Tribunal judiciaire de Bordeaux, 19 novembre 2024, RG n° 23/04019
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 19 novembre 2024, RG n° 23/04019

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Conformité et vices cachés : enjeux d’une vente de spa.

Résumé

Résumé de l’affaire

Dans cette affaire, un acheteur a acquis un spa d’un modèle spécifique pour un montant de 18 000€ TTC auprès d’une société spécialisée. Après la livraison et l’installation du spa, l’acheteur a constaté plusieurs désordres et a demandé, par courrier recommandé, le remplacement du spa ou au moins des pièces corrodées. La société a repris le spa pour inspection, mais n’a pas procédé à son remplacement. L’acheteur a ensuite demandé l’annulation de la vente et le remboursement du prix d’achat.

Réponses de la société

La société a répondu que le spa livré était conforme aux spécifications contractuelles et a effectué des réparations sans frais. Elle a également contesté les demandes de l’acheteur, arguant que les défauts allégués n’étaient pas prouvés et que la conformité du produit était respectée. La société a soutenu que l’acheteur n’avait pas démontré que les problèmes de consommation d’électricité étaient liés au spa.

Procédure judiciaire

L’acheteur a assigné la société devant le tribunal, invoquant la garantie de conformité et, à titre subsidiaire, la garantie des vices cachés. La société a demandé le rejet des demandes de l’acheteur, arguant que le cumul des actions était prohibé et que les défauts allégués n’étaient pas suffisamment graves pour justifier une annulation de la vente.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré l’action de l’acheteur recevable, mais a jugé que le spa n’était affecté ni d’un défaut de conformité ni d’un vice caché. Par conséquent, il a débouté l’acheteur de sa demande d’annulation de la vente et de ses demandes d’indemnisation pour préjudices. L’acheteur a été condamné aux dépens et à verser une somme à la société au titre des frais non compris dans les dépens.

Conclusion

En conclusion, le tribunal a statué en faveur de la société, confirmant que l’acheteur n’avait pas apporté de preuves suffisantes pour justifier ses demandes d’annulation de la vente et d’indemnisation. La décision a été assortie de l’exécution provisoire, permettant à la société de récupérer les frais engagés.

N° RG 23/04019 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XZFB
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE

SUR LE FOND

50A

N° RG 23/04019 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XZFB

Minute n° 2024/00610

AFFAIRE :

[C] [D]

C/

S.A.S. SP(HA)MMAM

Grosses délivrées
le

à
Avocats : Me Catherine CARMOUSE
Me Caroline CASTERA-DOST

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré

Mme Angélique QUESNEL, Juge ,
Statuant à Juge Unique

Greffier, lors des débats et du prononcé
Isabelle SANCHEZ, Greffier

DÉBATS

A l’audience publique du 17 Septembre 2024

JUGEMENT

Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile

DEMANDEUR

Monsieur [C] [D]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]

représenté par Me Caroline CASTERA-DOST, avocat au barreau de BORDEAUX

DÉFENDERESSE

S.A.S. SP(HA)MMAM
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Me Catherine CARMOUSE, avocat au barreau de BORDEAUX

