Dirigeant de fait ou salarié : les critères à connaître

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Le dirigeant de fait est celui qui, en toute indépendance, exerce une activité positive de gestion et de direction.

Preuve de la qualité de dirigeant de fait

Le dirigeant de fait est celui qui, en toute indépendance, exerce une activité positive de gestion et de direction. La reconnaissance de la qualité de salarié exige la réunion des conditions cumulatives suivantes : i) une prestation de travail effective et réelle requérant des compétences techniques, ii) une rémunération, iii) l’existence d’un lien de subordination à l’égard de son employeur.

Statut de l’ancien gérant devenu salarié

En l’espèce, M. [K] disposait d’un contrat de travail écrit à durée indéterminée en date du 1er juillet 2014, le liant à la SARL AMPOULES-LEDS.FR, en qualité de responsable d’exploitation, ses missions étant définies comme la gestion du personnel, la recherche de produits d’éclairage, la négociation des achats et volumes de produits d’éclairage destinés au site internet de l’entreprise.

Ce contrat prévoyait une rémunération de 1 077,23 € brut par mois et une indemnité de confidentialité de 2 002,23 € par mois. Il a perçu effectivement cette rémunération jusqu’en octobre 2017comme en témoignent ses fiches de paye (avec une augmentation de l’indemnité à compter de janvier 2017).

Présomption de contrat de travail

Il existe donc une présomption de l’existence d’un contrat de travail au bénéfice de M. [K] et donc de sa qualité de salarié.

En conséquence, il appartient à Maître [E] [C] ès qualités et au CGEA de [Localité 5] de rapporter la preuve contraire, c’est-à-dire la qualité de dirigeant de fait de M. [K].

Ainsi, ils se prévalent des courriers de M. [K] des 17 novembres et 28 novembre 2017 aux termes desquels ce dernier conteste que Mme [F] ait révoqué sa démission du 16 mars 2015 et il revendique la gérance à son profit en lieu et place de cette dernière. Mais, il ne s’agit là que d’une déclaration d’intention de M. [K], insuffisante pour démontrer sa qualité de gérant dans la mesure où précisément cette qualité lui est contestée. S’il revendiquait cette qualité, c’est qu’il n’en disposait pas. D’ailleurs, dans la lettre du 17 novembre 2017, il s’est plaint auprès de Maître [C], ès qualités de mandataire judiciaire, que Mme [F] gérait seule l’entreprise de manière autoritaire, qu’elle lui avait retiré ses missions et tenté de ne plus lui verser son salaire à compter de juillet 2016, ce qui caractérise un lien de subordination et donc un statut de salarié.

Concernant la rémunération de M. [K] à hauteur de 1 077,23 € brut pour 81 heures et 40 minutes par mois et 2 002,23 € par mois au titre de son engagement de confidentialité, elle n’est pas exorbitante au regard de la qualification de M. [K], employé au statut cadre niveau 8, et des résultats de la SARL AMPOULES-LEDS.FR entre 2014 et 2016.

Si M. [K] disposait d’une carte professionnelle auprès de la Caisse d’Epargne lui permettant d’engager la SARL AMPOULES-LEDS.FR, force est de constater que l’usage de cette carte lui a été conféré le 5 février 2014 par la SARL AMPOULES-LEDS.FR représentée par Mme [F] en sa qualité de gérante qui a signé l’acte. De plus, cette dernière a attesté que M. [K] était autorisé à engager les fonds de la société dans le cadre de sa mission d’achat de marchandises pour le compte de la société ou pour les besoins du compte courant d’associé et que tout autre achat d’importance nécessitait son accord préalable, d’autres salariés de l’entreprise étant également habilités à engager des fonds pour l’acquisition de fournitures et de matériels. L’usage de cette carte était donc réservé aux besoins courants de l’entreprise.

En outre, s’il a eu procuration sur un compte 0902062R025 auprès de la Banque Postale, cela a cessé au 2 mai 2016.

Si M. [K] était propriétaire du nom du domaine, cet élément ne caractérise pas un acte de gestion, de direction ou de représentation de la société, nécessaire à la qualification de gérant de fait.

De même, le fait que M. [K] ait télétravaillé ne caractérise pas une gestion de fait, alors même que la vocation de cette société était un commerce via internet.

Maître [C] ès qualités et le CGEA invoquent également le fait que M. [K] donnait des ordres aux salariés. Mais, dans le mail du 28 novembre 2017 dont ils se prévalent, M. [K] rappelle à des salariés qu’il est leur supérieur hiérarchique et qu’il n’a pas besoin d’invoquer un quelconque mandat de gérant pour leur demander de collaborer avec lui, ce qui implique qu’il n’était pas considéré comme tel. Effectivement, M. [K], en sa qualité de salarié, pouvait être le supérieur hiérarchique d’autres salariés, sans avoir la qualité de gérant. Par ailleurs Maître [C] ès qualités et le CGEA ne rapportent pas la preuve que M. [K] ait embauché, sanctionné ou licencié un salarié.

Qualité de dirigeant de fait écartée

Au total, ils ne justifient d’aucun élément établissant un acte précis et concret de direction, de gestion ou de représentation de la SARL AMPOULES-LEDS.FR par M. [K].

De son côté, M. [K] démontre que Mme [F] a pu lui supprimer ses accès au site Internet de la société (mail du 6 juillet 2016) et aux informations comptables et qu’elle lui a supprimé sa mission auprès des salariés et des fournisseurs (cf courrier de réclamation de M. [K] du 19 juillet 2016), cette dernière ayant pouvoir à l’égard du salarié M. [M] [T], responsable informatique, disposant de droits administrateurs supérieurs à ceux de M. [K].

De plus, ce dernier produit des échanges de mails avec Mme [F] démontrant qu’elle lui donnait des ordres de réaliser certaines tâches en rapport avec ses attributions (cf mail du 15 septembre 2015, du 14 janvier 2016, du 27 janvier 2016, du 5 mars 2016, du 8 mars 2016, du 14 mai 2016…) :

exemple :’Est-ce que tu peux rajouter plus de soldes pour qu’il y ait plus de ventes ‘Met les gu10 coupe OR en soldes faut qu’on les fasse on en a des tonnes’,

et elle en contrôlait l’exécution :

  • ‘Est-ce -que tu as envoyé bien fait la newsletter sur les E 27 ‘ J’ai rien reçu du tout c’est normal  » réponse de M. [K] : ‘Oui j’ai envoyé comme tu as demandé avec une remise sur les E27…’.

Enfin, dans plusieurs courriers, M. [K] s’est plaint auprès de Mme [F] qu’elle ne lui payait plus son salaire et les heures supplémentaires, qu’elle le harcelait moralement, qu’elle lui avait notifié à tort une absence injustifiée, qu’elle lui avait retiré ses missions en 2016 (courriers des 7 et 8 mars 2017 à Mme [F] et au médecin-conseil) et que son licenciement économique était mal fondé (courrier du 6 novembre 2017), se plaçant ainsi sous le statut de salarié.

Ainsi, au vu de l’ensemble de ces éléments, Maître [C] ès qualités et le CGEA ne rapportent pas la preuve de l’exercice par M. [K] d’une gestion de fait de la SARL AMPOULES-LEDS.FR, alors que M. [K] rapporte la preuve de sa qualité de salarié.

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