Résumé de l’affaire jugée en appel
La Cour d’Appel de Paris a rendu un arrêt le 26 septembre 2023 concernant un litige relatif à un congé pour reprise d’une parcelle de terre donnée en bail rural. L’appelant, M. [F] [Z], contestait le jugement du tribunal qui avait annulé le congé pour reprise qu’il avait délivré aux preneurs, M. [P] [L] et Mme [S] [L].Exposé du litige
Le litige portait sur l’erreur de date de naissance dans le congé et l’ambiguïté des conditions d’exploitation projetées par l’appelant. Le tribunal avait annulé le congé pour ces raisons, mais la Cour d’Appel a infirmé cette décision.Décision de la Cour
La Cour a validé le congé pour reprise et ordonné aux preneurs de libérer la parcelle dans un délai d’un mois. En cas de non-libération, leur expulsion serait autorisée. Les preneurs ont également été condamnés à verser une indemnité d’occupation et une somme de 2 000 euros à l’appelant. Les preneurs ont été condamnés aux dépens d’appel.Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 4 – Chambre 4 ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2023 (n° , 5 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/17891 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGSGZ Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2022 -Tribunal paritaire des baux ruraux de FONTAINEBLEAU – RG n° 51-21-0006 APPELANT Monsieur [F] [Z] [Adresse 1] [Localité 4] Représenté par Me Sarah DEGRAND de la SCP FGB, avocat au barreau de MELUN INTIMES Monsieur [P] [L] [Adresse 3] [Localité 7] Représenté par Me Christine HEUSELE, avocat au barreau de MEAUX Madame [S] [L] NÉE [R] [Adresse 3] [Localité 7] Représentée par Me Christine HEUSELE, avocat au barreau de MEAUX COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Marie MONGIN, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : Monsieur [F] CHALACHIN, président Madame Marie MONGIN, conseiller Madame Anne-Laure MEANO, conseiller Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO ARRET : – Contradictoire – par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. – Marie MONGIN conseiller signataire de l’arrêt ‘pour le président empêché’ et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4, présente lors de la mise à disposition. EXPOSÉ DU LITIGE Par acte sous seing privé en date du 22 novembre 2004, [V] et [M] [H] respectivement décédés les 27 juin 2011 et 6 novembre 2019, ont donné à bail rural pour une durée de 9 ans, à M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] une parcelle de terre cadastrée section [Cadastre 6] d’une superficie de 2 ha 26 a 50 ca située au lieudit « [Adresse 5] » sur la commune de [Localité 7] (Seine et Marne). Ce bail devait se terminer le 30 septembre 2013 et a été tacitement renouvelé jusqu’au 30 septembre 2022. M. [F] [Z] en sa qualité d’héritier d'[M] [H], est devenue propriétaire de la parcelle précitée. Par exploit d’huissier en date du 24 février 2021, M. [Z] a fait délivrer aux preneurs un congé aux fins de reprise pour exploiter, pour le 30 septembre 2022. M. et Mme [L] ont contesté ce congé par lettre recommandée avec accusé de réception en date adressée le 22 juillet 2022 au tribunal paritaire des baux ruraux de Fontainebleau aux fins de tentative de conciliation et à défaut d’entendre prononcer la nullité de ce congé. Par jugement en date du 13 septembre 2022, le tribunal a rejeté le premier moyen soulevé mais fait droit au second et, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, a prononcé la nullité du congé délivré le 24 février 2021 aux fins de reprise par M. [Z], débouté M. [Z] de ses demandes, l’a condamné à verser à M. et Mme [L] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. M. [Z] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 18 octobre 2022. A l’audience du 5 juin 2023, les conseils des parties ont été entendus en leurs explications développant leurs écritures. Le conseil de l’appelant a approuvé le premier juge qui a considéré que l’erreur sur sa date de naissance dans le congé, 1944 au lieu de 1964, n’avait pas fait grief aux preneurs d’autant plus que cette erreur avait été rectifiée par l’huissier instrumentaire par exploit du 26 août 2021 auquel était annexée une copie de sa carte d’identité ; En revanche, il critique la décision entreprise qui a considéré que son obligation d’indiquer dans le congé le mode d’exploitation des terres reprises n’était pas respectée en raison de l’ambiguïté de son affirmation que les terres en causes seraient mises à disposition de l’exploitation agricole à responsabilité limitée (société à associé unique) [F] [Z] alors qu’il est ensuite indiqué qu’il exploitera les terres conformément à l’article L 441-59 du code rural et de la pêche maritime pendant 9 ans, soit à titre personnel soit dans les conditions d’exploitation collectives définies par la loi ; Les intimés critiquent la solution adoptée par le tribunal s’agissant de l’erreur relative l’année de naissance de M. [Z] figurant dans le congé, soutenant que cette erreur leur a causé grief car ils n’ont pu apprécier la validité de ce congé et que cette erreur ne pouvait être régularisée postérieurement à la délivrance de l’acte ; ils approuvent la motivation du premier juge ayant constaté l’ambiguïté de la description du projet d’exploitation ; enfin à titre «surabondant» ils soulignent que le bénéficiaire de la reprise ne rapporte pas la preuve qu’il satisfait aux conditions de la reprise au regard des articles L. 411-58 et L. 411-59 du code rural et de la pêche maritime ; enfin, ils sollicitent une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que la condamnation de l’appelant aux dépens de la procédure d’appel ; Au terme des débats, il a été indiqué que l’arrêt serait rendu le 26 septembre 2023. SUR CE, Considérant s’agissant de l’erreur de date sur l’année de naissance de M. [Z], 1944 au lieu de 1964, que comme l’a jugé le tribunal, cette erreur purement matérielle n’était pas de nature à induire les preneurs en erreur, condition posée par l’article L 411-47 du code rural et de la pêche maritime pour qu’une erreur purement formelle conduise à la nullité du congé ; Qu’en l’occurrence, il apparaissait d’évidence que la date mentionnée résultait d’une erreur purement matérielle de sorte que c’est à juste titre que le tribunal a rejeté ce moyen ; Considérant s’agissant de l’ambiguïté reprochée par le tribunal et les preneurs des conditions d’exploitation projetées par le bénéficiaire de la reprise, le congé était ainsi rédigé : « MOTIFS DU CONGÉ Cette décision de non-renouvellement vous est donnée pour le ou les motifs suivants : le bailleur entend reprendre l’objet de la location à son bénéficie, étant précisé qu’il exploitera le bien repris sous forme sociétale et qu’il le mettra à disposition de l’exploitation agricole à responsabilité limitée (société à associé unique) [F] [Z] dont le siège social est sis [Adresse 2]. (Souligné par la cour) Le requérant exploitera personnellement et durablement le patrimoine de la reprise à compter de la date d’effet du congé. Il vous est rappelé à toutes fins et particulièrement pour satisfaire aux prescriptions de l’article L 411-47 du code rural et de la pêche maritime que : Le bénéficiaire de la reprise dispose d’un corps de ferme et d’une habitation, ainsi que de tous les moyens suffisants pour assurer lui même une exploitation personnelle, effective, permanente et directe du patrimoine objet de la reprise. Le bénéficiaire a, pour ce faire, la volonté d’être exploitant réel et bénéficie de l’aptitude physique, matérielle, intellectuelle et pécuniaire, et celle de le demeurer. Et entend expressément se conformer aux prescriptions de l’article L 411-59 du Code Rural et de la pêche Maritime, à savoir qu’à partir de la reprise, il se consacrera à l’exploitation de son objet pendant neuf ans, soit à titre individuel, soit dans les conditions d’exploitation collectives définies par la loi. » Que ce dernier paragraphe, qui fait partie d’un rappel « à toutes fins», des exigences de l’article L. 411-47 du code rural et de la pêche maritime et qui ne fait que rappeler que le bénéficiaire de la reprise entend se plier aux exigences générales de l’article L 411-49 dudit code rural, en exploitant personnellement les parcelles reprises pendant 9 années, ne prête nullement à confusion sur la forme de l’exploitation projetée qui est clairement et précisément énoncée dans le premier des paragraphes ci-dessus rappelé en des termes dépourvus d’ambiguïté selon lesquels : « il exploitera le bien repris sous forme sociétale et qu’il le mettra à disposition de l’exploitation agricole à responsabilité limitée (société à associé unique) [F] [Z] dont le siège social est sis [Adresse 2].» ; Que c’est donc à tort que le tribunal a prononcé la nullité du congé au motif que ce rappel général de l’article L 411-49 du code précité, induisait en erreur les preneurs quant aux conditions d’exploitation future ; Que le jugement sera donc infirmé et le congé sera validé ; Considérant qu’il doit être relevé pour répondre aux observations de M. et Mme [L], qualifiées de surabondantes, que M. [Z] démontre exercer la profession d’agriculteur en qualité de membre de société non salarié agricole depuis 1989, que cette activité est principale et qu’il exploite une superficie de 67,2203ha ; qu’il justifie également disposer du matériel nécessaire à son exploitation, être titulaire du brevet d’études professionnelles agricoles obtenu en 1982 et que son domicile est à 15 km des terres reprises (pièces n°4, 5, 6 et 7) ; Considérant qu’il sera fait droit à la demande de M. [Z] tendant à ce que soit ordonné à M. et Mme [L] de libérer la parcelle visée dans le bail rural conclu le 22 novembre 2004, cadastrée section [Cadastre 6] d’une superficie de 2 ha 26 a 50 ca située au lieudit « [Adresse 5] » sur la commune de [Localité 7] (Seine et Marne) et d’autoriser, à défaut de libération dans le délai d’un mois, leur expulsion avec, si besoin est, le concours de la force publique ; Qu’il sera également fait doit à la demande tendant au payement d’une indemnité d’occupation d’un montant égal à celui des loyers convenus depuis le 1er octobre 2022 jusqu’à la libération des lieux ; Considérant quant aux mesures accessoires que l’appelant ne sollicite pas l’infirmation de ces chefs ; que M. et Mme [L] seront condamnés aux dépens d’appel ainsi qu’à verser à M. [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS LA COUR, Statuant publiquement par mise à disposition au greffe de l’arrêt contradictoire, – Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a annulé le congé pour reprise délivré par M. [F] [Z] le 24 février 2021 à M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] et débouté M. [F] [Z] de ses demandes, Statuant à nouveau et y ajoutant, – Valide le congé pour reprise de la parcelle de terre cadastrée section [Cadastre 6] d’une superficie de 2 ha 26 a 50 ca située au lieudit « [Adresse 5] » sur la commune de[Localité 7]e (Seine et Marne), délivré par M. [F] [Z] le 24 février 2021 à M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R], – Ordonne en conséquence à M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] de libérer la parcelle susvisée dans le délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt, – A défaut de libération volontaire des lieux dans le délai ci-dessus précisé, autorise leur expulsion et celle de tout occupant de leur chef, au besoin avec le concours de la force publique, – Condamne in solidum M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] à verser une indemnité d’occupation égale au montant des loyers convenus depuis le 1er octobre 2022 jusqu’à la libération des lieux, – Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, – Condamne in solisum M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] à verser à M. [F] [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, – Condamne in solidum M. [P] [L] et Mme [S] [L] née [R] aux dépens d’appel. La Greffière Pour le président empêché