Cession de bail commercial et clause de garantie

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L’affaire concerne un litige entre la SCI TIMUR et la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL concernant un bail commercial sur un local à Sainte-Marie. La S.A.R.L. PCI a cédé son droit au bail à la société PARDON HOME, avec la garantie de rester solidaire du paiement des loyers pendant 3 ans. Suite à des loyers impayés, la SCI TIMUR a résilié le bail et réclamé des sommes impayées à la S.A.R.L. PCI. Le tribunal judiciaire de Saint-Denis a condamné la S.A.R.L. PCI à payer une partie des sommes réclamées. La S.A.R.L. PCI a interjeté appel, contestant la solidarité et le montant des sommes réclamées. La SCI TIMUR maintient sa demande de paiement des sommes dues.

La novation contractuelle

Aux termes des dispositions de l’article 1329 du code civil, « la novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée.

Elle peut avoir lieu par substitution d’obligation entre les mêmes parties, par changement de débiteur ou par changement de créancier. »

Le contrat de novation par substitution de débiteur entraîne l’extinction de l’obligation primitive donc la disparition des obligations du cédant.

La cession de contrat

A la différence de la novation, la cession de contrat consiste pour le cédant « à céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l’accord de son cocontractant, le cédé » (article 1216 du code civil).

La cession de contrat entraîne la libération du cédant pour l’avenir (article 1216- 1 du code civil).

Sur la nature du contrat passé le 1er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME en présence de la SCI TIMUR :

Dans cette affaire, il est question de déterminer si le contrat conclu le 1er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME est une novation ou une cession de contrat. Il est établi que ce contrat est une cession de contrat, entraînant un transfert d’obligations et non une novation.

Sur l’efficacité de la clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur figurant au contrat du 1er décembre 2016 :

La clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur est jugée efficace dans ce cas, car il y a eu un accord entre le cédant et le cessionnaire pour garantir le créancier. La SCI TIMUR est donc fondée à se prévaloir de cette clause de garantie.

Sur l’étendue de la clause de garantie à la charge de la S.A.R.L. PCI :

La stipulation de solidarité prévue au contrat du 1er décembre 2016 porte sur le paiement des loyers, des intérêts, de la clause pénale, mais pas des indemnités d’occupation. La SCI TIMUR est donc autorisée à poursuivre la S.A.R.L. PCI pour les sommes dues, à l’exception des indemnités d’occupation.

En ce qui concerne la résolution du bail cédé à la société PARDON HOME :

La résolution du bail a été acquise à la date du 24 décembre 2017, suite à un commandement de payer resté infructueux. La SCI TIMUR ne peut donc réclamer de loyers pour la période postérieure à cette résolution.

En ce qui concerne le défaut d’information reproché à la SCI TIMUR :

La SCI TIMUR n’a pas commis de défaut d’information envers la S.A.R.L. PCI concernant le défaut de paiement du locataire. Le moyen de défense de la S.A.R.L. PCI est donc rejeté.

En ce qui concerne les sommes réclamées à la S.A.R.L. PCI au titre de la garantie du cédant :

La S.A.R.L. PCI est condamnée à payer une somme déterminée à la SCI TIMUR au titre des loyers impayés par la société PARDON HOME, déduction faite du dépôt de garantie conservé par le bailleur.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La S.A.R.L. PCI est condamnée à supporter les dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser une indemnité au titre des frais irrépétibles d’appel à la SCI TIMUR.

Conseils juridiques:

1. Il est important de bien distinguer entre une novation et une cession de contrat. Assurez-vous de comprendre la nature du contrat passé et ses conséquences en termes d’obligations.

2. Si vous êtes partie à une cession de contrat avec une clause de garantie du cédant, veillez à respecter les engagements pris et à informer rapidement le cédant en cas de défaut de paiement du locataire. Tout retard dans l’information ne supprime pas l’engagement de garantie du cédant.

3. En cas de litige concernant des sommes réclamées au titre de la garantie du cédant, assurez-vous de bien calculer les montants dus et de prendre en compte toutes les sommes déjà versées ou détenues par le bailleur. Il est essentiel de respecter les termes du contrat et de fournir des justificatifs clairs pour éviter tout litige ultérieur.

