M. [S] a été embauché par la société Hydro Builtex en 1991 et a été licencié pour faute grave en 2019 après plusieurs arrêts de travail pour dépression. Il a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes de Toulouse, qui a jugé en faveur de l’employeur. M. [S] a fait appel de ce jugement, affirmant que son licenciement était discriminatoire en raison de son état de santé. La société Hydro Building Systems France a demandé à la cour de confirmer le jugement initial. Les demandes indemnitaires de M. [S] et la question de la cause réelle et sérieuse du licenciement sont au cœur du litige.
M. [S] ne conteste pas avoir adressé à sa collègue, infirmière de l’entreprise, des messages menaçants et insultants, et ce de manière répétée le 28 février 2019. Cette infirmière a d’ailleurs déposé une main courante au sujet des SMS et signalé les faits à la direction.
Il est établi qu’à cette période M. [S] se trouvait dans un état psychique fortement altéré pouvant obérer ses facultés de discernement quant au caractère répréhensible son comportement ; les éléments médicaux produits montrent que le salarié présentait des troubles de comportement, notamment sur le lieu de travail, plusieurs jours avant son hospitalisation sous contrainte intervenue le 17 mars 2019 à la suite d’une ‘nouvelle décompensation psychotique’ alors qu’il était en rupture de traitement depuis plusieurs mois selon le médecin psychiatre.
Les messages SMS dont il a reconnu l’envoi à l’infirmière sont intrinsèquement incohérents et révèlent l’état mental très dégradé dans lequel se trouvait M. [S].
A la même période, M. [S] ne s’est pas rendu à une formation, et a refusé de se rendre à la visite médicale, éléments dont l’employeur tient également compte pour licencier disciplinairement le salarié.
S’il est exact que l’employeur se devait, en vertu de son obligation de sécurité, de prendre des mesures de nature à protéger les collègues de M. [S], il n’en demeure pas moins que M. [S] était placé en arrêt maladie lors du prononcé du licenciement, et que l’employeur aurait pu faire le choix d’un licenciement non disciplinaire après avoir suivi une procédure relative à l’inaptitude de M. [S], étant précisé que celui-ci a formé une demande d’invalidité.
La cour juge, au regard de ces éléments, que les griefs reprochés à M. [S] ne sont pas imputables à faute de celui-ci, de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Contexte de l’affaire
M. [S] a été licencié pour faute grave par son employeur, la société Hydro Building Systems France, suite à des SMS insultants et dégradants adressés à une collègue, ainsi que pour des absences à une formation et aux visites médicales.
Contestation du licenciement pour discrimination
M. [S] conteste la validité de son licenciement en invoquant une discrimination liée à son état de santé, en vertu de l’article L.1132-1 du code du travail.
Rejet de la demande de nullité du licenciement
Le tribunal rejette la demande de nullité du licenciement pour discrimination, car la preuve d’une discrimination directe ou indirecte n’a pas été établie par le salarié.
Contestation de la cause réelle et sérieuse du licenciement
M. [S] conteste également la cause réelle et sérieuse de son licenciement pour faute grave, arguant d’une décompensation psychiatrique au moment des faits reprochés.
Reconnaissance de licenciement sans cause réelle et sérieuse
La cour reconnaît que les griefs reprochés à M. [S] ne sont pas imputables à sa faute, et juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Indemnités accordées
M. [S] se voit accorder une indemnité de 15 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des indemnités compensatoires de préavis, de congés payés et de licenciement conformément à la législation en vigueur.
1. Il est important pour un employeur de respecter la procédure légale en cas de licenciement pour faute grave, notamment en ce qui concerne la convocation à un entretien préalable. Il est recommandé de bien suivre les étapes prévues par la loi et de notifier clairement les motifs du licenciement.
2. En cas de contestation du licenciement pour motif discriminatoire, il est essentiel pour l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Il est recommandé de recueillir des preuves tangibles pour étayer la légitimité du licenciement.
3. Lorsqu’un salarié conteste la cause réelle et sérieuse du licenciement, il est primordial pour l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave invoquée à l’encontre du salarié. Il est conseillé de documenter soigneusement les manquements du salarié et de s’assurer que la décision de licenciement est justifiée par des éléments concrets.
Contexte de l’affaire
M. [S] a été licencié pour faute grave par son employeur, la société Hydro Building Systems France, suite à des SMS insultants et dégradants envoyés à une collègue, ainsi que pour des absences à une formation et aux visites médicales.
Contestation du licenciement pour discrimination
M. [S] conteste la validité de son licenciement en invoquant une discrimination liée à son état de santé, en vertu de l’article L.1132-1 du code du travail.
Rejet de la demande de nullité du licenciement
Le tribunal rejette la demande de nullité du licenciement pour discrimination, car la preuve d’une discrimination directe ou indirecte n’a pas été apportée par le salarié.
Contestation de la cause réelle et sérieuse du licenciement
M. [S] conteste la cause réelle et sérieuse de son licenciement pour faute grave, arguant d’un état psychique altéré au moment des faits reprochés.
Reconnaissance de licenciement sans cause réelle et sérieuse
La cour reconnaît que les griefs reprochés à M. [S] ne sont pas imputables à sa faute, et juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Indemnités accordées à M. [S]
M. [S] se voit accorder une indemnité de 15 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des indemnités compensatoires de préavis, de congés payés et de licenciement conformes à la législation en vigueur.
Réglementation applicable
– Article L.1132-1 du code du travail
– Article L.3221-3 du code du travail
– Article L 1134 – 1 du code du travail
– Article L 1235-3 du code du travail
– Article L1235-4 du code du travail
– Article 1er de la loi du 27 mai 2008
– Article 700 du code de procédure civile
Avocats
– Me Olivier D’ARDALHON DE MIRAMON
– Me Gilles SOREL
– Me Matthieu BARTHES
Mots clefs
– Licenciement
– Faute grave
– Harcèlement sexuel
– Discrimination
– Etat de santé
– Troubles psychotiques
– Inaptitude
– Ancienneté
– Salaire
– Indemnités
– Dommages-intérêts
– Préavis
– Congés payés
– Dépens
– Article 700 du code de procédure civile
Définitions juridiques
– Licenciement: rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur
– Faute grave: manquement très grave du salarié à ses obligations contractuelles
– Harcèlement sexuel: comportements à connotation sexuelle répétés qui ont pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne
– Discrimination: traitement défavorable d’une personne en raison de critères tels que le sexe, l’origine, la religion, etc.
– Etat de santé: situation médicale d’une personne, pouvant influencer sa capacité à travailler
– Troubles psychotiques: troubles mentaux sévères affectant la perception de la réalité
– Inaptitude: incapacité d’un salarié à exercer son poste de travail pour des raisons médicales
– Ancienneté: durée de présence d’un salarié dans l’entreprise
– Salaire: rémunération versée par l’employeur au salarié en échange de son travail
– Indemnités: sommes versées en compensation d’un préjudice subi
– Dommages-intérêts: réparation financière d’un préjudice subi
– Préavis: période de temps pendant laquelle le contrat de travail continue après avoir été résilié
– Congés payés: période de repos rémunérée accordée au salarié
– Dépens: frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire
– Article 700 du code de procédure civile: disposition permettant au juge de condamner la partie perdante à verser une somme à l’autre partie pour ses frais de justice
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
.
15/09/2023
ARRÊT N°2023/360
N° RG 22/00338 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OSL5
AB/AR
Décision déférée du 16 Décembre 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de toulouse ( 20/00097)
INDUSTRIE – MONTAUD G.
[L] [S]
C/
SARL HYDRO BUILDING SYSTEMS FRANCE
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
15 09 23
à Me Olivier D’ARDALHON DE MIRAMON
Me Gilles SOREL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU QUINZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANT
Monsieur [L] [S]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Olivier D’ARDALHON DE MIRAMON de la SELARL AUXILIUM, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEE
SARL HYDRO BUILDING SYSTEMS FRANCE
prise en la personne de son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social [Adresse 1] [Localité 2]
Représentée par Me Matthieu BARTHES de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE (plaidant) et par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Juillet 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C.BRISSET Présidente et A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère, chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
E.BILLOT, Vice-Présidente Placée
Greffier, lors des débats : A. RAVEANE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [L] [S] a été embauché selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet du 1er février 1991 par la société Hydro Builtex, en qualité d’opérateur scieur, puis opérateur polyvalent presse.
La convention collective nationale de la métallurgie est applicable.
M. [S] a fait l’objet de plusieurs arrêts de travail pour dépression.
Par lettre du 1er mars 2019 contenant mise à pied à titre conservatoire, M. [S] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement, fixé au 15 mars, puis reporté au 25 mars 2019.
Le 17 mars 2019, il était hospitalisé à la suite d’une décompensation psychotique au centre hospitalier de Purpan.
Il a été licencié pour faute grave par courrier du 29 mars 2019.
Par requête en date du 23 janvier 2020, M. [S] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins de contester son licenciement.
Par jugement du 16 décembre 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :
– jugé que le licenciement de M. [L] [S] n’a pas été prononcé en fonction de son état de santé,
– jugé que M. [S] a été licencié pour une faute grave avérée,
– débouté M. [S] de ses demandes au titre des conséquences de la rupture et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– débouté M. [S] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
– débouté M. [S] de sa demande au titre de l’exécution provisoire,
– débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [S] aux entiers dépens.
M. [S] a relevé appel de ce jugement le 18 janvier 2022, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 avril 2022, auxquelles il est expressément fait référence, M. [S] demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 16 décembre 2021,
– statuant à nouveau, juger que le licenciement de M. [S] a été exclusivement prononcé en fonction de son état de santé et qu’il est discriminatoire,
– juger qu’il est en cela dépourvu de cause réelle et sérieuse et en prononcer la nullité,
– condamner la société Hydro Bulding Systems à payer à M. [S] les sommes suivantes :
* 3 074,84 euros au titre du préavis,
* 307,48 euros au titre d’indemnité de congés payés afférents,
* 26 751,10 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,
* 61 496,80 euros au titre de dommages et intérêts pour réparation du préjudice moral lié à la discrimination,
* 15 000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hydro Building Systems aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 juin 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la société Hydro Building Systems France demande à la cour de :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– juger que ce licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,
– juger que le licenciement de M. [S] n’est pas discriminatoire.
En conséquence:
– rejeter l’intégralité des demandes indemnitaires de M. [S],
– condamner M. [S] à verser à la société Hydro Building System France la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.
MOTIFS :
Sur le licenciement :
En l’espèce, M. [S] a été licencié pour faute grave par courrier motivé comme suit:
‘Monsieur,
En date du 1er mars 2019 nous vous avons envoyé par LRAR une convocation à entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien qui devait se tenir le vendredi 15 mars 2019 à 9h.
Dans la mesure où vous ne vous êtes pas présenté et afin de vous permettre de vous expliquer sur les faits qui vous sont reprochés, nous vous avons, à nouveau, envoyé par LRAR une convocation à entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
Vous ne vous êtes toujours pas présenté à cet entretien qui devait se tenir le lundi 25 mars 2019 à 11h.
Votre absence n’ayant aucune incidence sur la poursuite de la procédure, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave, sans indemnité ni préavis.
Vous avez été embauché le 1er février 1991 en qualité d’opérateur scieur.
Vous exercez actuellement les fonctions de Polyvalent presse.
Le jeudi 28 février 2018, vous avez adressé à Mme [R] [W] [F] une série de SMS à la fois insultants, dégradants et assimilables à du harcèlement sexuel.
En effet, vous avez commencé à 8h50 en lui adressant le SMS suivant :
« T’avais les plus beaux seins du monde. Une oeuvre d’art façon [X] [B] ».
Les messages de cette nature se sont multipliés tout au long de la journée, comme en témoignent les extraits suivants :
« L ‘infirmière de TEchnal doit être bonasse, j ‘ose pas lui dire. C’te Couille elle est enregistrée, elle le sait pas : Mdr »
« Mdr Mérite la fessée cette coquine »
« Avec le Directeur ça doit y aller ! Y s’en passe des choses ».
Votre comportement a eu pour effet de causer un trouble caractérisé au fonctionnement de l’entreprise et a nécessairement des répercussions sur l’organisation du service.
Nous ne pouvons prendre le risque que de tels faits se reproduisent.
A cela s’ajoute le fait que vous avez été absent à la formation à laquelle vous deviez assister le 13 février 2019.
De même, vous ne vous êtes pas présenté aux visites médicales auprès du médecin du travail prévues le 28 février 2019 à 16h puis le 15 mars à 13h30.
Là encore, vous n’ignorez pas que vous devez impérativement participer aux sessions de formation organisées par l’entreprise et que le suivi médical est une obligation.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave. (…)’
A titre principal, M. [S] soutient que son licenciement est nul car discriminatoire à raison de son état de santé.
Par application de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L.3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
Et l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 définit comme suit les différentes formes de discrimination :
– constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non appartenance , vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou de son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre, ne l’est, ne l’a été, ou ne l’aura été, dans une situation comparable,
– constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique, neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires ou appropriés,
– la discrimination inclut tout agissement lié à l’un des motifs précités et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant.
L’article L 1134 – 1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 .
Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination .
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
En l’espèce, le salarié expose ses difficultés médicales l’ayant conduit à être hospitalisé pour troubles psychotiques sévères 18 jours après les faits.
Il ne discute pas de la matérialité des faits mais indique que ceux-ci s’inscrivent dans le cadre d’une décompensation psychiatrique, dont attestent les documents médicaux qu’il produit.
Pour autant, la seule concordance chronologique entre l’affection dont souffre M. [S] et les faits pour lesquels il a été licencié ne saurait caractériser un élément laissant supposer l’existence d’une discrimination à raison de l’état de santé.