N° RG 23/04019 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XZFB

EXPOSE DU LITIGE ET PROCÉDURE

Monsieur [C] [D] a acheté le 24 avril 2021 un SPA de modèle signature avec couverture isotherme pour un montant de 18 000€ TTC auprès de la SAS SP(HA)MMAM.
Le 23 juin 2021, le SPA a été livré et installé au domicile de Monsieur [C] [D].
Après la découverte de plusieurs désordres, Monsieur [C] [D] a, par courrier recommandé du 1er juillet 2022, sollicité le remplacement du SPA et au moins de toutes les buses inox corrodées.
Le 22 octobre 2022, la SAS SP(HA)MMAM a repris le SPA pour le renvoyer à l’usine de fabrication, située au Portugal. Le SPA n’a pas été remplacé.
Le 22 novembre 2022, Monsieur [C] [D] a par courrier recommandé sollicité l’annulation de la vente du SPA et le remboursement des 18 000€.
Le 9 décembre 2022, la SAS SP(HA)MMAM a par courrier, indiqué que le SPA livré était conforme en tous points à celui commandé et qu’elle avait effectué quelques changements gracieusement.
Monsieur [C] [D] a sollicité son assureur -protection juridique- pour mandater une expertise amiable.
Le 12 janvier 2023 s’est tenue une réunion d’expertise au sein des locaux de la société. Aucune constatation n’a pu être effectuée, car le SPA était toujours dans l’usine du Portugal.
Par courrier recommandé du 10 mars 2023, Monsieur [C] [D] a demandé, par l’intermédiaire de son assureur le remboursement du prix d’achat.
Par courrier du 28 avril 2023, la société a indiqué à Monsieur [C] [D] que le SPA pouvait être récupéré et remis en service.
C’est dans ces conditions, que Monsieur [C] [D] a assigné la SAS SP(HA)MMAM le 3 mai 2023 devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX sur le fondement de la garantie de conformité édictée par les articles L217-3 et suivants du code de la consommation et à titre subsidiaire sur le fondement de la garantie des vices cachés résultant des articles 1641 et suivants du code civil.
Suivant dernières conclusions récapitulatives notifiées le 29 novembre 2023, par voie électronique, Monsieur [C] [D] demande sur le fondement à titre principal des articles L217-3 et suivants du code de la consommation et à titre subsidiaire des articles 1641 et suivants du code civil au tribunal de :
Annuler le contrat de vente du SPA Modèle Signature du 24 avril 2021 signé entre Monsieur [D] et la société SP(HA)MMAM,Ordonner à la Société SP(HA)MMAM de reprendre à ses frais l’ensemble des éléments constitutifs de ce SPA encore présents chez Monsieur [D] sous astreinte de 50 € par jour de retard,Ordonner à la société SP(HA)MMAM de restituer à Monsieur [C] [D] la somme de 18 000 € avec intérêts à compter de la première lettre de mise en demeure du 22 novembre 2022 et la CONDAMNER en tant que de besoin au paiement de cette somme de 18 000 € avec intérêts,Condamner la société SP(HA)MMAM au paiement à Monsieur [C] [D] d’une indemnité de 2 000 € évalué exæquo bono à titre de dommages-intérêts pour le préjudice de jouissance, le préjudice matériel de consommation excessive d’électricité et les désagréments liés aux interventions nombreuses de réparateurs,Vu les articles 699 et 700 du Code de procédure civile,
Condamner la société SP(HA)MMAM au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.Au soutien de ses prétentions, Monsieur [C] [D] fait valoir :
à titre principal, que le contrat de vente doit être annulé sur le fondement de la garantie légale de conformité prévue aux articles L217-3 et L217-5 du code de la consommation. Il soutient que le spa n’était pas conforme aux conditions contractuelles lors de sa livraison et a présenté des défauts de conformité dans le délai de deux ans. En effet, dès les premiers mois après l’achat, le spa a montré divers dysfonctionnements, notamment des pannes fréquentes et des problèmes d’oxydation, anormaux pour un produit de cette nature et de cet âge. Il souligne que la société a reconnu par écrit à plusieurs reprises ces problèmes de conformité, notamment en remplaçant les panneaux de contrôle à trois occasions, confirmant ainsi l’existence de défauts. Concernant l’oxydation des buses, bien que la société ait tenté de minimiser ce problème en parlant d’un simple dépôt de fer, Monsieur [C] [D] estime que l’oxydation constatée après seulement un an d’utilisation est encore le signe d’un défaut. De plus, il souligne que les dysfonctionnements, en particulier les écrans de contrôle et les régulateurs de température, ont entraîné une consommation d’électricité excessive, ce qui dépasse les attentes légitimes pour un tel équipement. Ainsi, ces éléments démontrent que le spa ne répond pas aux critères de conformité attendus. Ces défauts, confirmés par la société elle-même et apparus dans le délai de deux ans après la livraison, justifient pleinement l’annulation du contrat de vente conformément aux dispositions du code de la consommation. En réplique aux arguments de la société, il rappelle qu’il incombe au vendeur de prouver que le défaut n’existait pas au moment de la délivrance du bien, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce, compte-tenu de l’apparition très rapide des défectuosités du spa après sa livraison. Il souligne également que le vendeur n’a jamais été en mesure de mettre le spa en conformité et, que le délai de trente jours prévu pour ce faire a été largement dépassé, la première réclamation datant du 1er juillet 2022.
à titre subsidiaire, que la résolution du contrat et la restitution du prix de vente se fondent sur la garantie des vices cachés, conformément aux articles 1642 et suivants du code civil. Il observe que les défectuosités et dysfonctionnements du spa, qui ont conduit la société à reprendre le spa en octobre 2022, démontrent l’impropriété du bien à l’usage auquel il était destiné. Il rappelle qu’il n’aurait jamais acheté ce spa s’il avait su que sa facture d’électricité augmenterait de plus de 400€ en un mois, qu’il serait contraint de faire changer le tableau de contrôle de régulation à trois reprises, et que le spa présenterait des signes d’oxydation en l’espace de quelques mois, enfin, qu’il est en droit de demander une indemnité à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance pouvant être fixé à 2 000€.
Suivant ses dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2023 par voie électronique, la SAS SP(HA)MMAM demande au tribunal de :
Débouter Monsieur [D] de l’ensemble de ses demandes,Condamner Monsieur [D] à verser à la société SP (HA)MMAM une somme de 4 000€ au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers frais et dépens et frais d’exécution.Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :
en premier lieu, que depuis un arrêt de principe de la première chambre de la cour de cassation en date du 8 décembre 1993, le cumul des actions en justice sur le fondement d’un défaut de conformité et sur la garantie des vices cachés est prohibé. Il soutient qu’il appartient au demandeur de fonder sa demande sur l’une des actions possibles. Par conséquent, en l’absence de choix opéré par Monsieur [D] quant au fondement juridique invoqué ses demandes seront jugées irrecevables.