Sur la nature du contrat passé le 1er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME en présence de la SCI TIMUR :

Dans cette affaire, il est question de déterminer si le contrat conclu le 1er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME est une novation ou une cession de contrat. Il est établi que ce contrat est une cession de contrat, entraînant un transfert d’obligations et non une novation.

Sur l’efficacité de la clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur figurant au contrat du 1er décembre 2016 :

La clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur est examinée dans cette affaire. Il est conclu que la SCI TIMUR est fondée à se prévaloir de cette clause de garantie, notamment en ce qui concerne les loyers impayés et la clause pénale de 10%.

Sur l’étendue de la clause de garantie à la charge de la S.A.R.L. PCI :

L’étendue de la clause de garantie à la charge de la S.A.R.L. PCI est analysée, notamment en ce qui concerne les loyers impayés, les intérêts de retard et la clause pénale. La SCI TIMUR est autorisée à poursuivre le paiement des loyers impayés et de la clause pénale, mais pas des indemnités d’occupation.

En ce qui concerne la résolution du bail cédé à la société PARDON HOME :

La résolution du bail cédé à la société PARDON HOME est examinée, et il est conclu que la SCI TIMUR peut se prévaloir de la clause résolutoire contenue dans le bail. La société PARDON HOME n’étant plus tenue au versement d’un loyer après la résolution du bail, la SCI TIMUR ne peut réclamer de loyers pour la période post-résiliation.

En ce qui concerne le défaut d’information reproché à la SCI TIMUR :

Le défaut d’information reproché à la SCI TIMUR est analysé, et il est conclu qu’aucun défaut d’information ne peut lui être reproché, notamment en raison du lien entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME.

En ce qui concerne les sommes réclamées à la S.A.R.L. PCI au titre de la garantie du cédant :

Les sommes réclamées à la S.A.R.L. PCI au titre de la garantie du cédant sont examinées, et il est conclu que la dette de la société PARDON HOME doit être diminuée du montant du dépôt de garantie conservé par la bailleur. La SCI TIMUR est autorisée à poursuivre le paiement des loyers impayés et de la clause pénale, mais pas des indemnités d’occupation.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Enfin, il est décidé que la S.A.R.L. PCI supportera les dépens de première instance et d’appel, et devra verser une indemnité au titre des frais irrépétibles d’appel à la SCI TIMUR.

Réglementation applicable

– Article 1329 du code civil
– Article 1216 du code civil
– Article 1216-1 du code civil
– Article 1206 du code civil
– Article L 145-16-2 du code de commerce
– Article 1134 du code civil
– Article L. 145-16-1 du Code de commerce
Article 700 du code de procédure civile

Avocats

– Me Alicia BUSTO, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
– Me Thierry CODET de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mots clefs

– Contrat de novation
– Cession de contrat
– Obligations du cédant
– Obligations du cessionnaire
– Clause de garantie
– Débiteur initial
– Créancier bénéficiaire
– Stipulation pour autrui
– Droit direct du créancier
– Indemnité d’occupation
– Clause résolutoire
– Défaut d’information
– Sommes réclamées
– Dépôt de garantie
– Intérêt légal
– Indemnité forfaitaire
– Dépens et frais irrépétibles

Définitions juridiques

– Contrat de novation: Accord par lequel les parties substituent une nouvelle obligation à une ancienne
– Cession de contrat: Transfert des droits et obligations d’un contrat à un tiers
– Obligations du cédant: Responsabilités du cédant dans le cadre de la cession de contrat
– Obligations du cessionnaire: Responsabilités du cessionnaire dans le cadre de la cession de contrat
– Clause de garantie: Disposition contractuelle visant à garantir l’exécution d’une obligation
– Débiteur initial: Personne qui était initialement tenue de remplir une obligation
– Créancier bénéficiaire: Personne qui bénéficie d’une obligation contractuelle sans être partie au contrat
– Stipulation pour autrui: Clause permettant à un tiers de bénéficier des effets d’un contrat
– Droit direct du créancier: Droit du créancier bénéficiaire d’agir directement contre le débiteur initial
– Indemnité d’occupation: Somme versée en compensation de l’occupation d’un bien
– Clause résolutoire: Clause permettant de résilier un contrat en cas de non-respect de ses conditions
– Défaut d’information: Manquement à l’obligation de fournir des informations nécessaires
– Sommes réclamées: Montants demandés dans le cadre d’une procédure judiciaire
– Dépôt de garantie: Somme versée en garantie de l’exécution d’un contrat
– Intérêt légal: Taux d’intérêt fixé par la loi en cas de retard de paiement
– Indemnité forfaitaire: Somme fixe prévue en cas de non-respect d’une obligation contractuelle
– Dépens et frais irrépétibles: Frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire et non remboursables

 

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

OC

R.G : N° RG 22/00464 – N° Portalis DBWB-V-B7G-FVTR

S.A.R.L. PARDON CREATION INTERNATIONAL

C/

S.C.I. SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE TIMUR

COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS

ARRÊT DU 01 MARS 2024

Chambre civile TGI

Appel d’une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS (LA REUNION) en date du 22 MARS 2022 suivant déclaration d’appel en date du 12 AVRIL 2022 RG n° 19/01962

APPELANTE :

S.A.R.L. PARDON CREATION INTERNATIONAL

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Alicia BUSTO, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.C.I. SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE TIMUR

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Thierry CODET de la SELARL CODET-CHOPIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 27 avril 2023

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Octobre 2023 devant Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 26 janvier 2024. Le délibéré a été prorogé au 23 février 2024 puis au 1er Mars 2024.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre

Conseiller : Monsieur Vincent ALDEANO-GALIMARD, Président de chambre

Conseiller : Madame Chantal COMBEAU, Présidente de chambre

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 01 Mars 2024.

* * *

LA COUR :

EXPOSÉ DU LITIGE :

1- Par acte sous seing privé du 19 juillet 2016, la SCI TIMUR a consenti un bail commercial à la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL (ci-après la S.A.R.L. PCI) sur un local de 714 m² dépendant du parc d’activité  » CARRE DUPARC » à Sainte-Marie, pour un loyer annuel principal de 164 220 € HT payable d’avance et trimestriellement, le premier jour de chaque trimestre civil.

2- Le bail a pris effet à la date du 19 septembre 2016.

3- Par acte sous seing privé du 1 er décembre 2016, la S.A.R.L. PCI a cédé son droit au bail à la société PARDON HOME avec l’accord de la SCI TIMUR, intervenue à l’acte.

4- Aux termes de cet acte, la S.A.R.L. PCI s’est engagée à rester solidaire du cessionnaire pour le paiement des loyers et l’exécution des conditions du bail pendant une durée de 3 années à compter de la date d’effet de la cession.

5- Des loyers étant restés impayés, la SCI TIMUR a fait délivrer à la société PARDON HOME un commandement de payer visant la clause résolutoire par acte d’huissier du 25 novembre 2017.

6- Par ordonnance du 13 septembre 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Denis a constaté la résolution du bail à la date du 24 décembre 2017 et a condamné la société PARDON HOME à verser différentes sommes à titre de loyers impayés, d’indemnité d’occupation et de frais irrépétibles.

7- Par un jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis en date du 3 octobre 2018, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’encontre de la société PARDON HOME, la cessation des paiements étant fixée à la date du 31 août 2018.

8- Par acte d’huissier du 29 mai 2019, la SCI TIMUR a fait assigner la S.A.R.L. PCI devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 346 862, 04 € au titre des loyers et charges restant dus par la société PARDON HOME, celle de 34 562, 97 € au titre de l’indemnité forfaitaire contractuelle et celle de 19 482, 02 € pour les intérêts de retard.

9- Par un jugement du 22 mars 2022, le Tribunal judiciaire de Saint-Denis a:

– CONDAMNÉ la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL, prise en la personne de son représentant légal, à verser à la SCI TIMUR, prise en la personne de son représentant légal, les sommes suivantes : 297.934,38€ ( 26.696,13€ au titre des loyers dûs + 271.238,25€ au titre des indemnités d’occupation des lieux pendant 15 mois), outre celle de 29.793,43€ au titre de l’indemnité forfaitaire prévue au bail et celle de 19.482,02 euros au titre des intérêts de retard dont PARDON HOME est redevable ;

– DÉBOUTÉ les parties du surplus des demandes, fins et conclusions ;

– ORDONNÉ I’exécution provisoire ;

– CONDAMNÉ la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL, prise en la personne de son représentant légal à verser à la SCI TIMUR, prise en la personne de son représentant légal, la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNÉ la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens.

10- Par déclaration d’appel déposée par le RPVA au greffe de la cour d’appel le 12 avril 2022, la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL a interjeté appel du dit jugement.

11- Aux termes de ses dernières écritures transmises par le RPVA le 8 juillet 2022, la S.A.R.L. PCI demande à la cour de :

– RECEVOIR la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL en son appel;

– INFIRMER le jugement du Tribunal judiciaire de SAINT DENIS du 22 mars 2022 ;

Statuant de nouveau, de :

A TITRE PRINCIPAL :

– DÉBOUTER la SCI TIMUR de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

A TITRE SUBSIDIAIRE :

– LIMITER La garantie de la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL à la somme de 26.696,13 € correspondant à la condamnation de la société PARDON HOME suivant ordonnance de référé du 13 septembre 2018 (rectifiée le 13 décembre 2018) aux « loyers dus à la date de résiliation du bail»;

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

– CONDAMNER la SCI TIMUR à payer à la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens.

12- Pour l’essentiel, la S.A.R.L. PCI fait valoir que :

– l’acte conclu le 1 er décembre 2016 a emporté novation par changement de débiteur et que c’est à tort qu’il a été dénommé « cession de droit au bail » ;

– que le Bailleur a expressément renoncé dans l’acte du 1er décembre 2016 à toute action relative à l’exécution du bail à l’encontre de la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL ce qui exclut toute solidarité ;

– que la clause de solidarité prévue au bail du 16 juillet 2016 ne vaut qu’en cas de cession du fonds de commerce ;

– qu’en l’absence de cession du bail, les dispositions de l’article L 145- 16- 2 du code de commerce ne peuvent trouver à s’appliquer ;

– que l’acte du 1 er décembre 2016 a un effet limité aux rapports entre les sociétés PARDON HOME et PARDON CRÉATION INTERNATIONAL ;

– que la SCI TIMUR est un tiers par rapport à l’acte du 1 er décembre 2016 en sorte qu’elle n’est pas fondée à se prévaloir de l’engagement de solidarité qui y est stipulé ;

– que les conditions d’une stipulation pour autrui ne sont pas réunies en l’absence d’accord entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME ;

– que la stipulation de solidarité figurant à l’acte du 1 er décembre 2016 ne porte que sur le règlement des loyers et ne peut- être étendue aux indemnités d’occupation lesquelles viennent réparer une faute extra contractuelle commise par le locataire qui se maintient dans les lieux après la résiliation du bail ;

– que les paiements sollicités ne sont pas justifiés tant dans leur quantum que dans leur consistance ;

– que le bailleur qui s’abstient d’avertir le garant du défaut de paiement du locataire et/ ou tarde à agir en résiliation du bail laisse ainsi s’aggraver la dette, perd son recours ;

– que la preuve n’est pas rapportée que la société PARDON HOME s’est maintenue dans les lieux jusqu’à la date du 29 mars 2019.

13- Aux termes de ses dernières écritures transmises par le RPVA le 7 octobre 2022, la SCI TIMUR demande à la cour de :

– DIRE que la créance de la société SCI TIMUR est fondée dans son principe et son quantum ;

– DIRE que la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL doit cette somme au titre de la garantie solidaire ;

Et en conséquence,

– CONDAMNER la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL à verser à la SCI TIMUR, les sommes suivantes :

* 346.862,04 euros au titre des loyers, charges et accessoires dont PARDON HOME est redevable ;

* 34.562,97 euros au titre de l’indemnité forfaitaire susvisée ;

* 19.482,02 euros au titre des intérêts de retard ;

– CONDAMNER la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL à verser à la SCI TIMUR la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNER la société PARDON CRÉATION INTERNATIONAL aux entiers dépens.

