Transfert de convention de transport et nouvelle convention : décisions confirmées

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Transfert de la convention de transport

La société [6] a demandé le transfert de la convention conclue entre la CGSS et l’entreprise [N] le 27 novembre 2002. Cependant, les licences de transport détenues par l’entreprise individuelle Monsieur [N] [Z] [R] sont devenues caduques en raison de sa radiation du registre des transporteurs publics routiers de personnes. La société [6] ne peut donc se prévaloir de la continuité des licences de transport et sa demande de transfert de convention a été rejetée.

Conclusion d’une nouvelle convention de transport

La société [6] a également demandé la conclusion d’une nouvelle convention de transport. Cependant, la convention locale du 30 avril 2008, à laquelle elle avait adhéré, a perdu ses effets avec l’entrée en vigueur de la nouvelle convention nationale de transport assis professionnalisé. La société [6] a donc été déboutée de sa demande de conventionnement.

Autres demandes

Le jugement a confirmé le rejet des demandes de la société [6]. Les dépens ont été mis à sa charge.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

GB/LP

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N° 88 DU QUINZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

AFFAIRE N° : N° RG 22/00679 – N° Portalis DBV7-V-B7G-DOW3

Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre – Pôle social – du 30 Mai 2022.

APPELANTE

S.A.R.L. [6]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean-Nicolas GONAND, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

INTIMÉE

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOU PE

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Mme [V] [J] munie d’un pouvoir dûment établi.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle BUSEINE, conseillère, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn Le GOFF, conseillère, présidente,

Mme Gaëlle BUSEINE, conseillère,

Mme Annabelle CLEDAT, conseillère,

Les parties ont été avisées à l’issue des débats de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 15 mai 2023

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 al 2 du CPC.

Signé par Madame Rozenn Le GOFF, conseillère, présidente et par Mme Lucile POMMIER, greffier principal, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

********

FAITS ET PROCÉDURE :

La Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe (CGSS) a conclu le 27 novembre 2002 une convention avec la société ‘Groupe [N]’, aux fins de prise en charge par l’assurance maladie des frais de transports non sanitaires d’assurés sociaux et de leurs ayants droits handicapés.

Par lettre du 2 juin 2020, le directeur de la CGSS a refusé de donner suite à la demande de transfert de la convention précitée à la SARL [6] ([6]), à la suite de l’acquisition de l’entreprise individuelle de transport M. [N] [Z].

Par décision du 15 septembre 2020, la commission de recours amiable de la CGSS a rejeté la demande de la SARL [6] et confirmé le refus de transfert de la convention.

Par requête déposée au greffe le 12 novembre 2020, la SARL [6] saisissait le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, Pôle social, aux fins de contestation de la décision de recours amiable de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe (CGSS) en date du 15 septembre 2020 rejetant sa demande de transfert, de la convention de transport qui liait la CGSS de la Guadeloupe à l’entreprise Transport [4] [N].

Par jugement rendu contradictoirement le 30 mai 2022, le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, Pôle social a :

– débouté la SARL [6] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la SARL [6] aux dépens de l’instance.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 27 juin 2022, la SARL [6] formait appel dudit jugement, qui lui était notifié le 22 juin 2022, en ces termes: ‘Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués suivants : déboute la SARL [6] de l’ensemble de ses demandes, condamne la SARL [6] aux dépens de l’instance’.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon ses dernières conclusions, notifiées à la CGSS le 25 septembre 2022, la SARL [6] demande à la cour de :

– la déclarer recevable et bien-fondée en son appel,

– infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

– annuler la décision du Directeur de la CGSS en date du 2 juin 2020,

A titre principal,

– ordonner à la CGSS de donner effet à la convention du 27 novembre 2002 dans ses rapports avec la société [6],

A titre subsidiaire,

– ordonner à la CGSS de conclure avec la société [6] une nouvelle convention de prise en charge des frais de transport avec dispense d’avance des frais par les assurés,

– condamner la CGSS aux entiers dépens.

Elle soutient que :

– la convention a été passée avec l’entreprise autonome ‘[4] [N]’ et non M. [Z] [N],

– aucun élément ne permet de considérer que les licences accordées par la DEAL dont M. [N] était titulaire, ont été radiées du fait de la cession de l’entreprise,

– aucun fondement juridique ne peut justifier la caducité de la convention,

– la limitation du nombre de véhicules, prévue par l’avenant du 31 août 2010, ne lui est pas opposable, la convention étant antérieure,

– rien ne s’oppose à la conclusion d’une convention entre la CGSS et une entreprise de transport de personnes à mobilité réduite (TPMR),

– la prise en charge des transports précités par l’assurance maladie n’est pas limitée aux taxis, VSL ou ambulances conventionnés et il est inexact d’affirmer que seules les entreprises de taxi seraient susceptibles de prétendre à un conventionnement, eu égard aux termes de la convention du 30 avril 2008,

– l’entrée en vigueur de la convention nationale des taxis signée en 2018 n’a eu aucun effet sur la convention locale.

Selon ses dernières conclusions, notifiées le 30 décembre 2022 à la société [6], auxquelles il a été fait référence lors de l’audience des débats, la CGSS demande à la cour de :

– confirmer le jugement déféré,

– débouter la société [6] de sa demande de transfert de convention,

– débouter la société [6] de sa demande d’injonction de la CGSS de signer une nouvelle convention conforme à celle du 30 avril 2008.

La CGSS expose que :

– toute cession d’entreprise conventionnée avec la CGSS entraîne un nouveau conventionnement de tiers-payant entre la CGSS et l’acquéreur,

– le transfert de convention n’est pas possible dans la mesure où la licence est incessible,

– les licences du cédant, M. [N] étaient à son nom, et, compte tenu de sa radiation du registre du commerce à compter du 1er juin 2019, elles sont devenues caduques,

– l’acquéreur a bénéficié d’une attestation de conformité provisoire de la DEAL, qui devait être effective sous réserve de disposer de la licence de transport,

– l’acquéreur a pourtant exercé en toute illégalité du 1er juin au 19 octobre 2019, en utilisant les numéros d’identification de l’entreprise ‘[4] [N]’ pour facturer des actes à la CGSS, dont les indus ont ensuite été reconnus par M. [N],

– depuis 2008, la CGSS n’accorde plus de convention pour les sociétés dites TPMR,

– le 31 août 2010, un avenant à la convention de 2008 signée par les entreprises TPMR bloque l’augmentation du nombre de véhicules et le limite,

– la convention nationale des taxis, signée en 2018 et déclinée localement en avril 2019, prévoit que seuls les taxis habilités au TPMR, les ambulances et les VSL doivent donner lieu à une prise en charge des dépenses de l’assurance maladie.

MOTIFS :

Sur la demande de transfert de la convention de transport :

Aux termes de l’article L. 3411-1 du code des transports, les activités de transport routier public de personnes ou de marchandises et de location de véhicules industriels avec conducteur destinés au transport de marchandises s’effectuent sous le couvert d’une licence communautaire ou d’une licence de transport intérieur.La licence communautaire est délivrée dans les conditions prévues par le règlement (CE) n° 1073/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché international des services de transport par autocars et autobus ou le règlement (CE) n° 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché du transport international de marchandises par route.

La licence de transport intérieur est délivrée aux entreprises inscrites au registre mentionné aux articles L. 3113-1 et L. 3211-1 et qui n’ont pas l’obligation de détenir une licence communautaire. Elle est exigée de toute entreprise de transport routier public de personnes ou de marchandises ou de location de véhicules industriels avec conducteur disposant d’un ou plusieurs véhicules automobiles motorisés.

Elle est établie au nom de l’entreprise et incessible. L’entreprise reçoit des copies certifiées conformes de sa licence de transport intérieur en nombre égal à celui des véhicules qu’elle détient.

Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’Etat en tenant compte notamment des spécificités de chaque type de transport.

En l’espèce, la CGSS a conclu le 27 novembre 2002 une convention avec la société ‘Groupe [N]’, aux fins de prise en charge par l’assurance maladie de frais de transports non sanitaires d’assurés sociaux et de leurs ayants droits handicapés.

Par courriers du 12 août 2019, adressés à la CGSS, M. [G] [S] et M. [N] [Z] ont informé la CGSS de l’acquisition, pour le premier, et de la cession, pour le second, de l’entreprise [4] [N], incluant le fonds de commerce et ont sollicité le transfert de la convention tiers payant avec cet organisme.

L’extrait K bis et l’annonce BODACC versés aux débats mettent en évidence la cessation d’activité de l’entreprise individuelle Monsieur [N] [Z] [R], exerçant sous l’enseigne [4] [N] et sous l’enseigne [3], à la date du 31 juillet 2019.

Par lettre du 24 octobre 2019, la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Guadeloupe (DEAL) informait M. [N] [Z] que sa radiation du registre du transport public routier de personnes était bien prise en compte.

Par lettre du 25 novembre 2019, une attestation de conformité, valable 3 mois, était délivrée à l’entreprise [6], [4] [N], à M. [G] [S], précisant ‘cette inscription sera effective lorsque vous serez en possession de la licence de transport’.

Il résulte des éléments repris ci-dessus, qu’en application des dispositions de l’article L. 3411-1 du code des transports, les licences de transport détenues par l’entreprise individuelle Monsieur [N] [Z] [R] sont devenues caduques du fait de la radiation de cette entreprise à compter du 31 juillet 2019 et de l’incessibilité des licences au cessionnaire.

