L’Essentiel : La présente affaire oppose une société civile immobilière, désignée comme la demanderesse, à une société à responsabilité limitée, désignée comme la défenderesse. La demanderesse a confié à la défenderesse des travaux de rénovation d’un parquet, pour un montant de 3 454 euros. Après l’exécution des travaux, la demanderesse a constaté des désordres, confirmés par un expert. Elle a mis en demeure la défenderesse de réparer son préjudice, chiffré à 9 913,51 euros, avant de l’assigner en justice. Le Tribunal a statué en faveur de la demanderesse, condamnant la défenderesse à verser des indemnités pour les travaux réparatoires et les frais de justice.
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Contexte de l’affaireLa présente affaire oppose une société civile immobilière, désignée comme la demanderesse, à une société à responsabilité limitée, désignée comme la défenderesse. La demanderesse, propriétaire d’une maison, a confié à la défenderesse des travaux de rénovation d’un parquet, pour un montant de 3 454 euros, en date du 1er décembre 2021. Problèmes rencontrésAprès l’exécution des travaux, la demanderesse a constaté des désordres, notamment un vernis qui « sautait » à plusieurs endroits. Un procès-verbal de constat a été dressé par un commissaire de justice le 21 novembre 2022, et un expert a été mandaté pour évaluer les travaux réalisés. L’expert a confirmé des défauts dans la vitrification du parquet, attribués à un ponçage inadéquat. Demandes de la demanderesseLa demanderesse a mis en demeure la défenderesse de réparer son préjudice, chiffré à 9 913,51 euros, avant de l’assigner en justice pour obtenir une indemnisation. Elle a demandé, à titre principal, la condamnation de la défenderesse à verser cette somme pour couvrir divers frais liés aux désordres, ainsi qu’à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité contractuelle. Réponse de la défenderesseLa défenderesse a contesté les demandes de la demanderesse, arguant que le rapport d’expertise amiable ne pouvait pas fonder les demandes en justice. Elle a également soutenu que les désordres ne relevaient pas de la garantie biennale et a demandé le débouté de la demanderesse sur l’ensemble de ses demandes. Décision du TribunalLe Tribunal a statué en faveur de la demanderesse, condamnant la défenderesse à verser 2 048,51 euros pour les travaux réparatoires et 400 euros pour le préjudice de jouissance. De plus, la défenderesse a été condamnée à payer 2 000 euros au titre des frais de justice. Les demandes de la défenderesse ont été rejetées, et l’exécution provisoire a été ordonnée. ConclusionCette affaire illustre les enjeux liés à la responsabilité des professionnels du bâtiment en matière de travaux de rénovation. Le Tribunal a reconnu la nécessité d’une réparation intégrale des préjudices subis par la demanderesse, tout en précisant les limites de l’expertise amiable dans le cadre d’une procédure judiciaire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les responsabilités du constructeur en vertu de l’article 1792 du Code civil ?En vertu de l’article 1792 du Code civil, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, affectant l’un de ses éléments constitutifs ou d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Cette responsabilité est engagée même si les dommages résultent d’un vice du sol. L’action en responsabilité se prescrit par 10 ans à compter de la réception des travaux, et le désordre doit être caché au moment de la réception. Ainsi, dans le cas présent, la SCI EUSEBE, en tant que maître d’ouvrage, peut invoquer cette responsabilité pour obtenir réparation des désordres constatés sur le parquet. Quelles sont les implications de la garantie biennale selon l’article 1792-3 du Code civil ?L’article 1792-3 du Code civil stipule que les éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de leur réception. Cette garantie s’applique aux éléments qui sont indissociables de l’ouvrage principal. Dans le cas présent, la SARL JV SOLUTION soutient que le vernissage du parquet ne constitue pas un élément d’équipement, ce qui pourrait limiter l’application de cette garantie. La SCI EUSEBE, en revanche, cherche à établir que les désordres affectent le bon fonctionnement de l’ouvrage, justifiant ainsi l’application de cette garantie. Comment la responsabilité contractuelle est-elle définie par l’article 1217 du Code civil ?L’article 1217 du Code civil précise que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou a été exécuté de manière imparfaite peut : – Refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ; Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées, et des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter. Dans le contexte de la présente affaire, la SCI EUSEBE pourrait invoquer cette responsabilité contractuelle pour obtenir réparation des désordres causés par la SARL JV SOLUTION, en démontrant l’existence d’un manquement et d’un lien causal avec le préjudice subi. Quelle est la valeur d’un rapport d’expertise amiable dans le cadre d’un litige ?La SARL JV SOLUTION fait valoir que le rapport d’expertise amiable produit par la SCI EUSEBE n’a pas la valeur d’un rapport d’expertise judiciaire et ne saurait fonder exclusivement ses demandes. Il est établi que l’expertise amiable est une expertise extrajudiciaire diligentée à la demande conjointe des parties. Cependant, dans ce cas, le contradictoire s’est limité à la présence des deux parties lors de la réunion d’expertise, sans que l’expert ait pris en compte les observations écrites de la SARL JV SOLUTION. Ainsi, le rapport d’expertise amiable ne peut être considéré comme ayant la valeur d’un rapport d’expertise judiciaire, mais constitue un simple élément de preuve soumis à la discussion. Quels sont les critères pour établir un préjudice de jouissance ?La SCI EUSEBE fait valoir qu’elle ne pourra jouir du rez-de-chaussée et du rez-de-jardin pendant la durée des travaux, ce qui constitue un préjudice de jouissance. Cependant, il est nécessaire de prouver que les désordres affectent effectivement l’usage des lieux. Dans cette affaire, il a été constaté que seule une partie du rez-de-chaussée est affectée par les désordres, et aucun élément n’a été produit concernant le rez-de-jardin. Ainsi, le Tribunal a accordé une somme de 400 euros au titre du préjudice de jouissance, en tenant compte de la nature des travaux et de leur impact sur les pièces à vivre. |
7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 06 FÉVRIER 2025
54G
N° RG 23/04526
N° Portalis DBX6-W-B7H-X3S6
Minute n°2025/
AFFAIRE :
SCI EUSEBE
C/
SARL JV SOLUTION
Grosse Délivrée
le :
à
SCP BAYLE JOLY
SELARL CABINET FERRANT
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :
Madame BOULNOIS, Vice-Président, statuant en Juge Unique,
Lors des débats et du prononcé :
Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier
à l’audience publique du 04 Décembre 2024
JUGEMENT :
Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe
DEMANDERESSE
SCI EUSEBE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Thomas FERRANT de la SELARL CABINET FERRANT, avocat au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE
SARL JV SOLUTION
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Perrine ESCANDE de la SCP BAYLE JOLY, avocat au barreau de BORDEAUX
La SCI EUSEBE, propriétaire d’une maison d’habitation sise [Adresse 4] a confié à la SARL JV SOLUTION des travaux de rénovation d’un parquet consistant dans un ponçage et une vitrification ayant donné lieu à une facture de 3 454 euros en date du 1er décembre 2021.
Elle s’est plainte de ce que le vernis « sautait » à plusieurs endroits et a fait dresser le 21 novembre 2022 un procès-verbal de commissaire de justice.
Elle a eu recours à un expert, Monsieur [P], qui a procédé le 02 mars 2022 à une réunion d’expertise en présence d’un représentant de la SARL JV SOLUTION.
Elle a mis celle-ci en demeure par un courrier recommandé avec avis de réception du 19 avril 2023 de lui régler une somme de 9 913,51 euros en réparation de son préjudice.
Faute de réponse de sa part, elle l’a, par acte en date du 24 mai 2023, fait assigner au fond devant le Tribunal judiciaire aux fins d’indemnisation.
Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 mars 2024, la SCI EUSEBE demande au Tribunal de :
Vu les articles 1544 et suivants du code civil, Vu l’article 1792-3 du code civil, Vu les articles 1217 et suivants du code civil,
A titre principal, au titre de la garantie biennale :
CONDAMNER la SARL JV SOLUTION à verser à la SCI EUSEBE, une somme de 9.913,51 € au titre de la réparation intégrale de son préjudice lié aux désordres, ventilée de la manière suivante :
– 2.048,50 € pour le replanissage, ponçage fin du parquet, application d’une couche de fond dur et de deux couches de vitrificateur effet invisible sans solvant ;
– 1.455,00 € pour le déménagement des meubles devant être débarrassés, leur retour, ainsi que leur dépôt en garde-meubles ;
– 1.660,00 € au titre des travaux de peinture sur les plinthes ;
– 2.000,00 € au titre du préjudice de jouissance ;
– 2.000,00 € au titre du préjudice moral ;
– 2.000,00 € au titre de la perte de chance de jouir plus longtemps du parquet ;
– 1.250,00 € au titre des frais d’expertise amiable.
A titre subsidiaire, au titre de la responsabilité contractuelle,
CONDAMNER la SARL JV SOLUTION à verser à la SCI EUSEBE, une somme de 9.913,51 € au titre de la réparation intégrale de son préjudice lié aux désordres, ventilée de la manière suivante :
– 2.048,50 € pour le replanissage, ponçage fin du parquet, application d’une couche de fond dur et de deux couches de vitrificateur effet invisible sans solvant ;
– 1.455,00 € pour le déménagement des meubles devant être débarrassés, leur retour, ainsi que leur dépôt en garde-meubles ;
– 1.660,00 € au titre des travaux de peinture sur les plinthes ;
– 2.000,00 € au titre du préjudice de jouissance ;
– 2.000,00 € au titre du préjudice moral ;
– 2.000,00 € au titre de la perte de chance de jouir plus longtemps du parquet ;
– 1.250,00 € au titre des frais d’expertise amiable.
En tout état de cause,
DEBOUTER la SARL JV SOLUTIONS de sa demande tendant à ce que l’exécution provisoire soit écartée ;
DEBOUTER la SARL JV SOLUTIONS de sa demande de séquestre ;
CONDAMNER la SARL JV SOLUTION à verser une somme de 2.000,00 € à la SCI EUSEBE, au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise.
Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 février 2024, la S.A.R.L JV SOLUTIONS demande au Tribunal de :
Vu l’article 1792-3 du Code Civil, Vu les articles 1217 et suivants du Code Civil,
À titre principal,
Débouter la SCI EUSEBE de l’ensemble de ses demandes fondées sur la seule communication d’un rapport amiable ;
A titre subsidiaire,
Débouter la SCI EUSEBE de ses demandes fondées sur la garantie biennale ;
A titre infiniment subsidiaire,
Débouter la SCI EUSEBE de ses demandes sur le fondement de la responsabilité contractuelle en l’absence de preuve d’une faute et d’une causalité certaine avec les désordres allégués ;
Débouter en tout état de cause la SCI EUSEBE de sa demande au titre des frais de déménagement, de retour et de dépôt en garde-meubles, au titre des travaux de peinture sur les plinthes, au titre du préjudice de jouissance, au titre du préjudice moral, au titre de la perte de chance de jouir plus longtemps du parquet et au titre des frais d’expertise amiable ;
Si la responsabilité de la société JV SOLUTIONS est retenue, ramener les prétentions de la SCI EUSEBE sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions
En tout état de cause, écarter l’exécution provisoire de droit du jugement à intervenir.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2024.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures ci dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
En application de l’article 1792 du code civil, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.
L’action en responsabilité se prescrit par 10 ans à compter de la réception des travaux et le désordre doit être caché au moment de la réception.
L’article 1792-2 du même code prévoit que la présomption de responsabilité établie par l’article 1792 s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert. Un élément d’équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l’un des ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
L’article 1792-3 dispose que les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.
Si les dommages invoqués ne relèvent pas de ces garanties, le maître de l’ouvrage peut rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun, prévue par l’article 1231-1 du code civil qui dispose que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure » ; étant rappelé que ce recours de nature contractuelle impose de rapporter l’existence d’un manquement, d’un préjudice et d’un lien causal.
En application de l’article 1217 du code civil : « La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter ».
La SARL JV SOLUTION fait valoir que le « rapport expertal » versé aux débats par la SCI EUSEBE n’a pas la valeur d’un rapport d ‘expertise judiciaire et ne saurait fonder exclusivement ses demandes.
La SCI EUSEBE fait valoir qu’elles ont choisi conjointement l’expert, que l’expertise a été réalisée de manière contradictoire et qu’il s’agit d’un rapport d’expertise amiable contradictoire qui se suffit à lui-même.
Il résulte des échanges de mails produits que les parties se sont accordées sur le choix d’un expert sélectionné sur la liste des experts judiciaires, Monsieur [Z] [P], la SARL JV SOLUTION ayant laissé à la SCI EUSEBE le soin de contacter celui-ci. L’expert a indiqué qu’il agissait «dans le cadre d’une mission d’expert privé pour le compte de la SCI EUSEBE ». Il a également précisé dans sa proposition d’expertise du 14 janvier 2023 sous un paragraphe « réserves et modalités » : « le rapport d ‘expertise n’aura pas de valeur judiciaire, cette mission étant réalisée au titre d’expert privé pour le demandeur ».
La SARL JV SOLUTION a assisté aux opérations d’expertise le 02 mars 2022. Elle avait en outre adressé un mail à Monsieur [P] le 25 janvier 2023. Le 06 mars 2023, la SCI EUSEBE a adressé des pièces à l’expert, la SARL JV SOLUTION étant en copie du mail. L’expert a rendu son rapport le 17 mars 2023 en joignant le plan du RDC produit par la SARL JV SOLUTION, la facture et la fiche technique du produit utilisé. Il n’a pas établi de pré-rapport ni laissé de délai aux parties pour formuler des dires et des observations.
L’expertise amiable est une expertise extrajudiciaire diligentée, à la demande conjointe des parties concernées, en vertu d’une clause contractuelle ou d’un accord, soit par un expert désigné d’un choix commun, soit par deux experts choisis respectivement par chaque partie.
En conséquence, cette expertise peut être considérée comme une expertise amiable. Cependant, il résulte des éléments exposés ci-dessus que le contradictoire s’est limité à la présence des deux parties à la réunion d’expertise, qu’il n’apparaît pas que l’expert ait pris en compte les observations écrites de la SARL JV SOLUTION ni laissé après le dépôt d’un pré-rapport la faculté aux parties de formuler des dires. En conséquence, et comme l’expert l’indique lui-même, ce rapport ne peut être considéré comme ayant la valeur d’un rapport d’expertise judiciaire. Il s’agit ainsi d’un simple élément de preuve versé aux débats et soumis à la discussion, sur lequel le juge ne peut se fonder exclusivement.
Le procès-verbal de constat de commissaire de justice du 21 novembre 2022 relève que dans le salon au rez-de-chaussée, en différents endroits, tels qu’à l’entrée des toilettes, dans le passage autour de la table basse, devant les canapés, dans le passage menant à la cuisine ouverte et dans la cuisine, le parquet « pelait » ou s’écaillait, de fins lambeaux de vitrification s’enlevant. Il a ajouté que dans les toilettes, de petits lambeaux étaient également visibles.
