Simple mesure d’instruction ou saisie-contrefaçon ?

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Le grief tiré de l’exécution d’une saisie-contrefaçon déguisée ne peut être retenu qu’autant qu’il est établi que l’huissier s’est livré à des opérations relevant des pouvoirs exorbitants propres à la saisie contrefaçon (Cour d’appel de Paris, 30 septembre 2016, RG n°15-22.360).

L’ordonnance qui ouvre la voie à une simple description, et non à une description détaillée, qui caractériserait la saisie-contrefaçon, est valide.

Aux termes de l’article L615-5 du Code de propriété intellectuelle, « La contrefaçon peut être prouvée par tous moyens.

A cet effet, toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon est en droit de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, le cas échéant assistés d’experts désignés par le demandeur, en vertu d’une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d’échantillons, soit à la saisie réelle des produits ou procédés prétendus contrefaisants ainsi que de tout document s’y rapportant. L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux produits ou procédés prétendus contrefaisants en l’absence de ces derniers.

La juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer les produits ou pour mettre en œuvre les procédés prétendus contrefaisants.

Elle peut subordonner l’exécution des mesures qu’elle ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du défendeur si l’action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou la saisie annulée.

A défaut pour le demandeur de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, dans un délai fixé par voie réglementaire (article R615-3 CPI : 20 jours ouvrables ou 31 jours civils à compter de l’ordonnance), l’intégralité de la saisie, y compris la description, est annulée à la demande du saisi, sans que celui-ci ait à motiver sa demande et sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. »

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne la cession de gré à gré du fonds de commerce de la société [Localité 5] INTERNATIONAL à la société SNESV, suite à sa liquidation judiciaire. La SNESV a mis en demeure la société GROUPE COMPTOIR de justifier la licéité de ses approvisionnements en vaisselle, suspectant une contrefaçon des articles vendus. Une mesure d’instruction a été ordonnée pour vérifier les faits. La société GROUPE COMPTOIR a contesté cette demande et a demandé la rétractation de l’ordonnance sur requête. Les deux affaires ont été jointes et sont en attente de délibéré.

Les points essentiels

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence du président du Tribunal judiciaire

L’article L 721-3 du code de commerce prévoit que les tribunaux de commerce ont compétence pour traiter des contestations relatives aux engagements entre commerçants, artisans, établissements de crédit, sociétés de financement, et autres.

Sur le défaut d’actes de contrefaçon

Les articles du Code de la propriété intellectuelle définissent clairement ce qu’est une contrefaçon de marque et les interdictions qui en découlent. Il est important de respecter les droits attachés à une marque pour éviter toute atteinte à ces droits.

Sur le défaut de justification des droits de propriété intellectuelle de la SNESV

La SNESV a justifié de ses droits de propriété intellectuelle par un acte de cession entre [Localité 5] INTERNATIONAL et la SNESV, démontrant ainsi sa légitimité à agir en cas de contrefaçon.

Sur la compétence du Tribunal judiciaire

La compétence du Tribunal judiciaire de Rennes est retenue pour connaître du litige sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, en raison des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale allégués.

Sur l’existence d’une “saisie-contrefaçon déguisée”

La société GROUPE COMPTOIR est déboutée de sa demande de rétractation de l’ordonnance sur requête au motif d’une saisie-contrefaçon irrégulière, car les opérations du commissaire de justice ne correspondaient pas à une saisie-contrefaçon.

Sur l’absence de réunion des conditions de la mesure d’instruction in futurum

La mesure d’instruction demandée par la SNESV est fondée sur un motif légitime et circonscrite dans le temps et dans son objet, justifiant ainsi son utilité dans la perspective d’une action en réparation au fond.

Sur la demande de désignation d’un expert judiciaire et de mise sous séquestre

Faute de production du procès-verbal de saisie du commissaire de justice, la juridiction ne peut se prononcer sur la nécessité de désigner un expert judiciaire et de mettre sous séquestre.

Sur la demande de modification de la requête de la SNESV

La demande de modification de la requête de la SNESV est rejetée, car rien ne justifie une telle modification après son exécution.

Sur les demandes accessoires

La société GROUPE COMPTOIR supportera les dépens de l’instance et sera condamnée à verser à la SNESV la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Les montants alloués dans cette affaire: – La société GROUPE COMPTOIR est condamnée à verser à la SNESV la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile
– La société GROUPE COMPTOIR est condamnée aux entiers dépens de l’instance

Réglementation applicable

– Code de commerce
– Code de la propriété intellectuelle
– Code de procédure civile

Article L 721-3 du code de commerce:
« Les tribunaux de commerce connaissent:
1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;
2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;
3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes (…) ».

Article L711-1 du Code de la propriété intellectuelle:
« La marque de produits ou de services est un signe servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux d’autres personnes physiques ou morales. Ce signe doit pouvoir être représenté dans le registre national des marques de manière à permettre à toute personne de déterminer précisément et clairement l’objet de la protection conférée à son titulaire. »

Article L716-4 du Code de la propriété intellectuelle:
« L’atteinte portée au droit du titulaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits attachés à la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-2 à L. 713-3-3 et au deuxième alinéa de l’article L. 713-4. »

Article L713-2 du Code de la propriété intellectuelle:
« Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :
1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque »

Article L713-3 du Code de la propriété intellectuelle:
« Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires, pour des produits ou des services, d’un signe identique ou similaire à la marque jouissant d’une renommée et utilisé pour des produits ou des services identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, si cet usage du signe, sans juste motif, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque, ou leur porte préjudice. »

Article L712-2 du Code de la propriété intellectuelle:
« La propriété de la marque s’acquiert par l’enregistrement. »

Article L716-5 II. du Code de la propriété industrielle:
« les autres actions civiles et les demandes relatives aux marques, autres que celles mentionnées au I, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire. »

Article 145 du code de procédure civile:
« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Stéphane BOURDAIS
– Me Stéphanie PRENEUX

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