14- Pour l’essentiel, la SCI TIMUR fait valoir :

– que l’acte du 1er décembre 2016 doit s’analyser comme une cession de contrat dans la mesure où il emporte continuation du bail conclu le 19 juillet 2016 et non son extinction et son remplacement par un nouveau bail ;

– que dans cet acte, les parties ont prévu que la S.A.R.L. PCI devait garantir la SCI TIMUR des éventuels manquements de la société PARDON HOME ;

– que l’article 11- 3 du bail du 19 juillet 2016 étend aux indemnités d’occupation la garantie solidaire du cédant ;

– que les dispositions de l’article 1216- 1 du code civil prévoient que le cédant reste par principe solidairement tenu vis-à-vis du cédé de l’exécution du contrat;

– qu’aux termes de la convention passée entre les parties, la garantie du cédant est due sans que le bailleur ne soit tenu d’effectuer la moindre formalité ou dénonciation, les dispositions de l’article 145- 16- 1 du code de commerce n’étant pas d’ordre public ;

– qu’un manquement du bailleur à son obligation d’information du cédant peut donner lieu en cas de préjudice à l’allocation de dommages et intérêts mais ne peut faire perdre au créancier ses recours ;

– qu’en l’espèce, le garant et le preneur défaillant ont le même dirigeant lequel était parfaitement informé de la situation ;

– que le garant n’a subi aucun préjudice ;

– que l’ordonnance du juge des référés constatant la résolution du bail n’était pas définitive lors de l’ouverture de la liquidation judiciaire de sorte que le bail a continué à courir ;

– qu’en l’absence de confusion des patrimoines, la S.A.R.L. PCI ne peut se prévaloir du dépôt de garantie versé par la société PARDON HOME.

15- La procédure a été clôturée par une ordonnance du 27 avril 2023.

16- L’audience de plaidoirie s’est tenue le 27 octobre 2023.

MOTIFS

Sur la nature du contrat passé le 1 er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME en présence de la SCI TIMUR :

17- Aux termes des dispositions de l’article 1329 du code civil, « la novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée.

Elle peut avoir lieu par substitution d’obligation entre les mêmes parties, par changement de débiteur ou par changement de créancier. »

18- Le contrat de novation par substitution de débiteur entraîne l’extinction de l’obligation primitive donc la disparition des obligations du cédant.

19- A la différence de la novation, la cession de contrat consiste pour le cédant « à céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l’accord de son cocontractant, le cédé » (article 1216 du code civil).

20- La cession de contrat entraîne la libération du cédant pour l’avenir (article 1216- 1 du code civil).

21- En l’espèce, le contrat conclu le 1 er décembre 2016 sous l’intitulé cession de droit au bail prévoit que la S.A.R.L. PCI, le cédant, s’oblige à verser à la SCI TIMUR, le bailleur, le dépôt de garantie et le droit d’entrée stipulés dans le bail commercial signé le 19 juillet 2016, objet de la cession.

22- Il précise également que la S.A.R.L. PCI aura à s’acquitter du solde des arriérés de loyers, 4 ème trimestre 2016 compris.

23- Ainsi, la convention conclue le 1 er décembre 2016 oblige la S.A.R.L. PCI à exécuter les stipulations du bail cédé.

24- Elle n’a donc pas pour effet d’éteindre l’obligation de la S.A.R.L. PCI.

25- De son côté, le cessionnaire, la société PARDON HOME, s’y oblige à exécuter, à compter de son entrée en jouissance, c’est-à-dire après la cession et pour l’avenir, toutes les clauses et conditions du bail et en particulier à acquitter les loyers à leur échéance.