La société [6] ne saurait valablement se prévaloir d’une absence de radiation des licences de transport ou d’une continuité de celles-ci, en arguant l’absence de lien avec la cession de l’entreprise ou de tout fondement juridique, alors que l’article L. 3411-1 du code des transport prévoit en des termes clairs leur incessibilité, que la radiation du registre des transporteurs publics routiers de personnes a été actée par lettre de la DEAL du 24 octobre 2019 et qu’une procédure d’inscription de la société appelante auprès de ce même registre a été initiée et a donné lieu à une autorisation provisoire délivrée par lettre de la DEAL du 25 novembre 2019, sous réserve de disposer d’une licence de transport.

Si la société appelante se prévaut de ce que la convention litigieuse a été conclue entre la CGSS et l’entreprise autonome ‘[4] [N]’, et non Monsieur [Z] [N], elle ne justifie pas, ainsi que l’ont souligné les premiers juges, que cette convention lui aurait été cédée avec le fonds de commerce.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société [6] de sa demande de transfert de la convention conclue entre la CGSS et l’entreprise [N] le 27 novembre 2002.

Sur la demande de conclusion d’une nouvelle convention de transport :

Aux termes du 2ème alinéa de l’article L. 322-5 du code de la sécurité sociale, les frais d’un transport effectué par une entreprise de taxi ne peuvent donner lieu à remboursement que si cette entreprise a préalablement conclu une convention avec un organisme local d’assurance maladie. Cette convention, conclue pour une durée au plus égale à cinq ans, conforme à une convention type établie par décision du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie après avis des organisations professionnelles nationales les plus représentatives du secteur, détermine, pour les prestations de transport par taxi, les tarifs de responsabilité qui ne peuvent excéder les tarifs des courses de taxis résultant de la réglementation des prix applicable à ce secteur et fixe les conditions dans lesquelles l’assuré peut être dispensé de l’avance des frais. Elle peut également prévoir la possibilité de subordonner le conventionnement à une durée d’existence préalable de l’autorisation de stationnement.

Aux termes de l’article R. 322-10-1 du code de la sécurité sociale, les transports pris en charge par l’assurance maladie peuvent être assurés par les moyens suivants :

1° L’ambulance ;

2° Le transport assis professionnalisé, véhicule sanitaire léger et taxi ;

3° Les transports en commun terrestres, l’avion ou le bateau de ligne régulière, les moyens de transport individuels.

Un référentiel de prescription arrêté par le ministre chargé de la sécurité sociale précise les situations dans lesquelles l’état du malade justifie respectivement la prescription des modes de transport prévus au présent article en fonction de l’importance des déficiences et incapacités et de leurs incidences.

Le 30 avril 2008, la CGSS a signé une convention locale et transitoire relative au transport de personnes à mobilité réduite, à laquelle M. [N] a adhéré en signant un acte individuel d’adhésion.

Par décision du 18 décembre 2018 du directeur général de l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie, une convention type à destination des entreprises de taxi et des organismes locaux d’assurance maladie a été mise en place, remplaçant celle du 8 septembre 2008.

L’examen des termes de la convention locale du 30 avril 2008 met en évidence qu’elle présente un caractère local et transitoire, dans l’attente d’une habilitation législative permettant à une convention nationale d’encadrer le transport des personnes à mobilité réduite, ‘en tenant compte de nos spécificités’. L’article 16 précise qu’elle perdra ses effets lors de la parution de la convention nationale du transport assis professionnalisé.

La société appelante, dont il est constant qu’elle appartient à la catégorie des transporteurs de personnes à mobilité réduite, qui font partie des transports dits non sanitaires, souligne à juste titre que la convention nationale de 2018 a trait aux entreprises de taxis et ne mentionne pas expressément qu’elle concernerait le transport assis professionnalisé.

Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la nouvelle convention des taxis du 30 décembre 2018, signée en local le 4 juin 2019 et modifiée le 14 mai 2021 prévoit la prise en charge des TPMR par les taxis. L’avenant 9 à la convention nationale signée avec les fédérations nationales des transporteurs sanitaires prévoit également la prise en charge des TPMR par les VSL.

Un protocole d’accompagnement des sociétés de service dites TPMR réalisant du transport non sanitaire a d’ailleurs été signé le 7 octobre 2022 entre la préfet de la Région Guadeloupe, l’ARS, la Région Guadeloupe, le Conseil Départemental, la CGSS et l’Union nationale des taxis de Guadeloupe, en vue d’accompagner les sociétés TPMR dans un processus de reconversion, notamment par une évolution de leur activité en taxi ou transport sanitaire, pour celles ayant fait le choix de s’orienter vers un conventionnement CGSS.

Dans ces conditions, et conformément à l’article 16 de la convention locale du 30 avril 2008, celle-ci n’a plus vocation à s’appliquer.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société [6] de sa demande de conventionnement.

Sur les autres demandes :

Les dépens seront mis à la charge de la société [6].

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, Pôle social entre la société [6] et la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe,

Condamne la société [6] aux entiers dépens de l’instance.

Le greffier, La présidente,

 

 

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