Rémunération du réalisateur de documentaires

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La classification des documentaires par les sociétés de gestion collective (SCAM) est déterminante pour la rémunération du réalisateur. En effet, un documentaire classé par la SCAM dans la catégorie D « reportage » et non dans la catégorie A « documentaire unitaire et grand reportage unitaire », réduit la rémunération des droits d’auteur des réalisateurs de 35%. Comme illustré par cette affaire, les décisions de classification des sociétés de gestion de droits peuvent être contestées devant le juge judiciaire. Le critère déterminant pour distinguer un reportage d’un documentaire est la référence à une ligne éditoriale devant être respectée par les coréalisateurs, la seule indication du sujet de l’oeuvre ne constituant pas une ligne éditoriale.

Classification des documentaires par la SCAM

Plusieurs réalisateurs ont contesté avec succès la classification de leurs oeuvres audiovisuelles par la SCAM, qui avait classé ces dernières dans la catégorie D « reportage » et non dans la catégorie A « documentaire unitaire et grand reportage unitaire ».

Il existe une autonomie de la classification des oeuvres prévue par le barème de rémunération de la SCAM quant à la définition qu’ils donnent des oeuvres que cette société de gestion collective gère. Cette classification ne se réfère pas à la qualification des oeuvres prévue par le code de propriété intellectuelle. Pour autant, il appartient au juge de s’assurer de la bonne application, par les organes d’une société de perception et de répartition des droits, des procédures et dispositions statutaires, en ce compris le barème de classement des oeuvres audiovisuelles, ce qui ne remet pas en cause l’autonomie de ce barème. Il revient à la juridiction judiciaire de vérifier la mise en oeuvre des critères de classification retenus afin de s’assurer du respect des dispositions statutaires applicables, ce qui ne saurait s’analyser en une substitution aux organes de la SCAM, et le caractère autonome de ce barème ne peut empêcher la juridiction judiciaire de veiller à leur bonne application dans les rapports entre la SCAM et ses adhérents.

Enfin, un contrat (les statuts de la SCAM) s’interprète d’après les termes de la commune intention des parties plutôt qu’en s’arrêtant au sens littéral des mots, et il revient au juge d’examiner si les dispositions statutaires ont été interprétées par la SCAM conformément à cette commune intention. Aussi, le contrôle de l’application du barème ne constitue pas une immixtion dans le fonctionnement de la SCAM.   

Reportage ou magazine

Dans les règles de répartition des droits d’auteur de la SCAM, un reportage est défini ainsi « toute oeuvre audiovisuelle intégrée dans un magazine ou insérée à un plateau, qu’elle soit ou non accompagnée d’autres oeuvres, est présumée obéir à une ligne éditoriale et être conçue en vue du magazine ou du plateau dans le cadre duquel elle a été diffusée ; elle relève en conséquence du genre ‘reportages’, sauf à ce que son (ses) auteur(s) apporte(nt) la preuve contraire ». Ces règles ne définissent pas le documentaire unitaire ou grand reportage unitaire, catégorie dans laquelle les réalisateurs ont voulu voir classer leurs oeuvres, ni le magazine.

Au vu de la définition qui précède, toute oeuvre, intégrée dans un magazine ou insérée dans un plateau, est présumée obéir à une ligne éditoriale et être conçue en vue de cette émission, et relever du ‘reportage’, sauf si la preuve contraire est rapportée.

Si la SCAM indique que constitue un ‘magazine’ au sens de son barème une émission consacrée à un thème donné, diffusée de façon périodique et pendant une durée non fixée, qu’il y ait ou non présentateur et plateau, une telle définition ne figure pas dans les règles de répartition des droits d’auteur, l’émission dans laquelle étaient intégrées les œuvres audiovisuelles, ne contenait pas de plateau de télévision.

Concernant l’émission en cause, chaque documentaire d’une durée de 26 minutes est consacré à un thème ; il est suivi d’une courte séquence d’une minute qui donne des informations précises sur le sujet. Ils sont diffusés le premier lundi de chaque mois et rediffusés le samedi suivant sur France 5. Ainsi, la chaîne France 5 visait expressément des documentaires, et non des reportages ; l’UNADEV (Union Nationale des Aveugles et Déficients Visuels), partenaire et soutien de l’émission ‘A vous de voir’, la présentait également comme une série de documentaires. La thématique de l’émission, qui est le traitement de sujets portant sur la vie des personnes aveugles et déficientes visuelles, ne peut suffire à constituer une ligne éditoriale. Les contrats conclus entre la société de production et les réalisateurs indiquaient  notamment « que le producteur a conçu une série de films documentaires intitulée ‘A vous de voir’ ayant pour thème la déficience visuelle, dont le titre appartient au Producteur. … Que le Producteur souhaite confier au Réalisateur en relation avec monsieur X, également co-Réalisateur, l’écriture du synopsis et des commentaires d’un des films documentaires de la série de films documentaires ainsi que la réalisation du film documentaire pour les personnes aveugles et malvoyantes, intitulé provisoirement … ». Ces contrats précisaient aussi le thème de chaque film.

Ces contrats ne définissent ni ne font référence à une ligne éditoriale devant être respectée par les coréalisateurs, la seule indication du sujet de l’oeuvre ne constituant pas une ligne éditoriale. En conséquence, il n’était pas établi qu’il existait une ligne éditoriale à laquelle les oeuvres ont obéi et qu’elles entraient dans la catégorie ‘reportage’, de sorte que les réalisateurs  étaient fondés à contester ce classement par la SCAM.

Délais pour agir

Attention, les réalisateurs n’ont que peu de temps pour agir : au vu de l’article 23 du Règlement général de la SCAM « toute contestation du classement d’une oeuvre déclarée doit être adressée dans les trois mois suivants la date du premier règlement des droits de diffusion opéré par la société…. Passé ce délai, aucune réclamation ne sera recevable ». Télécharger la décision

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