Dans son rapport du 17 mars 2023, Monsieur [P] a indiqué que concernant la partie salle à manger, il n’y avait pas de désordres, mais a relevé dans la cuisine 5 zones circulaires irrégulières de diamètre de 20 mm environ où le vernis avait sauté, laissant apparaître directement le bois brut ainsi que le long de la rive de plusieurs lames sur une largeur de 2 à 3 mm. Il a précisé que les zones situées sur les rives étaient plus sollicitées par le passage et que le vernis primaire avait sauté car son accroche sur le bois n’était pas satisfaisante. Il a ajouté que les zones de forme circulaire ou ovale pouvaient être liées à un liquide qui serait déposé sur le parquet. Dans le salon, il a constaté la présence d’une zone au pied du canapé où le vernis avait sauté le long de la rive sur 10 cm environ, et dans les WC, il a constaté la présence de deux zones devant et à l’intérieur où le vernis avait sauté sur la rive des lames, indiquant que le système vernis-primaire avait sauté car son accroche sur le bois n’était pas suffisante. Concernant l’analyse des causes du désordre, il a reprécisé que le système primaire-vernis sautait par plaques sur le parquet contrecollé car l’adhérence du primaire sur le bois du parquet n’était pas suffisante et que les couches primaires-vernis sautaient sur des zones plus particulièrement sollicitées par le passage au niveau des rives des lames qui étaient donc très légèrement saillantes et que les autres zones de forme ovoïdes pouvaient être liées au dépôt d’un liquide. Il a expliqué
que le parquet contrecollé était précédemment huilé et que le ponçage sur ce type de parquet était particulièrement délicat car si l’huile n’était pas totalement supprimée, le parquet allait présenter des résidus gras sur lesquels le primaire n’allait pas adhérer correctement et que lorsque le vernis était sollicité, le système primaire-vernis allait sauter puisqu’il n’était pas suffisamment adhérent sur le parquet. Concernant les zones ovoïdes, il a expliqué qu’elles étaient très certainement liées à des zones sur lesquelles l’huile avait été appliquée en quantité trop importante et avait pénétré en profondeur. Il a conclu que les désordres étaient d’ordres esthétiques mais avaient un caractère évolutif, le système primaire-vernis allant progressivement très probablement sauter sur de nouvelles zones et les zones déjà touchées s’amplifier et qu’il était nécessaire de poncer l’ensemble du parquet contrecollé pour enlever le système primaire-vernis appliqué et enlever tout résidu gras du support avant d’appliquer un nouveau vernis.
Ce rapport corroboré par le procès-verbal de constat du commissaire de justice établit que le parquet est affecté de désordres, le vernis s’écaillant et ayant « sauté » en plusieurs endroits dont la cause était attribuée à un défaut de ponçage n’ayant pas permis de supprimer totalement l’huile préexistante.
Il n’est pas contesté que ces désordres n’étaient pas apparents à la réception qui peut être fixée à la date de la facture du 1er décembre 2021 et sont apparus ensuite.
La SCI EUSEBE sollicite la réparation du préjudice en résultant sur le fondement de la garantie biennale de bon fonctionnement, régime de responsabilité de plein droit. La SARL JV SOLUTION fait valoir que le vernissage du parquet ne constitue pas un élément d’équipement. La garantie de bon fonctionnement s’applique à des éléments dont le “bon fonctionnement” est en cause, c’est à dire à des éléments destinés à fonctionner. Or, un parquet et son vernis ne sont pas des éléments d’équipements destinés à fonctionner. La responsabilité de la SARL JV SOLUTION ne peut donc être engagée sur ce fondement.
A titre subsidiaire, la SCI EUSEBE recherche la responsabilité contractuelle de la SARL JV SOLUTION. Quand bien même l’origine des tâches ne serait pas précisément établie et le vernis aurait « sauté » dans des endroits particulièrement sollicités, la SARL JV SOLUTION, professionnelle tenue à une obligation de résultat, se devait de livrer un ouvrage exempt de vices et en réalisant une vitrification qui a sauté en plusieurs endroits moins d’un an après sa réalisation, elle a commis des manquements qui engagent cette responsabilité contractuelle et sera tenue à réparation du préjudice en résultant.
