Amiante : la responsabilité du diagnostiqueur

Notez ce point juridique

Une société (diagnostiqueur d’amiante) commet une faute en effectuant sa mission de façon imparfaite et incomplète sans respecter les règles de l’art.

La responsabilité du diagnostiqueur est engagée lorsque:

-le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art;

-le diagnostic établi en application de l’article L 271-4 du code de la construction et de l’habitation est erroné et ce, que le matériau détecté soit ou non défectueux et nécessite ou non d’être remplacé.

Il a retenu la présence de matériaux amiantés facilement visibles et jugé que la société GR Audit et inspection n’avait pas réalisé le diagnostic amiante conformément aux règles de l’art .

Le diagnostic technique avant-vente prévu à l’article L271-4 du code de la construction et de l’habitation a pour finalité de mieux informer le futur acquéreur d’un immeuble sur les éléments du bâtiment susceptibles de porter atteinte à sa santé ou sa sécurité.

Le professionnel désigné pour établir le diagnostic engage sa responsabilité si celui-ci n’est pas réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art et qu’il se révèle erroné.

Si l’acquéreur n’est pas contractuellement lié au diagnostiqueur, il est cependant légitime à se prévaloir d’un manquement contractuel de ce dernier qui lui a causé un dommage sur le fondement de la responsabilité délictuelle.


La SCI Zaouali a acquis un bâtiment à usage de commerce et a fait réaliser un diagnostic amiante avant-vente par la société GR Audit et inspection, assurée par AXA France IARD. Le diagnostic a conclu à l’absence d’amiante, mais ultérieurement, la présence d’amiante a été découverte, nécessitant des travaux de désamiantage. La SCI Zaouali a saisi le tribunal judiciaire pour obtenir réparation des préjudices subis. Le tribunal a condamné les sociétés GR Audit et inspection et AXA France IARD à payer les travaux de désamiantage, ainsi qu’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. AXA France IARD a fait appel du jugement. La responsabilité de la société GR Audit et inspection a été retenue pour avoir réalisé un diagnostic amiante incomplet et erroné. Le préjudice lié au désamiantage a été indemnisé. AXA France IARD a été condamnée à garantir la société GR Audit et inspection, avec déduction de la franchise contractuelle. La SCI Zaouali a également demandé des dommages et intérêts pour préjudice moral et de jouissance, mais ces demandes ont été rejetées. Les sociétés GR Audit et inspection et AXA France IARD ont été condamnées aux dépens et à verser une somme à la SCI Zaouali au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En l’espèce, la société GR Audit et inspection a reçu pour mission d’effectuer un repérage ayant pour objectif de rechercher, identifier, localiser et évaluer l’état de conservation des matériaux et produits des listes A et B de l’annexe 13-9 du code de la santé publique accessibles sans travaux destructifs.

Ses vérifications ont porté sur les flocages, les calorifugeages et les faux plafonds (Annexe 13.9 du code de la santé publique liste A), les parois verticales intérieures, les planchers et plafonds, les conduits, canalisations et équipements intérieurs, les toitures, les bardages et façades légères et les conduits en toiture et façade (Annexe 13.9 du code de la santé publique Liste B). Il est indiqué en conclusion du rapport qu’il n’a pas été repéré de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante.

Arrêt de la Cour

La cour a infirmé le jugement condamnant la SARL GR Audit et inspection et la société Axa France Assurances à payer à la SCI Zaouali une somme au titre des réparations nécessitées par la présence d’amiante. Elle a confirmé le jugement pour le reste et a condamné les deux sociétés à payer une autre somme à la SCI Zaouali en réparation de son préjudice.

Décision de la Cour

La cour a débouté la SCI Zaouali de sa demande de préjudice moral et a condamné la société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection à payer une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Les deux sociétés ont également été condamnées aux dépens d’appel.

