En application de l’article 1225, alinéa 2, du code civil, entré en vigueur le 1er octobre 2016, ‘la clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat.
La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution.
La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire’.
La société L.M. Optic a mis à disposition de la société Amplifon France un local pour exercer une activité d’audioprothésiste, avec une rémunération basée sur un pourcentage du chiffre d’affaires. Suite à un différend sur le paiement de cette rémunération, la société L.M. Optic a résilié le contrat et a expulsé la société Amplifon France du local. Cette dernière a saisi le juge des référés pour demander à être rétablie dans ses droits temporaires. Le juge a ordonné que la société Amplifon France soit réinstallée dans les locaux, avec des astreintes en cas de non-respect de la décision. La société L.M. Optic a interjeté appel de cette décision, demandant à la cour de la réformer. Les deux parties ont formulé des demandes de condamnation et de paiement d’indemnités. La procédure est actuellement en attente de décision de la cour.
Introduction de l’affaire
L’affaire en question concerne un litige entre la société L.M. Optic et la société Amplifon France, jugé par le tribunal de commerce. Le différend porte sur la résiliation d’un contrat de mise à disposition de locaux commerciaux, invoquée par L.M. Optic en raison de l’inexécution par Amplifon France de ses obligations contractuelles.
Compétence du juge des référés
Selon l’article 873, alinéa 1, du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut prescrire en référé des mesures conservatoires ou de remise en état pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite. Le juge des référés peut constater la résiliation d’un contrat en application d’une clause résolutoire, à condition que celle-ci soit mise en œuvre régulièrement et sans contestation sérieuse.
Arguments de la société L.M. Optic
L.M. Optic soutient que la résiliation du contrat est justifiée par l’inexécution par Amplifon France de son obligation de remise des documents comptables dans le délai contractuel d’un mois. Elle affirme que la résiliation n’est ni brutale ni constitutive d’un trouble manifestement illicite, car elle a été prononcée conformément aux conditions de la clause résolutoire.
Arguments de la société Amplifon France
Amplifon France conteste la résiliation du contrat, arguant que la lettre du 24 février 2023 n’a pas été précédée d’une mise en demeure conforme aux exigences de l’article 1225 du code civil. Elle soutient également que la clause résolutoire a été mise en œuvre de mauvaise foi et que la résiliation a causé un trouble manifestement illicite en l’empêchant de suivre sa clientèle et de percevoir les revenus liés à son activité.
Contexte contractuel
Le contrat de mise à disposition a été conclu le 18 février 2010 pour une durée de cinq ans, reconduite tacitement sauf dénonciation par l’une des parties. La clause résolutoire stipule que le contrat peut être résilié en cas d’inexécution des obligations après une mise en demeure restée sans effet ou par consentement mutuel.
Échanges entre les parties
Des échanges de mails entre les parties montrent que L.M. Optic a réclamé à plusieurs reprises les éléments comptables à Amplifon France. Par une lettre recommandée du 17 janvier 2023, L.M. Optic a mis en demeure Amplifon France de fournir les documents comptables, mais cette demande est restée sans effet, conduisant à la résiliation du contrat par lettre du 24 février 2023.
Analyse de la mise en demeure
La lettre du 17 janvier 2023, bien que mentionnant « mise en demeure », ne contenait pas d’injonction explicite de respecter l’obligation ni d’indication du délai imparti par la clause résolutoire. En vertu de l’article 1225 du code civil, la mise en demeure doit mentionner expressément la clause résolutoire pour produire effet, ce qui n’était pas le cas ici.
Décision du tribunal
Le tribunal a jugé que la contestation de la régularité de la mise en œuvre de la clause résolutoire par Amplifon France était sérieuse. La résiliation unilatérale par L.M. Optic, ayant conduit à l’expulsion immédiate d’Amplifon France, constituait un trouble manifestement illicite. Le tribunal a ordonné la réintégration d’Amplifon France dans les locaux et la remise en place de son enseigne.
Confirmation de l’ordonnance
L’ordonnance du premier juge a été confirmée, ordonnant la libération des locaux et la réinstallation de l’enseigne d’Amplifon France. Les moyens invoqués par L.M. Optic, tels que l’erreur de droit et l’absence de dommage imminent, ont été jugés inopérants.
Dépens et frais irrépétibles
La société L.M. Optic, ayant succombé en ses prétentions, a été condamnée à supporter les dépens d’appel. Amplifon France a obtenu une indemnité de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés pour sa défense en appel, conformément à l’article 700 du code de procédure civile.
– Somme allouée à la société Amplifon France : 4.000 euros
Réglementation applicable
Voici la liste des articles des Codes cités dans le texte fourni, ainsi que leur contenu :
– Article 873, alinéa 1, du Code de procédure civile :
« Le président du tribunal de commerce, dans les limites de sa compétence, peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »
– Article 1225 du Code civil :
« La clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat. La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. »
– Article 1214 du Code civil (issu de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016) :
« Le contrat à durée déterminée ne peut être prorogé par tacite reconduction. À son terme, il peut être renouvelé par accord des parties ou, à défaut, il prend fin. »
– Article 700 du Code de procédure civile :
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »
Ces articles sont cités et utilisés dans le contexte de la décision de la cour concernant la résiliation d’un contrat entre la société L.M. Optic et la société Amplifon France.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS
– Me Eric CHARLERY
– Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
– Me Brigitte BOURDU ROUSSEL
Mots clefs associés
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 8
ARRÊT DU 22 MARS 2024
(n° , 7 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/15464 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CIIIV
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Septembre 2023 -Président du TC de MEAUX – RG n° 2023006170
APPELANTE
S.A.S. L.M. OPTIC, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Ayant comme avocat postulant Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, représenté à l’audience par Me Eric CHARLERY
INTIMÉE
S.A.S. AMPLIFON FRANCE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 4]
[Localité 2]
Ayant comme avocat postulant Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, représenté à l’audience par Me Brigitte BOURDU ROUSSEL
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 15 Février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Florence LAGEMI, Présidente de chambre chargée du rapport
Rachel LE COTTY, Conseillère
Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence LAGEMI, Présidente de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Par acte du 18 février 2010, la société L.M. Optic a mis à disposition de la société Conversons 93, aux droits de laquelle se trouve la société Amplifon France, un local aménagé de 30m² au sol jouxtant le magasin d’optique qu’elle exploite à [Localité 3] (Seine-et-Marne), [Adresse 1], outre un espace d’attente dans la surface commerciale commune avec le magasin d’optique ainsi qu’une vitrine et une signalétique spécifique et ce, afin d’y exercer une activité d’audioprothésiste.
En contrepartie de la mise à disposition des locaux, il a été prévu une rémunération, en partie forfaitaire, de 15.000 euros hors taxes par an et, en partie variable, correspondant à un pourcentage du chiffre d’affaires hors taxes réalisé par la société Amplifon France sur les ventes de prothèses à l’exception de celles classées ‘CMU’. Il a été convenu que cette rémunération devait être calculée en fonction du relevé mensuel adressé par l’audioprothésiste.
Par lettre recommandée du 24 février 2023, la société L.M. Optic a résilié pour faute le contrat de mise à disposition du local commercial au motif que la société Amplifon France n’avait pas fourni, dans les conditions contractuelles, les données comptables mensuelles permettant d’établir la rémunération due en dépit d’une mise en demeure adressée le 17 janvier 2023.
La société L.M. Optic a repris possession du local en procédant à l’expulsion de la société Amplifon France et au retrait de son enseigne, remplacée par celle de LM Audio, et en exploitant avec son propre personnel l’activité d’audioprothésiste.
Soutenant subir un trouble manifestement illicite constitué par la mise en oeuvre irrégulière de la clause résolutoire, à l’origine d’un préjudice commercial et d’image à l’égard de sa clientèle, la société Amplifon France a fait assigner, par acte du 21 juin 2023, la société L.M. Optic devant le juge des référés du tribunal de commerce de Meaux afin, notamment, de pouvoir librement accéder aux locaux et de poursuivre son activité.
