Le Conseil constitutionnel a censuré des dispositions de l’article 4 de la Loi plein emploi autorisant les personnes morales constituant le réseau pour l’emploi à partager entre elles certaines informations. Droit au respect de la vie privéeLes députés requérants soutenaient que ces dispositions méconnaissaient le droit au respect de la vie privée au motif que le partage des données qu’elles visaient à autoriser n’était pas entouré de garanties suffisantes. Ils relevaient à cet égard que les données concernées n’étaient pas définies précisément et que les destinataires de ces données, incluant des organismes privés, étaient particulièrement nombreux. Ils affirmaient également que, en se bornant à renvoyer au pouvoir réglementaire les modalités d’application de ce partage de données, le législateur avait méconnu l’étendue de sa compétence. L’article 2 de la Déclaration de 1789Le Conseil constitutionnel rappelle que la liberté proclamée par l’article 2 de la Déclaration de 1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités. À cette aune, il relève que les différentes personnes morales constituant le réseau pour l’emploi coordonnent l’exercice de leurs compétences afin d’assurer le suivi et la continuité des parcours d’insertion ainsi que la réalisation des actions d’accompagnement socio-professionnel des bénéficiaires de leurs services. Le partage des donnéesDans ce cadre, les dispositions contestées prévoient que ces personnes morales partagent certaines données relatives aux bénéficiaires de leurs services et les rendent accessibles à l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage. Elles renvoient à un décret en Conseil d’État la détermination des modalités de traitement des données à caractère personnel nécessaires à la mise en œuvre de leurs actions. Le Conseil constitutionnel relève que ces dispositions visent à favoriser la coordination des acteurs concourant au service public de l’emploi et améliorer les parcours d’insertion sociale et professionnelle des personnes bénéficiant de leurs services. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général. Il juge que, toutefois, d’une part, les personnes morales autorisées à partager ces données au sein du réseau pour l’emploi sont non seulement l’État, les régions, les départements, les communes et certains groupements de communes, l’opérateur France Travail, les missions locales et les organismes de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap, mais aussi les organismes publics ou privés dont l’objet consiste en la fourniture de services relatifs au placement, à l’insertion, à la formation et à l’accompagnement des demandeurs d’emploi, les organismes chargés du repérage et de l’accompagnement spécifique des personnes les plus éloignées de l’emploi, les entreprises adaptées constituées par des collectivités territoriales ou des organismes publics ou privés, les établissements et services d’aide par le travail accueillant des personnes handicapées, les établissements et services médico-sociaux de réadaptation, de pré-orientation et de rééducation professionnelle, les organismes chargés de la mise en œuvre des plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi, les maisons de l’emploi, les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification, les autorités et les organismes délégataires du conseil départemental vers lesquels les demandeurs d’emploi peuvent être orientés en vue de leur accompagnement, les organismes débiteurs de prestations familiales chargés du service du revenu de solidarité active et les structures dont l’objet est l’accompagnement à la création d’entreprises pour les personnes à la recherche d’un emploi. Nature des données partagéesD’autre part, les données susceptibles d’être partagées sont, outre celles permettant l’identification des bénéficiaires des services des personnes morales participant au réseau pour l’emploi, toutes celles nécessaires à l’évaluation de leur situation, au suivi de leur parcours d’insertion, à la réalisation des actions d’accompagnement, à l’établissement des statistiques et à la gestion de l’assurance chômage. En outre, le partage autorisé peut porter sur toute catégorie de données à caractère personnel, dont notamment des informations relatives à la santé des personnes. Un partage disproportionnéLe Conseil constitutionnel relève que, ainsi, le législateur a permis que des données à caractère personnel, y compris de nature médicale, soient communiquées à un très grand nombre de personnes, dont la désignation n’est subordonnée à aucune habilitation spécifique et sans qu’aucune garantie n’encadre ces transmissions d’informations. Il déduit de tout ce qui précède que ces dispositions portent une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et les déclare donc contraires à la Constitution. |
S’abonner
Connexion
0 Commentaires
Le plus ancien