Conclusion de l’Affaire

En conclusion, la cour a rendu sa décision finale concernant l’affaire, statuant publiquement et contradictoirement. La SCI Zaouali a obtenu une indemnisation pour son préjudice, mais sa demande de préjudice moral a été rejetée. Les sociétés AXA France IARD et GR Audit et inspection ont été condamnées à payer des sommes supplémentaires et aux dépens d’appel.

– La SARL GR Audit et inspection et la société Axa France Assurances sont condamnées à payer à la SCI Zaouali la somme de 38 360 euros hors taxes en réparation de son préjudice
– La société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection sont condamnées à payer à la SCI Zaouali la somme de 2 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– La société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection sont condamnées aux dépens d’appel


Réglementation applicable

– Code de la construction et de l’habitation
– Code de la santé publique
– Code civil
– Code des assurances
– Code de procédure civile

Article L271-4 du Code de la construction et de l’habitation:
Le diagnostic technique avant-vente a pour finalité de mieux informer le futur acquéreur d’un immeuble sur les éléments du bâtiment susceptibles de porter atteinte à sa santé ou sa sécurité. Le professionnel désigné pour établir le diagnostic engage sa responsabilité si celui-ci n’est pas réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art et qu’il se révèle erroné.

Article 1240 du Code civil:
Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Article L112-6 du Code des assurances:
L’assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice des exceptions opposables au souscripteur originaire.

Article 700 du Code de procédure civile:
Les parties succombant pour l’essentiel de leurs prétentions peuvent être condamnées à verser une somme au titre des frais exposés pour la défense de l’autre partie.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Jean-pascal TREINS de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS
– Me Laurent LUCAS de la SELARL AVOX
– Me François-Xavier DOS SANTOS
– Me Jean-michel DE ROCQUIGNY

Mots clefs associés

– Motivation
– Responsabilité de la société GR Audit et inspection
– Normes et règles de l’art
– Diagnostic erroné
– Matériaux amiantés
– Obligations du diagnostiqueur
– Repérage avant-vente
– Couverture en fibrociment
– Présence d’amiante
– Faute du diagnostiqueur
– Préjudice lié à la remise en état
– Coût des réparations
– Préjudice certain
– Désamiantage
– Responsabilité du diagnostiqueur
– Franchise contractuelle
– Dépens
– Indemnisation
– Préjudice moral

– Motivation: ensemble des facteurs internes et externes qui poussent un individu à agir dans un certain sens
– Responsabilité de la société GR Audit et inspection: obligation légale de cette société de réaliser des audits et inspections conformes aux normes en vigueur
– Normes et règles de l’art: ensemble des normes et pratiques reconnues comme étant les meilleures dans un domaine spécifique
– Diagnostic erroné: constatation incorrecte d’une situation ou d’un problème
– Matériaux amiantés: matériaux contenant de l’amiante, une substance cancérigène
– Obligations du diagnostiqueur: devoirs légaux et professionnels d’une personne réalisant des diagnostics
– Repérage avant-vente: identification des risques et défauts d’un bien immobilier avant sa vente
– Couverture en fibrociment: revêtement en fibres de ciment, souvent utilisé dans la construction
– Présence d’amiante: constatation de la présence de l’amiante dans un bâtiment ou un matériau
– Faute du diagnostiqueur: erreur ou négligence commise par le diagnostiqueur dans l’exercice de ses fonctions
– Préjudice lié à la remise en état: dommage subi en raison des travaux de réparation ou de remise en état d’un bien
– Coût des réparations: montant nécessaire pour effectuer les réparations ou travaux nécessaires
– Préjudice certain: dommage avéré et prouvé subi par une personne
– Désamiantage: processus de retrait de l’amiante d’un bâtiment ou d’un matériau
– Responsabilité du diagnostiqueur: obligation légale du diagnostiqueur de répondre des conséquences de ses actes professionnels
– Franchise contractuelle: montant fixe ou pourcentage des dommages à la charge de l’assuré en cas de sinistre
– Dépens: frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire
– Indemnisation: compensation financière versée à une personne pour réparer un préjudice subi
– Préjudice moral: dommage non matériel subi par une personne, tel que le stress, la souffrance morale, etc.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°162

DU : 27 Mars 2024

N° RG 22/02341 – N° Portalis DBVU-V-B7G-F5TH

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Arrêt rendu le vingt sept Mars deux mille vingt quatre

décision dont appel : Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 07 Novembre 2022, enregistrée sous le n° 22/00883

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire

En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

S.A. AXA FRANCE IARD

immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 722 057 460

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentants : Me Jean-pascal TREINS de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Laurent LUCAS de la SELARL AVOX, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

ET :

S.A.R.L. GR AUDIT ET INSPECTION

immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le numéro 497 826 875

Monsieur [G] [E] [Adresse 1]

[Adresse 3]

Représentant : Me François-Xavier DOS SANTOS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

S.C.I. ZAOUALI

immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le numéro 818 970 527

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentant : Me Jean-michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMÉS

DEBATS : A l’audience publique du 10 janvier 2024 Madame DUBLED-VACHERON a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 28 février 2024.

ARRET :

Prononcé publiquement le 27 Mars 2024, après prorogé du délibéré initialement prévu le 28 février 2024 puis le 13 mars 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La SCI Zaouali s’est portée acquéreur d’un bâtiment à usage de commerce situé au [Adresse 6]. Dans le cadre de l’établissement des diagnostics obligatoires, la société GR Audit et inspection, assurée auprès de la compagnie AXA France IARD, a établi un diagnostic amiante avant-vente daté du 5 février 2014.

Elle a conclu à l’absence de repérage de produits ou matériaux contenant de l’amiante.

Par assignation du 10 décembre 2020, la SCI Zaouali a saisi le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, aux fins de voir condamner la société AXA France IARD, in solidum avec la société GR Audit et inspection, au paiement des travaux de désamiantage rendus nécessaires suite à la découverte d’une sous-toiture en fibrociment.

Par jugement du 7 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a condamné les sociétés GR Audit et inspection et AXA France IARD au paiement des sommes suivantes :

– 68.740 euros HT au titre des réparations nécessitées par la présence d’amiante ;

– 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le tribunal a considéré que le diagnostiqueur n’avait pas réalisé le diagnostic amiante selon les règles de l’art.

La société AXA France IARD a été condamnée à garantir la société GR Audit et inspection sous déduction de la franchise contractuelle. Elle a relevé appel du jugement selon déclaration d’appel du 19 décembre 2022.

Aux termes de conclusions notifiées le 27 juin 2023 elle demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :

-juger que la responsabilité de la société GR Audit et inspection n’est pas engagée;

En conséquence,

-de débouter la SCI Zaouali de l’intégralité de ses demandes à son encontre ;

-de condamner la SCI Zaouali à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-de condamner la SCI Zaouali aux entiers dépens.

Subsidiairement,

-de débouter la SCI Zaouali de l’intégralité de ses demandes en l’absence de demande sur le fondement de la perte de chance,

Très subsidiairement

-de ramener le préjudice à de plus justes proportions ;

En tout état de cause

-de juger que toute condamnation prononcée contre elle le sera dans les limites de la police, c’est-à-dire franchise contractuelle déduite.

Par conclusions notifiées le 12 juin 2023, la SCI Zaouli demande à la cour :

– de débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

-sur son appel incident, de réformer le jugement dont appel.

-de condamner la société GR Audit et inspection in solidum avec son assureur AXA à lui payer et porter la somme principale de 68.740 euros TTC, avec indexation BT 34 entre décembre 2020 (rapport judiciaire) et l’arrêt à intervenir outre, au titre du trouble de jouissance pendant les travaux, une somme de 10 000 euros et 7.500 euros de préjudice moral ainsi qu’une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel avec confirmation de l’indemnité allouée par le tribunal et les entiers dépens dans lesquels seront compris les frais de référé et d’expertise.

