Vidéos intimes attentatoires à l’image des sapeurs-pompiers

·

·

Vidéos intimes attentatoires à l’image des sapeurs-pompiers

La diffusion de vidéos sexuelles en milieu professionnel est une faute qui peut aussi porter atteinte au corps professionnel auquel appartient le salarié.  

Révocation d’un sapeur-pompier

Par décision en date du 1er juin 2022, le président du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours du Nord a prononcé la sanction disciplinaire de révocation d’un sapeur-pompier professionnel en raison de diffusion régulière de vidéos à caractère pornographique sur la télévision du centre d’incendie et de secours, de captation d’une vidéo intime et à caractère sexuel représentant l’une de ses collègues sans recueillir son consentement et de diffusion d’une autre vidéo à caractère sexuel représentant l’une de ses collègues sans recueillir son consentement.

Révocation confirmée

Saisi de l’affaire, le Tribunal administratif a validé cette révocation : les griefs étaient constitutifs d’un manquement au devoir de dignité qui incombe à tout sapeur-pompier professionnel et d’une atteinte à l’image de l’établissement et à celle de l’ensemble de la profession de sapeur-pompier.

Autres points juridiques sur cette thématique

________________________________________________________

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Tribunal administratif de Lille

25 juillet 2022

N° 2204945

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juin et 13 juillet 2022, M. A B, représenté par Me Briatte, demande au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision en date du 1er juin 2022, par laquelle le président du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) du Nord a prononcé sa révocation à compter du 1er juillet 2022, jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ;

2°) d’enjoindre au président du conseil d’administration du SDIS du Nord de le réintégrer, dans un délai de cinq jours à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge du SDIS du Nord une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— la condition d’urgence est remplie dès lors que la décision de révocation le prive de son traitement et le place dans une situation financièrement alarmante dès lors qu’il n’est plus à même de faire face à ses dépenses mensuelles incompressibles ;

— il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, dès lors que :

* elle a été édictée par une autorité incompétente dès lors qu’en vertu du premier alinéa de l’article L. 1424-30 du code général des collectivités territoriales, seul le président du conseil d’administration est compétent pour édicter une sanction à l’encontre d’un agent du SDIS ;

* elle est entachée de vice de procédure dès lors que s’il a été mis à même de consulter son dossier administratif, celui-ci ne comportait pas le rapport établi à l’issue de l’enquête administrative ;

* elle est insuffisamment motivée dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas précisément datés et circonstanciés ;

* la décision est entachée d’inexactitude matérielle des faits, aucun des griefs retenus à son encontre ne lui étant imputables ;

* à titre subsidiaire, la sanction est manifestement disproportionnée dès lors qu’il a été plus sévèrement sanctionné que les autres agents qui ont été poursuivis dans le cadre d’une procédure correctionnelle, ce qui n’est pas son cas, que sa carrière et sa manière de servir témoignent de ses qualités humaines et professionnelles, que la révocation n’est entrée en vigueur qu’un mois après son édiction de telle sorte que son maintien en fonction n’était pas susceptible de porter atteinte à l’intérêt du service.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2022, le SDIS du Nord conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

— la condition d’urgence n’est pas satisfaite, le requérant pouvant notamment prétendre au bénéfice d’allocations de retour à l’emploi pour lui permettre de faire face à ses charges de célibataire sans enfant ;

— pour le surplus, les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

— les autres pièces du dossier ;

— la requête enregistrée le 30 juin 2022 sous le numéro 2204962 par laquelle M. B demande l’annulation de la décision du 1er juin 2022.

Vu :

— le code général de la fonction publique ;

— le code général des collectivités territoriales ;

—  le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné Mme Féménia, vice-présidente, pour statuer sur les demandes de référé.

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 13 juillet 2022 à 9h00, à l’issue de laquelle l’instruction a été close :

— le rapport de Mme Féménia, juge des référés ;

— les observations de Me Briatte représentant M. B qui maintient le bénéfice de ses écritures ; il est en outre indiqué notamment que M. B n’a fait l’objet d’aucune poursuites pénales, que la sanction votée à l’unanimité par le conseil de discipline ne portait que sur une exclusion temporaire de fonction pour une durée de deux ans, que le rapport de saisine du conseil de discipline ne comportait pas le bordereau de transmission des pièces ;

— les observations de Me Segard représentant le SDIS du Nord qui reprend les termes du mémoire en défense, rappelle la gravité des faits de captation et de diffusion d’images et de vidéos à caractère pornographique pour lesquels M. B a fait l’objet de la révocation contestée, faits ayant conduit au suicide d’une de ses collègues sapeur-pompier qui avant de mettre fin à ses jours n’a pas fait connaître sa volonté de porter plainte de sorte que les poursuites pénales n’ont pu aboutir et, fait valoir notamment que les justificatifs de charge présentés par le requérant sont contestables dès lors que le contrat de bail produit n’est ni daté ni signé et est établi au nom d’une société immobilière non inscrite au registre du commerce, que l’enquête administrative n’a pas donné lieu à la rédaction d’un rapport mais a consisté à collecter les procès-verbaux d’audition réalisés par les services de police de sorte que la matérialité de ce rapport ne peut être invoquée, que la transmission des pièces au conseil de discipline a bien été faite par bordereau de transmission lequel a été au demeurant versé par le requérant dans les pièces de la présente instance, que M. B a reconnu les griefs qui lui sont reprochés lors de l’enquête pénale visant plusieurs de ses collègues pour lesquels les procès-verbaux d’audition de police font foi jusqu’à preuve du contraire lesquels ont été signés sans réserve par l’intéressé.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ».

2. Par décision en date du 1er juin 2022, le président du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours du Nord a prononcé la sanction disciplinaire de révocation à compter du 1er juillet 2022 de M. B, sapeur-pompier professionnel. Le président du conseil d’administration du SDIS du Nord a retenu à l’encontre de M. B des faits de diffusion régulière de vidéos à caractère pornographique sur la télévision du centre d’incendie et de secours, de captation d’une vidéo intime et à caractère sexuel représentant l’une de ses collègues sans recueillir son consentement et de diffusion d’une autre vidéo à caractère sexuel représentant l’une de ses collègues sans recueillir son consentement. Il a considéré que ces griefs étaient constitutifs d’un manquement au devoir de dignité qui incombe à tout sapeur-pompier professionnel et d’une atteinte à l’image de l’établissement et à celle de l’ensemble de la profession de sapeur-pompier. Par sa requête, M. B demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions précitées de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution de la décision du 1er juin 2022.

Sur les conclusions aux fins de suspension et d’injonction :

3. En l’état de l’instruction et des informations recueillies au cours de l’audience publique, aucun des moyens visés ci-dessus ne paraît, dans les circonstances de l’espèce, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. Par suite, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’existence d’une situation d’urgence au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, les conclusions à fin de suspension de l’exécution de la décision du 1er juin 2022 et, par voie de conséquence, les conclusions à fin d’injonction, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

4. Aux termes des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ».

5. Les dispositions précitées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS du Nord, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A B et au Service départemental d’incendie et de secours du Nord.

Fait à Lille, le 25 juillet 2022.

La juge des référés,

signé

J. FÉMÉNIA

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N°2204945

Questions / Réponses juridiques

Quel est le contexte de l’affaire entre la SARL Santa Lucia Contrôle et Monsieur [C] ?

L’affaire concerne un licenciement contesté par Monsieur [C], un salarié de la SARL Santa Lucia Contrôle, qui a été engagé en tant que chef de centre. Le licenciement a été notifié le 23 novembre 2016 pour des motifs jugés réels et sérieux par l’employeur, notamment des comportements inappropriés, le non-respect des horaires de travail, et le refus de participer à une vidéo promotionnelle. Monsieur [C] a contesté ce licenciement devant le Conseil de Prud’hommes de Cannes, qui a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, condamnant la société à verser des dommages et intérêts. La société a ensuite interjeté appel de cette décision, ce qui a conduit à l’arrêt de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence du 7 juillet 2022.

Quels étaient les motifs invoqués par la société pour justifier le licenciement de Monsieur [C] ?

La société a invoqué plusieurs motifs pour justifier le licenciement de Monsieur [C]. Parmi ceux-ci, on trouve : 1. Non-respect des procédures : Le salarié aurait négligé de respecter les procédures imposées par la réglementation applicable aux centres de contrôle technique, ce qui a été confirmé par un rapport de la DREAL. 2. Comportement désagréable : Des plaintes de clients ont été rapportées, dénonçant une attitude désagréable et un manque de considération de la part du salarié. 3. Modification unilatérale des horaires : Monsieur [C] aurait modifié ses horaires de travail sans accord préalable, ce qui aurait impacté le fonctionnement de l’entreprise. 4. Refus de participer à une vidéo promotionnelle : Le salarié a refusé de participer à une vidéo promotionnelle, critiquant le choix marketing de l’employeur. 5. Utilisation personnelle du véhicule de fonction : Il a été reproché au salarié d’utiliser le véhicule de fonction à des fins personnelles, ce qui contrevenait aux règles établies. Ces motifs ont été énoncés dans la lettre de licenciement, mais la Cour a finalement jugé que seuls deux griefs étaient établis et non prescrits, à savoir le comportement inapproprié envers un client et l’absence injustifiée.

Quelles ont été les décisions des juridictions concernant le licenciement de Monsieur [C] ?

Le Conseil de Prud’hommes de Cannes a d’abord jugé que le licenciement de Monsieur [C] était sans cause réelle et sérieuse, condamnant la SARL Santa Lucia Contrôle à verser 10 000 euros de dommages et intérêts, ainsi qu’une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. La société a interjeté appel de cette décision, contestando la qualification de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cependant, la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a confirmé le jugement de première instance, en considérant que les deux griefs retenus (le comportement inapproprié et l’absence injustifiée) n’étaient pas suffisamment sérieux pour justifier le licenciement. En conséquence, la Cour a maintenu l’indemnisation de 10 000 euros pour le préjudice subi par Monsieur [C] et a condamné la société à verser 2 000 euros supplémentaires pour les frais d’appel.

Quels éléments ont conduit la Cour à conclure que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ?

La Cour a examiné les différents griefs énoncés dans la lettre de licenciement et a constaté que, bien que certains faits aient été établis, ils n’étaient pas suffisamment graves pour justifier une rupture du contrat de travail. 1. Prescription des faits : La Cour a noté que certains griefs, notamment ceux liés aux non-conformités signalées par la DREAL, étaient prescrits, car l’employeur en avait eu connaissance plus de deux mois avant l’engagement de la procédure de licenciement. 2. Griefs isolés : Les seuls faits établis étaient le comportement inapproprié envers un client et l’absence injustifiée. Cependant, ces faits étaient considérés comme isolés et ne constituaient pas un motif suffisant pour un licenciement, surtout dans le cadre d’une relation de travail de quatre ans sans antécédents disciplinaires. 3. Absence de preuves solides : La société n’a pas réussi à prouver que les comportements reprochés étaient récurrents ou suffisamment graves pour justifier le licenciement. La Cour a également relevé l’absence de rappels à l’ordre ou de sanctions antérieures. Ainsi, la Cour a conclu que le licenciement de Monsieur [C] n’était pas justifié par des motifs réels et sérieux, confirmant la décision du Conseil de Prud’hommes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon