1. Attention à la preuve de l’existence d’un contrat de travail : Pour établir l’existence d’un contrat de travail, il est recommandé de rassembler des preuves tangibles telles que des échanges d’emails, des SMS, des photographies, des fiches de sécurité, et tout autre document montrant l’exécution de tâches sous la direction de l’employeur. Ces éléments peuvent démontrer la réalité d’une prestation de travail, la rémunération perçue, et le lien de subordination.
2. Attention à la rédaction et à la signature des contrats de travail : Il est recommandé de toujours formaliser par écrit les contrats de travail et de s’assurer qu’ils sont signés par les deux parties. Un contrat non signé ou remis tardivement peut être requalifié en contrat à durée indéterminée, ce qui peut entraîner des conséquences juridiques et financières importantes pour l’employeur. 3. Attention à la déclaration préalable à l’embauche et à la délivrance des bulletins de paie : Il est recommandé de respecter scrupuleusement les obligations légales en matière de déclaration préalable à l’embauche et de délivrance de bulletins de paie. Le non-respect de ces obligations peut être considéré comme du travail dissimulé, entraînant des sanctions sévères, y compris le paiement d’indemnités forfaitaires au salarié concerné. |
→ Résumé de l’affaireDans cette affaire, Monsieur [W] a saisi la cour d’appel pour contester un jugement antérieur. Il demande à la cour de :
1. Infirmer le jugement précédent, sauf en ce qu’il a rejeté les demandes reconventionnelles de la société EDEN DIVE. En réponse, Maître [S], en qualité de liquidateur judiciaire de la société EDEN DIVE, demande à la cour de : 1. Confirmer le jugement précédent qui a jugé qu’il n’existait aucun contrat de travail entre la société EDEN DIVE et Monsieur [W]. L’AGS CGEA de [Localité 8] n’a pas constitué avocat devant la cour d’appel et n’est donc pas représentée. La procédure a été clôturée le 11 janvier 2024. |
→ Les points essentielsSur l’existence d’un contrat de travailMonsieur [W] affirme qu’un contrat de travail oral a été conclu avec la société EDEN DIVE, pour un poste de moniteur de plongée, et qu’il a commencé à travailler dès le 28 avril 2017. Il soutient que la société l’a hébergé temporairement et qu’il a effectué diverses tâches pour le club. La société EDEN DIVE, représentée par son mandataire liquidateur, conteste ces affirmations, indiquant qu’aucun accord sur les conditions du contrat n’a été finalisé et que Monsieur [W] n’a pas commencé à travailler avant le 1er mai 2017. Preuves de l’existence d’une relation de travailMonsieur [W] produit plusieurs éléments pour prouver l’existence d’une relation de travail : une offre d’emploi, des échanges d’emails et de SMS, des justificatifs de déplacement, des photographies, des fiches de sécurité, et un contrat de travail non signé. La cour constate que bien que le contrat de travail ne soit pas signé, les éléments produits montrent que Monsieur [W] a répondu à une offre d’emploi et a commencé à travailler sous l’autorité de la société EDEN DIVE à partir du 29 avril 2017. Requalification du contrat de travailMonsieur [W] demande la requalification de son contrat de travail verbal en contrat à durée indéterminée (CDI) en raison de l’absence d’écrit et de la remise tardive du contrat de travail. La cour estime qu’il existe un contrat de travail verbal à compter du 29 avril 2017 et que le contrat écrit remis le 5 mai 2017 n’a pas été signé, ce qui équivaut à une absence d’écrit. En conséquence, le contrat est requalifié en CDI et une indemnité de requalification de 1.550 euros est octroyée à Monsieur [W]. Rémunération due pour la période travailléeLa cour reconnaît l’existence d’un contrat de travail à compter du 29 avril 2017 jusqu’au 7 mai 2017. La société EDEN DIVE n’a jamais payé de salaire à Monsieur [W] pour cette période. La cour fixe la créance de Monsieur [W] à 322,17 euros à titre de salaire et 32,21 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente. Travail dissimuléMonsieur [W] sollicite une indemnité pour travail dissimulé. La cour constate que Monsieur [W] a travaillé du 29 avril au 6 mai 2017 sans être déclaré et sans contrat de travail signé. L’intention de dissimuler l’emploi est caractérisée. En conséquence, une indemnité de 9.300 euros est octroyée à Monsieur [W] pour travail dissimulé. Rupture du contrat de travailMonsieur [W] soutient qu’il a été contraint de mettre un terme au contrat de travail en raison des manquements de la société EDEN DIVE, notamment l’absence de logement décent et la rémunération inférieure à celle convenue. La cour constate que la société a manqué à son obligation d’exécution loyale du contrat en modifiant unilatéralement les termes de la rémunération. La rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Indemnité compensatrice de préavis et congés payésLe licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [W] a droit à une indemnité compensatrice de préavis de 1.550 euros et une indemnité de congés payés de 155 euros. La cour octroie ces sommes à Monsieur [W]. Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuseMonsieur [W] sollicite des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour lui accorde une somme globale de 2.000 euros en réparation du préjudice subi, compte tenu de son âge, de son ancienneté, de sa rémunération, de sa qualification, et des circonstances de la rupture. Garantie de l’AGSLe présent arrêt est déclaré opposable à l’AGS et au CGEA de [Localité 8]. L’obligation du CGEA de procéder à l’avance des créances se fera dans les termes et conditions résultant des dispositions légales, limitées au plafond de garantie applicable. Intérêts sur les créances salarialesLes créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation. Le jugement d’ouverture de la procédure collective de la société EDEN DIVE a entraîné la suspension du cours des intérêts légaux et conventionnels. Remise des documents de fin de contratLa cour enjoint au mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE de remettre à Monsieur [W] un bulletin de salaire rectificatif conforme à la teneur du présent arrêt et de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux et fiscaux. Demande de dommages et intérêts pour procédure abusiveLa société EDEN DIVE, représentée par son mandataire liquidateur, sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive. La cour ayant fait droit aux demandes de Monsieur [W], ces demandes sont rejetées. Frais irrépétibles et dépensLa cour fixe au passif de la procédure collective de la société EDEN DIVE la somme de 1.500 euros pour les frais irrépétibles dus à Monsieur [W] en première instance et en appel. L’employeur est tenu aux dépens de première instance et d’appel, lesquels seront employés en frais privilégiés de la procédure collective. Les montants alloués dans cette affaire:
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→ Réglementation applicableArticles des Codes cités et leur texte
Code du travail – Article L. 1242-12 – Article L. 1245-1 – Article L. 1242-13 – Article L. 1245-2 – Article L. 1222-1 – Article L. 3242-3 – Article L. 3243-2 – Article R. 3243-1 |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE – PLANTARD – ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
– Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE – Me David TRAMIER, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE (substitué pour Me Maxime PLANTARD) – Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE (substituée pour Me Maud ANDRIEUX) |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/03532
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 08 MARS 2024
N° 2024/70
Rôle N° RG 19/03532 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BD4AQ
[P] [W]
C/
CGEA CENTRE DE GESTION ET D’ETUDE AGS DE [Localité 8]
SARL EDEN DIVE
Copie exécutoire délivrée le :
08 MARS 2024
à :
Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE – PLANTARD – ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 22 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F17/02081.
APPELANT
Monsieur [P] [W], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE – PLANTARD – ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me David TRAMIER, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
CGEA CENTRE DE GESTION ET D’ETUDE AGS DE [Localité 8], demeurant [Adresse 7]
non représentée
Société EDEN DIVE, SARL au capital de 25.000,00 €, numéro SIRET 80059391500013, ayant son siège social [Adresse 4], représentée par Maître [H] [S] désigné en qualité de mandataire liquidateur de la Société EDEN DIVE, selon jugement du 15.06.2023 rendu par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE, dont l’étude est située [Adresse 2].
représentée par Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère
Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
Monsieur [P] [W] a répondu à une offre d’emploi émanant de la société EDEN DIVE, exploitant un club de plongée situé sur le port de [Localité 6], aux fins d’être embauché en contrat à durée déterminé saisonnier de 6 mois en qualité de moniteur à compter du 1er mai 2017 moyennant une rémunération de 1.550 euros nets.
Monsieur [W] s’est rendu sur son lieu de travail à [Localité 6] le 28 avril 2017, date à compter de laquelle la société EDEN DIVE l’a hébergé temporairement dans la salle de cours du club.
Suite à un différend portant sur le logement de Monsieur [W], la relation a pris fin le 7 mai 2017.
Monsieur [W] n’a pas signé le contrat de travail qui lui a été soumis le 5 mai 2017.
La Convention collective applicable est celle du sport du 7 juillet 2005 étendue par arrêté du 21 novembre 2006 (IDCC 2511).
Par requête en date du 14 septembre 2017, Monsieur [W] a saisi le conseil de prud’hommes aux fins de voir reconnaître l’existence d’un contrat de travail et condamner la société EDEN DIVE à lui payer diverses sommes au titre de l’exécution du contrat, ainsi que de la rupture de celui-ci.
Suivant jugement du 22 janvier 2019, le conseil de prud’hommes a débouté Monsieur [W] de l’intégralité de ses demandes, constatant l’absence de relation contractuelle entre les parties, permettant d’établir l’existence d’un contrat de travail.
Par déclaration du 18 février 2019, Monsieur [W] a relevé appel de cette décision.
Selon jugement en date du 16 juin 2022 rendu par le tribunal de commerce de Marseille, la société EDEN DIVE a été placée en redressement judiciaire, avec désignation de Maître [H] [S] en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du 15 juin 2023, la société EDEN DIVE a été placée en liquidation judiciaire et Maître [S] désigné en qualité de liquidateur judiciaire.
Suivant ordonnance du 26 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture rendue le 11 mai 2023 et fixé la nouvelle date de clôture au 11 janvier 2024.
INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société EDEN DIVE de ses demandes reconventionnelles,
Statuant à nouveau :
JUGER qu’il est établi la preuve qu’il s’est déplacé de [Localité 9] à [Localité 6] pour venir occuper un poste de moniteur offert par la société EDEN DIVE pour la durée de la saison estivale 2017 de 6 mois,
JUGER qu’il est établi la preuve qu’il a commencé à occuper ses fonctions dès le 28 avril 2017,
JUGER que pour autant la société EDEN DIVE ne lui a transmis un contrat de travail écrit que le 5 mai 2017, au-delà du délai légal de 2 jours ouvrables, de sorte que cette remise tardive du contrat de travail s’analyse en une absence d’écrit conduisant à la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée,
REQUALIFIER en conséquence, la relation contractuelle entre la société EDEN DIVE et Monsieur [W] en contrat de travail à durée indéterminée,
JUGER que la rupture de cette relation, intervenue le 7 mai 2017, s’analyse en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse puisqu’elle est imputable à la société EDEN DIVE et aux conditions de travail et d’hébergement qu’elle a instauré rendant impossible la poursuite de la relation contractuelle,
JUGER que la société EDEN DIVE a commis le délit de travail dissimulé faute d’avoir déclaré l’emploi occupé par Monsieur [W] à compter du 28 avril 2017, de sorte que la rupture du contrat de travail ouvre droit au profit de ce dernier à une indemnité spécifique de 6 mois de salaires,
FIXER en conséquence, sa créance, dans le cadre de la liquidation judiciaire de la Société EDEN DIVE, représentée par Maître [H] [S], aux sommes suivantes :
‘ 1 550,00 euros à titre d’indemnité de requalification ;
‘ 1 550,00 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
‘ 155,00 euros à titre de congés payés sur préavis ;
‘ 3.818,03 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en réparation des préjudices subis par le salarié du fait de la rupture se décomposant comme il suit :
– Préjudice financier correspondant aux frais de déplacement et de péage :1.268, 03 euros ;
– Perte de chance de trouver un emploi saisonnier :1.000, 00 euros ;
– Préjudice moral :1.550, 00 euros ;
‘ 9.300,00 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;
‘ 357,97 euros bruts à titre de paiement de salaire pour la période du 28 avril au 7 mai 2017 et celle de 35,79 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente,
‘ 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER Maître [H] [S] en qualité de liquidateur judiciaire de la société EDEN DIVE à régulariser les déclarations fiscales et sociales faites à son égard sur la base d’un CDI depuis le 28 avril 2017 et à lui adresser des bulletins de salaire rectifiés conformément à l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, en se réservant le droit de liquider l’astreinte,
DECLARER le jugement opposable à l’association AGS CGEA de [Localité 8],
JUGER que les dépens seront inscrits en frais de procédure collective.
Monsieur [W] a dénoncé ses conclusions régularisées au CGEA par acte du 13 décembre 2023 et a dénoncé ses conclusions régularisées à Maitre [S] en qualité de liquidateur judiciaire de la société EDEN DIVE le 20 décembre 2023.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 janvier 2024, Maitre [S] en qualité de liquidateur judiciaire de la société EDEN DIVE demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement déféré en ce qu’il a :
JUGE qu’il n’existait aucun contrat de travail entre la société EDEN DIVE et Monsieur [P] [W].
Par conséquent :
DEBOUTE Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes.
Statuant à nouveau :
CONDAMNER Monsieur [W] à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
CONDAMNER Monsieur [W] à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’ aux entiers dépens.
RENDRE opposable la décision au CGEA.
L’AGS CGEA de [Localité 8] n’a pas constitué avocat devant la cour d’appel et n’est donc pas représentée.
La clôture de la procédure est intervenue le 11 janvier 2024.
Sur l’existence d’un contrat de travail
Monsieur [W] soutient qu’un contrat de travail oral a été conclu avec la société EDEN DIVE conformément à l’offre d’emploi à laquelle il a candidaté et pour laquelle, il a été retenu. A ce titre, il fait valoir que les parties étaient d’accord sur les caractéristiques essentielles d’un contrat de travail contenues dans l’offre d’emploi (moniteur de plongée, club de plongée situé à [Localité 6], qualification BEES1 minimum, CDD de 6 mois, saison 2017 moyennant une rémunération mensuelle de 1.550 euros + prime de fin de contrat possible, fonctions principales décrites + possibilités de formation), pour l’exécution duquel il s’est déplacé à [Localité 6], et ce alors que son épouse était atteinte d’un cancer. Il affirme ensuite qu’il a commencé à travailler dès le 28 avril 2017, date à laquelle il a pris le bateau du club pour emmener plonger des clients et a reçu des directives de la société EDEN DIVE pour la facturation des prestations.
Il ajoute que la société a accepté de l’héberger pendant plus de 10 jours au sein de ses locaux professionnels, dormant sur un matelas dans la salle de cours du club, ce qui n’aurait jamais été le cas, s’il n’existait pas de relation contractuelle. Il précise qu’il avait bien la qualification requise pour être plongeur autonome puisqu’il est reconnu plongeur PA60 et en situation d’enseignement au niveau E4; que si Monsieur [Z], gérant de la société EDEN DIVE a estimé que sa présence dans l’eau n’était pas indispendable, il a exercé des missions de surveillance de sécurité en surface, lesquelles sont obligatoires lors de plongée loisir (cf code du sport et décret hyperbare), tel qu’il résulte des fiches de sécurité et qu’il a également été assigné à des missions d’accueil des clients et d’entretien du matériel du club.
La société EDEN DIVE, représentée par Maitre [H] [S] en qualité de mandataire liquidateur soutient pour sa part, que si la volonté d’établir une relation contractuelle existait, elle n’avait pu se matérialiser à défaut d’accord sur les conditions du contrat de travail et de commencement d’exécution de toute mission.
Elle indique qu’il n’a jamais été prévu qu’elle prenne en charge l’ hébergement de Monsieur [W] à [Localité 6] et que celui-ci a refusé toutes les propositions d’hébergement (gite, colocation) qu’il a estimé trop chères, qu’alors qu’elle a maintenu ce refus de prise en charge de l’hébergement, l’appelant a décidé de lui-même de repartir.
