Compromis de Vente : décision de justice du 6 avril 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/06327

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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50B

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 AVRIL 2023

N° RG 21/06327

N° Portalis DBV3-V-B7F-UZHB

AFFAIRE :

[B] [N] épouse [X]

C/

S.A.S. ALKA O

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Septembre 2021 par le TJ de Nanterre

N° Chambre : 2

N° RG : 18/04098

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Jérôme HOCQUARD de la SELARL ELOCA

Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

1/ Madame [B] [N] épouse [X]

née le 13 Décembre 1970 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

2/ Monsieur [J] [X]

né le 31 Mars 1966 à [Localité 6] (19)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Jérôme HOCQUARD de la SELARL ELOCA, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0087 – N° du dossier 390067

APPELANTS

****************

S.A.S. ALKA O

N° SIRET : 818 334 567

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 744 Représentant : Me Bertrand DAVID de la SELARL ACBC, Plaidant, avocat au barreau de BAYONNE, vestiaire : 41

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

Exposé du litige

FAITS ET PROCEDURE :

Le 29 mai 2017, M. [J] [X] et Mme [B] [N], épouse [X], ont donné procuration à tout clerc de Me [S], notaire à Maubourget (Pyrénées-Atlantiques), pour signer avec la société Alka O une vente d’immeuble à rénover portant sur un appartement en duplex de type T3 constituant le lot n°8 d’un immeuble situé à [Adresse 3], au prix de 253 650 euros.

Par acte du 15 juin 2017 reçu par Me [S], un compromis de vente d’immeuble à rénover portant sur ce bien a été signé au prix de 253 650 euros, comprenant l’existant à concurrence de 114 143 euros et des travaux à réaliser par le vendeur entre décembre 2017 et janvier 2018 à concurrence de 139 508 euros, sous condition suspensive d’obtention d’un prêt par les acquéreurs, au plus tard le 17 juillet 2017. La signature de l’acte authentique devait intervenir au plus tard le 31 août 2017 devant Me [S].

Par courriels des 4 et 21 juillet 2017, Me [S], notaire chargé de la vente, a interrogé les époux [X] afin de connaître l’état d’avancement de leur dossier de prêt.

Le 25 juillet 2017, M. et Mme [X] ont donné mandat à la société Financement Paris Ouest, qui avait déjà réalisé le 19 juillet une simulation de financement pour leur compte, de rechercher un prêt d’un montant de 276 477 euros sur 20 ans au taux de 1,2 %.

Par avenant du 28 août 2017, le délai de réalisation de la condition suspensive d’obtention du prêt a été prorogé au 30 septembre 2017 et celui de la régularisation par acte authentique au 31 octobre 2017.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 octobre 2017, reçue le 13, la société Alka O a mis en demeure M. et Mme [X] de justifier de l’obtention d’un prêt.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 octobre 2017, reçue le 23, les époux [X] ont notifié au notaire un refus de prêt émanant de la banque CIC.

Par actes du 16 avril 2018, la société Alka O a fait assigner M. et Mme [X] devant le tribunal de grande instance de Nanterre en paiement de la clause pénale.

Par jugement du 2 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

– condamné M. et Mme [X], solidairement, à payer à la société Alka O la somme de 25 365 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2018,

– condamné M. et Mme [X] aux dépens de l’instance avec recouvrement direct, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

– condamné M. [X] et Mme [X] à payer à la société Alka O la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le tribunal a écarté la demande de nullité de la clause relative à la condition suspensive d’obtention de prêt formée par M. et Mme [X] en ce qu’elle fait référence aux dispositions du code de la consommation relatifs au crédit à la consommation et non au crédit immobilier, dès lors, d’abord, que les acquéreurs ne démontraient pas en quoi cette référence erronée avait eu un effet sur leur consentement et leur avait causé un quelconque grief, ensuite, qu’aucun texte n’imposait à peine de nullité de viser les textes trouvant à s’appliquer entre le prêteur et l’emprunteur, la clause suspensive n’étant pas fondée sur ces textes, enfin, que les dispositions protectrices des consommateurs avaient en l’espèce été respectées.

Sur la réalisation de la condition suspensive, le tribunal a jugé que les acquéreurs ne justifiaient pas d’une demande de prêt conforme aux stipulations contractuelles imposant un taux maximum de 1,9% ni avant le 17 juillet 2017, ni avant le 30 septembre 2017, date à laquelle le terme du délai de réalisation de la condition avait été reporté, la demande adressée à la banque CIC le 8 septembre 2017 portant sur un taux de 2,15%, soit un taux supérieur au taux maximum convenu, les acquéreurs n’ayant au surplus pas déposé de demande de prêt auprès de la Société Générale, malgré une simulation plus favorable.

Le tribunal a par ailleurs estimé que les acquéreurs ne pouvaient prétendre qu’un prêt conforme aux stipulations contractuelles ne leur aurait pas été accordé au regard de la faiblesse de leurs capacités financières, dès lors qu’ils avaient effectué une simulation de prêt auprès de la banque CIC du 24 mars 2017 d’un montant de 253 650 euros sur 25 ans au taux de 2,15% par mois représentant une échéance mensuelle de 1 151, 31 euros, démontrant qu’ils étaient prêts à porter leur endettement à 35% pour cet investissement devant leur rapporter un loyer et des réductions d’impôts.

Il en a déduit que la condition suspensive devait être réputée accomplie et que la société Alka O était bien fondée à solliciter l’application de la clause pénale, les acquéreurs ayant manqué à leurs engagements contractuels, tant dans les conditions initiales que dans les conditions résultant de l’avenant du 28 août 2017, et fait obstacle à la réalisation de ladite condition.

Moyens

Motivation

SUR QUOI :

Le compromis de vente en date du 15 juin 2017 comportait une condition suspensive d’obtention de prêt au bénéfice des acquéreurs répondant aux caractéristiques suivantes :

« Montant maximum de la somme empruntée : 279.015 euros

– Durée maximale de remboursement : 25 ans

– Taux nominal d’intérêt maximum : 1,9 % (hors assurances)

– Garanties offertes : privilège de prêteur de deniers avec ou sans hypothèque conventionnelle complémentaire ou toute autre garantie sous-seing privée » et précisait que « l’acquéreur s’engage à faire toutes les démarches nécessaires à l’obtention du prêt et à justifier de celle-ci au vendeur dans un délai de un mois à compter des présentes et au plus tard le 17 juillet 2017 ».

Un article intitulé « clause pénale » y était également inséré selon lequel : « Si l’une des parties ne veut ou ne peut réitérer le présent acte par acte authentique bien que les conditions suspensives soient réalisées, elle sera redevable envers l’autre, d’une indemnité d’ores et déjà fixée à titre de clause pénale à la somme de VINGT-CINQ MILLE TROIS CENT SOIXANTE-CINQ EUROS (25.365 euros), conformément aux dispositions de l’article 1231-5 (anciens articles 1152 et 1226) du Code civil. »

Sur la nullité de la clause relative à la condition suspensive d’obtention de prêt :

La clause relative à la condition suspensive d’obtention de prêt stipulée au bénéfice des époux [X] fait référence aux « dispositions des articles L. 312-1 à L. 312-36 – Chapitre II (Crédit immobilier) du Livre III du code de la consommation relative à l’information et la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier ».

Ces textes, dans leur rédaction en vigueur à la date de la signature de l’acte, portaient sur le crédit à la consommation et non sur le crédit immobilier. Cette fausse référence peut s’expliquer par le fait que les dispositions relatives au crédit immobilier figuraient jusqu’au 1er juillet 2016 dans ce code et sous ces numéros, mais qu’à partir de cette date, leur numérotation est devenue L. 313-24 à L. 313-36 du même code.

Néanmoins, le déroulé de l’action respective des parties depuis la signature du compromis démontre que M. et Mme [X] ont bénéficié de toutes les protections que les textes sous leurs véritables références instaurent à l’occasion de la souscription d’un prêt immobilier adossé à un acte de vente au bénéfice des emprunteurs profanes en qualité de candidats acquéreurs.