Par ordonnance du 8 septembre 2023, le premier juge, après s’être déclaré incompétent pour statuer sur les demandes relevant du fond et renvoyé les parties à mieux se pourvoir, a :
dit qu’il conviendra de revenir à la situation d’origine et donc de remettre la société Amplifon France en place jusqu’à ce qu’une décision au fond soit rendue ;
dit qu’il conviendra donc de rétablir la société Amplifon France dans ses droits temporaires en faisant libérer les locaux situés [Adresse 1], [Localité 3] et en déposant l’enseigne et toute signalétique L.M. Audio dans les 10 jours suivant la signification de la décision, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et ce pendant une durée de trois mois ;
dit que la société L.M. Optic devra laisser libre accès au local au personnel audioprothésiste de la société Amplifon France et à l’espace d’attente dans la surface commerciale commune avec le magasin situé à l’adresse précitée, afin qu’elle puisse exercer son activité et lui laisser la libre disposition de la vitrine dédiée, dans les 10 jours suivant la signification de la décision, le tout sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, et ce pendant une durée de trois mois ;
dit que pour ce faire, l’enseigne Amplifon France et la signalétique devront être réinstallées à la charge de la société L.M. Optic, dans les 10 jours suivant la signification de la décision, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, et ce pendant une durée de trois mois, et jusqu’à ce qu’une décision au fond soit rendue ;
dit que la société Amplifon France pourra exercer son activité commerciale dans les lieux ;
dit que la société Amplifon France devra impérativement, pendant cette période, poursuivre le paiement de ses loyers et la rémunération de la société L.M. Optic en fournissant son chiffre d’affaires mensuel et plus généralement respecter ses obligations contractuelles ;
dit que tout ce qui précède devra se faire sans menaces, ni contrainte verbale ou physique et sans dénigrement de la part de la société L.M. Optic sous astreinte de 200 euros par infraction constatée ;
dit que par conséquent, la société L.M. Optic, comme par le passé, s’interdira toute activité d’audioprothésiste jusqu’à ce qu’une décision au fond soit rendue ;
donné acte à la société Amplifon France de ce qu’elle se réserve de demander réparation pour le préjudice subi en raison de la rupture brutale et de l’impossibilité d’exploiter son activité d’audioprothésiste et les activités annexes contractuelles ;
ordonné à la société Amplifon France de communiquer à la société L.M. Optic, dans les 15 jours de la signification de l’ordonnance un extrait certifié par son expert-comptable ou par son comptable, du grand-livre clients se rapportant aux ventes réalisées par elle depuis le 6 juillet 2017, en son établissement situé dans le local jouxtant le magasin L.M. Optic, [Adresse 1] à [Localité 3], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé ce délai ;
condamné la société Amplifon France à payer par provision à la société L.M. Optic la somme de 5.767,57 euros TTC au titre du solde de loyer dû pour l’année 2022 dans les 15 jours de la signification de l’ordonnance ;
condamné la société L.M. Optic à payer à la société Amplifon France la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
débouté la société L.M. Optic de sa demande fondée sur ce texte ;
condamné la société L.M. Optic aux dépens.
Par déclaration du 20 septembre 2023, la société L.M. Optic a interjeté appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif à l’exception de ceux relatifs à la communication des documents comptables et à la condamnation de la société Amplifon France au paiement, à titre provisionnel, du solde des loyers.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 24 janvier 2024, la société L.M. Optic demande à la cour de :
infirmer l’ordonnance entreprise en ses dispositions dont elle a fait appel ;
Statuant à nouveau,
juger n’y avoir lieu à référé sur les prétentions formées par la société Amplifon France ;
la débouter de toutes ses demandes ;
confirmer l’ordonnance déférée en ses dispositions ayant condamné la société Amplifon France à lui payer la somme de 5.767,57 euros TTC au titre du solde de loyer dû pour l’année 2022 et lui ayant enjoint de communiquer, sous astreinte, dans les délais et montant visés par l’ordonnance, un extrait certifié par son expert-comptable du grand-livre clients se rapportant aux ventes réalisées par elle depuis le 6 juillet 2017, en son établissement situé [Adresse 1] à [Localité 3] ;
condamner la société Amplifon France à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au paiement de tous éventuels dépens de première instance et d’appel.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 30 janvier 2024, la société Amplifon France demande à la cour de :
confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;
débouter la société L.M. Optic de toutes ses demandes ;
condamner la société L.M. Optic à lui payer, en cause d’appel, la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement de tous éventuels dépens d’appel.
La clôture de la procédure a été prononcée le 31 janvier 2024.
Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu’aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
Selon l’article 873, alinéa 1, du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce, dans les limites de sa compétence, peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Il entre dans les pouvoirs du juge des référés de constater la résiliation d’un contrat en application d’une clause résolutoire dès lors que celle-ci est mise en oeuvre régulièrement et lorsque aucune contestation sérieuse n’y est opposée.
A défaut, il lui appartient de tirer les conséquences de toute irrégularité dans l’application de cette clause et de s’assurer que sa mise en oeuvre n’est pas susceptible d’occasionner un trouble manifestement illicite à celui qui la subit et auquel il doit mettre fin.