La SCI EUSEBE sollicite l’octroi d’une somme de 2 048,51 euros en réparation des désordres pour le replanissage, ponçage fin du parquet, l’application d’une couche de fond dur et de deux couches de vitrificateur. La SARL JV SOLUTION ne critique pas cette solution réparatoire et ne produit aucun élément permettant de la remettre en cause alors qu’elle correspond à la nécessité de reprendre l’ensemble du parquet affecté de vices, la réparation se devant d’être intégrale. En conséquence, elle sera condamnée à payer à la SCI EUSEBE la somme de 2 048,51 euros au titre des travaux réparatoires.
La SCI EUSEBE fait en outre valoir qu’elle va devoir déménager les meubles des pièces concernées et louer un garde-meuble pendant un mois pour les stocker et la SARL JV SOLUTION, qu’elle ne justifie pas de la nécessité d’un tel déménagement. Monsieur [P] a indiqué qu’il était nécessaire de déplacer les meubles présents dans les pièces le temps de la nouvelle intervention. Cependant, alors que la maison comporte d’autres pièces qui peuvent recevoir les meubles pendant les travaux, la SCI EUSEBE ne justifie pas de la nécessité d’organiser le déménagement des meubles pour les stocker dans un garde-meuble pendant la durée de ceux-ci, concernant laquelle aucune indication n’est produite. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de la prise en charge de frais de déménagement et de garde-meuble.
Concernant les travaux de peinture sur les plinthes, elle ne justifie pas non plus de la nécessité de ceux-ci et sera de même déboutée de sa demande à ce titre.
S’agissant du préjudice de jouissance, elle fait valoir qu’elle ne pourra jouir du rez-de-chaussée et du rez-de-jardin pendant la durée des travaux. Il ressort néanmoins du plan du rez-de-chaussée que seule une partie de celui-ci est affectée par les désordres et le sera donc par les travaux tandis qu’aucun élément n’est produit quant à la partie de la maison désignée comme « rez-de-jardin ». Eu égard à la nature des travaux qui vont affecter le séjour et la cuisine, pièces à vivre, et à la durée prévisible de ceux-ci, il sera accordé à la SCI EUSEBE une somme de 400 euros liée au préjudice de jouissance que la SARL JV SOLUTION sera condamnée à lui payer.
La SCI EUSEBE ne justifie pas que les désordres lui aient causé une atteinte à ses sentiments d’affection, à son image, à son honneur ou à sa considération et sera déboutée de sa demande au titre d ‘un préjudice moral.
L’affirmation selon laquelle le parquet devra être changé plus tôt n’est étayée par aucun élément outre que ce changement prématuré de parquet ne constitue pas la privation d’un droit ou une privation de l’usage de celui-ci susceptible de constituer un préjudice de jouissance et la demande à ce titre de la SCI EUSEBE sera rejetée.
Dès lors que les frais non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la demande de la SCI EUSEBE relative aux frais d’expertise amiable ne peut donner lieu à une allocation de dommages-intérêts et relève des frais irrépétibles.
La SARL JV SOLUTION, partie perdante, sera condamnée aux dépens, qui ne comprendront pas les frais de l’expertise amiable qui ne relèvent pas des dépens prévus à l’article 695 du code de procédure civile. Au titre de l’équité, elle sera condamnée à payer à la SCI EUSEBE la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire est de droit, et il n’y a pas lieu à l’écarter, celle-ci n’étant pas incompatible avec la nature du litige. Il n’y a pas lieu également à constitution d’une garantie en application de l’article 514-5 du code de procédure civile.
Le Tribunal,
CONDAMNE la SARL JV SOLUTION à payer à la SCI EUSEBE la somme de 2 048,51 euros au titre des travaux réparatoires.
CONDAMNE la SARL JV SOLUTION à payer à la SCI EUSEBE la somme de 400 euros au titre du préjudice de jouissance.
CONDAMNE la SARL JV SOLUTION à payer à la SCI EUSEBE la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
CONDAMNE la SARL JV SOLUTION aux dépens.
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit et DIT n’y avoir lieu à l’écarter et à constitution d’une garantie.
La présente décision est signée par Madame BOULNOIS, Vice-Président, le Président, et par Monsieur ROUCHEYROLLES, Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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