Pour établir l’originalité d’un logiciel il convient notamment de préciser quels sont les arbitrages que le concepteur du logiciel a été amené à opérer entre les choix qui s’offraient à lui dans la conception du logiciel en cause.
Il appartient notamment au concepteur de logiciel de démontrer en quoi les éléments des codes sources distingueraient les différentes versions du logiciel en cause, ou à tout le moins certaines d’entre elles, des logiciels existants dans le domaine d’activité considéré, en exposant le cheminement intellectuel qu’il a suivi et les options qu’il a prises parmi celles qui s’offraient à lui, de manière à placer la juridiction saisie en mesure de procéder à l’analyse in concreto qui lui incombe de la réalité de son effort créatif. Il est de principe que sont protégeables le code source et le code objet, le cahier des charges, la documentation associée au programme ainsi que le matériel de conception préparatoire à l’exclusion du langage de programmation qui ne constitue qu’un moyen d’expression et non l’expression elle-même et des algorithmes et des fonctionnalités, qui relèvent l’un et l’autre du domaine des idées, lesquelles sont de libre parcours. Toutefois un exposé des faits par le concepteur du logiciel qui décrit la démarche intellectuelle suivie et qui procède d’une pure logique, qui présuppose que pour parvenir à la fonctionnalité souhaitée, il convient au préalable d’introduire dans le système l’ensemble des données indispensables, n’est pas original. Cet exposé ne révèle en lui-même aucun apport créatif dès lors qu’il se borne à exposer un objectif de fonctionnalités obtenues grâce à des langages informatiques, à des algorithmes (AES 256, Hufman, Blowfish, MD5), à une infrastructure en open source (Jquery- Ajax) et à une base de données MySQL également en open source. Nos conseils : 1. Attention à bien documenter et conserver toutes les étapes de conception et de développement de votre logiciel, y compris les documents préparatoires, les choix opérés, et les versions successives du code source. Cela vous permettra de prouver l’originalité de votre travail en cas de litige. 2. Il est recommandé de démontrer clairement l’effort intellectuel personnel que vous avez apporté à la création du logiciel, en exposant les choix opérés, les arbitrages réalisés, et les fonctionnalités spécifiques que vous avez développées. Cela renforcera votre position en cas de contestation de la propriété intellectuelle. 3. Il est essentiel de définir clairement les attentes et les fonctionnalités du logiciel dès le début du projet, afin d’éviter toute ambiguïté sur les résultats attendus. Assurez-vous de communiquer régulièrement avec vos clients pour valider les étapes de développement et éviter tout malentendu sur la conformité de la livraison. |
→ Résumé de l’affaireL’affaire concerne un litige entre Monsieur [U], créateur d’un logiciel de tarification des primes d’assurance pour la société ADP Courtage Plus, et cette dernière ainsi que l’association Appuis. Monsieur [U] a accusé la société ADP d’avoir utilisé son logiciel sans autorisation après son départ de l’entreprise, ce qui a été considéré comme un acte de contrefaçon par le tribunal judiciaire de Nancy. Le tribunal a condamné la société ADP à verser des dommages-intérêts à Monsieur [U] et à supprimer le logiciel contrefait de ses équipements informatiques. Les parties ont fait appel de cette décision et l’affaire est en attente de jugement.
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→ Les points essentielsSur l’originalité du logiciel tarificateurAux termes des dispositions de l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. L’article L.112-2 13° du même code précise que sont considérées notamment comme des oeuvres de l’esprit au sens du présent code, les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire. Comme pour toute autre oeuvre de l’esprit, il appartient à celui se prévaut de la qualité d’auteur d’un logiciel de rapporter in concreto la preuve de son originalité, laquelle résulte ici des choix qu’il a opérés, d’un apport intellectuel propre et d’efforts personnalisés. Dans ce contexte, il incombe au juge ‘de rechercher au cas par cas si l’auteur a fait preuve de l’effort personnalisé requis, allant au-delà de la simple mise en oeuvre d’une logique automatique et contraignante’ en exposant en quoi les choix opérés en témoignent. Les éléments protégeables et non protégeablesIl est de principe que sont protégeables le code source et le code objet, le cahier des charges, la documentation associée au programme ainsi que le matériel de conception préparatoire à l’exclusion du langage de programmation qui ne constitue qu’un moyen d’expression et non l’expression elle-même et des algorithmes et des fonctionnalités, qui relèvent l’un et l’autre du domaine des idées, lesquelles sont de libre parcours. Les moyens mis en oeuvre dans le logiciel tarificateurMonsieur [U] expose dans ses écritures les moyens mis en oeuvre pour la création du logiciel tarificateur, notamment en ce qui concerne la communication des données, le recueil des données, le stockage des données, et les différentes versions du logiciel. Cependant, il ne parvient pas à démontrer un apport intellectuel propre résultant des choix qu’il aurait réalisés dans le codage du logiciel en cause. Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêtsL’association Appuis demande des dommages et intérêts pour le non-fonctionnement du logiciel tarificateur. Cependant, la cour relève que les factures en question ne permettent pas d’inférer avec certitude qu’elles concernent la création du logiciel. De plus, il n’est pas démontré que le logiciel n’a jamais fonctionné, et des échanges de mails montrent certaines erreurs mais pas un dysfonctionnement complet. Sur les frais et dépensMonsieur [U] sera condamné à supporter une partie des dépens de première instance et d’appel, ainsi que de payer une somme à la société ADP au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’association Appuis sera déboutée de sa demande de frais et dépens. Les montants alloués dans cette affaire: – Monsieur [T] [U] est condamné à payer la somme de 3000 euros à la société ADP Courtage Plus sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– Monsieur [T] [U] est condamné aux dépens de première instance et d’appel dans la proportion des deux tiers – La société ADP Courtage Plus et l’association Appuis sont condamnées in solidum au paiement des dépens dans la proportion d’un tiers |
→ Réglementation applicable– Code de la propriété intellectuelle
– Code de procédure civile Article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle: Article L.112-2 13° du code de la propriété intellectuelle: Article 455 du code de procédure civile: Article 700 du code de procédure civile: – Code de la propriété intellectuelle |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Michaël DECORNY de la SCP MOUKHA DECORNY
– Me Patrice CANNET de la SARL CANNET MIGNOT – Me Rui Manuel PEREIRA de la SCP TERTIO AVOCATS – Me Constance CUVILLIER substituant Me Vincent CUISINIER de la SELARL du PARC |