Déposer une marque dans un but vindicatif sous couvert de conflit familial expose le déposant à une condamnation et à la restitution de la marque.
L’article L.712-6 du code de la propriété intellectuelle dispose que si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice. Il s’agit d’une action en revendication mobilière, une action réelle. L’intention frauduleuse s’entend de la connaissance par le déposant de l’existence d’un signe utilisé par un concurrent comme signe distinctif pour identifier un de ses produits ou une de ses activités. L’action en revendication nécessite la démonstration d’un usage antérieur du signe dans le commerce, portant sur la même spécialité, et la preuve de la fraude commise par le déposant dans le seul but de nuire à autrui. En la cause, la déposante de la marque ASBH (Club de rugby de Béziers) connaissait parfaitement la valeur du signe ASBH et celle du logo associé pour le club dont ils constituent un actif indispensable. A supposer que la déposante se soit légitimement inquiétée de la protection dont bénéficiait le signe et des risques de contrefaçon encourus en l’absence du renouvellement de dépôt de la marque ASBH, elle ne justifie pas en quoi il lui était impossible de procéder au dépôt au nom de l’association sportive. La déposante n’avait aucune légitimité à déposer ces marques verbale et semi figurative en son nom alors qu’elle n’a aucun intérêt dans le club, le fait de se présenter comme un “chevalier blanc” ou la “gardienne de l’identité” du club, ne lui octroyant aucun droit ou aucun pouvoir en son sein. En tout état de cause, à l’examen des pièces versées aux débats, force est de constater que ses intentions sont nourries par des motifs personnels et vindicatifs qui s’inscrivent sans doute dans une volonté de procéder à un “règlement de compte” avec sa famille et plusieurs acteurs économiques de la région biterroise, et qui sont susceptibles de porter atteinte à la notoriété du club sportif, à ses dirigeants, à ses activités, et à son avenir, les communiqués de presse ne pouvant qu’accroître, outre la renommée médiatique de l’intéressée photographiée avantageusement avec un ballon de rugby portant le signe distinctif du club, les rumeurs de mauvaise gestion de l’association sportive, et dès lors nuire à ses intérêts. Ainsi, les deux dépôts effectués ont été effectués dans l’intention maligne de porter atteinte à des intérêts préexistants, l’intention frauduleuse consistant dans la connaissance par la déposante de l’existence du signe utilisé par l’association sportive comme signe distinctif pour identifier ses produits et activités. |
→ Résumé de l’affaireL’affaire concerne un litige entre l’Association Sportive [Localité 4] Hérault Rugby (ASBH) et Madame [K] [Y] concernant le dépôt de marques liées au club de rugby de la ville de [Localité 4]. L’ASBH utilise le sigle ASBH depuis 1991 et a déposé un logo en 2010, mais n’a pas renouvelé sa marque à temps en 2020. Madame [Y] a alors déposé des marques verbales et figuratives similaires en 2023, affirmant agir dans l’intérêt général. L’ASBH a demandé le transfert des marques à son profit, alléguant une fraude de la part de Madame [Y]. La société [Localité 4] Rugby est également intervenue dans l’affaire, soulignant l’utilisation de la marque ASBH par l’équipe professionnelle gérée par elle. Madame [Y] se défend en tant que lanceur d’alerte, dénonçant des pratiques douteuses au sein de l’association. L’affaire a été plaidée en mai 2024 et est en attente d’une décision du tribunal.
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