en second lieu, que la conformité d’un bien est appréciée par rapport aux clauses du contrat. Elle soutient que le spa livré correspond aux descriptions et aux spécifications stipulées dans le bon de commande. Elle rappelle qu’au titre de l’article L217-5 du code de la consommation que la chose vendue doit correspondre à la description donnée par le vendeur et posséder des qualités que celui-ci a présentées à l’acheteur sous forme d’échantillon ou de modèle ou présenter les caractéristiques prévues au contrat. Dans le cas présent, elle soutient qu’elle a respecté les termes du contrat en livrant un spa modèle signature et la couverture isotherme conforme aux spécifications du bon de commande, ce qui correspond aux obligations du vendeur de fournir un bien conforme. Elle affirme avoir respecté le calendrier de livraison convenu, ce qui est un élément essentiel de la conformité contractuelle. De plus, elle a procédé à la mise en service montrant un respect des obligations de prestations de service. Par ailleurs, qu’elle a respecté ses obligations contractuelles en répondant promptement à chaque signalement de problème par Monsieur [C] [D] concernant le panneau de contrôle. En effet, elle fait observer qu’elle est intervenue dans les plus brefs délais en procédant au remplacement du panneau de contrôle. De plus, elle souligne que le spa est équipé de boutons de contrôle indépendants du panneau principal, permettant à Monsieur [C] [D] d’utiliser le spa normalement. Elle fait donc remarquer que le problème du panneau de contrôle a été résolu de manière définitive, sans qu’aucune nouvelle demande subsiste à ce titre. Cela démontre qu’elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles, éliminant ainsi toute base légale pour une demande de nullité de la vente liée à ce problème.
Concernant, la présence d’oxydation des buses, la société a constaté qu’il s’agissait en réalité de dépôt de ferrite et non d’oxydation. Elle indique que ce dépôt est probablement dû à l’utilisation de l’eau provenant du puit de Monsieur [C] [D] pour remplir le spa. Par conséquent, Monsieur [C] [D] ne rapporte pas la preuve d’un défaut de conformité du bien vendu.
Que Monsieur [C] [D] n’apporte pas la preuve que la consommation d’électricité du spa ait été contractuellement spécifiée, ni qu’elle ait augmenté en raison de la présence du spa. Elle fait observer que Monsieur [C] [D] ne présente aucun élément de preuve établissant la consommation électrique initiale ou une augmentation de celle-ci due spécifiquement à la présence du spa. Ainsi, en l’absence de telles preuves, il ne s’agit pas d’un défaut de conformité par rapport au contrat.
en outre, que la demande subsidiaire fondée sur la garantie des vices cachés ne peut prospérer. Elle soutient que selon l’article 1641 du code civil, pour qu’un vice caché soit reconnu, il doit rendre le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou diminuer cet usage à tel point que l’acheteur ne l’aurait pas acquis ou en aurait donné un moindre prix s’il l’avait connu. Or, en l’espèce, le spa a toujours bien fonctionné et a pu être utilisé normalement. Elle fait observer que Monsieur [C] [D] ne démontre pas que les défauts allégués rendent le spa impropre à son usage ou qu’ils en diminuent significativement l’utilité, justifiant une réduction du prix. Les défauts invoqués par Monsieur [D] n’affectent pas l’usage et sont tellement insignifiants qu’ils ne peuvent être considérés comme des vices cachés, lesquels requièrent une certaine gravité pour être retenus. Enfin, que la reprise du spa fin octobre 2022, pour un renvoi à l’usine afin de vérifier la fuite et les buses ne constitue en aucun cas une reconnaissance de la présence de vices cachés contrairement aux affirmations de Mr [C] [D] qui ne reposent sur aucun fondement juridique.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction est intervenue le 3 juillet 2024 par ordonnance rendue le même jour par le juge de la mise en état. L’affaire a été fixée pour plaidoirie à l’audience du 17 septembre 2024, date à laquelle elle a été mise en délibéré au 19 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Déclare l’action de Monsieur [C] [D] recevable,

Dit que le spa n’est affecté ni d’un défaut de conformité, ni d’un vice caché,

Déboute Monsieur [C] [D] de sa demande d’annulation de la vente pour un défaut de conformité et d’un vice caché,

Déboute Monsieur [C] [D] de sa demande indemnitaire au titre des différents préjudices subis,

Condamne Monsieur [C] [D] aux dépens,

Condamne Monsieur [C] [D] au paiement à la SAS SP(HA)MMAM de la somme de 1 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Rappelle que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de droit,

Rejette les demandes plus amples ou contraires.

La présente décision est signée par Mme Angélique QUESNEL, Juge , et Isabelle SANCHEZ, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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