Meilleure relation client de l’année c/ Meilleur produit de l’année

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En l’absence de risque de confusion entre logos, l’action en parasitisme ne peut prospérer.

La société Viseo (Logo Meilleur produit de l’année) a fait valoir en vain que la société Gabaon (Logo Meilleure relation client de l’année) a commis des faits distincts de parasitisme consistant à profiter sans bourse délier de la notoriété de son trophée en modifiant en 2020 son logo pour adopter un signe totalement différent du précédent et très proche du sien, reprenant la combinaison arbitraire d’éléments figuratifs ayant fait le succès de son trophée, ainsi qu’en déposant la marque figurative de l’Union Européenne n°018197490 le 17 février 2020, dépourvu de signe verbal, lui permettant de l’utiliser pour l’ensemble de ses trophées et prouvant la recherche d’un effet de gamme

En la cause, le logo de la société Gabaon est constitué de trois carrés de trois couleurs distinctes (blanc, noir et orange), se superposant, le carré intermédiaire noir comportant une anse qui le fait ressembler à un cabas, tandis que le logo de la société Viséo est constitué de deux carrés superposés, l’un rouge, l’autre bleu, comportant chacun un bord arrondi et étant reliés par un signe en forme de demi lune ressemblant à un sourire. Ainsi tant le nombre que les couleurs des carrés sont distincts, tout comme leur position, ainsi que les éléments additionnels constitués de la demi lune et de l’anse.

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce, ce qui implique qu’un signe ou un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d’un risque de confusion sur l’origine du produit dans l’esprit de la clientèle, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.
Le parasitisme, qui n’exige pas de risque de confusion, consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis (Cass. com. 28 juin 2023, pourvoi n° 22-10.759).

Il est constant que cette action exige la preuve d’une faute relevant de faits distincts de ceux allégués au titre de la contrefaçon (Cass. com., 18 sept. 2019, n° 17-23.253).
Toutefois, l’action en concurrence déloyale, qui est ouverte à celui qui ne peut se prévaloir d’aucun droit privatif, peut se fonder sur des faits matériellement identiques à ceux allégués au soutien d’une action en contrefaçon rejetée pour défaut de constitution de droit privatif, dès lors qu’il est justifié d’un comportement fautif (Cass. com., 7 juin 2016 n°1426950).

Résumé de l’affaire

L’affaire oppose la société Viseo Customer Insights à la société New Interactive Marketing et à la société Gabaon Conseils concernant des concours de service client. Viseo affirme que Newim a organisé un concours similaire au sien, ce qui constituerait une contrefaçon de ses marques et un acte de parasitisme économique. Viseo demande des dommages et intérêts ainsi que des mesures d’interdiction à l’encontre de Newim et Gabaon. De leur côté, Newim et Gabaon contestent les accusations de Viseo et demandent à être déboutés de leurs demandes. L’affaire a été plaidée en novembre 2023 après une instruction clôturée en janvier 2023.

Les points essentiels

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’exception de procédure tirée de la nullité de l’assignation et la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir

Moyens des parties

La société Viséo fait valoir que le tribunal est incompétent pour statuer sur l’exception de procédure tirée de la nullité de l’assignation délivrée à la société Gabaon et la fin de non-recevoir pour défaut d’intérêt à agir contre la société Newim, soulevées par les défenderesses, au motif qu’elles relèvent de la seule compétence du juge de la mise en état qui n’en a pas été saisi. En réponse, les sociétés Newim et Gabaon fondent la compétence du tribunal sur les termes d’un bulletin émis par le juge de la mise en état de la 5e chambre 1ère section du tribunal judiciaire de Paris renvoyant l’examen des fins de non-recevoir au fond.

Réponse du tribunal

L’article 789, 1° et 6° du code de procédure civile, en sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable aux instances en cours au 1er janvier 2020, dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure et les fins de non-recevoir. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu’elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état. Aux termes de l’article 791 du même code, le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l’article 768 du même code. En l’espèce, conformément aux textes précités, il incombait aux sociétés Newim et Gabaon de saisir le juge de la mise en état, par conclusions séparées, des exception de procédure et fin de non-recevoir soulevées à l’encontre de la société Viseo, ce dont elles se sont abstenues. Elles ne sont par conséquent pas recevables à les soulever devant le tribunal, étant précisé que le bulletin invoqué par les défenderesses, émis par le juge de la mise en état de la 1ère section de la 5ème chambre, est étranger à la présente instance.

Sur les demandes principale en contrefaçon des marques n°3495351, n°3870904 et n°4267789 et subsidiaire d’atteinte à leur renommée

Moyens des parties

Pour s’opposer à la demande principale en contrefaçon et à la demande subsidiaire en atteinte à la renommée des marques n°3495351, n°3870904 et n°4267789 présentées par la société Viseo, les sociétés Newim et Gabaon font valoir à titre préalable que la société Viseo ne prouve pas ses droits sur les marques qu’elle invoque en l’absence de production des certificats d’enregistrement. En réponse, la société Viseo fait valoir que la marque n°3495351 lui a été cédée le 18 décembre 2018, que les marques n°3870904 et n°4267789 lui ont été cédées le 19 octobre 2020, les cessions ayant été inscrites à l’INPI en 2020.

Réponse du tribunal

L’article L.716-4-2 du code de la propriété intellectuelle dispose en son premier alinéa que l’action civile en contrefaçon est engagée par le titulaire de la marque ou par le licencié avec le consentement du titulaire. Selon l’article L.714-7 du même code, toute transmission ou modification des droits attachés à une marque enregistrée doit être inscrite au registre national des marques pour être opposable aux tiers. En l’espèce, la société Viseo n’a pas rapporté la preuve de ses droits sur les marques litigieuses, ce qui entraîne le rejet de ses demandes en contrefaçon et atteinte à la renommée des marques.

Sur la demande principale en concurrence parasitaire

Moyens des parties

La société Viseo accuse la société Gabaon de parasitisme en utilisant un logo similaire au sien pour ses trophées. La société Gabaon conteste ces accusations en arguant que les signes en présence sont différents et ne créent pas de confusion.

Réponse du tribunal

Le tribunal conclut que la société Viseo n’a pas prouvé de faute de parasitisme de la part de la société Gabaon, et rejette donc sa demande en concurrence parasitaire.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la société Viseo sera condamnée aux dépens. En outre, elle devra verser aux sociétés Gabaon et Newim une somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire à titre provisoire.

Ce jugement met en lumière l’importance de la preuve des droits sur les marques dans les actions en contrefaçon et concurrence parasitaire. Il souligne également l’importance de respecter les règles de compétence judiciaire pour soulever des exceptions de procédure.

Les montants alloués dans cette affaire: – La société Viseo Customer Insights est condamnée à payer 8 000 euros aux sociétés Gabaon Conseils et New Interactive Marketing en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Réglementation applicable

– Code de procédure civile
– Code de la propriété intellectuelle
– Code civil

Article 789, 1° et 6° du code de procédure civile:
« Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure et les fins de non-recevoir. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu’elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état. »

Article 791 du code de procédure civile:
« Le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l’article 768 du même code. »

Article L.716-4-2 du code de la propriété intellectuelle:
« L’action civile en contrefaçon est engagée par le titulaire de la marque ou par le licencié avec le consentement du titulaire, sauf stipulation contraire du contrat. Toutefois, le bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation peut agir en contrefaçon si, après mise en demeure, le titulaire n’exerce pas ce droit dans un délai raisonnable. »

Article L.714-7 du code de la propriété intellectuelle:
« Toute transmission ou modification des droits attachés à une marque «enregistrée» doit, pour être opposable aux tiers, être inscrite au registre national des marques. Toutefois, avant son inscription, un acte est opposable aux tiers qui ont acquis des droits après la date de cet acte mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de l’acquisition de ces droits. Le licencié, partie à un contrat de licence non inscrit sur le registre national ou international des marques, est également recevable à intervenir dans l’instance en contrefaçon engagée par le «titulaire» de la marque afin d’obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre. »

Article 1240 du code civil:
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Article 696 du code de procédure civile:
« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. »

Article 700 du code de procédure civile:
« Le juge peut condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre, pour les frais exposés mais non compris dans les dépens, une somme qu’il détermine, en tenant compte de l’équité et de la situation économique de cette partie. »

Article 514 du code de procédure civile:
« Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. L’exécution provisoire de droit n’a pas à être écartée en l’espèce. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Olivier GUIDOUX
– Maître Franck BERTHAULT

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