26- Le contrat conclu le 1 er décembre 2016 entre la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME en présence de la SCI TIMUR, partie intervenante, est donc bien une cession de contrat, ainsi que les parties l’ont d’ailleurs formellement qualifié, emportant un transfert d’obligations et non pas un contrat de novation doté d’un effet substitutif.

27- La S.A.R.L. PCI n’est pas fondée par conséquent à se prévaloir d’une novation qui aurait entraîné l’extinction de ses obligations à l’égard de la SCI TIMUR.

Sur l’efficacité de la clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur figurant au contrat du 1er décembre 2016 :

28- Lorsque la cession de contrat recueille l’accord du cédé, elle libère le cédant pour l’avenir (article 1216- 1 du code civil).

29- Il reste toujours possible, cependant, de prévoir une clause de garantie du débiteur initial au profit du créancier.

30-En l’espèce, la cession de droit au bail conclue le 1 er décembre 2016 contient une clause aux termes de laquelle la S.A.R.L. PCI, le cédant, s’oblige à rester solidaire du cessionnaire, la société PARDON HOME, pour le paiement des loyers et l’exécution des conditions du bail pendant une durée de 3 années à compter de la date d’effet de la cession.

31- Il y a donc bien eu un accord entre le cédant et le cessionnaire pour garantir le créancier, contrairement à ce que soutient la S.A.R.L. PCI.

32- Cet accord a pour effet de faire du cédant et du cessionnaire des débiteurs solidaires.

33- Il s’analyse comme une stipulation pour autrui dont le créancier désigné, la SCI TIMUR, est le bénéficiaire.

34- En sa qualité de créancier bénéficiaire de la stipulation de solidarité, la SCI TIMUR est fondée, en application des dispositions de l’article 1206 du code civil, à se prévaloir d’un droit direct à l’encontre du cédant sans que puisse lui être opposé le principe de l’effet relatif des contrats.

35- Ce droit direct de la SCI TIMUR vis-à-vis de la S.A.R.L. PCI trouve son origine dans la convention du 1er décembre 2016.

36- Il n’y a pas dés lors de contradiction qui soit de nature à priver la garantie de son efficacité entre la clause de solidarité et l’engagement de la SCI TIMUR d’annuler les procédures en cours à l’encontre de la S.A.R.L. PCI concernant le bail commercial signé le 19 juillet 2016.

37- Pour la même raison, la S.A.R.L. PCI n’est pas fondée non plus à se retrancher derrière la perte de sa qualité de preneur pour se soustraire à son obligation de garantie.

38- Enfin, la durée de 3 années assignée à la clause de garantie est parfaitement conforme aux dispositions de l’article L 145- 16- 2 du code de commerce qui limitent à 3 ans le temps durant lequel le bailleur peut invoquer dans un bail commercial la clause de garantie du cédant.

39- Au total, il apparaît que la SCI TIMUR est parfaitement fondée à se prévaloir à l’encontre de la S.A.R.L. PCI de la clause de garantie du cédant figurant au contrat de cession de bail conclu le 1 er décembre 2016.

Sur l’étendue de la clause de garantie à la charge de la S.A.R.L. PCI :

40- La stipulation de solidarité prévue au contrat du 1 er décembre 2016 au titre de la garantie du cédant porte sur le paiement des loyers ainsi que sur l’exécution des conditions du bail.

41- Le bail conclu le 19 juillet 2016 comporte une clause d’intérêts (article 7 des conditions générales) aux termes de laquelle à défaut de paiement d’une somme exigible au titre du loyer et/ou de ses accessoires à sa date d’échéance celle-ci sera productive d’un intérêt au taux légal majoré de 5 points à compter de la date d’exigibilité de chaque somme concernée.

42- Il comporte également une clause pénale (article 25-2 des conditions générales) prévoyant l’application de plein droit, à titre d’indemnité forfaitaire, d’une majoration de 10 % sur le montant des sommes dues.

43- Ces stipulations d’intérêts et de pénalité constituent des conditions du bail au sens de la clause de solidarité prévue dans le contrat de cession.

44- Elles entrent bien par conséquent dans le périmètre de l’obligation de garantie du cédant à l’instar des loyers impayés.

45- La SCI TIMUR entend également bénéficier de la garantie du cédant au titre d’une indemnité d’occupation à la charge de la société PARDON HOME pour la période courue entre la résiliation du bail et la restitution des clefs.

46- L’indemnité d’occupation que doit le preneur qui se maintient dans les lieux alors qu’il n’a plus ni droit ni titre vient réparer une faute extra contractuelle ainsi que le fait observer à raison la S.A.R.L. PCI.

47- Sauf convention contraire, cette indemnité ne se rattache pas au contrat de bail lequel prend fin avec sa résolution.

48- En l’espèce, aucune disposition du bail conclu le 19 juillet 2016 et de l’acte de cession du 1 er décembre 2016 ne traite de la question du maintien du preneur dans les lieux après la résiliation du bail et de l’indemnité d’occupation susceptible alors d’être due.

49- L’article 11- 3 des conditions générales organise en faveur du bailleur une solidarité du cédant et des cessionnaires successifs pour le paiement des indemnités d’occupation mais dans l’hypothèse d’une cession du fonds de commerce.

50- Cette disposition du bail ne peut être utilement invoquée par la SCI TIMUR puisque la cession intervenue le 1 er décembre 2016 porte sur le bail et non pas sur celle du fonds de commerce.

51- La clause résolutoire insérée au bail (article 25- 1 des conditions générales) fait également entrer dans le périmètre des obligations contractuelles les indemnités d’occupations susceptibles d’être dues en cas de maintien dans les lieux du preneur dans l’attente du versement par le bailleur d’une indemnité d’éviction.

52- Ces dispositions n’ont pas vocation à s’appliquer à un maintien dans les lieux après la résiliation du bail.

53- Elles ne peuvent donc pas plus être invoquées.

54- Au total, il apparaît que la SCI TIMUR est fondée à poursuivre auprès de la S.A.R.L. PCI, codébiteur solidaire, le paiement des loyers restés impayés par la société PARDON HOME et de la clause pénale de 10 %, outre les intérêts de retard, mais à l’exclusion des indemnités d’occupation pour la période courue entre la résolution du bail et la restitution des clefs.

55- Le débat sur la date de restitution des clefs est ainsi sans incidence sur la solution du litige.

En ce qui concerne la résolution du bail cédé à la société PARDON HOME :

56- Aux termes des dispositions de l’article 1134 du code civil en sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

57- En l’espèce, le bail litigieux prévoit qu’à défaut de paiement de toute somme due par le preneur, le bail sera, si bon semble au bailleur, résilié de plein droit un mois après une mise en demeure ou un commandement et/ou sommation resté totalement ou partiellement infructueux.

58- Il est constant que la SCI TIMUR a fait délivrer le 23 novembre 2017 un commandement de payer visant la clause résolutoire à la société PARDON HOME pour la somme de 72 751, 13 €.

59- Par acte d’huissier du 06 avril 2018, la SCI TIMUR a ensuite saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail à la date du 23 décembre 2017.

60- Il est donc établi que la SCI TIMUR a bel et bien entendu se prévaloir de la clause résolutoire contenue au bail.

61- Il est constant que le commandement de payer délivré le 25 novembre 2017 est resté infructueux.

62- La résolution étant de plein droit, celle-ci s’est donc trouvée acquise à la date du 24 décembre 2017 même si la décision du juge des référés constatant son acquisition n’était pas encore définitive, le 03 octobre 2018, lors de la liquidation judiciaire de la société PARDON HOME par le tribunal de commerce de Saint-Denis.

63- Le preneur n’étant plus tenu au versement d’un loyer après la résolution de son bail, la SCI TIMUR ne peut donc se prévaloir d’une créance de loyer pour la période courue entre le 24 décembre 2017 et la remise des clefs.

En ce qui concerne le défaut d’information reproché à la SCI TIMUR :

64- Aux termes des dispositions de l’ article L. 145-16-1 du Code de commerce « si la cession du bail commercial est accompagnée d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier informe le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci ».

65- Le bailleur est donc tenu d’informer le cédant du défaut de paiement du locataire dans un bref délai.

66- Outre que le texte ne prévoit aucune sanction en cas de non-respect de ce délai, un retard ne peut avoir pour effet de supprimer l’engagement de garantie du cédant à l’égard du bailleur.

67- Il est de surcroît constant, en l’espèce, que la S.A.R.L. PCI et la société PARDON HOME avaient le même dirigeant.

68- C’est donc à juste titre que le premier juge a considéré qu’aucun défaut d’information ne pouvait être reproché à la SCI TIMUR.

69- Le moyen sera par conséquent écarté.

En ce qui concerne les sommes réclamées à la S.A.R.L. PCI au titre de la garantie du cédant :

70- Il est établi par le relevé de compte locataire versé aux débats qu’à la date de la résiliation du bail, le 24 décembre 2017, la société PARDON HOME se trouvait débitrice d’une somme de 72 729, 43 € au titre des loyers impayés.

71- Deux versements d’un montant de 5000 € chacun sont par la suite intervenus et trois écritures correspondant à des avoirs ont été imputés au crédit du compte pour un total de 9 977, 61 €.

72- L’arriéré de loyer de la société PARDON HOME est donc établi pour un montant de 52 751, 82 €.

73- Il est également établi que la SCI TIMUR a encaissé une somme de 41 055 € au titre d’un dépôt de garantie.

74- Il n’est pas contesté qu’elle détient encore cette somme et il n’est justifié d’aucune autre somme dont la société PARDON HOME pourrait être débitrice vis-à-vis de la SCI TIMUR et que celle-ci serait fondée à venir imputer sur le dépôt de garantie.

75- Les dispositions de l’article 5- 2 des conditions générales du bail autorisent le bailleur à conserver tout ou partie du dépôt de garantie lorsque le preneur est débiteur d’une somme quelconque envers lui.

76- La S.A.R.L. PCI est dés lors fondée à soutenir que la dette de la société PARDON HOME doit être diminuée du montant du dépôt de garantie conservé par le bailleur.

77- La dette de la société PARDON HOME susceptible d’être garantie par la S.A.R.L. PCI est donc de 11 696, 82 € (52 751, 82- 41055).

78- La SCI TIMUR est fondée à voir appliquer sur cette somme l’intérêt légal majoré de 5 points ainsi que prévu au bail et à poursuivre le paiement de l’indemnité forfaitaire, soit la somme de 1169, 68 €.

79- Le jugement du 22 mars 2022 sera par conséquent infirmé et la S.A.R.L. PCI condamnée dans les limites du dispositif du présent arrêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

80- La S.A.R.L. PCI, partie succombante, supportera la charge des dépens de première instance et d’appel

81- A ce titre, elle n’est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

82- Il serait inéquitable de laisser la SCI TIMUR supporter la charge des frais irrépétibles qu’elle a été conduite à exposer en première instance et en cause d’appel.

83- Le jugement rendu le 3 octobre 2018 par le tribunal de commerce de Saint-Denis sera confirmé sur ce point et la S.A.R.L. PCI condamnée à verser une nouvelle indemnité d’un montant de 2000 € au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Infirme le jugement rendu le 3 octobre 2018 par le tribunal de commerce de Saint-Denis sauf en ce qui concerne la condamnation de la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL aux dépens et au versement d’une indemnité pour frais irrépétibles ;

Statuant de nouveau,

Condamne la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL à verser à la SCI TIMUR la somme de 11 696, 82 € au titre des loyers de la société PARDON HOME restés impayés outre 1169, 68 € au titre de la clause pénale;

Dit que la somme de 11 696, 82 euros sera majorée de l’intérêt au taux légal augmenté de 5 points décompté à partir du 1er octobre 2017 ;

Dit que la somme de 1169, 68 € sera majorée de l’intérêt au taux légal augmenté de 5 points décompté à partir de la délivrance le 25 novembre 2017 du commandement de payer ;

Condamne la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL à verser à la SCI TIMUR la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles d’appel ;

Condamne la S.A.R.L. PARDON CRÉATION INTERNATIONAL aux dépens de l’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Cyril OZOUX, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 

 

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