Suivant conclusions notifiées le 4 avril 2023, la société GR Audit et Inspection demande à la cour :

A titre principal :

-d’infirmer le jugement du 7 novembre 2022,

Statuant à nouveau,

-de débouter la SCI Zaouali de l’intégralité de ses demandes, et de son appel incident.

Subsidiairement,

-de débouter la SCI Zaouali de toute demande non justifiée par la production de sa situation au regard de la TVA, de ses demandes de reconstruction d’une couverture et d’un préjudice de jouissance,

-de condamner la compagnie d’assurances AXA France IARD, à la garantir et relever indemne de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre dans les limites de leur contrat d’assurance.

En tout état de cause,

-de condamner la SCI Zaouali à lui payer et porter une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

-de débouter toute partie contestante de pareilles demandes dirigées à son encontre

-de condamner la SCI Zaouali aux entiers dépens qui comprendront ceux de référé, de première instance, les frais d’expertise et les dépens d’appel.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposés de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2023.

Motivation : I- Sur la responsabilité de la société GR Audit et inspection: Le tribunal a rappelé que la responsabilité du diagnostiqueur est engagée lorsque: -le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art; -le diagnostic établi en application de l’article L 271-4 du code de la construction et de l’habitation est erroné et ce, que le matériau détecté soit ou non défectueux et nécessite ou non d’être remplacé. Il a retenu la présence de matériaux amiantés facilement visibles et jugé que la société GR Audit et inspection n’avait pas réalisé le diagnostic amiante conformément aux règles de l’art . La compagnie AXA France IARD, appelante, distingue trois types d’intervention du diagnostiqueur et précise que les obligations de ce dernier sont différentes suivant l’intervention demandée. S’agissant du repérage avant-vente, elle fait valoir que le diagnostic est limité à de simples inspections visuelles, sans sondages destructifs, visant à repérer les matériaux des listes A et B définies par l’annexe 13-9 du code de la santé publique ; la recherche s’effectue dans ce cas pour les matériaux et produits accessibles. Dans le cas d’espèce, elle note que la couverture en fibrociment était dissimulée sous un bac acier, ce qui imposait de soulever le faux plafond pour détecter les matériaux amiantés. Elle soutient que les matériaux amiantés ne présentent pas de danger pour les occupants des locaux et qu’en conséquence, il n’existe pas de préjudice puisqu’il n’existe pas d’obligation de remplacer la couverture du bâtiment. La société GR Audit inspection dans l’immobilier reprend les arguments de son assureur quant à son absence de responsabilité. La société Zaouali fait valoir que le rapport de l’expert confirme que la structure de couverture en fibrociment était parfaitement visible de l’extérieur du bâtiment comme de l’intérieur, en soulevant simplement une plaque de faux-plafond. Elle soutient qu’en matière de diagnostic obligatoire, la faute dans le constat de l’existence d’un matériau dangereux est génératrice de responsabilité automatique du diagnostiqueur. Sur ce : Suivant les dispositions de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. 1-sur la faute : Le diagnostic technique avant-vente prévu à l’article L271-4 du code de la construction et de l’habitation a pour finalité de mieux informer le futur acquéreur d’un immeuble sur les éléments du bâtiment susceptibles de porter atteinte à sa santé ou sa sécurité. Le professionnel désigné pour établir le diagnostic engage sa responsabilité si celui-ci n’est pas réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art et qu’il se révèle erroné. Si l’acquéreur n’est pas contractuellement lié au diagnostiqueur, il est cependant légitime à se prévaloir d’un manquement contractuel de ce dernier qui lui a causé un dommage sur le fondement de la responsabilité délictuelle. En l’espèce, la société GR Audit et inspection