La société L.M. Optic soutient, pour l’essentiel, que le premier juge a méconnu les dispositions du contrat, affirmant que la résiliation est intervenue en raison de l’inexécution par la société Amplifon France de son obligation de remise des documents comptables, dans le délai contractuel d’un mois, et que celle-ci ne peut être qualifiée de brutale ni constitutive d’un dommage imminent ou d’un trouble manifestement illicite, dès lors qu’elle a été prononcée conformément aux conditions de la clause résolutoire.
Elle s’oppose aux contestations émises par l’intimée qu’elle considère non sérieuses et fait valoir que le contrat, conclu le 18 février 2010, n’est pas soumis aux dispositions de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 entrées en vigueur le 1er octobre 2016, de sorte que l’article 1225 du code civil issu de ce texte, qui subordonne l’effet de la clause résolutoire à la notification d’une mise en demeure la visant expressément, n’est pas applicable en l’espèce.
La société Amplifon France soutient, pour sa part, que la lettre du 24 février 2023 ne pouvait emporter la résiliation du contrat dès lors qu’elle n’a pas été précédée d’une lettre de mise en demeure précisant le délai imparti pour lui permettre d’exécuter son obligation et l’intention de son cocontractant de résilier le contrat.
Elle ajoute que la lettre du 17 janvier 2023 sur laquelle se fonde la société L.M. Optic, ne visait pas la clause résolutoire prévue à l’article 6-1 du contrat et n’en reprenait pas les termes, de sorte que l’appelante ne peut se prévaloir d’une mise en demeure préalable infructueuse au sens de l’article 1225 du code civil, applicable en l’espèce, pour résilier le contrat avec effet immédiat.
Elle indique encore que la clause résolutoire a été mise en oeuvre de mauvaise foi, ce qui fait obstacle à son acquisition, soutenant avoir toujours réglé le loyer fixe de 15.000 euros annuel, présenté les relevés de vente faisant ressortir le pourcentage revenant à la société L.M. Optic et régularisé les comptes en fin d’année si bien qu’aucune somme ne lui a été réclamée dans les lettres des 17 janvier et 24 février 2023 pour les années 2020 à 2022 pour lesquelles une reddition de comptes annuels lui a été adressée.
Elle considère, dans ces circonstances, que la mise en oeuvre de la clause résolutoire apparaît irrégulière, qu’il existe une apparence de violation par la société L.M. Optic des clauses du contrat et de la loi, constitutive d’un trouble manifestement illicite, seul fondement invoqué, qui persiste à ce jour, et qui doit cesser puisqu’elle a été expulsée des locaux, que son activité d’audioprothésiste a été immédiatement reprise par la société L.M. Optic, qui s’est appropriée sa clientèle au mépris de la clause de non rétablissement stipulée dans le contrat et qui l’empêche de suivre sa clientèle alors qu’il pèse sur elle une obligation réglementaire de suivi pendant 4 ans et la prive des revenus liés à son activité.
Le contrat de mise à disposition a été conclu le 18 février 2010, ‘pour une durée de cinq ans, reconduite par tacite reconduction sauf dénonciation par l’une ou l’autre des parties par lettre recommandée avec avis de réception avec un préavis de 6 mois’.
Il a également été stipulé à l’article 6 intitulé ‘Résiliation’, que le contrat pourra être résilié par l’une ou l’autre des parties, dans deux hypothèses : ‘en cas d’inexécution des obligations de l’autre partie un mois après une mise en demeure par lettre recommandée restée sans effet’ et ‘par consentement mutuel et amiable’.
Il ressort des mails produits en date des 24 janvier 2020, 5 et 6 octobre 2022, que la société L.M. Optic a réclamé à la société Amplifon France les éléments comptables sur le chiffre d’affaires réalisé et a dénoncé des anomalies entre les factures établies par l’intimée et le chiffre d’affaires communiqué.
Par mail du 7 octobre 2022, la société L.M. Optic a sollicité, conformément aux dispositions du contrat, que lui soit adressé ‘un relevé comportant le chiffre d’affaires mensuel ainsi que le volume’ afin de lui permettre d’établir la facture correspondante de façon trimestrielle, avec une régularisation en fin d’année.
Puis, par lettre recommandée du 17 janvier 2023, comportant en objet ‘mise en demeure’, la société L.M. Optic, se référant au mail susvisé, a indiqué ‘nous souhaitons revenir aux termes écrits dans le contrat (déjà fourni à maintes reprises), à savoir que vous nous adressiez un relevé comportant votre chiffre d’affaires mensuel, ainsi que le volume et nous vous établirons la facture correspondante de façon trimestrielle, avec une régularisation en fin d’année si besoin était. Sauf erreur de notre part, à ce jour, vous n’avez pas tenu compte de notre demande. Nous vous prions d’agréer (…)’.
Cette demande étant restée sans effet, la société L.M. Optic a résilié le contrat par lettre recommandée du 24 février suivant en se fondant sur la clause résolutoire énoncée à son article 6 et en demandant à la société Amplifon France de quitter le local dans les plus brefs délais.
Il est constant que la société L.M. Optic a entendu résilier le contrat pour défaut d’exécution par la société Amplifon France de son obligation de communiquer mensuellement les éléments comptables propres à calculer le montant de la redevance complémentaire à la rémunération de base due en contrepartie de l’occupation des locaux.
Cependant, au regard des termes employés dans la lettre du 17 janvier 2023 précédemment rappelés, il ne saurait être considéré que celle-ci suffit à engager le processus de résiliation tel que prévu au contrat.
En effet, en dépit de la mention ‘mise en demeure’, figurant en objet, cette lettre se limite à exprimer le souhait de la société L.M. Optic de revenir aux conditions contractuelles quant à la périodicité de la délivrance des éléments comptables, sans contenir expressément d’injonction de respecter cette obligation ni d’indication du délai imparti par la clause résolutoire pour y faire obstacle (1e Civ., 3 février 2004, pourvoi n° 01-02.020 – 1e Civ., 3juin 2015, pourvoi n° 14-15.655).
Au surplus, il est relevé qu’en application de l’article 1225, alinéa 2, du code civil, entré en vigueur le 1er octobre 2016, ‘la clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat. La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire’.
Ce texte est applicable en l’espèce dès lors qu’il résulte des stipulations dépourvues d’ambiguïté du contrat conclu le 18 février 2010, que les parties ont fixé sa durée à cinq ans, avec faculté de tacite reconduction ; qu’à son échéance, le 17 février 2015, un nouveau contrat, au contenu identique à celui du précédent, a été souscrit pour une nouvelle durée de cinq ans, expirant le 17 février 2020 ; qu’à cette date, par l’effet de l’article 1214 du code civil, issu de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, est intervenu un nouveau contrat pour une durée indéterminée, soumis aux dispositions légales applicables à compter du 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur du texte précité.
Or, la lettre de mise en demeure du 17 janvier 2023 ne mentionnant pas la clause résolutoire, n’a pu produire effet.
Il en résulte que la contestation invoquée par la société Amplifon France sur la régularité de la mise en oeuvre de la clause résolutoire et, par suite, le bien fondé de la résiliation opérée dont les conditions n’apparaissent pas réunies avec toute l’évidence requise en référé, est sérieuse et permet, sans qu’il soit utile pour la solution du litige d’examiner le moyen soulevé tenant à l’absence de bonne foi de la société L.M. Optic, de faire obstacle au constat de la résiliation du contrat.
Dans ces circonstances, la résiliation prononcée unilatéralement par la société L.M. Optic, ayant conduit à l’expulsion immédiate de la société Amplifon France, empêchée depuis d’exercer son activité, apparaît constitutive d’un trouble manifestement illicite.
C’est donc par une exacte appréciation des faits soumis à son appréciation que le premier juge a, pour faire cesser ce trouble, ordonné que la société Amplifon France soit rétablie dans ses droits et dans sa situation antérieure jusqu’à ce qu’il soit statué par le juge du fond, et, pour ce faire, ordonné, sous astreinte, la libération des locaux et que soit laissé leur libre accès à la société Amplifon France, la dépose de l’enseigne et de toute signalétique LM Audio et la réinstallation de l’enseigne et de la signalétique de la société intimée.
L’ordonnance entreprise sera donc confirmée de ces chefs, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les moyens inopérants invoqués par la société L.M. Optic tenant d’une part, à l’erreur de droit qui aurait été commise par le premier juge en ce qu’il a renvoyé les parties à se pourvoir et donné à la société intimée l’acte qu’elle requérait, d’autre part, à l’absence de dommage imminent, lequel n’était d’ailleurs pas soutenu par l’intimée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le sort des dépens de première instance et des frais irrépétibles a été exactement apprécié par le premier juge.
Succombant en ses prétentions, la société L.M. Optic supportera les dépens d’appel.
Il sera alloué à la société Amplifon France, contrainte d’exposer des frais irrépétibles pour assurer sa défense en appel, la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme l’ordonnance entreprise en ses dispositions dont il a été fait appel ;
Condamne la société L.M. Optic aux dépens et à payer à la société Amplifon France la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT