traduire par le versement de dommages-intérêts. Dans le cas de Mme [N], la cour a reconnu qu’elle avait subi une perte de chance de conserver son emploi en raison de la violation des obligations de reprise par la société CAPITAL SECURITE. La cour a donc condamné cette dernière à verser 15 000 euros à Mme [N] en réparation du préjudice subi. Il est important de noter que cette réparation est distincte de la question du licenciement pour motif économique.

8. Quelles sont les conséquences d’un refus de reprise par un salarié ?

Lorsqu’un salarié refuse la proposition de reprise, cela n’oblige pas l’entreprise entrante à proposer une liste complémentaire. L’article 2.5 de l’accord du 5 mars 2002 précise que l’absence de réponse d’un salarié à la proposition de reprise est considérée comme un refus. Cela signifie que le salarié ne pourra pas revendiquer ultérieurement son droit à la reprise s’il n’a pas répondu dans le délai imparti. Il est donc déterminant pour les salariés de bien comprendre les implications de leur réponse à une proposition de reprise.

9. Quelles sont les obligations de l’entreprise sortante lors de la reprise ?

L’entreprise sortante a l’obligation de communiquer à l’entreprise entrante la liste du personnel transférable, conformément à l’article 2.5 de l’accord du 5 mars 2002. Cette liste doit être fournie dans un délai de 8 jours ouvrables et doit inclure des copies des contrats de travail et des justificatifs de formation. L’entreprise sortante doit également s’assurer que les critères de transfert sont respectés, afin de garantir que tous les salariés éligibles soient pris en compte. Le non-respect de ces obligations peut entraîner des conséquences juridiques pour l’entreprise sortante.

10. Quelles sont les implications des articles 1231-7 et 639 du Code civil ?

L’article 1231-7 du Code civil stipule que les condamnations à des dommages-intérêts portent intérêts au taux légal à compter du jugement. Cela signifie que toute somme due à titre de dommages-intérêts sera augmentée des intérêts légaux à partir de la date du jugement. De plus, l’article 639 du Code de procédure civile précise que la partie qui succombe dans ses prétentions doit supporter les dépens. Dans le cas de Mme [N], la société CAPITAL SECURITE a été condamnée à payer les dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

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