a reçu pour mission d’effectuer un repérage ayant pour objectif de rechercher, identifier, localiser et évaluer l’état de conservation des matériaux et produits des listes A et B de l’annexe 13-9 du code de la santé publique accessibles sans travaux destructifs. Ses vérifications ont porté sur les flocages, les calorifugeages et les faux plafonds (Annexe 13.9 du code de la santé publique liste A), les parois verticales intérieures, les planchers et plafonds, les conduits, canalisations et équipements intérieurs, les toitures, les bardages et façades légères et les conduits en toiture et façade (Annexe 13.9 du code de la santé publique Liste B). Il est indiqué en conclusion du rapport qu’il n’a pas été repéré de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante. La mission effectuée trois ans plus tard et le 20 avril 2017 par la société Ecolabel a révélé la présence d’amiante. Le rapport d’expertise judiciaire établi par M. [J] signale la présence d’une toiture en amiante-ciment, sur la partie stockage du bâtiment, qui a été recouverte par une sur-toiture en bacs acier. Un faux plafond en plaques démontables couvre la zone de stockage et ne permet pas de voir la couverture d’origine à moins de soulever une dalle. L’expert indique que la présence de fibrociment était très facilement détectable sans travaux destructifs par n’importe quel diagnostiqueur. Les photos prises sur site en attestent puisque les plaques ondulées de fibrociment sont visibles depuis la dalle de faux-plafonds déposée mais également de l’extérieur. La société GR Audit et inspection évoque en défense les circonstances dans lesquelles le second repérage a été effectué à la demande du locataire du local ; elle souligne que la société Zaouli a choisi de ne pas agir contre son vendeur et d’invoquer un problème de vice caché alors que la problématique porte sur la conformité dans la vente. Toutefois ces arguments sont inopérants dès lors que la société Zaouli qui dispose du droit d’agir contre le vendeur en garantie des vices cachés (sous réserve de ne pas s’opposer à une clause d’exclusion inscrite comme dans le cas d’espèce dans l’acte de vente) demeure libre d’agir contre le diagnostiqueur sous réserve d’établir sa responsabilité. La société GR Audit et inspection ajoute que le second diagnostic intervient dans un contexte différent puisque lors de sa visite le local était un local industriel de stockage qui a changé de destination pour devenir un local de stockage et de commercialisation de denrées alimentaires. La destination des lieux n’entre cependant pas en ligne de compte puisqu’il appartenait à la société GR Audit et inspection de porter à la connaissance de l’acquéreur, au moyen de vérifications strictement énumérées et codifiées, l’existence éventuelle d’amiante dans le bâtiment inspecté. Au demeurant la société GR Audit et inspection reconnaît avoir établi un diagnostic erroné tout en affirmant que cette erreur ne constitue pas une faute civile puisqu’au moment de la vente la présence d’amiante n’avait aucune incidence, le retrait n’étant pas obligatoire. Ce faisant la société GR Audit et inspection opère une confusion entre la caractérisation de sa faute et le préjudice éventuel qui en résulte. Le contrôle auquel doit procéder le diagnostiqueur n’est pas purement visuel et il lui appartient d’effectuer toutes vérifications n’impliquant pas de travaux destructifs. Les opérations d’expertise montrent que la présence d’amiante était aisément détectable et ce, sans travaux destructifs en soulevant notamment une dalle du faux plafond. Les constatations de l’expert judiciaire sont, sur ce point, corroborées par celles de M. [K] mandaté par la société Allianz Assurances. Ce dernier indique que certains éléments auraient dû interpeler le diagnostiqueur, à savoir un écart relativement important entre le bas de la couverture bacs acier et le niveau de la gouttière laissant supposer la pose d’une sur couverture. Cet indice aurait dû l’amener à faire le tour du bâtiment de sorte qu’il aurait pu constater dans l’angle sud-ouest la présence des plaques