En date du 29 juin 2021, madame [H] [Z] épouse [L] a acheté un véhicule de marque MINI immatriculé [Immatriculation 3] à madame [R] [B] pour 6.500 euros. Au moment de la vente, le procès-verbal du dernier contrôle technique n’a pas été remis, la venderesse promettant de le fournir ultérieurement. Après avoir changé de propriétaire, madame [Z] a obtenu un procès-verbal daté du 21 juin 2021, révélant plusieurs défaillances, dont une anomalie concernant le kilométrage.
Madame [Z] a mandaté un expert qui a confirmé des modifications du kilométrage et des non-conformités mécaniques. Suite à cela, elle a demandé la résolution du contrat de vente par courrier en janvier 2022. Ne recevant pas de réponse, elle a saisi le Juge des référés, entraînant la désignation d’experts judiciaires. Madame [Z] a assigné madame [B] en juin 2023, et plusieurs ordonnances de clôture ont été émises, avec des audiences fixées jusqu’en 2024. Dans ses conclusions, madame [Z] a demandé l’annulation de la vente pour vices cachés, la restitution du prix d’achat, des dommages et intérêts, ainsi que le remboursement de frais engagés. Le tribunal a finalement prononcé la résolution de la vente, condamnant madame [B] à restituer le prix de vente et à indemniser madame [Z] pour les frais et préjudices subis, tout en ordonnant la restitution du véhicule. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Draguignan
RG n°
23/04404
DE DRAGUIGNAN
_______________________
Chambre 1
DU 17 Octobre 2024
Dossier N° RG 23/04404 – N° Portalis DB3D-W-B7H-J3DS
Minute n° : 2024/ 496
AFFAIRE :
[H] [Z] épouse [L] C/ [R] [B]
JUGEMENT DU 17 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Madame Amandine ANCELIN, Vice-Présidente, statuant à juge unique
GREFFIER : Madame Nasima BOUKROUH,
DÉBATS :
A l’audience publique du 2 juillet 2024 mis en délibéré au 24 Septembre 2024 prorogé 17 Octobre 2024
JUGEMENT :
Rendu après débats publics par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire et en premier ressort.
Copie exécutoire à Me Sandrine OTT-RAYNAUD
Délivrées le 17 Octobre 2024
Copie dossier
NOM DES PARTIES :
DEMANDERESSE :
Madame [H] [Z] épouse [L],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Sandrine OTT-RAYNAUD, avocat au barreau de TOULON,
D’UNE PART ;
DEFENDERESSE :
Madame [R] [B],
demeurant [Adresse 1]
non comparante ni représentée ;
D’AUTRE PART ;
En date du 29 juin 2021, madame [H] [Z] épouse [L] de marque MINI immatriculé [Immatriculation 3] auprès de madame [R] [B] moyennant la somme de 6.500 euros.
Madame [Z] expose qu’au jour de la vente, le procès-verbal du dernier contrôle technique réalisé sur le véhicule ne lui a pas été remis, la venderesse s’engageant à le lui transmettre dans les meilleurs délais ; cependant, ayant procédé au changement de propriétaire, madame [Z] déclare qu’elle a obtenu le procès verbal de contrôle technique daté du 21 juin 2021 (auprès du garage auteur du contrôle), celui-ci faisant état de plusieurs défaillances, notamment que le “kilométrage relevé [était] inférieur à celui relevé lors d’un précédent contrôle”.
Madame [Z] a diligenté un expert mandaté par sa protection juridique.
Suite à une réunion à laquelle étaient invitées les parties (le 11 janvier 2021), l’expert a restitué son rapport, daté du 11 janvier 2021.
Il y a notamment relevé que: « – l’historique des contrôles technique montre que le kilométrage véhicule a été diminué avant l’acquisition de véhicules par l’assuré.
– Le filtre à particules et le catalyseur ont été supprimés, le véhicule n’est donc pas conforme
– le coût de la remise en état du moteur est estimé à 1224,87 euros TTC
– le coût de la remise en état du système de filtre à particules et catalyseur est estimé à 2974,56 euros TTC.
[…] Le véhicule présente un défaut de conformité du système d’échappement ainsi qu’une modification de kilométrage antérieurement à la vente.
La responsabilité de madame [B] est à rechercher ».
Par courrier du 19 janvier 2022, madame [Z] a sollicité la résolution du contrat de vente.
L’absence de réponse, elle a sollicité le Juge des référés du Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN ; une ordonnance de référé a été rendue le 6 juillet 2022, désignant un expert judiciaire, remplacé en raison de son indisponibilité suivant ordonnance de changement d’expert du 31 août 2022, puis, une nouvelle ordonnance de changement d’expert est intervenue en date du 15 décembre 2022.
Madame [Z] a fait assigner madame [B] devant le Juge du fond par acte d’huissier en date du 14 juin 2023.
L’ordonnance de clôture de la procédure a été fixée au 26 septembre 2023.
Le rapport définitif de l’expert judiciaire a été communiqué aux parties en date du 7 novembre 2023. Il a notamment conclu à des vices et à de l’usure relativement à l’état mécanique du véhicule et au compteur kilométrique.
Toutefois, en vue de pouvoir conclure de nouveau suite au rapport, la demanderesse a sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture et le renvoi à la mise en état par conclusions du 21 novembre 2023.
L’ordonnance de clôture de la procédure est intervenue en date du 21 novembre 2023, fixant l’audience au 8 février 2024.
Le second original de l’assignation, transmis par le réseau privé virtuel des avocats en date du 2 février 2024, a permis de mettre en évidence que les nouvelles conclusions de madame [Z] avaient été signifiées à personne à madame [B] en date du 3 décembre 2023.
À l’audience du 8 février 2024, l’affaire a fait l’objet d’un renvoi à la mise en état du 11 avril 2024 pour éventuelle constitution de madame [B] suite à une signification à personne des écritures de la demanderesse.
Dans ses dernières écritures intitulées « conclusions récapitulatives », madame [Z] sollicite l’annulation de la vente sur le fondement des vices cachés, sollicitant la restitution du prix d’achat et la condamnation de la venderesse à récupérer le véhicule sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du jugement.
En outre, elle sollicite sa condamnation au paiement de 560,06 euros à titre de remboursement des frais engagés à perte sur le véhicule immobilisé ainsi que celle de 4.000 € correspondant à des dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi, outre 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens, en ce compris les frais d’expertise à hauteur de 4874 €.
Bien qu’ayant eu remise de l’acte madame [B] n’a pas constitué avocat.
Une nouvelle ordonnance de clôture est intervenue en date du 11 avril 2024, fixant l’audience au 2 juillet 2024.
À cette audience, la décision a été mise en délibéré au 24 septembre 2024, prorogé.
Sur l’absence de défendeur à la procédure
Il résulte des dispositions de l’article 472 du Code de procédure civile que lorsque le défendeur ne comparaît pas, le Juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
La signification de l’assignation, qui avait donné lieu à un procès-verbal de recherches article 659 du code de procédure civile, a finalement pu se faire en personne en date du 3 décembre 2023.
Au regard des modalités de remise de l’acte et de la procédure suite à l’introduction d’instance, il y a lieu de considérer que l’assignation est régulière et que l’affaire est en état d’être jugée au fond.
Sur la demande principale
Aux termes de l’article 1641 du Code civil « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, non ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »
L’article 1643 du même Code précise que le vendeur « est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie. »
L’article 1644 du même Code prévoit que « Dans le cas des articles 1641et 1643, l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix ».
L’article 1645 prévoit que «Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.»
Sur l’existence d’un vice caché antérieur
L’expert judiciaire a notamment conclu son rapport dans les termes suivants :
«- Le véhicule est dans un mauvais état mécanique, il a été relevé des suppressions de pièces mécaniques indispensables et des usures très importantes, ces éléments touchant le bon fonctionnement du véhicule ne permettant pas de la circulation normale en sécurité.
– Une intervention frauduleux sur le compteur kilométrique avant la vente vers Mme [L] a été réalisée : cette intervention est imputable a été effectuée avant l’acquisition par Madame [B] qui a pu s’apercevant de cette modification frauduleuse lors du contrôle technique effectué le 21/06/2021, sur lequel le kilométrage 2019 bien supérieure apparaissait.
– Des dysfonctionnements ont été décrits : il s’agit de vices et d’usure.
– Les vices n’étaient pas apparents pour un acheteur profane normalement diligent en fonction des éléments portés à sa connaissance lors de la vente mais il devaient être connus du vendeur.
– Les vices répertoriés le kilométrage réel très élevé proche de la durée de vie du véhicule rendent celui-ci impropre à l’usage auquel il est destiné. ».
En outre, l’expert a chiffré la remise en état du véhicule à plus de 10 000 €, soit un montant supérieur à la valeur réelle du véhicule (telle que retenue par l’expert), ainsi qu’à sa valeur d’acquisition par madame [Z] (à hauteur de 6. 500 €).
L’expert relève l’existence de « vices et d’usure ».
Au vu des défaillance énumérées sur le véhicule, il préconise son immobilisation car le véhicule présenterait un danger s’il était maintenu en circulation.
À titre liminaire, il convient de relever qu’aucun certificat de cession n’est produit au dossier et que le kilométrage du véhicule au jour de la vente est impossible à objectiver -de même accessoirement que des dysfonctionnements mécaniques qui auraient pu être indiqués.
L’usure normale d’un véhicule peut s’évaluer par rapport à son année de mise en circulation, mais également par rapport à son kilométrage ; or, bien que le kilométrage au jour de la vente ne soit pas indiqué, le kilométrage tel que relevé au jour du contrôle technique (21 juin 2021) et par l’expert lors de l’expertise semble nettement inférieur au kilométrage réel évalué (a minima) par l’expert (326 000 km).
D’autre part, bien que l’expert relève que madame [B] n’était pas propriétaire du véhicule au moment où le kilométrage aurait été modifié (à deux reprises selon l’expert) et que la demanderesse n’ait pas été professionnelle de l’automobile, le procès-verbal de contrôle technique du 21 juin 2021 émettait des réserves pour deux défaillances majeures et pointait clairement, en tant que défaillance mineure, que le « kilométrage relevé [était] inférieur à celui relevé lors d’un précédent contrôle ».
Le kilométrage erroné est constitutif d’un vice caché affectant le véhicule acquis par madame [Z] et la venderesse en avait connaissance.
Par suite, il sera fait droit à la demande formulée en annulation de la vente avec restitution du prix à l’acquéreuse et restitution en contrepartie du véhicule à la demanderesse, à charge pour elle de récupérer ce véhicule dans le délai de deux mois à compter du jugement sur son lieu de stationnement avec astreinte.
Eu égard à l’absence de tentative préalable d’exécution de la restitution, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’astreinte formulée par madame [Z].
En outre, eu égard aux circonstances telles que précédemment reprises ainsi qu’en application des textes susvisés, madame [Z] est bien fondée en sa demande d’être dédommagée des frais engagés sur le véhicule immobilisé à hauteur de 560,06 euros.
Enfin, la demande en réparation d’un préjudice de jouissance formulée (à hauteur de 4.000 euros) par madame [Z] sera admise, en ce qu’elle correspond à l’évaluation de ce préjudice retenue par l’expert.
L’ensemble de ces sommes portera intérêts au taux légal à compter de la signification du présent jugement, sans mention spécifique, en application des dispositions de l’article 1231-7 du Code civil.
Sur les demandes accessoires
Madame [B], succombant l’instance, sera condamnée aux dépens, ces frais incluant les frais d’expertise judiciaire sans qu’il doive en être fait mention spécifique (relativement au montant) au dispositif de la présente décision ; en effet, il s’agit de frais intégrés aux dépens en application de l’article 695 du Code de procédure civile.
En outre, il y aura lieu de condamner madame [B] à payer à madame [Z] la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Aucun élément ne justifie qu’il soit fait exception au principe de l’exécution provisoire, de droit en application des dispositions de l’article 514 du Code de procédure civile en vigueur au jour de l’introduction de l’instance.
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement rendu en premier ressort et par mise à disposition au Greffe,
PRONONCE la résolution la vente intervenue entre madame [R] [B] (venderesse) et madame [H] [Z] épouse [L] (acquéreuse) portant sur le véhicule de marque MINI immatriculé [Immatriculation 3] ;
CONDAMNE madame [R] [B] à la restitution du prix de vente à madame [H] [Z] épouse [L], soit la somme de 6.500 € ;
ORDONNE la restitution par madame [H] [Z] épouse [L] dudit véhicule à madame [R] [B], à charge pour madame [B] de venir récupérer le véhicule sur son lieu de stationnement dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement ;
CONDAMNE madame [R] [B] à payer à madame [H] [Z] épouse [L] la somme de 560,06 euros en réparation de son préjudice matériel du fait des frais engagés sur le véhicule ;
CONDAMNE madame [R] [B] à payer à madame [H] [Z] épouse [L] la somme de 4.000 euros en réparation de son préjudice de jouissance pour l’ensemble des périodes d’immobilisation du véhicule jusqu’au présent jugement
DIT que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision
CONDAMNE madame [R] [B] à payer à madame [H] [Z] épouse [L] la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande ;
CONDAMNE madame [R] [B] aux dépens, incluant tous les frais visés à l’article 695 du Code de procédure civile à l’exclusion de tous autres frais ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire à titre provisoire en toutes ses dispositions.
AINSI JUGE ET PRONONCE AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DRAGUIGNAN LE 17 OCTOBRE 2024.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT.
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