C’est ainsi que l’ordre public a été parfaitement respecté, l’erreur sur la nouvelle numérotation des articles du même code n’ayant pu vicier le consentement de M. et Mme [X] au moment de la conclusion du contrat .

Aucun texte n’imposait par ailleurs leur mention dans le compromis de vente.

Les appelants n’invoquent d’ailleurs aucun grief précis découlant de cette simple erreur formelle.

Les premiers juges les ont justement déboutés de cette demande de nullité.

Sur la réalisation de la condition suspensive :

L’article 1304-1 alinéa 1 du code civil prévoit :  » La condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l’accomplissement. »

S’agissant des autre griefs formulés par les appelants et examinés par le tribunal , la cour adopte les motifs des premiers juges aux termes desquels ils ont accueilli la demande en paiement de la clause pénale par M. et Mme [X] à la société Alka O en relevant que les premiers n’ont pas respecté les clauses du compromis :

– les époux [X] ne justifient pas de demandes de prêt auprès d’un établissement avant la date contractuellement prévue du 17 juillet 2017,

– ils ne justifient à aucun moment d’une demande de prêt conforme aux stipulations contractuelles en adressant une demande au CIC le 8 septembre 2017 portant sur un taux supérieur au taux maximum convenu comme le révèle un refus de prêt émanant de cette banque en date du 20 octobre 2017 dans les termes suivants :

« Conformément à votre demande en date du 8 septembre 2017, nous avons étudié votre dossier de prêt immobilier pour un montant global de 270.000 euros moyennant un taux fixe de 2,15 % sur une durée de 300 mois destiné à financer l’acquisition d’un bien situé [Adresse 3]. Nous sommes au regret de vous informer que nous ne pouvons donner une suite favorable à cette demande »,

– et alors que le 22 septembre 2017, le mandataire des époux [X] leur a adressé une simulation de la Société générale pour un prêt de 277.743,70 euros sur 20 ans au taux de 1,5 %, représentant une échéance mensuelle de 914,22 euros la première année et de 1.450,93 euros les années suivantes, ils n’ont pas donné suite en déposant une demande formelle de prêt dans cet établissement bancaire à ces conditions, préférant s’interroger finalement sur le taux effectif global et la rentabilité de l’opération (achat d’une maison secondaire pour louer).

Les appelants qui remettent en cause la validité de l’avenant au motif qu’ils n’en connaissaient pas l’existence l’ont exécuté en procédant à des démarches en lien avec l’obtention du prêt après la date de sa signature et du délai de réalisation de la condition suspensive prévue au compromis.

Ils ne peuvent pas en effet invoquer le dépassement de son mandat par le notaire, auquel ils ont donné une très large procuration en date du 19 mai 2017, en vue notamment de ‘procéder à la régularisation de tout avant-contrat, de convenir du mode et des époques de paiement, de payer le prix soit comptant soit aux termes convenus’ etc…

Ils ne peuvent pas se réfugier derrière une prétendue faiblesse de leurs capacités financières -non prouvée au demeurant- après avoir déclaré aux termes de l’acte de vente conclu le 15 juin 2017 « qu’il n’existe à ce jour aucun obstacle de principe à l’obtention des financements qu’ils envisagent de solliciter. »

Dès lors, c’est bien de leur faute que la condition suspensive ne s’est pas réalisée et celle-ci doit donc être réputée accomplie. La décision de première instance sera entièrement confirmée en toutes ses dispositions en ce compris les dispositions relatives aux frais et dépens.

Les demandes de M. et Mme [X] seront entièrement rejetées et ils seront condamnés à payer à la société Alka O une indemnité de procédure de 3 000 euros outre les dépens d’appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

la cour statuant contradictoirement,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. et Mme [X] à payer à la société Alka O la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. et Mme [X] aux entiers dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Florence PERRET, Président, et par Mme FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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