fibrociment, l’habillage de la rive n’étant pas fermé à son extrémité. Il est donc établi que la société GR Audit et inspection a commis une faute en effectuant sa mission de façon imparfaite et incomplète sans respecter les règles de l’art. 2-sur le préjudice lié à la remise en état: Le tribunal a jugé que le coût des réparations nécessitées par la présence d’amiante non signalée par le diagnostiqueur dans le rapport d’évaluation destiné à informer l’acquéreur sur la présence de produits amiantés constitue un préjudice certain qui doit être intégralement réparé et non une perte de chance d’avoir pu négocier à la baisse le prix de vente. Il a fixé l’indemnisation au coût du désamiantage, soit 68 740 euros hors taxes. La société Axa France IARD objecte qu’il n’existe aucun préjudice puisqu’en l’état de la règlementation actuelle aucune disposition n’impose ni même ne préconise le retrait obligatoire de matériaux amiantés. Elle fait valoir que les matériaux amiantés ne sont pas dégradés et ne laissent pas échapper de fibres d’amiante. La société GR Audit et inspection souligne : – que les éléments d’amiante mis en évidence ne concernent pas l’ensemble du bâtiment mais des joints dans la paroi du premier dépôt de stockage et des plaques de couverture derrière le plenum du dépôt de stockage numéro 2 ; -que le remplacement de la toiture, composée d’un matériau inerte n’est pas techniquement et règlementairement obligatoire ; -que la vente aurait pu se faire avec l’obligation pour l’acquéreur d’une évaluation périodique. Elle soutient que contrairement à ce que fait valoir la société Zaouali, le débat ne porte pas sur l’existence d’un vice caché mais sur une question de conformité dans la vente puisque l’activité de vente de produits alimentaires était déterminante du consentement de la société Zaouali qui pouvait agir contre son vendeur. Elle affirme qu’il n’existe ni nécessité de réfection de la toiture ni perte de chance d’acheter le bien moins cher. Elle fait le reproche, sans en tirer cependant de conséquences juridiques, à la société Zaouali de ne pas avoir effectué les investigations à la charge de tout acquéreur diligent au-delà de ce que la loi impose aux diagnostics avant-vente. La société Zaouali soutient pour sa part qu’elle n’aurait pas acquis le bien si elle avait su qu’il lui faudrait débourser 75 000 euros pour le remettre en l’état. Elle entend être replacée en l’état où elle aurait été en l’absence de faute du diagnostiqueur et pouvoir disposer d’un bâtiment sans amiante. Elle sollicite donc le remplacement de la toiture en bardage de bonne qualité et l’application de l’indice BT34 pour parvenir à un chiffrage actualisé qui tienne compte du coût des matériaux. Sur ce : La responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art, et qu’il se révèle erroné, les préjudices subis du fait de ce diagnostic erroné ayant un caractère certain. Le diagnostiqueur ayant délivré une information inexacte doit être condamné à réparer un dommage qu’il n’a pas causé mais que sa négligence a empêché la victime d’éviter. (Ch. mixte., 8 juillet 2015, pourvoi n° 13-26.686, Bull. 2015, Ch. mixte, n° 3), En l’espèce l’expert judiciaire comme l’expert de la société Allianz assurances ont considéré que rien ne nécessitait d’enlever les plaques en amiante-ciment dans leur état actuel. Cependant, il résulte de leurs rapports que la question se posera en cas de revente ou lorsqu’il sera nécessaire de refaire la toiture. La société Zaouali supportera alors un surcoût lié au désamiantage qui constitue son entier préjudice. Ainsi si la réfection de la toiture ne s’impose pas et ne constitue pas le préjudice de la société Zaouali, le surcoût lié au désamiantage constitue un préjudice certain qu’il convient d’indemniser. En considération du lien de causalité existant entre la faute commise et le préjudice indemnisable il convient de confirmer le jugement et de retenir la responsabilité de la société GR Audit inspection. L’expert judiciaire évalue le surcoût du désamiantage à la somme de 46 032 euros TTC. L’expert se base en cela sur le devis de la société Désamiantage Service qui chiffre les travaux liés au désamiantage à la somme de 38.360 euros HT. Les frais de pose d’une nouvelle couverture n’entrant pas dans le préjudice indemnisable il convient de réformer le jugement sur ce point. La société Zaouali sollicite une indemnisation TTC alors que le tribunal a, à juste titre, rappelé que la TVA n’est incluse dans le préjudice que si elle reste à la charge du débiteur. Nonobstant les observations faites sur ce point par la société GR Audit inspection dans l’immobilier, la SCI reste taisante sur ce point et ne rapporte pas plus qu’en première instance la preuve qu’elle n’est pas assujettie à la TVA. Il lui sera donc alloué en réparation la somme de 38 360 euros HT. La société Zaouali demande à la cour d’indexer la condamnation sur l’indice BT34. Cependant cet indice concerne les couvertures en zinc et en métal alors que la cour indemnise le surcoût lié au désamiantage. Il sera donc fait application de l’indice BT01. La société Zaouali sollicite également un préjudice de jouissance pour l’impact qu’auront les travaux sur le commerce de distribution alimentaire. Cependant c’est à juste titre et par des motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu que l’immeuble objet du litige n’était pas occupé par la SCI Zaouali mais par son locataire ; que la SCI ne pouvait donc solliciter l’indemnisation d’un préjudice de jouissance. Enfin la société Zaouali sollicite l’indemnisation de son préjudice moral. Cette demande n’a pas été présentée en première instance. L’irrecevabilité de cette demande n’est toutefois pas soulevée. En tout état de cause l’existence de ce préjudice n’est pas justifiée ce qui conduit la cour à rejeter cette demande. II-Sur la garantie de la société Axa France IARD : La société AXA France IARD ne conteste pas devoir sa garantie. La société AXA France IARD entend voir déduire le montant de sa franchise contractuelle. En application de l’article L112-6 du code des assurances l’assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice des exceptions opposables au souscripteur originaire. La société AXA France IARD sera donc autorisée à opposer le montant de la franchise stipulée au contrat d’assurance souscrit le 20 mars 2014 par la société GR Audit et inspection pour un montant de 10 % du sinistre et dans la limite (applicable en l’espèce) de 2.500 euros. Le jugement sera confirmé sur ce point. III-Sur les autres demandes : La société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection succombant pour l’essentiel de leurs prétentions seront condamnées aux dépens. L’équité commande de ne pas laisser à la charge de la société Zaouali la charge des frais exposés pour sa défense. La société AXA France IARD et la société GR audit et inspection seront condamnées à lui verser la somme de 2 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, par mise à disposition de l’arrêt au greffe ;

Infirme le jugement en ce qu’il a condamné in solidum la SARL GR Audit et inspection et la société Axa France Assurances à payer à la SCI Zaouali la somme de 68 740 euros au titre des réparations nécessitées par la présence d’amiante outre indexation sur les variations de l’indice BT couverture du bâtiment depuis le 2 décembre 2020 jusqu’à paiement effectif ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau ;

Condamne in solidum la SARL GR Audit et inspection et la société Axa France IARD à payer à la SCI Zaouali la somme de 38 360 euros hors taxes en réparation de son préjudice , outre indexation sur les variations de l’indice BT01 depuis le 2 décembre 2020 ( date du dépôt du rapport d’expertise) jusqu’au jour du présent arrêt ;

Y ajoutant ;

Déboute la SCI Zaouali de la demande présentée au titre d’un éventuel préjudice moral;

Condamne la société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection à payer à la SCI Zaouali la somme de 2 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société AXA France IARD et la société GR Audit et inspection aux dépens d’appel.

Le Greffier La Présidente

 

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