Elle précise que Monsieur [W] ne peut pas prétendre avoir commencé à travailler le 28 avril 2017, étant sur la route (cf justificatifs de frais) et qu’il ne peut pas prétendre non plus avoir commencé à travailler le 29 avril 2017, puisqu’il résulte de son email du 17 avril 2017, ainsi que du projet de contrat de travail que la date d’embauche avait initialement été fixée au 1er mai 2017.
Maitre [S] en qualité de mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE affirme en outre que l’appelant n’a jamais exercé la moindre prestation de travail pour son compte; que la société a décalé la date d’effet de son contrat de travail pour lui permettre de se consacrer exclusivement à ses recherches de logement; qu’alors que Monsieur [Z], directeur du club, encadrait lui même les plongées durant les 6 jours où Monsieur [W] prétend avoir travaillé, il n’avait aucune obligation de prévoir une personne effectuant la sécurité en surface; que si Monsieur [W] a plongé, ce n’est pas dans le cadre d’une prestation de travail, mais uniquement pour son loisir.
La société indique que Monsieur [W] procède par voie d’affirmations, que les éléments qu’il produit ne sont pas probants, en ce que les photographies sont des protographies de paysage; que s’il a dormi au sein du club, c’est qu’il a refusé toutes les autres solutions d’hébergement proposées; que la fiche de sécurité de la journée de plongée du 30 avril 2017 a été renseignée par Monsieur [Z] et n’indique pas la présence de Monsieur [W], que ce soit en qualité de plongeur affecté à la surveillance en surface ou en qualité de passager, et que, s’agissant des autres fiches des 1er mai et 6 mai 2017, il s’agissait d’une plongée en autonomie à titre de loisir.
*
Il appartient à celui qui se prévaut de l’existence d’une relation de travail, en l’absence de contrat apparent, d’en rapporter la preuve en justifiant de la réalité d’une prestation de travail, moyennant rémunération et d’un lien de subordination de l’employeur désigné.
Le demandereur doit ainsi justifier, par tous moyens :
-de l’exécution d’une prestation de travail;
-de la rémunération qu’il aurait perçue ;
-de la réelle existence d’un lien de subordination.
Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Au soutien de ses prétentions tendant à la reconnaissance d’un contrat de travail avec la société EDEN DIVE, Monsieur [P] [W] produit en l’espèce :
-l’offre émise par la société EDEN DIVE sur le site de la Bourse de l’emploi le 16 mars 2017 mentionnant : Profil de l’emploi proposé : moniteur/monitrice de plongée, qualification de l’encadrant : BEESA, type de contrat : CDD, période envisagée : 15/04/2017 au 15/10/2017, logé : non, nourri : non et des observations particulières ainsi libellées :
‘EDEN DIVE, club de plongée familial et convivial situé à [Localité 6], recherche deux moniteurs/monitrices pour la saison 2017. Contrat CDD saisonnier de 6 mois rémunéré 1550 euros net. Primes de fin de contrat possible selon les compétences et performances.
Qualification : BEES1 au minimum. Fonctions principales : directeur/directrice de plongée, pilotage du bateau, accueil et distribution de l’équipement aux plongeurs, gonflage, entretien basique du matériel. Possibilité de formation ou de perfectionnement en cours de contrat (ex. pilotage connaissance des produits et techniques de vente, Trimix, Nitrox) Envoyez CVs et lettre de motivation à l’adresse [Courriel 5] ou pour toute information complémentaire n’hésitez pas à contacter [C] [Z] par téléphone au [XXXXXXXX01] ou par email à l’adresse mentionnée ci-dessus.’;
-des échanges d’emails entre la société EDEN DIVE et lui même entre le 24 mars et le 12 avril 2017 montrant qu’il acceptait l’offre d’emploi et que des négociations étaient en cours quant à son hébergement à [Localité 6] et notamment la possibilité de faire une colocation avec un stagiaire, Monsieur [E] [I], également recruté au sein du club pour la saison 2017;
-un email le 17 avril 2017 par lequel il indique à Monsieur [C] [Z], gérant de la société EDEN DIVE ‘j’ai hâte de commencer (…) Je suis sensé démarrer le travail le 1er mai dans ta structure et c’est dans à peine 15 jour, et ce pour 6 mois à 7 mois suivant les besoins prévisibles. Comme évoqué par téléphone l’autre jour, je prévois par conséquent de faire la route le vendredi 28 avril (10h mini de trajet). Serez vous en mesure de m’accueillir dès ce 28 au soir pour le gite ‘ Quelque chose semble avoir été déniché. Concernant le contrat quel en sera la teneur précise, en dehors des 1550 euros nets sur la base des 35h prévues à un contrat saisonnier standard ‘ Concernant mes frais sur site, comme vous savez, nous devrons trouver une solution pour réellement minimiser voir annihier mes frais d’hébergement, les surcoûts de nourriture sur site et frais relatifs au poste (…);
-un échange de sms en date des 24 et 25 avril 2017 par lequel [P] [W] demande à [C] [Z] : ‘Pense à m’envoyer le contrat [C] par mail scanné ‘ et [C] [Z] lui répond : ‘va me falloir une copie de ta carte CNI et de ta carte de sécu, pour le contrat. Bonne journée ! A très vite’;
-des justificatifs de son déplacement de [Localité 9] à [Localité 6] le 28 avril 2017 (ticket de péage, essence);
-des photographies prises sur le bateau, dans les locaux du club montrant notamment un couchage déplié, ainsi que des photographies d’un tee-shirt du staff EDEN DIVE;
-un extrait du compte facebook de la société EDEN DIVE où il apparaît en photo le 30 avril 2017 sur le bateau du club;
-un échange de SMS entre Monsieur [C] [Z], gérant du club et Monsieur [P] [W] comme suit :
T.[Z] le dimanche 30 avril à 14h21 :
‘Salut tu factures 4 x 30 euros aux suisses stp doit 120. Tu prend le mail et j enverrais la facture si besoin à tout à l’heure [C]’
G.[W] le dimanche 30 avril à 14h21 :
‘Je fais cela sur ton pc »
T.[Z] le dimanche 30 avril 14h41 :
‘Encaisse juste 120 euros et prend nom, prénom adresse je m’en occuperais
Et mail..’.
G.[W] le mercredi 3 mai 13h31
‘Le mec de la ds4 est passé. Il repassera à 3h te vout Voir Sinon c’est 35 euros sur le log compta’
T.[Z] le mercredi 3 mai 13h 42 :
‘Ouep je redescendrais pour 3 heure sinon c’est 45 pas 35 changement de pile suntoo uwatec’
G.[W] le mercredi 3 mai 13h 43 :
‘ok…As tu qq chose à me donner en attendant »
T.[Z] le mercredi 3 mai 14h03 :
‘non c’est bon j arrive dans 15 min et on fait la Réunion’;
‘les fiches de sécurité complétées par le club de plongée EDEN DIVE pour :
-la journée du 29 avril 2017 sur laquelle Monsieur [W] apparaît dans la palanquée (groupe de plongeur) vers 16h niveau E4 (plongeur en autonomie), [C] [Z] étant mentionné : Encadrant,
-la journée du 30 avril 2017 sur laquelle son nom n’est pas mentionné,
-la journée du 1er mai 2017 sur laquelle son nom est mentionné dans la palanquée vers 15h, niveau E4 en compagnie de [Z] [C] ‘encadrant’, [V] [U] : ‘Baptème’ et [L] [T] : ‘niveau N3″,
-la journée du 6 mai 2017 sur laquel il apparaît dans la palanquée vers 10h, niveau E4 en compagnie de [C] [Z] ‘encadrant’, [O] [Y] ‘Sécurité surface’ et 3 autres plongeurs, respectivement niveau N3, N3 et PN1;
-un exemplaire de contrat de travail entre la société EDEN DIVE et Monsieur [P] [W] (CDD 6 mois à compter du 1 er mai 2017 au 31 octobre 2017 pour un emploi de moniteur au club de plongée de [Localité 6] avec une rémunération mensuelle brute de 1.550 euros), non signé par les parties et raturé portant la mention ‘remis le 5 mai 2017 à 18h » .
La cour constate que le contrat de travail versé aux débats n’est signé par aucune des parties, de sorte qu’il n’existe pas de contrat de travail apparent.
En revanche, il ressort des éléments produits que Monsieur [W] a répondu à une offre d’emploi émanant de la société EDEN DIVE, exploitant un club de plongée sur la commune de [Localité 6] pour un contrat à durée déterminée saisonnier de 6 mois (avril-octobre 2017) en qualité de moniteur de plongée moyennant une rémunération nette mensuelle de 1.550 euros et 35 heures de travail; que la prise en charge de l’hébergement par la société n’était pas prévue, l’employeur proposant des solutions de colocation avec un stagiaire ou un hébergement en gite, sans évoquer une prise en charge des frais de logement et que Monsieur [W] s’est déplacé de [Localité 9] (son domicile) jusqu’à [Localité 6] le 28 avril 2017, date à compter de laquelle la société EDEN DIVE reconnait l’avoir hébergé temporairement dans les locaux du club jusqu’au 7 mai 2017 au matin.
Alors que le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE indique dans ses conclusions que la société a reporté la date d’exécution du contrat de travail afin que Monsieur [W] recherche un logement, la cour observe que l’employeur reconnait ainsi implicitement la conclusion d’un contrat de travail verbal liant les parties.
De même, alors que la société EDEN DIVE affirme n’avoir jamais confié à Monsieur [W] aucune prestation, il résulte des photographies et des fiches de sécurité produites, que ce dernier faisait pourtant partie des palanquées au cours des journées des 29 avril, 1er mai et 6 mai 2017 en compagnie de Monsieur [Z] et de clients du club partant en plongée, de manière encadrée en autonomie ou en baptème.
En outre, il ressort clairement de l’échange de sms du 30 avril 2017 et du 3 mai 2017, que Monsieur [C] [Z], gérant de la société EDEN DIVE donnait des directives précises à Monsieur [W] pour accueillir les clients et facturer les prestations, tout en lui confiant la responsabilité des locaux du club et du matériel en son absence et en l’associant à une réunion.
Il convient également de relever que Monsieur [Z] a bien remis à Monsieur [W] le 5 mai 2017 un exemplaire du contrat de travail qu’il lui avait promis selon mail du 25 avril 2017 et que cet écrit, certes non signé, est daté du 29 avril 2017 et prévoit un commencement d’exécution au 1er mai 2017, contrairement aux affirmations de l’employeur sur le report d’exécution du contrat convenu avec le salarié.
Ainsi, Monsieur [W] apporte la preuve qu’il a exécuté des prestations de travail (accueil des clients, facturation, participation à des réunions, accompagnement lors de plongée) sous l’autorité de Monsieur [Z], gérant de la société EDEN DIVE, qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, ainsi que d’en contrôler l’exécution et ce moyennant une rémunération promise de 1.550 euros nets/mois.
En conséquence, la cour constate que Monsieur [W] établit l’existence d’un contrat de travail verbal avec la société EDEN DIVE.
Cette relation de travail est établie à compter du 29 avril 2017 et non du 28 avril 2017, comme invoqué par l’appelant car le 28 avril 2017 correspond à la journée de route du salarié entre son domicile et [Localité 6] (cf email et justificatifs de frais produits par le salarié) durant laquelle il n’était pas à la disposition de l’employeur. En effet, sauf stipulation conventionnelle contraire, le temps de déplacement entre le domicile et le lieu d’exécution du travail ne constitue pas en soi un temps de travail effectif.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef.
Sur la requalification de la relation contractuelle à durée déterminée en relation contractuelle à durée indéterminée
Invoquant l’absence d’écrit et la remise tardive du contrat de travail, Monsieur [W] sollicite la requalification de son contrat de travail verbal conclu à compter du 28 avril 2017 en contrat à durée indéterminée, ainsi que le versement d’une indemnité de requalification d’un montant de 1.550 euros.
Le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE conclut au rejet de cette demande, en l’absence d’existence de la relation de travail.
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En application de l’article L. 1242-12 du code du travail, s’il n’est pas écrit, le contrat à durée déterminée est réputé conclu pour une durée indéterminée en application de l’article L1245-1 du code du travail.
Il s’agit d’une présomption irréfragable rendant impossible pour l’employeur la preuve contraire.
Est assimilé à un défaut d’écrit, et entraine donc la requalification en contrat à durée indéterminée, l’absence de signature du contrat par les parties.
De même, en application de l’article L1242-13 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée, peut être requalifié en contrat à durée indéterminée, s’il n’a pas été transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche et que les juridictions prud’homales constatent un autre manquement aux règles exigées pour l’établissement de ce type de contrat.
En l’espèce, la cour a estimé qu’il existait un contrat de travail verbal entre Monsieur [W] et la société EDEN DIVE à compter du 29 avril 2017. Or il n’est pas contesté qu’un contrat de travail à durée déterminée ne lui sera proposé par écrit que le 5 mai 2017.
Dès lors, il est établi que Monsieur [W] a travaillé en dehors de toute convention entre le 29 avril et le 30 avril 2017 puis sous couvert d’un contrat de travail à durée déterminée écrit à compter du 1er mai 2017, lequel a été remis tardivement et n’a pas été signé, ce qui équivaut à une absence d’écrit, de sorte qu’il encoure la requalification en contrat à durée indéterminée.
En conséquence, en application de l’article L 1245-2 du code du travail, au regard de la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, la cour octroie à Monsieur [W] une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire, soit la somme de 1.550 euros sollicitée par l’appelant.
Cette somme sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société EDEN DIVE.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef.
Sur la rémunération due au titre de la période du 28 avril au 7 mai 2017
Il résulte des dispositions des articles L 1222-1, L 3242-3, L 3243-2 et R 3243-1 du Code du travail que le paiement du salaire constitue une obligation essentielle de l’employeur lequel est débiteur de l’obligation de rapporter la preuve de son paiement notamment par la production de pièces comptables.
En l’espèce, alors que la cour reconnait l’existence d’un contrat de travail à compter du 29 avril 2017, lequel a pris fin le 7 mai 2017, il est constant que la société EDEN DIVE n’a jamais payé à Monsieur [W] un salaire en contrepartie de son travail sur cette période.
Dès lors, il y a lieu de fixer la créance de Monsieur [W] au passif de la liquidation judiciaire de la société EDEN DIVE à la somme de 322,17 euros à titre de salaire pour la période du 29 avril au 7 mai 2017, outre celle de 32,21 euros brut au titre de l’indemnité de congés payés afférente.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef.
Sur le travail dissimulé
Monsieur [W] sollicite la fixation au passif de la société d’une indemnité pour travail dissimulé, tandis que le mandataire de la société EDEN DIVE s’y oppose, estimant n’avoir jamais eu l’intention d’avoir recours à un travail dissimulé dans la mesure où il était prévu de faire signer au salarié un contrat écrit dès que débuterait la relation de travail.
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L’article L.8221-5 du Code de travail énonce que « est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;
2 ° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre H du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de /’administration fiscale en vertu des dispositions légales. »
Aux termes de l’article L8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours, en commettant les faits de travail dissimulé à droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En l’espèce, alors que Monsieur [W] a été recruté par la société EDEN DIVE en qualité de moniteur de plongée et l’a ainsi fait venir de [Localité 9] pour travailler au sein du club de plongée de [Localité 6], ce dernier a travaillé du 29 avril au 6 mai 2017 sans être déclaré au préalable et sans contrat de travail signé.