Il est constant entre les parties que M. [S] a bien commis les faits que l’employeur qualifie de fautifs, or la commission de faits fautifs est en soi une cause objective de licenciement ; et le fait que M. [S] conteste avoir disposé de toutes ses facultés mentales lors de la commission de ces faits ne permet pas de faire un lien direct entre le licenciement et l’état de santé du salarié, alors même que cet état de santé psychique était ignoré de l’employeur lors du licenciement puisque celui-ci a découvert le motif des arrêts maladie à l’occasion de la procédure prud’homale.
La demande relative à la nullité du licenciement ainsi que la demande indemnitaire pour discrimination seront rejetées par confirmation du jugement déféré.
A titre subsidiaire, M. [S] conteste la cause réelle et sérieuse du licenciement.
Il appartient à la société Hydro Building qui a procédé au licenciement pour faute grave de M. [S] de rapporter la preuve de la faute grave qu’elle a invoquée à l’encontre de son salarié, étant rappelé que la faute grave se définit comme un manquement ou un ensemble de manquements qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; la cour examinera les motifs du licenciement énoncés dans la lettre de licenciement précitée, qui fixe les limites du litige.
Ainsi qu’il l’a été rappelé, M. [S] ne conteste pas avoir adressé à sa collègue, infirmière de l’entreprise, des messages menaçants et insultants, et ce de manière répétée le 28 février 2019. Cette infirmière a d’ailleurs déposé une main courante au sujet des SMS et signalé les faits à la direction.
Il est établi qu’à cette période M. [S] se trouvait dans un état psychique fortement altéré pouvant obérer ses facultés de discernement quant au caractère répréhensible son comportement ; les éléments médicaux produits montrent que le salarié présentait des troubles de comportement, notamment sur le lieu de travail, plusieurs jours avant son hospitalisation sous contrainte intervenue le 17 mars 2019 à la suite d’une ‘nouvelle décompensation psychotique’ alors qu’il était en rupture de traitement depuis plusieurs mois selon le médecin psychiatre.
Les messages SMS dont il a reconnu l’envoi à l’infirmière sont intrinsèquement incohérents et révèlent l’état mental très dégradé dans lequel se trouvait M. [S].
A la même période, M. [S] ne s’est pas rendu à une formation, et a refusé de se rendre à la visite médicale, éléments dont l’employeur tient également compte pour licencier disciplinairement le salarié.
S’il est exact que l’employeur se devait, en vertu de son obligation de sécurité, de prendre des mesures de nature à protéger les collègues de M. [S], il n’en demeure pas moins que M. [S] était placé en arrêt maladie lors du prononcé du licenciement, et que l’employeur aurait pu faire le choix d’un licenciement non disciplinaire après avoir suivi une procédure relative à l’inaptitude de M. [S], étant précisé que celui-ci a formé une demande d’invalidité.
La cour juge, au regard de ces éléments, que les griefs reprochés à M. [S] ne sont pas imputables à faute de celui-ci, de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
M. [S] avait acquis 28 ans d’ancienneté et était âgé de 48 ans lors de son licenciement.
Il percevait en dernier lieu un salaire moyen de 3074,84 € bruts.
Il ne fournit pas d’éléments actualisés sur sa situation.
En vertu de l’article L 1235-3 du code du travail, modifié par l’ordonnance du 22 septembre 2017, applicable aux licenciements survenus à compter du 24 septembre 2017, si le licenciement survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, et si l’une des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité comprise entre un montant minimal et un montant maximal figurant dans un tableau. Selon le tableau, pour un salarié tel que M. [S], ayant 28 ans d’ancienneté dans une entreprise comprenant au moins 11 salariés, cette indemnité est comprise entre 3 et 19,5 mois de salaire brut.
Les éléments de la cause justifient d’allouer à M. [S] la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par ailleurs M. [S] est bien fondé à obtenir les sommes de 3 074,84 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis , 307,48 € au titre des congés payés y afférents, et 26 751,10 € au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement, dont le calcul n’est pas discuté par l’employeur.
Il sera fait application des dispositions de l’article L1235-4 du code du travail à hauteur de deux mois d’indemnisation.
Sur le surplus des demandes :
La société Hydro Building Systems France, succombante, sera condamnée aux dépens de première instance par infirmation du jugement déféré, ainsi qu’aux dépens d’appel et à payer à M. [S] la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, le jugement étant infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [S] de ses demandes afférentes à la nullité du licenciement et à la discrimination,
L’infirme sur le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,
Dit que le licenciement de M. [S] est sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la société Hydro Building Systems France à payer à M. [S] les sommes suivantes :
* 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3074,84 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 307,48 € bruts au titre des congés payés y afférents,
* 26 751,10 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
* 3500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,
Condamne la société Hydro Building Systems France à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. [S] dans la limite de deux mois d’indemnités,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la société Hydro Building Systems France aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.
La greffière La présidente
A. Raveane C. Brisset