La cour constate en outre que lors de la rédaction du contrat de travail, l’employeur a mentionné dans le document visant à régulariser la situation, un début d’activité au 1er mai sans faire mention des jours travaillés en avril 2017.
L’intention de dissimuler l’emploi pendant plusieurs jours est dès lors caractérisée.
En conséquence, Monsieur [W] est bien fondé à solliciter la fixation de sa créance au passif de la société EDEN DIVE à la somme de 9.300 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail
Monsieur [P] [W] soutient qu’il a été contraint de mettre un terme au contrat de travail le liant à la société EDEN DIVE en raison des manquements imputables à cette dernière rendant impossible la poursuite du contrat de travail.
A ce titre, il allègue le fait que:
-l’employeur ne lui a pas fourni un logement décent en dépit des accords précontractuels entre les parties,
-la rémunération payée, n’était pas celle convenue, en ce que la société EDEN DIVE promettait une rémunération nette mensuelle de 1.550 euros outre des primes en fonctions de la qualification et des prestations dans l’offre d’emploi, tandis que le contrat de travail finalement remis à Monsieur [W] le 5 mai 2017 stipulait une rémunération de 1.550 euros brut.
Il estime ainsi que la rupture du contrat de travail s’analyse en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE fait valoir que si la société a eu la volonté d’embaucher Monsieur [W] pour la saison estivale, la relation contractuelle n’a pas débuté puisqu’elle a accepté de décaler la date d’effet du contrat de travail pour lui permettre de se consacrer exclusivement à ses recherches de logement. Il rappelle qu’il n’a jamais été prévu entre les parties la prise en charge des frais d’hébergement de Monsieur [W] et indique qu’alors que la société lui a proposé plusieurs solutions (colocation avec un stagiaire, hébergement en gîte) et l’a hébergé gratuitement au club, Monsieur [W] a refusé toutes les propositions de logement, les estimant trop onéreuses et a décidé de partir le 7 mai 2017 au matin, sans que ce départ ne soit imputable à la société.
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En cas de prise d’acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d’une démission.
Il appartient au salarié d’établir les faits par lequel il prend acte de la rupture et qui doivent constituer des manquements suffisamment graves de l’employeur à ses obligations pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
En l’espèce, Monsieur [W] soutient qu’il a été contraint de mettre un terme au contrat de travail le liant à la société EDEN DIVE en raison des manquements de cette dernière en ce que d’une part, elle ne lui a pas fourni un logement décent en dépit des accords précontractuels entre les parties et d’autre part, la rémunération retenue au contrat de travail qui lui a été remis n’était pas celle promise dans l’offre d’emploi.
S’agissant du premier grief, la cour observe que si Monsieur [W] a eu l’espoir que la société EDEN DIVE prenne en charge son hébergement à [Localité 6], l’offre d’emploi à laquelle il a répondu ne prévoyait pas l’hébergement du futur moniteur de plongée. Il ne résulte pas davantage de l’échange d’email versé aux débats lors des pourparlers entre les parties, que la société EDEN DIVE ait été d’accord pour financer les frais d’hébergement, celle-ci ayant tout d’abord mis en contact Monsieur [W] avec Monsieur [E] [I], futur stagiaire au club afin qu’il puisse faire une colocation, puis l’a hébergé temporairement dans ses locaux lui proposant un hébergement futur en gîte, ou une recherche de logement mais toujours à ses frais.
C’est ce que confirme Mme [M] [A], stagiaire en formation au sein du club, attestant que la politique du club de plongée a toujours été lors des recrutements de ne pas prendre en charge l’hébergement, les frais de déplacement ou la nourriture, précisant que Monsieur [W] avait tenté de négocier, sans que Monsieur [Z] ne modifie sa position.
Ce grief n’est donc pas établi.
S’agissant du second grief, il convient de relever que l’offre d’emploi émise le 16 mars 2017 et le mail de Monsieur [W] en date du 17 avril 2017 récapitulant les éléments du contrats mentionnaient expressément une rémunération mensuelle ‘nette’ de 1.550 euros avec possibilité de primes en fonction des compétence et des performances du salarié.
Or le contrat de travail remis à Monsieur [W] le 5 mai 2017 ne prévoyait qu’une rémunération mensuelle ‘brute’ de 1.550 euros, sans versement d’éventuelles primes.
Le montant de la rémunération caractérisant un des éléments essentiels et déterminants du contrat de travail, la cour constate que la société EDEN DIVE, a manqué à son obligation d’exécution loyale du contrat de travail en en modifiant unilatéralement les termes, laissant en outre le salarié travailler depuis le 29 avril 2017, dans l’ignorance de cette modification substantielle.
Il s’agit d’un manquement suffisamment grave de l’employeur à ses obligations pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail à ses torts.
Dans ce contexte, la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse et Monsieur [W] disposant d’une ancienneté inférieure à 2 ans, il est en droit de percevoir, en application de la convention collective du sport du 7 juillet 2005 étendue par arrêté du 21 novembre 2006, la somme de 1.550 euros correspondant à un mois de salaire au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 155 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Aux termes des dispositions de l’article L1235-5 du code du travail, dans sa version applicable au litige, s’agissant d’un licenciement antérieur au 24 septembre 2017, d’un salarié disposant de moins de deux ans d’ancienneté dans une entreprise de moins de 11 salariés, Monsieur [W] peut prétendre, en réparation du licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Monsieur [W] sollicite la fixation de sa créance à la somme totale de 3.818, 03 euros, en réparation du préjudice subi à la suite de la rupture de son contrat de travail,
s’analysant en licenciement sans cause réelle et sérieuse qu’il décompose ainsi :
-1268,03 euros au titre du préjudice financier consistant dans les frais de déplacement aller-retour entre [Localité 9] et [Localité 6] qu’il a dû supporter ;
-1.000 euros au titre de la perte de chance de pouvoir retrouver un poste de moniteur de plongée similaire, la saison étant trop avancée ;
-1.550 euros au titre du préjudice moral subi, l’employeur ayant joué de sa patience et du fait qu’il n’était pas de la région, pour lui proposer des solutions d’hébergement indécentes l’ayant contraint de reprogrammer sa vie en l’espace de quelques semaines.
Le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE estime que la société n’a pas à prendre en charge les frais d’autoroute et d’essence de Monsieur [W] car ils ne constituent pas des frais professionnels, c’est à dire découlant des conditions d’exécution du travail. Il souligne en outre que la saison estivale venait juste de commencer lorsqu’il a décidé de partir et communique toutes les offres d’emploi parues dans le secteur de la plongée entre mai et septembre 2017.
Monsieur [W] produit les justificatifs à hauteur de 1268,03 euros des frais de déplacement (péage d’autoroute et frais kilométriques) qu’il a été contraints d’exposer pour se rendre de son domicile, situé dans la région de [Localité 9] à son lieu de travail situé à [Localité 6], puis pour retourner à son domicile, après la rupture de son contrat de travail imputable à l’employeur.
Compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat (41 ans), de son ancienneté dans l’entreprise (moins d’un mois), de la rémunération contractuelle mensuelle prévue de 1.550 euros nette, de sa qualification, des circonstances de la rupture et de la justification de sa situation de chômage (attestation Pôle emploi attestant du versement de l’ARE du 2 mai 2017 au 31 août 2018), il convient de lui accorder la somme globale de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cette somme sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société EDEN DIVE.
La décision du conseil de prud’hommes sera infirmée de ce chef
Sur la garantie de l’AGS :
Le présent arrêt devra être déclaré opposable à l’AGS et au CGEA de [Localité 8].
Il convient de rappeler que l’obligation du C.G.E.A, gestionnaire de l’AGS, de procéder à l’avance des créances visées à l’article L 3253-8 et suivants du code du travail se fera dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, et payable sur présentation d’un relevé de créance par le mandataire judicaire, et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L 3253-20 du Code du Travail.
Sur les intérêts
Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation, étant précisé que le jugement d’ouverture de la procédure collective de la société EDEN DIVE le 16 juin 2022 a entrainé la suspension du cours des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 du code de commerce).
Sur la remise des documents de fin de contrat
La remise d’un bulletin de salaire rectificatif conforme à la teneur du présent arrêt, s’impose sans qu’il y ait lieu de prévoir une astreinte, aucun élément laissant craindre une résistance du mandataire liquidateur n’étant versé au débat.
Il convient également d’enjoindre à Maître [H] [S] en qualité de mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE de régulariser la situation de Monsieur [P] [W] auprès des organismes sociaux et fiscaux.
Sur les demandes formées par le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE
La société EDEN DIVE, représentée par Maître [S] en qualité de mandataire liquidateur sollicite la condamnation de Monsieur [W] à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, ainsi que la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour ayant fait droit aux demandes formées par Monsieur [W], les demandes formées par le mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE tendant à voir juger la procédure prud’homale abusive, ainsi qu’à condamner le salarié aux frais irrépétibles, seront rejetées.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
L’équité commande d’infirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles et de fixer au passif de la procédure collective de la société EDEN DIVE la somme de 1.500 euros les frais irrépétibles dus à Monsieur [W] en première instance et en cause d’appel.
L’employeur qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance et d’appel lesquels seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud’homale,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté la société EDEN DIVE de ses demandes reconventionnelles,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Dit qu’il existait un contrat de travail entre la société EDEN DIVE et Monsieur [P] [W] à compter du 29 avril 2017.
Requalifie le contrat à durée déterminée conclu entre les parties en contrat à durée indéterminée.
Dit que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par Monsieur [P] [W] s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société EDEN DIVE les créances de Monsieur [P] [W] à hauteur des sommes suivantes :
-322,17 euros bruts à titre de paiement de salaire pour la période du 29 avril au 7 mai 2017, outre celle de 32,21 euros bruts à titre de congés payés y afférents,
-9.300 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
-1.550 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail,
-1.550 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 155 euros à titre de congés payés sur préavis,
-2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1.500 euros au titre des frais irrépétibles,
Ordonne à Maître [H] [S] en qualité de mandataire liquidateur de la société EDEN DIVE la remise à Monsieur [W] d’un bulletin de salaire rectificatif conforme à la teneur du présent arrêt, ainsi que la régularisation de sa situation auprès des services sociaux et fiscaux,
Rejette la demande d’astreinte,
Dit la présente décision opposable au CGEA-AGS de [Localité 8],
Dit que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées à l’article L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L3253-19 et L3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L3253-17 et D3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L3253-20 du code du travail,
Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation,
Rappelle que le jugement d’ouverture de la procédure collective a opéré la suspension du cours des intérêts légaux et conventionnels,
Dit que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE